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LES POETES 07

 

 

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Abdelmadjïd Kaouah est journaliste, critique et poète. Leïla Boutaleb est journaliste, elle a travaillé à la chaîne 3 d’Alger et a été la collaboratrice de Jean Sénac à Radio Alger.

Abdelmadjïd Kaouah évoque son arrivée à Toulouse dans l’été 1994 dans une grande, mais qui se révélera féconde, précarité. Il fuyait l’Algérie où ses collègues journalistes et poètes étaient assassinés (193 dans l’année…). Il dit sa passion de la poésie et son indéfectible attachement à la langue française.
D’entrée, Michel Cosem le publie à « Encres Vives » et Kaouah lui voue une reconnaissance et une amitié fidèle. C’est « La Maison livide » pour lequel le peintre et poète Hamid Tibouchi conçoit l’illustration de couverture. Kaouah enchaîne ensuite les publications « Le Nœud de Garonne »(Autres Temps ed), « Le Cri de la mouette quand elle perd ses plumes », « L’Ode à Katarina Angélabei suivie de Skärgärden »(Encres Vives).

Le poète et Leïla Boutaleb, revenant sur leur exil en France, ne peuvent qu’être toujours bouleversés par l’assassinat des poètes qui étaient leurs amis, dontTahar Djaout qui avait retenu Kaouah dans son anthologie sur les poètes algériens. Plus de vingt ans après, c’est à Kaouah d’élaborer son anthologie personnelle pour marquer une étape dans sa longue création poétique.

"Que pèse une vitre qu’on brise" de A. Kaouah : quarante ans de poésie dans un recueil Publié par  Fodhil belloul .

Profonds et lapidaires, hantés par le souvenir des compagnons assassinés ou traversés par les douleurs de l’exil, les poèmes du recueil "Que pèse une vitre qu’on brise" d’Abdelmadjid Kaouah témoignent de plus de quarante ans d’écriture et de la place du poète dans l’histoire de la poésie algérienne francophone. Ce recueil de 86 pages, paru aux éditions algériennes Arak, rassemble une quarantaine de textes, pour la plupart inédits, écrits par Abdelmadjid Kaouah entre 1972 et 2014, offrant aux lecteurs une occasion de découvrir ou de redécouvrir une verve poétique constante, marquée par des drames humains dans l’Algérie contemporaine. Présentés selon un ordre plus ou moins chronologique, ces textes portent également des hommages à d’autres poètes, algériens comme Tahar Djaout, Youcef Sebti et Jean Sénac (tous trois assassinés) ou étrangers comme l'immense Mahmoud Darwish et le poète bosniaque Izet Sarajlic. Témoins de l’ "être fraternel" du poète, comme l’écrit Djamel Amrani - autre grand poète algérien dont un article sur Kaouah est inséré au livre- ces poèmes dédiés, parmi les plus poignants du recueil, replongent aussi les lecteurs dans l’horreur de la violence terroriste des années 1990 . L’évocation de cette époque où "l’on arme la haine/ à coup de versets inversés" est différemment présentée par le poète, selon les textes: de strophes incantatoires et puissantes, énumérant des noms de victimes dans "Maison livide" (1994), elle devient une vision de "femmes en noir" posant des "talismans" pour conjurer le "règne de l’oubli". L’exil européen du poète après ces années de "folie" et d’ "enfer" constitue un autre thème majeur du recueil que le poète explore avec autant de diversité. Dans "Les portes de l’exil s’ouvrent à Blagnac", Kaouah s’interroge avec amertume: "Qu’est-ce qu’un aéroport", sinon un "commerce de l’absence/ une maison close puant de nostalgies", alors que dans d’autres, il convoque la figure mythique d’Ulysse. Cette référence récurrente au héros de l'Iliade, renseigne également sur l’ancrage méditerranéen du poète, comme l’explique le sociologue espagnol Jordi Estivill dans l’avant-propos du recueil. L’évocation de la mer est aussi présente lorsque qu'il s’agit pour Kaouah de parler de ses années de jeunesse dans sa ville natale d’Ain-Taya, une référence à la nature, très présente, surtout dans les plus vieux textes du recueil. Accompagnés de reproductions de tableaux du peintre Djamel Merbah, "Que pèse une vitre qu’on brise" constitue un événement éditorial rare en Algérie où la poésie n'est quasiment plus publiée. Il se veut également, par sa qualité d’édition, un juste hommage à ce poète discret et peu cité dans les travaux sur la poésie algérienne d’expression française. Né dans les années 1950 en Algérie et établi en France depuis les années 1990, Abdelmadjid Kaouah est l’auteur d’une vingtaine de recueils, parus en Algérie et en France. Egalement journaliste et chroniqueur littéraire, il a notamment dirigé "Quand la nuit se brise", une des meilleures anthologies de la poésie algérienne francophone parue à ce jour (Seuil éd. collection Points).

Lecture de textes par A. Kaouah et L. Boutaleb.

Christ maure

C'est un simple sourire

franc comme du froment

de l'ancien temps

sourire étincelant

pareil à un horizon

après l'averse

 

Le petit maure repose

dans une benne à ordure

Il a croisé son destin

dit-on en guise d'oraison

 

pas de Noël

pour Larbi

simplement un cercueil plombé

pour la rive sans jouets

des mottes de terre jetées

à ciel ouvert sur un ange lacéré

 

Larbi a rencontré au détour des Aubiers

l'Ogre des contes ancestraux

Au royaume du petit maure

le père Noël n'existe pas

et ici pour rire

on le traite de salaud

 

Était-ce l'Ogre nécrophage

un faux père Noël

le destin

dans une benne à ordures

en la bonne ville de Bordeaux

un enfant d'ici d'ailleurs

Un petit Rimbaud sans voix

surpris par l'enfer

se décompose

entre gel et Noël

 

Christ fils de Meriem

reconnais-le avec effroi

Le petit maure

s'est trompé de sourire

comme toi avec Judas

mais ceci est une autre histoire

*

 

FLAMME TOULOUSE FEMME

 

Flamme Toulouse

La cathédrale autour

Tournent les livres, les vies

C'est un grand manège

Qui conduit de Notre-Dame d'Afrique

Aux Jacobins.

De leur temps les temples

Servaient d'étables aux bêtes du Bon Dieu

 

Toulouse femme

Tournoyant au son

Des stridences du raï

Qui battait la mesure

Aux hanches langoureuses

De l'Odalisque

Dont je remonte les reins

Sans jamais connaître la satiété

 

Elle a la bouche de braise

Comme quand le disque du soleil

Plonge sa morsure dans la couche de la Garonne

 

Tout est feu

Couronnés d'incandescence

Sur Toulouse

 

Les mortels s'aiment

Sur les pelouses du Cours Dillon

Tandis qu'un tam-tam

Se fracasse le crane contre

Les parvis du Pont-Neuf

 

Femme nouvelle, bonne nouvelle

Brûlante comme l'ardoise rouge

De Toulouse

 

Contre laquelle je m'écorche les mains

D'amour

*

Abdelmajid KAOUAH parle à l'humanité toute entière disait Michel COSEM à l'occasion d'une préface d'un recueil. Cela fait plus de vingt ans que sa poésie, toute de lumière d'espoir sur les deux rives, nous réconcilie avec un réel cruel et incertain. Il porte la langue française au cœur d'un dilemme qu'il résout avec la bonté naturelle qui l'habite. Sa générosité colore ses poèmes et ses protestations légitimes sont autant d'appels à la paix et à la fraternité. Nous pourrons maintenant disposer d'un panorama de son œuvre avec son anthologie : "Que pèse une vitre qu'on brise", titre emprunté à un vers d'un poète dont il a tu le nom et qu'il vous reste à découvrir.     

 

 

LES POETES 06

 

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Le 25 décembre 2014, le 1er et le 8 janvier 2015, a été diffusée à l’antenne une émission sur Michel Houellebecq. J’ai voulu réaliser cette émission pour préparer la suivante, plus tard, sur les dernières créations de Houellebecq. Il me semblait qu’auparavant, il fallait revenir sur les publications antérieures. Ce que j’ai fait. Vous pouvez l’écouter en cliquant sur : les-poètes.fr, puis sur « poete 06 » à la rubrique "Pour écouter les émissions" .

Des poètes contemporains, en particulier français, il est le seul à avoir au plus haut degré le génie de la contemporanéité. Jamais un poète n’a autant vécu dans son temps, ne l’a dépeint avec autant de lucidité. Pour témoigner avec cette géniale acuité sur l’époque, la première des conditions est d’y être bien présent : « un  poète mort n’écrit plus. D’où l’importance de rester vivant».

« La société où vous vivez a pour but de vous détruire. Vous en avez autant à son service. L’arme qu’elle emploiera est l’indifférence. Vous ne pouvez vous permettre d’adopter la même attitude. Passez à l’attaque ! »

Et l’artiste n’a d’autre vocation que ce passage à l’attaque. C’est la révolte de Camus. Mais les artistes se divisent en deux catégories : les révolutionnaires et les décorateurs. « Les révolutionnaires sont ceux qui sont capables d’assumer la brutalité du monde et de lui répondre avec une brutalité accrue… il est possible que les décorateurs soient au fond plus ambitieux que les révolutionnaires ».

Houellebecq constate que « depuis Deschamp, l’artiste ne se contente plus de proposer une vision du monde, il cherche à créer son propre monde ; il est très exactement le rival de Dieu ». Et il cite une phrase qui demeure anonyme : « Dieu existe, j’ai marché dedans ».

Houellebecq est l’anti Deschamp. Il propose sa vision du monde personnelle et exacte et par conséquent, émouvante. Toute son œuvre poétique ne fait rien d’autre.

Le poète avec Houellebecq n’est pas ce « décorateur » qui fabrique un monde pour le substituer à l’autre, mais celui qui est immergé de plein pied dans le quotidien, dans la logique du fonctionnement de notre monde aujourd’hui, avec ses lois tangibles (mondialisation, économie de marché, communautés dominantes). Face aux grandes questions métaphysiques, il ne triche pas. Il est dépassé :

« Je suis peut-être, moi-même, un véhicule de Dieu,

Mais je n’en ai pas vraiment conscience

Et j’écris cette phrase « à titre expérimental ».

Qui suis-je ?

Tout cela ressemble à une devinette ».

 

« Le monde est une souffrance déployée ». La poésie est inséparable de cette souffrance. Houellebecq ne s’intéresse qu’à la vie. Elle régit la métamorphose constante du monde. Cette métamorphose, il la perçoit par toutes les fibres de son corps. Et l’intelligence est là : aiguë, terrible : « compte tenu des caractéristiques de l’époque moderne, l’amour ne peut plus guère se manifester ; mais l’idéal de l’amour n’a pas diminué. Etant, comme tout idéal, fondamentalement situé hors du temps, il ne saurait ni diminuer ni disparaître ».

Quelque fois, en lisant Houellebecq, sa lucidité implacable, il n’est pas interdit d’y lire en creux les vers terribles de Maurice Blanchard : « Si j’écris, c’est pour ne pas me tuer / C’est ma transfiguration à moi ».

Lecture de poèmes de Houellebecq dont des extraits de « Lanzarotte ». Diffusion de la voix de Houellebecq avec « Présence humaine », « Paris Dourdan », « Les pics de pollution », « Playa Blanca », « Crépuscules ».

Bernard Maris avait relu « avec ses lunettes d’économiste » toute l’œuvre de Houellebecq. Quel autre artiste pouvait-il justifier une telle adhésion à la réalité sociale et économique du monde d’aujourd’hui ? Nous en reparlerons. Sans Bernard Maris, assassiné avec d’autres artistes de génie, tant il est vrai que l’horreur ne finit jamais. Et que la bêtise relève toujours la tête. Et si nous pleurons –mais comment ne pas pleurer devant l’irrémédiable ?- c’est de chagrin, mais pas de peur.
C’est Pierre Autin-Grenier qui a écrit : « être libre, c’est ne pas avoir peur ». Et nous sommes inexorablement libres !

Pleurer aussi, mais d’admiration cette fois, pour « Pas pleurer » de Lydie Salvayre.
Il y aura toujours des êtres magnifiques.

Le rire, l’humour sont intolérables à ceux qui veulent dominer le monde. Cette « force de dérision massive » est l’arme la plus efficace contre la propagande et l’éblouissement du faste des puissants. « La propagande, cette rhétorique, cherche à persuader du droit de commander ; le faste, lui, présuppose que ce droit existe et que tout le monde en est persuadé », disait déjà Paul Veyne à propos de l’empire Gréco-romain.

 Bel humour de Lydie Salvayre aux dépens d’un apparatchik de la poésie comme nous en fréquentons tous :

« Je ne peux m’empêcher de penser au poète glossolalique et pilier des colloques lettrés que je suis allée écouter hier soir par pure curiosité, ça m’apprendra, et qui après nous avoir infligé un interminable poème où il répétait sans cesse que l’homme était pourvu d’un devant et d’un derrière (vous m’en direz tant !), avait voulu faire genre en soulignant le risque majeur qu’il avait pris en l’écrivant, misère ».

 

 

LES POETES 05

 

 

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Christian Saint-Paul reçoit Manijeh NOURI, enseignante, chercheur en lettres persanes, spécialiste reconnue de la littérature mystique, conférencière, polyglotte traductrice, on lui doit les traductions et présentations de : « Cœur et Beauté ou le livre des Amoureux » de Fattâhi de Nishapur (Ed. Dervy), « La conférence des Oiseaux » de « Attâr » (Seuil), « Le sens de l’amour chez Rûmi » (Ed. Dervy).

En préambule, elle s’accorde à l’opinion déjà exprimée à l’occasion de l’émission sur le livre de poèmes de Kiarostami (Ed. Eres), selon laquelle la poésie iranienne, tant classique que contemporaine, est toujours très vivace. Comme l’a démontré le numéro spécial de la revue « Europe » consacrée à la littérature iranienne, celle-ci occupe une place importante dans la littérature aujourd’hui. Et la poésie s’y taille la part du lion, ce qui la distingue des littératures occidentales. Ceci s’explique par une longue tradition. Tout était rédigé en poésie. Même Avicène au XIème siècle rédigea son traité de médecine en poème. Et la poésie a étouffé la prose. Aujourd’hui, prose et poésie s’interpellent et prospèrent d’un même élan.

L’influence de la poésie persane a rayonné très tôt dans le monde et s’est inscrit d’emblée dans la littérature universelle de l’humanité. Goethe s’est inspiré de cette poésie persane qui a influencé tout l’Occident dès les troubadours. Ce rapprochement avec la poésie occitane courtoise est revendiqué par les spécialistes de cette période comme l’écrivain, essayiste, poète Alem Surre-Garcia qui a organisé des soirées sur ce thème à la Maison de l’Occitanie à Toulouse.
Manijeh Nouri, qui est allée à Téhéran l’été dernier recevoir un grand prix de traduction, précise qu’il faut distinguer trois périodes dans la poésie persane :

1 – avant l’arrivée de l’islam, avant l’écriture arabe,

2 – la poésie persane avec la métrique arabe jusqu’au XXème siècle,

3  - au XXème siècle, abandon du cloisonnement de la métrique classique, création du vers libre, narration, biographie du poète.
Le poète fait alors passer des messages plus personnels qui apaisent une certaine tension sociale. L’influence de la poésie française a été primordiale dans cette évolution. En France, la connaissance de la poésie persane en est restée à la poésie orientaliste du XIXème siècle. Il est donc indispensable de la faire découvrir.

Lecture en persan par Manijeh Nouri.
Poètes contemporains : 
Nima Youshïj, Sohrab Sepehir, Mohammad Reza Shafïi Kad Kani.
Poètes classiques : Nezami Ganjavi, Rûmi.

Roman : Khosrow et Shiriu

L’émission se termine par la lecture d’un poème de celui qui fut son professeur à la Sorbonne, Ravân Farhâdi.

 

 

LES POETES 04

 

 

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LES POETES 03

 

 

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LES POETES 02

 

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La destinée du jeune poète Seyhmus DAGTEKIN a des ressemblances avec celle de son aîné Irakien Salah Al Hamdani qui, comme lui, s’est exilé en France sans en connaître la langue.
Vous pouvez écouter cette émission en cliquant sur le site « les-poetes.fr » - Pour écouter les émissions, puis sur « lespoetes 02 ».

Seyhmus Dagtekin, poète et romancier est né et élevé à Harun, village kurde au sud-est de la Turquie.
Il a grandi dans une bourgade de montagne au mode de vie quasi autarcique, sans voiture, ni télévision, ni radio. 
Les hommes de son village vivaient, pour beaucoup, de contrebande. Au village, l'écrit n'existe pas, sauf sur les emballages d'aliments ou sur les paquets de cigarettes arrivés en contrebande des pays arabes voisins. Le kurde, unique langue des villageois, est interdit par l'Etat turc. 

Pendant la petite enfance de l'auteur, seuls deux hommes, dont son père, parlent le turc et lisent l'alphabet latin. Dans les années 1970, L'Etat turc construit une école et nomme un instituteur, l'auteur appartiendra à la première génération scolarisée du village.
Puis ce fût l'université à Ankara et les études de journalisme et d'audiovisuel. 
En 1974, l'un des frères de l'auteur part travailler en France comme ouvrier dans l'industrie lorraine. En 1987, Seyhmus Dagtekin le rejoint pour compléter ses études universitaires. Il "naît alors au français". Après Nancy, suivent des études de cinéma à Paris.

" En rêver ne suffit pas, faut le faire " me disait mon père. Je me suis levé et j'ai commencé. J'ai mis une parole dans ma bouche qui puisse me lier au cœur de l'autre, qui puisse ouvrir mon cœur dans la bouche de l'autre. ".

Quatre ans à peine après son arrivée en France, il commence à écrire en français et choisit la poésie et son exigence d'appropriation de la langue. Puis en 2004, Seyhmus Dagtekin publie son premier roman, "À la source, la nuit" chez Robert Laffont, roman à la langue poétique qui nous plonge dans la vie du village de l'enfance de l'auteur et qu'il définit comme le roman d'un monde d'avant le livre.
Aujourd'hui, l'écrivain est ancré dans la vie littéraire française.

"Je tente d'habiter un souffle, une transversalité et de le faire à travers mes langues, sans que cela ne m'éloigne de ceux qui habitent les autres langues et géographies. Tisser des liens dans cette transversalité et les vivre intensément. Un Kafka, un Dostoïevski, un Artaud, un Deleuze, un Rûmi font partie de ma chair. Mais littéralement. Je me dis, tout comme j'appartiens à l'humain, aussi tout ce qui est humain m'appartient."

Il n'est plus retourné en Turquie depuis 1992, où il reste en délicatesse avec les autorités. Seyhmus Dagtekin aime à rappeler qu'il n'a pas de drapeau qu'il soit turque, kurde ou français.

"Je me dis que le monde, que l'être, sont comme un chaudron, et que l'art, l'écriture, en sont la louche. Plus la louche est longue et grande, plus on peut brasser les fonds et les limites du chaudron, plus on parvient à remuer les fonds et les limites de l'être. C'est le pari que je fais, le sens que je cherche à donner à travers la poésie et l'écriture : essayer d'allonger, d'agrandir le plus possible ma louche, mes moyens de remuer l'être, de pousser le plus en avant sa connaissance et de donner à en entendre le chant."

Lecture de très larges extraits de " Élégies pour ma mère ", Le Castor Astral, 2013, 80 pages, 10 €. 

*

Terre

Ô terre, le malheur nous a fait délaisser nos verges, nos blessures

          nous ont empêchés de creuser un quelconque trou

Nous nous sommes tournés vers les calumets, terre

Les œufs passent dans les nids

La noix se fait vent chez les Perses, Ô bouche remise

Elle frappe les nuages dans la mort

Et accueille les vieilles dans l'œil de la source

 

Faudrait écarter le rouge d'une noire

La poser devant notre jeûne

Et élever ton nombril sur un piédestal

 

Terre, tu nous as assoiffés

Tu as enseveli nos blessures dans le cimetière des lézards

Tu as grillé les lézards dans la fournaise de midi

Terre, nos villages enfourchent les chevaux et courent les noix.

S'essoufflent les villages dans les traces des vendeurs ambulants

Tandis que tu emmêles la parole et confonds les funérailles,

          terre

 

Un peu de poussière, de fumée, de cendre

Terre

Chair de malheur. Eloignée des langues

Je mettrai une de tes moitiés dans une noix, la laisserai

          aux vents des Perses

Aux alentours de l'automne, mettrai l'autre moitié

          dans le calumet d'un vendeur ambulant

Et te laisserai partir dans les fumées de la chair

 

Rose tourne, rose contourne

Sur ton cœur, rose se retourne

Calumet dans le bois du rosier

Village est soir, soir est serpent

Notre sang tourne rose sur ta peur

*

 

Nous nous tromperons de village, nous nous lancerons contre les eaux, nous nous disperserons avec les nuages, deviendrons une averse nocturne, reviendrons tomber sur ta poitrine, et réchaufferons la terre avec la luminance de tes nattes

 

Lève-toi, lève-toi et secoue tes nappes dans le noir

Remplis de langues ton tablier

Dépose-les sur ton âne boiteux

Retourne les cieux sur les cieux

Fais de ton sommeil une caverne

De notre peur une altitude

/

Expulse-nous de ton crépuscule dans un cri

 

Nous nous ferons couleur de nuit, retournerons

et avec notre peur et du pain

dormirons devant le moulin des morts

 

Le feu meurt avec les vivants. S'essoufflent les chiens

          sur la pente. Ils se font hôtes des rêves

 

Nos cœurs, ô cœur blanc, vautours au-dessus de la source

*

Faisons un pas dans cette autre langue à nous

Allumons un feu sur cette autre tête à nous

Secouons une grenouille sur la terre des ancêtres

Et posons-la sur ta chair vieillie

Tandis que chacun se gonfle pour tenir le monde en équilibre

          sur le bout de sa langue

Que chacun pousse l'autre

          du bout de sa langue

          dans sa nuit

 

 

 

LES POETES 01

 

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Danièle

FAUGERAS

 

11/12/2014

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Christian Saint-Paul invite les auditeurs à participer à la fête du 8ème anniversaire de La Maison de l'Occitanie, 11, rue Malcousinat à Toulouse, le samedi 13 décembre 2014 de 14 h à 18 h; carte blanche est donnée au poète écrivain chanteur Claude MARTI et ses invités. Diffusion de : "Electrocitan" de Claude MARTI. Une chanson qui inscrit la création en langue d'oc dans la contemporanéité totale.

Pour l'émission, l'invitée de la semaine est la traductrice, éditrice et poète Danièle FAUGERAS.

Née à Paris, elle y a suivi une scolarité et un cursus universitaire qui devait la destiner à l’enseignement. Le hasard des nominations l’amène à s’installer en 1970 dans le midi de la France. Dans le Gard,  Danièle Faugeras se consacre, depuis plus de trois décennies, exclusivement à l'écriture.

Elle a mené de front, pendant la plupart de ce temps, une activité de traductrice spécialisée dans le champ de la clinique psychiatrico-psychanalytique (plus de 30 traductions parues à ce jour, principalement dans la collection la Maison Jaune, qu'elle codirige aux éditions ERES (Toulouse), mais aussi aux éditions des femmes-Antoinette Fouque ou chez Naïve) et une écriture personnelle exclusivement poétique, évoluant vers des formes de plus en plus brèves. La tension liée à ce double investissement, longtemps vécu comme contradictoire, en poésie et traduction d'essais a trouvé depuis 2008, grâce à la complicité de Pascale Janot, à s'harmoniser dans la traduction et l'édition de poésie : la collection PO&PSY qu'elles dirigent ensemble aux éditions ERES abordera en 2015 sa 7ème année d'existence avec 26 titres publiés.

Elle traduit dès lors quasi exclusivement de la poésie - de l'italien (en collaboration avec Pascale Janot) : Patrizia Cavalli (ed. des Femmes, 2007), Paolo Universo (PO&PSY 2008 et PO&PSY in extenso à paraître en 2015), Leonardo Sinisgalli (PO&PSY à paraître en 2016) ; du japonais : Issa (2008) ; de l'espagnol : Antonio Porchia (PO&PSY 2011 et PO&PSY in extenso 2013), Federico García Lorca (PO&PSY 2012 et PO&PSY in extenso à paraître en 2016).

Côté écriture poétique : depuis son premier volume de poèmes, intitulé Ici n’est plus très loin (une petite anthologie personnelle parue en 2001 aux éditions La part de l'œil, Bruxelles), Danièle Faugeras a publié exclusivement des recueils en dialogue avec des artistes plasticiens qu'elle perçoit comme attentifs aux conditions de perception et de restitution du réel selon cette même éthique que, pour sa part, elle poursuit en poésie et qu'elle résume dans la formule : "Dé-placement / pour voir".

C'est ainsi que sont parus en 2006 : Brèche, avec des monotypes de Jean-Marie Cartereau (éditions Encre et lumière, Cannes et Clairan) ; en 2009 : État de lieux, avec des fusains de Philippe Agostini (Propos2éditions, Manosque) ; en 2010 : Lieu dit, avec des encres d’Alexandre Hollan (Propos2éditions, Manosque) ; en 2011 : Murs, avec des dessins de Magali Latil (Propos2éditions, Manosque).

Ce mode d'échange consistant à proposer des poèmes à l'intervention d'un artiste, a changé de sens quand, en 2013, Germain Roesz et Claudine Bohi ont demandé à Danièle Faugeras d'inaugurer avec Alexandre Hollan la nouvelle collection des éditions Lieux dits qu'ils dirigent à Strasbourg, une collection dont le principe est de demander à un poète d'intervenir "sur" les propositions picturales d'un plasticien. C'est ainsi qu'est né, en mai 2014, Quelque chose n'est, un poème "calqué" (aux sens propre et figuré) sur 11 fusains de nus d'Alexandre Hollan, et qui tente de restituer en peu de mots le "miracle de l'apparaître" dans ce rapport fusionnel à la chose vue qui fait dire au peintre : "Je suis ce que je vois" (Alexandre Hollan, Notes sur le dessin et la peinture, réédition PO&PSY a parte à paraître en 2015). Le même volume est complété par cinq "grands poèmes pour voir" écrits entre 1989 et 2003 et qui évoquent de la même façon, les conditions d'apparition du poème.

Les deux autres recueils parus depuis : Ephéméride 03, chez Propos2éditions (Manosque, juillet 2014) et Paroles obliques, sorti en ligne en novembre 2014 par les soins de Recours au poème éditeurs, ont été écrits respectivement en 2003 et entre 1988 et 1994.

Éphéméride 03, comme son nom l'indique, se présente comme un calendrier où les hachurages au crayon de Martine Cazin, qui marquent le mouvement du temps, font écho aux "visions" d'un quotidien familier où extériorité et intériorité se mêlent "naturellement".

Paroles obliques, au contraire, donne à voir l'effort de langage sciemment entrepris pour écarter, par le geste même de l'écriture, ce qui fait obstacle à ces visions ("fatras de choses, de mots et de pensées froides, de sentiments à la dérive et d’illusions collantes, dont la caractéristique est de provoquer ce terrible « défilé étroit », ce « rétrécissement dans la gorge » qui est la définition même du mot angoisse et qui est certainement une des caractéristiques fondamentales de notre « postmodernité »", développe Claudine Bohi dans son commentaire) pour tenter d'accéder à "cette violence du calme, sans rime ni déraison" qui fait que "quelque chose (qui) n'est" va pouvoir naître...

C'est ainsi, disait R.M. Rilke, que le poète répond à l'éternelle question au centre de l'existence humaine  : « Comment est-il possible de vivre quand les éléments de cette vie nous sont insaisissables ? Quand nous sommes toujours insuffisants en amour, hésitants devant la décision et incapables face à la mort, comment est-il possible d’exister ? » - en « faisant des choses avec de l’angoisse », en transformant l’angoisse en choses qui « soient sorties du temps et confiées à l’espace » - en poèmes.

"Danièle Faugeras nous livre dans ses Paroles obliques ", dit encore Claudine Bohi, "un cheminement vers le dépouillement qui constitue l’essentiel de sa poésie, dans cet espace où se mêlent indissociablement l’existence et le langage".

Les prétendus "hasards" de l'édition n'ont, somme toute, pas mal fait les choses en proposant dans un bref laps de temps, ce parcours amont d'une écriture désormais vouée à ces "travaux de l'infimes" chers à Jacques Ancet, qui consistent, à l'aide des mots du peu (et même du très peu) à "prélever un petit bout de réel", comme disait Georges Perros. Un très peu qui friserait le rien ? Pourquoi pas ? "Ce serait ça mon rêve" disait encore Perros. "Ce serait de ne plus pouvoir écrire parce que... ben voilà : vivant ! Vivant quelque chose de sans arrêt complet, entièrement là comme ça. Si le fait d'écrire n'aboutit pas à quelque chose qui rend inutile l'écriture, c'est pour moi... ce n'est pas valable, ce n'est pas intéressant." Apparent paradoxe d'une impérieuse nécessité d'écrire - pour arriver à ne plus écrire - pour vivre - pour lire (et éditer) de la poésie ?

Du dialogue instauré avec Christian Saint-Paul autour de sa posture de poète, Danièle FAUGERAS précise, qu'enfant unique et heureuse, elle a vécu dans une grande intimité avec la solitude. C'était une solitude riche, sans aucun tourment. Elle est née ainsi à la poésie en regardant et en lisant. L'envie lui est venue alors de "rendre compte". Du réel, car l'écriture ne peut se détacher du réel. Ce n'est pas l'imaginaire qui dicte ses poèmes, mais la transcription de ce qu'elle voit. Comme des photographies, des instantanés de vie. "Je suis ce que je vois" comme dit Alexandre HOLLAN. Il faut tout de même oser aller voir derrière le décor. C'est le sens des "paroles obliques".

La forme extrêmement dépouillée de ses poèmes, ces textes brefs, ne sont pas pour autant des aphorismes. L'aphorisme suppose une assertion explicative des choses, une vision. Les poèmes sont des témoignages du réel débusqué par les mots.

Lecture par Danièle FAUGERAS  d'extraits de ses trois derniers livres.

Autres poèmes à titre d'exemple :

à chaque jour suffit son poème

 soir tombant - un feu
veille sur les vagues arrêtées
du champ d’asperges

*paisibles le soir
s’échevèlent les fumées
- sarments et bois morts

*sciant le laurier
sec - effluves intempestifs
de cuisine d’été

*bois rentré - oiseaux
nourris - deux trois mots trouvés
: matin bien rempli

*au dedans chuinte
la braise tandis que dehors
tout s’agite muettement

*les feuilles du bambou
derrière la vitre embuée : un
lavis animé

*lourde si lourde
la tête de la jacinthe
qu’elle bute contre la vitre

*tant qu’elle embaumait
sans faute on la regardait
la jacinthe bleue

*quand la lampe s’allume   
- vert le bruit du vent dans le
bosquet de bambous

*à chaque rafale
les feuilles mortes remontent leur chute
le long des vitres

*sur l'asphalte givré
sinusoïde lente
l'écureuil transi

*douces éphémères
se ruant sur le pare-brise
- un cauchemar blanc

*pluie sur la neige -
à l’abri dessous l’auvent
les mésanges en grappe

*sous l’effet des pluies
le mur s’éboulant a pris
la salamandre

*comme il tremble mon chien
sous ma main tandis que passe
la troupe des marcheurs

*suivant le sentier
un chasseur aboie après
une horde de grelots

*le parapluie rouge
de berger entre les pins
raccompagne l’ami

*à l’écart des foules
ma solitude néanmoins
aspire à se vouer

*au déclin du jour
du monticule de cendres
s’approche le rouge-gorge

*le brasier éteint
fouaillé par la grêle se fend
d’une nouvelle fumée

*fumée montante
du bois vert – fumée rampante
des braises ranimées

*heure où tout se pose…
assis les chiens face au vide
regardant sans voir

*ni suite ni projet
- à chaque réveil s’ébauche
le visage du jour

*sans tâche point d’ennui
pour autant : qu'à accueillir
ce qui se présente

*près du feu de bois
double compagnie : Issa
et mon chat – pure joie

*griffe aiguë dent longue
ce modèle réduit de tigre
me fait les yeux doux

*pleine lune - lumière pâle
et glacée – me voici bonne
pour une nuit blanche

*ah ! douce insomnie
page noire où scintille la voie
lactée des mots…

*

Au début de l'année 2014, Daniel MARTINEZ a publié aux éditions Les Deux Siciles, une exceptionnelle anthologie de poésie brève "Frag ­| ments & caetera" établie et présentée par Jacques COLY, 320 pages, 14,50 €. Danièle FAUGERAS a sa place dans une future reprise de cette anthologie au côté des géants de la poésie mondiale. En attendant, lisons ses trois derniers livres.

 

 

04/12/2014

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Christian Saint-Paul annonce l'Exposition: Paul Pugnaud, Joë Bousquet, deux poètes, un éditeur : Rougerie. Ceci à la Maison des Mémoires 53, rue de Verdun à Carcassonne; le Vendredi 12 décembre 2014, à 18 heures aura lieu le vernissage de l'exposition .
 Le travail accompli par les
éditions Rougerie depuis l'achat d'une presse à bras en 1948 par René Rougerie s'inscrit aujourd'hui dans les hauts faits d'armes de la diffusion de la poésie contemporaine. René ROUGERIE fut un des premiers invités de l'émission "les poètes" et rejoignit notre studio toulousain pour une émission sur son livre qu'il venait alors de publier en 1982 : "la fête des ânes", un pamphlet savoureux sur les débordements de la fête de la poésie instaurée à l'image de la fête de la musique par Jack Lang.

 

Quant au poète méditerranéen Paul Pugnaud  voici ce qu'en disait sur son blog le

vendredi 5 décembre 2014,  Serge Bonnery :

"Présence de Paul Pugnaud

(Banyuls-sur-Mer 1912 - Lézignan-Corbières 1995)

En première lecture, une approche du poète Paul Pugnaud né à Banyls-sur-Mer et décédé dans sa propriété viticole de Belle-Isle à Lézignan-Corbières. En prélude à l’exposition que le Centre Joë Bousquet de Carcassonne consacre au poète, du 12 décembre 2014 au 14 mars 2015, exposition conçue par Sylvie Pugnaud, la fille du poète, et René Piniès, directeur du Centre Joë Bousquet.

« Nous écoutons venir les temps / A marche lente… » 
« Nous craignons le retour (…) / Est-ce la venue de la mort / Le passage du temps… » 

La poésie de Paul Pugnaud est aux prises avec le temps. Tout se passe comme si nous étions les survivants d’un cataclysme - un accident nucléaire par exemple - et que s’offre à nous, désormais, le spectacle d’un monde rendu aux règnes du minéral et du végétal. Un monde d’où l’homme aurait été chassé et où il chercherait à reprendre pied.

« Nous contemplons la fuite du monde / En partie oublié… » Le monde, comme du sable qui file entre nos mains, dont rien ne reste que ces microparticules battues par les vents et les eaux déchaînées de la mer venue frapper la tempe des rochers.

Nous voici lecteurs rendus à l’errance. Face au danger, Pugnaud ne nous protège pas. Nous voici seuls face au monde. Aucune main secourable pour nous accompagner.

Face à nous : un monde où tout se confond dans une sorte de putréfaction prémonitoire de la fin perpétuelle. A chaque instant la fin mais ce n’est jamais la fin. Quelque chose vient qui recommence.

Le roulement des blocs de pierre
Détache les ombres figées
Les disperse en éclats
Tristes images promenées
 
Sur toutes les routes du monde
La pierre sèche qui se brise
Heurte le bloc dur de la mer…

Paul Pugnaud compose la poésie des éléments : eau, terre, air, feu. Ce qui reste lorsque la destruction est accomplie.

Ce n’est plus nous, soudain, qui contemplons le monde mais le monde qui nous regarde. Comme la mer « est un regard posé sur les rocs immobiles ». Effet de retournement. Miroir. La poésie alors est autorisée à agir comme un remède à notre angoisse du vide. Elle nous aide à « reconnaître une force silencieuse » et « ces mots enfin assemblés (…) ont fait naître une présence ».

Cette présence n’est pas nommée. Elle se contente d’être. A nous de la deviner et de la reconnaître.

Nous sommes des errants fantomatiques. Devant nous, la mer et le vent et le ciel se confondent.

« Les jours ont froid sur ces tristes chemins / Où nous allons avec le vent / Qui nous sert de guide et nous pousse… »

Lorsque vous marchez sur les sentiers rocailleux taillés à flanc de falaise, le long de la côte rocheuse, entre Banyuls-sur-Mer et Port-Vendres, ce sont ces sensations là qui vous saisissent. Face à vous, par temps gris, mer et ciel en effet se confondent.

 « Il faudrait vivre pour revoir ces paysages effacés… » Vivre pour entendre cette poésie d’après le monde, qui puise dans le souvenir du monde les images qu’il a laissées au moment où il s’est retiré. Où il a disparu, enfoui sous les sables levés par le tempête.

Cette poésie d’outre-monde nous place face à l’inconnu. « Devant cet espace nouveau les mots ont peur… » « Les mots deviennent inutiles ». La décalcification de tout ce qui nous entoure fait son œuvre et nous n’en sommes pas exemptés. Nous n’échapperons pas à la poussière ni au sable qui seul, gardera mémoire du temps.

Gravée sur les rocs les plus durs
La banalité de ces terres
Ne nous étonne pas
 
La perpétuelle poussière
Couvre nos visages vivants…

Jamais ne fut dite avec autant de persévérance la nudité de l’homme au monde et son retour aux éléments premiers qui le constituent, seule alternative entrevue pour sortir de l’impasse et percevoir - fut-il réduit à ses cendres - le filet de lumière qui perce entre de lourds nuages." Serge BONNERY

La jeune poésie a son prix spécifique, le

Prix International « Matiah Eckhard »

 Il faut rallumer le feu de la Vie par la musique et l’Amour écrivait Matiah Eckhard, dans : "Lointains chants sacrés d’où je suis né"

Matiah était un jeune poète et musicien disparu à l’âge de 19 ans, en janvier

2014. Sa poésie révèle, entre autres, son amour pour la vie et sa musique

témoigne de son envie de partage et d’amitié.

C’est dans cet esprit que l’association Euromedia communications, qui a édité

le livre de Matiah "Lointains chants sacrés d’où je suis né" (2014), organise un

Concours international des jeunes créateurs pour encourager la création

artistique et poétique.

Chaque année le prix sera organisé dans des pays différents. En 2015 il sera

attribué en France aux jeunes poètes entre 12 et 25 ans : les candidats peuvent

s’inscrire du 1er octobre jusqu’au 31 décembre 2014 à l’adresse suivante:

prix.matiah.eckhard@gmail.com et envoyer leurs poèmes par mail avant le 31

mars 2015.

1er prix (un chèque de 300 €)

2e prix (200€)

3e prix (100€)

La cérémonie d’attribution du prix aura lieu fin mai 2015.

Lecture d'extraits de ce livre de Mathiah ECKHARD qui constitue un très beau et pertinent cadeau de fin d'année. (bon de commande sur le site les-poetes.fr). Association Euromedia Communications : tél. 06 79 68 12

 

Vivre c'est déjà être libre

*

Ressentir la vie

comme une création perpétuellement nouvelle.

Le temps est aboli mais les actions

sont d'autant plus vives et colorées.

Ressentir une joie immédiate,

que l'entendement humain

n'a pas eu le temps de salir,

d'analyser, de juger.

Et avec cet émerveillement continu

devant tant d'œuvres nouvelles,

d'appels sensoriels,

d'inventions de la nature,

s'éloigner les souffrances

qui réhabilitent la lourdeur terrestre :

le Temps.

Dépasser les souffrances, car le monde est trop beau

pour qu'on puisse y souffrir.

*

Saint-Paul revient ensuite sur la poésie contemporaine d'Iran, qui avait été évoquée par Niloufar SADIGHI dans l'émission consacrée à KIAROSTAMI.

Lecture de poèmes d'Ahmad CHÂMLOU (1925  2000) l'une des voix majeures de la poésie persane du XXème siècle.

L'heure de la pendaison

 

Dans la serrure de la porte une clé a tourné

 

Sur ses lèvres un sourire a tremblé

Telle la danse de l'eau au plafond

Reflétée par les rayons du soleil

 

Dans la serrure de la porte une clé a tourné

 

Dehors

La douce couleur de l'aube

Flânait désinvolte

Telle une note perdue

Sur les trous de la flûte en roseau

Cherchant sa demeure...

 

Dans la serrure de la porte une clé a tourné

Sur ses lèvres un sourire a tremblé

Telle la danse de l'eau au plafond

Reflétée par les rayons du soleil

 

Dans la serrure de la porte

Une clé a tourné.

*

Lecture de poèmes de Simine BEHBAHÂNI née en 1927 à Téhéran et qui vient de nous quitter.

.....

Cage, le monde entier est une cage

Une envie de fuir me monte à la tête

Revêtir le manteau des départs

Recouvrir ma tête d'un fichu. Partir

Où ?

Vers la rue de nulle part

Dans la corruption et la stagnation et la fumée

Afin de pouvoir enfin

Dans le chagrin de ce qui est et ce qui n'est pas

Exhaler ma plainte contre les injustices

 

Vous m'avez rappelée, je sais

Mais tous les amis sont dans la peine

Les plonger encore plus dans le malheur

Pourquoi faire ? Pour renaître plus fraîche ?

Pour quoi faire ? Pour que vos braves médecins

Trouvent le moyen de me guérir ?

 

Prendre des risques. Reprendre ma valise.

Revivre l'appel du départ

Et si ce cœur redevenait neuf

Et si de ces yeux le voile se levait

Et si je revenais parmi vous en poèmes

Pour semer encore le trouble et le vacarme ?

Mais ne suis-je pas déjà trop enfoncée dans les neiges

Pour pouvoir m'en extraire un jour ?

Le mal est profond, je ne crois pas

En relever la tête un jour

 

Ô compagnon de toujours, toi qui m'es cher

Abandonne-moi au soleil de l'hiver

Peut-être, par l'indulgence d'un oubli

Y trouverais-je le repos du corps et de l'esprit ?

Si la brise du printemps pouvait atteindre

Mes nerfs desséchés

Peut-être que je pourrais féconder mon corps

De la sève verte des bourgeons...

*

"La poésie et la vie sont intimement nouées. Le poème écrit le poète" disait Maurice BLANCHARD qui ajoutait que "pour écrire un poème, il faut recommencer sa vie, toutes ses vies."

Jean-Louis GIOVANNONI (à propos duquel il faut lire la note que lui consacre Arnaud BERTINA dans le petit volume "Singularités du sujet  huit études sur la poésie contemporaine" volume 1, Prétexte éditeur, 145 pages, 11 €) brosse un bien émouvant portrait de Raphaële GEORGE dans le n° 63 de la revue DIERESE poésie et littérature (le n° 15 €, abonnement 40 € à adresser à Daniel Martinez, 8 avenue Hoche, 77330 Ozoir-la-Ferrière). Née à Paris en 1951, elle y meurt à l'hôpital Saint-Louis en avril 1985. Cette professeure d'Arts Plastiques a fondé avec GIOVANNONI "Les Cahiers du double" revue de Littérature et de Sciences Humaines, qu'elle dirigea jusqu'en 1981.

Luttant contre la maladie dès 1984, elle écrit son dernier livre "Psaume de silence". En mars 1985 les Editions Lettres Vives publient : "Les Nuits échangées" suivi de "l'Eloge de la fatigue", préface de Pierre BETTENCOURT. L'année suivante paraît son livre posthume "L'Absence réelle" en collaboration avec JL GIOVANNONI aux éditions Unes.

Lecture de "Raphaële George, maintenant" texte d'hommage d'Isabelle LEVESQUE;

Lecture d'extraits d'inédits publiés par Diérèse, de son "Journal".

[...] l'acte d'écrire sort du champ de la volonté à tel point que j'ai souvent cette impression que ce n'est pas moi qui écris mais quelqu'un d'autre. Au fond, je donne mon âme à cet être intérieur dont j'ignore les vraies intentions. Je me prête à son jeu.

            Parfois, il me paraît être le diable, il me prend ma conscience, et lorsqu'après d'étranges heures passées à noircir des feuilles, il me la rend, tout devient pâle.

*

Feuilles volantes

 

            Je voudrais vivre les yeux des autres, certaine d'être au-dedans, incluse, peut-être même absente... Je saurais les peurs qui rapprochent du vide, ces heures insupportables, ces regards emprisonnés. Je saurai ainsi que je ne suis pas seule.

  J'essaie d'approcher ton regard. Embrasser. Impossible, l'effet d'un ongle grinçant sur un tableau d'école. Je me sens pauvre d'une pauvreté irréparable.

  Ici tout demeure définitivement étranger. Le ciel. L'autre côté de la rue. Des fenêtres incandescentes. Je sens en moi un désir de jumelles impossibles. Le frigidaire est rempli. Personne n'est venu. Sous la porte, une missive de la sécurité sociale.

            *

L'émission s'achève sur la diffusion de "Séjour club"  de et dit par Michel HOUELLEBECQ.

 

 

 

 Abbas KIAROSTAMI et ses traducteurs

Niloufar SADIGHI, Franck MERGER

 

 

27/11/2014

 

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Les éditions érès de Toulouse ont créé une collection po&psy dirigée par Danièle FAUGERAS et Pascale JANOT qui publie des textes courts de poésie, dans une présentation originale et particulièrement soignée. Nous en avons rendu compte à l'occasion d'émissions récentes, en signalant en particulier les petits livres de Michel DUNAND "j'ai jardiné les plus beaux volcans" et d' Alfredo COSTA MONTEIRO "dépli". Dans le même esprit, livre au format de poche, illustré avec sobriété, la collection s'est enrichie d'un nouveau domaine "in extenso" qui entend reprendre des textes d'auteurs précédemment publiés dans la collection PO&PSY en les restituant dans l'ensemble plus vaste qui les a vus naître - recueil thématique intégral ou œuvre poétique complète. C'est ainsi que sont parus : "Les travaux de l'intime" de Jacques ANCET et "Voix réunies" d'Antonio PORCHIA; le troisième ouvrage de cette collection est la publication de l'œuvre poétique complète traduite en français de l'Iranien Abbas KIAROSTAMI.

Surtout connu en France pour sa création cinématographique, il était opportun de faire découvrir le génie de cet artiste qui obéit depuis l'adolescence à une vocation d'expression toujours placé sous le signe de l'impulsion poétique.

Le travail de traduction des poèmes d'une extrême concision de KIAROSTAMI a nécessité la collaboration de quatre intervenants : Tayebeh HASHEMI, Jean-Restom NASSER, Niloufar SADIGHI et Franck MERGER;

Niloufar SADIGHI a bien voulu présenter cette édition complète de l'œuvre poétique d'Abbas KIAROSTAMI,

 " des milliers d'arbres solitaires" avec des collages de Mehdi MOUTASHAR, en version bilingue français / persan. (840 pages, 20 €)

Elle se présente : " Née en Iran en 1969, j’ai fait toute ma scolarité en France. Ancienne élève de l’E.N.S. Fontenay, Agrégée de lettres modernes, diplômée de l’INALCO en langue et civilisation persanes, professeur de lettres à l’Ecole Européenne de Bruxelles depuis 2007.

Ayant consacré plusieurs années à la recherche universitaire sur la littérature du XVIe siècle, j’ai enseigné la littérature de la Renaissance à l’université de Rennes II, le français au collège en banlieue parisienne, avant de décider de partir pour Londres où j’ai été en poste au lycée français. De retour en France, j’ai été chargée de mission pour les relations internationales à l’IUFM de Paris entre 2004 et 2007.

J’ai collaboré à la collection Bibliocollège chez Hachette pour laquelle j’ai publié plusieurs éditions scolaires (Le CidGargantuaPantagruelPoèmes 6°-5°, et Poèmes 4°-3°).

Parlant couramment le persan, l’anglais et l’italien, et ayant vécu dans différents pays d’Europe, les questions interculturelles et le multilinguisme sont au cœur de mon parcours et de mes centres d’intérêt. C’est donc tout naturellement que j’ai accepté de coopérer au projet de traduction de la poésie de Kiarostami pour Po&psy, qui me donne une occasion magnifique de revenir aux sources persanes."

Elle développe ensuite la biographie d'Abbas KIAROSTAMI parfaitement résumée par le site allocine :

"Abbas Kiarostami quitte ses parents à 18 ans après avoir réussi le concours de la Faculté des Beaux-Arts de Téhéran. Il finance ses études en travaillant la nuit comme employé de la circulation routière, puis est engagé au début des années 60 par la société Tabli Film pour qui il réalise près de 150 spots publicitaires. 
En 1969, il fonde le département cinéma de "l'Institut pour le développement intellectuel des enfants et des jeunes adultes", et y réalise plusieurs courts-métrages dont
 Le Pain et la Rue, remarqué dans des Festivals en 1970. Il signe son premier long métrage Le Passager en 1974, et continue durant les années 70 et 80 à créer autour du thème de l'enfance avec Les Elèves du cours préparatoire (1984) et Ou est la maison de mon ami ?(1987).
L'histoire de l'Iran et par extension, celle du cinéma de Kiarostami sont bouleversées en 1979 avec la révolution iranienne. Contrairement à ses confères du 7ème art, le cinéaste choisit de rester dans son pays, assumant alors les contraintes dictées par la nouvelle politique du pays. Cette décision fut l'une des plus importante de sa carrière : son cinéma n'aurait selon lui pas supporté le déracinement. Devenu directeur du Kanun où il tourne ses films, Kiarostami revient aux courts métrages avec Rage de dents et
 Le Chœur. Mais 1987 marque un tournant pour le cinéaste. Avec Ou est la maison de mon ami ?, Kiarostami attire l'attention des cinémas étrangers. Dans ce film il dépeint avec talent les croyances des campagnards iraniens et use du paysage iranien comme soutien poétique à sa narration. C'est le premier opus de ce que les critiques nomment la "Trilogie de Koker", dont fait partie Et la vie continue (1992) et Au travers des oliviers (1994). Bien que ces trois films ne constituent en rien une suite narrative, cette trilogie est ainsi nommée en raison du village de Koker où se situent chaque histoire. 

Les années 90 sont marquées pour le réalisateur par une véritable reconnaissance de son travail dans les festivals internationales. Devenu une figure emblématique de la culture iranien, le cinéma de Kiarostami revête également un intérêt diplomatique en montrant un visage nuancé de l'Iran. Marque de son succès à l'étranger : Close up (1991) relate les motivations d'un imposteur se faisant passer pour le réalisateur Mohsen Makhmalbaf. Ce film qui flirte avec le documentaire sur la société iranienne fût applaudi par Quentin Tarantino, Martin Scorsese, Jean-Luc Godard et Nanni Moretti...
Kiarostami connaîtra la reconnaissance suprême en 1997 en recevant (ex æquo avec 
L'Anguille de Shohei Imamura) la Palme d'Or au festival de Cannes pour son film sur le suicide: Le Goût de la cerise. Le film qui était jusque là interdit en Iran fut autorisé la veille de la remise des prix, avec quelques variantes plus conforme à la politique islamique. Avec Le Vent nous emportera, primé à la Mostra de Venise, Kiarostami aborde le thème de la dignité au travail, entre rural et urbain, entre femmes et hommes. En 2000, c‘est le festival du Film de San Francisco qui remet au cinéaste un prix pour l'ensemble de sa carrière et son style poétique. Quelques années plus tard, il entraîne le spectateur au cœur du processus créatif de ses films avec 10 on ten, avant de participer au collectif de Chacun son cinéma, avec tous les autres palmés à l'occasion de l'anniversaire du festival de Cannes de 2007. C'est là qu'il propose à Juliette Binoche de tenir le premier rôle de sa future Copie conforme (2010). Egalement en 2010 sort en salles Shirin, contant l'histoire de 140 personnes assistant à l'adaptation théâtrale d'un poème iranien du 12ème siècle.
En 2012, Kiarostami dirige une production franco-japonaise avec le film 
Like Someone in Love, qui est par ailleurs présenté à Cannes cette même année. Deux ans plus tard, il préside le Jury de la Cinéfondation et des Courts Métrages du festival de Cannes 2014, montrant une fois de plus à quel point sa carrière est indissociable du célèbre festival."

 

L'entretien se poursuit par les précisions qu'apporte Niloufar SADIGHI sur la personnalité atypique de KIAROSTAMI qui est le prototype de ce que Camus nomme : l’artiste.
L’éditeur de « des milliers d’arbres solitaires » le souligne dans sa brève présentation de l’auteur qui déclare qu’être à la fois cinéaste, photographe, poète, n’est pas un choix, mais une fatalité.

La situation actuelle de KIAROSTAMI dans la diffusion de ses œuvres en Iran est ambigüe  dans la mesure où une part importante de son œuvre cinématographique tournée à l'étranger est toujours censurée.

La littérature a évolué en Iran.
La poésie portée depuis des siècles à son incandescence, fait 
aujourd’hui un peu de place à la prose et il existe malgré tout, une liberté d’écrire. La condition de la femme écrivain en Iran s'est imposée avec la voix par exemple de Simine BEHBAHANI et dont la poésie a évolué au gré des années comme a évolué l'Iran.

Mais KIAROSTAMI, pour exister comme artiste en Iran, a pratiqué l’art du contournement. Retrouvant en cela, peut-être, les ruses savantes du « langage des oiseaux ». Il semble que cet usage de la façon détournée de dire le monde soit devenu, plus qu’une nécessité face au risque de censure, une sorte d’interrogation jamais refermée sur le sens de la vie. Les réponses demeurant en suspens, sont l’aveu d’une prudence politique bien compréhensible, mais aussi d’une vraie prudence philosophique.

 PESSOA disait que les choses n’avaient pas de signification, qu’elles avaient une existence. KIOROSTAMI écrit :  « la seule chose certaine/ c’est que/ moi c’est moi. » Est-ce à dire que, comme PESSOA, pour appréhender le réel, il ne faut avoir aucune philosophie, puisqu’avec la philosophie, il n’y a pas d’arbres, il n’y a que des idées ?

De la même manière, il est légitime de se demander quelle est l’idée de la « réalité » dans « des milliers d’arbres solitaires » mais aussi dans l’ensemble de l’œuvre de KIAROSTAMI. Est-elle différente de la vérité ? (la réalité/ nous laisse exsangues/ la vérité/ loin des yeux).

Les poèmes de « des milliers d’arbres solitaires » sont aussi des « instantanés » construits par la fulgurance des mots, du photographe KIAROSTAMI; son œuvre en ce domaine est importante.

Le poème pour KIAROSTAMI est-il un refuge heureux :" face au joug du temps / le havre du poème/ face à la tyrannie de l’amour/ le havre du poème/ face à la criante injustice / le havre du poème."
Il y a de l’humour dans ses poèmes : « l’enfant a demandé : est-ce que le hérisson aussi / son dos le gratte ? ou « chut ! / papa dort ».

 

Niloufar SADIGHI lit de larges extraits de "des milliers d'arbres solitaires" en persan et en français.

*

pour finir

la discussion

a viré au conflit

le conflit au silence

le silence à

l'amertume

*

ça a commencé par des "bien entendu"

ça s'est terminé par un malentendu

*

parmi des centaines

de pierres petites et grandes

seule remue

une tortue

*

une petite fleur sans nom

a poussé solitaire

dans la faille d'une immense montagne

*

la montre

est arrêtée

au poignet de l'aveugle

*

l'aveugle

demande l'heure

à l'écolier

*

une bouteille cassée

pleine à ras bord

de pluie de printemps

*

le sabot du cheval écrase

une fleur inconnue

parmi des milliers de fleurs

*

Artiste emblématique de l'Iran Abbas KIAROSTAMI qui a su éviter l'exil, car c'est de ce lieu, par ailleurs son pays, qu'il peut créer, dépeint sous toutes les formes dont il est prodigieusement capable, la forme multiple de l'Iran, rural et urbain, ancestral et contemporain. Cette confrontation certainement à son paroxysme en Iran, est le terreau de l'originalité absolue de sa création artistique. Celle-ci est portée sans aucun doute par un amour impérieux de la poésie, la grande poésie persane qui éclaire l'humanité, et la poésie d'aujourd'hui resserrée sur l'observation fascinée d'un quotidien qui n'en finit pas de charrier, sans le vouloir, la grandeur d'une culture en métamorphose.     

 

 

 

 

 

 

 

 

 

20/11/2014

 

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Christian Saint-Paul invite les auditeurs à se rendre au Centre Joë Bousquet et son temps, à Carcassonne qui organise deux événements autour d'Armand GATTI. Le premier, le vendredi 28 novembre 2014 au cinéma Le Colisée à Carcassonne, à 21 h projection du film d'Armand GATTI  : "L'Enclos" qui emporta le prix de la critique de cinéma au Festival de Cannes 1961. Premier film de fiction sur l'univers des camps de concentration, Cocteau avait noté que "l'Enclos témoignait avec une puissance irrésistible". Et GATTI lui-même rescapé du camp de Linderman, prés de Hambourg, éprouvait un besoin irrépressible de témoigner. Il cherche à articuler le désir d'utopie langagière qui l'anime et cette nécessité de raconter l'histoire terrible qu'il vient de vivre : comment traduire le camp est l'un des premiers grands problèmes du langage qui se sont posés à l'auteur GATTI. Il ne cessera d'y revenir. Ce film est disponible pour les toulousains à la médiathèque José Cabanis.

Le second est la rencontre le samedi 29 novembre 2014 à 15 h à la Maison des Mémoires, 53, rue de Verdun à Carcassonne, avec Armand GATTI, Jean-Jacques HOCQUARD, Pauline TANON autour du livre : "Armand Gatti dans le maquis des mots". Ce livre invite à (re)découvrir, de "La Parole errante" à "La Traversée des langages", une œuvre de combat, pour la liberté des mots et par les mots.

Armand GATTI une œuvre fondamentale dans l'histoire contemporaine de la poésie et du théâtre.  

Retour ensuite à un livre de poèmes de Michel COSEM  "Ainsi se parlent le ciel et la terre"  avant-propos de Jean JOUBERT, L'Harmattan éditeur, 95 pages, 11,50 €. Dans sa présentation, Joubert note avec cet optimisme serein qui, au fond imprègne toute l'œuvre poétique de Cosem : "On imagine que le poète voyageur a noté, au jour le jour, sur ses chers carnets, les multiples manifestations d'un "merveilleux quotidien", trop souvent occulté par le tapage médiatique. Oui, la poésie est là, dans ces lieux secrets enfin révélés. N'est-ce pas une des fonctions de la poésie d'aiguiser le regard du lecteur, de susciter l'émotion, de conférer au quotidien un pouvoir d'émerveillement.

Lire, relire "Ainsi se parlent le ciel et la terre" c'est éprouver le désir, dans la lancée du poème, de s'engager soi-même dans l'aventure des découvertes d'un monde proche et pourtant caché.

 Oui, à sa manière, et par bonheur, la poésie est contagieuse".

Lecture d'extraits.

 

Ecrire être au monde

comme un carré de terre

semé d'orchidées mauves

et de plumes d'oiseaux

Être dans la sève

pour revenir chaque saison

dans les lumières dans les mémoires

Ecrire les soleils et les océans

écrire sous l'écorce

l'histoire et l'imaginaire

les voyages dans les hautes dunes d'or

et les crépuscules du cœur

*

J'ai perdu

l'écharpe qu'Isis m'a donnée

au bord du fleuve

Je l'ai perdue dans les broussailles

dans les feux d'herbes

jusqu'au creux des verbes obscurs

Le rapsode a raison :

je n'ai pas pris garde à la nuit

à la luisance verte des eaux profondes

aux rumeurs hostiles et cassantes

je n'ai pas suffisamment ouvert le tiroir des

bienveillances

la source de l'illusion

et c'est pourquoi j'ai froid ce soir d'été

*

Georges CATHALO nous offre ce mois de novembre (à retenir pour les cadeaux de fin d'année) trois livres de poèmes :

1 ) "Quotidiennes pour interroger" (éditions La Porte,  Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin, 02000 Laon, 3,80 €) Le poète continue avec ce petit livret sa série d'interrogations entamées les années antérieures, sur "ce monde improbable" qui ne va pas en s'améliorant. Son inquiétude, qui s'étend à tout et à tous, dont lui-même, est un cri d'angoisse plus que d'alerte.

et si nous n'étions au fond

que d'obscurs bouffons bouffis

de pitoyables pantins pantelants

empêtrés dans nos contradictions

aveuglés par nos prétentions

et toujours dans la posture suffisante

de ceux qui savent ?

*

que gardera-t-on de ce passage

quelques regards quelques visages

avec si près de nous la nuit qui glisse

et toutes ces belles illusions

que l'on bâtit par conviction

ou par tacite consentement

que gardera-t-on plus tard

de cette aiguille affolée

aimantée entre deux pôles ?

*

2 ) "La feuillée des mots" éditions Henry, 32 pages, 8 €.

Cela fait bien des décennies que le poète Georges CATHALO, pour regarder le monde chaque matin avec envie, s'abrite sous "la feuillée des mots".

Et cela marche ! C'est son vieux maître, toujours présent par l'héritage des mots et des idées qu'il nous a légués pour l'éternité, Gaston PUEL qui est l'instigateur involontaire du titre, puisqu'il avait écrit dans "L'âme errante et ses entours", L'Arrière-Pays éd., 2007) :

"Rien ne vint. Rien n'advint. Je devins. Je devins ce scribe empêtré dans la feuillée des mots." Dans ce petit livre, très agréable aussi par la qualité de son impression, son esthétique avec la vignette de couverture d'Isabelle CLEMENT, chaque poème est dédié à un ou deux amis. On retrouve ainsi, sans vouloir être indiscret une partie de l'environnement du poète, les familiers de la poésie d'aujourd'hui. Chacun est dévoilé dans les poèmes de Cathalo, dans la justesse d'appréhension toujours fraternelle, des acteurs cités. Et presque tous, bien sûr sont ces artistes qui façonnent l'histoire de la poésie de notre drôle de siècle. Le ton n'est pas seulement fraternel, qualité innée de l'auteur, mais il est aussi moraliste. Car ce poète, qui ose dire ses colères, est un moraliste qui n'a rien d'ostentatoire, de dogmatique, de refoulé. Sa morale est celle du simple bon sens, de l'amour que l'on se doit à soi-même et donc aux autres. Le poète dans ce livre célèbre l'amitié, l'admiration pour les tâches bien accomplies de ses amis poètes.

SILENCIEUX

A François-Xavier Farine

 

l'homme qui tient parole

manifeste en silence

une parole sacrée

 

bien caché derrière les mots

il se propulse en plein jour

revendique sa part de lumière

 

livre ouvert et livre fermé

il ne se refusera rien

 

il en joue à satiété

se repaît d'allers-retours

et grâce lui est rendue

de prolonger les attentes.

*

RESIGNES

A Cathy Garcia

 

en achetant la paix sociale

ils rajoutent un matelas de plus

à leur confort quotidien

 

leur mission est bien ciblée

 

braquer les uns contre les autres

attiser les braises finissantes

instiller goutte à goutte la perfidie

 

artificiers à court de munitions

ils cherchent les mots qui blessent

les post-scriptum à leurs envois

 

et face aux vagues des indignés

ils ont rassemblé cimenté

l'armée sombre des résignés.

*

3 ) "Près des yeux près du cœur"  illustrations d'Evelyne BOUVIER, les éditions de la Renarde Rouge, la petite collection, 48 pages, 15 €.

Ces poèmes sont dits "pour enfants"; en réalité ce sont des poèmes que peuvent aussi lire les enfants, mais les grands (enfants ou pas) sont tout aussi concernés et prendront autant de plaisir que les petits. Une idée de cadeau utile sous tous rapports en tout cas pour nos chères têtes blondes ou brunes. Les illustrations en rouge et noir font de ce beau livre un livre d'artiste. A surveiller donc si vous le confiez à de jeunes mains peu soigneuses...

Avec ces poèmes, le poète se souvient qu'il fut pédagogue et que la poésie est l'art parfait de la transmission.

Ramasser

 

ce que tu ramasseras

sur le sable de septembre

ne contiendra pas dans ton seau

ce sont des rêves de bateaux

des bouts de bois des coquillages

des promesses et des projets

cela tient très peu de place

au fond de tes yeux fermés

*

Tracer

 

le ciel prépare sa page bleue

les hirondelles y tracent

des lignes qui s'effacent

les peupliers y lancent

des appels de détresse

pour oiseaux en partance

et c'est alors que le vent souffle

et que tout disparaît

pour reparaître un peu plus loin

*

C'est le poète américain Jerome ROTHENBERG, auquel il a déjà été consacré plusieurs émissions, dont une avec son traducteur Jean PORTANTE, qui est l'auteur principal de la semaine. En effet, il importe de faire connaître l'édition réussie du diptyque que constituent "Pologne / 31" et "Khurbn" publiés tous deux aux éditions Caractères.

Jerome Rothenberg, né à New York le 11 décembre 1931, est l’une des voix majeures de la poésie américaine. Ses nombreux livres sont des collages où s’entremêlent tradition et avant-garde, ethno-poésie et dadaïsme, mythes et quête de l’origine.

Khurbn est le pendant de Pologne / 1931, un autre livre de Jerome Rothenberg paru aux éditions Caractères l’année dernière. Il aura ainsi revisité deux faces de la Pologne, terre d’origine du poète né en 1931. Dans Pologne / 31, il s’agit d’un pays imaginé, nourri exclusivement d’anecdotes familiales, de lectures, de kabbale, de Mishna, de fantasmes, alors que Khurbn est le livre du retour physique dans la petite ville polonaise de d’Ostrow-Mazowiezka. Khurbn signifie « destruction totale » en yiddish. Le retour dans la terre de ses ancêtres permet au poète de mesurer l’ampleur de l’anéantissement après la Deuxième Guerre mondiale et la Shoah.

Jerome ROTHENBERG s'explique sur le mot "khurbn": "le mot holocauste l'a toujours mis mal à l'aise : trop chrétien et trop beau, il relevait par trop de la notion de "sacrifice". Je ne le comprenais pas et je ne le comprends toujours pas. Le mot que nous utilisions était le mot yiddish-hébreu "khurbn" et c'est ce mot là qui m'accompagna pendant tout notre séjour en Pologne."

 

Lecture d'extraits de Pologne / 31 paru en 2013 traduction de Jean PORTANTE et Zoë SKOULDING, 188 pages, 18 €.

Lecture d'extraits de  Khurbn, paru en 2014, traduit de l’anglais (États-Unis) par Rachel ERTEL, encres de Albert HIRSCH, 96 pages, 15 €. Éditions Caractères, 2014.

 

à treblinka   des guichets de billets   une grande horloge

les panneaux indicateurs : direction bialystok

mais l'homme crie qui a vu

les monceaux de vêtements   les juifs

rien de bon   c'est votre propre triste viande

qui pend ici   misérable dans des sacs

            comme celle d'animaux

le sang coagulé en gelée

une aisselle   traversée d'un ventricule éclaté

il est resté ici se balançant hurlant

une perche de bois brut fichée dans sa langue

une autre dans le scrotum   il voit

une bouche   un trou   un trou rouge

lambeaux écarlates de chairs d'enfants

leurs yeux minuscules mollusques gelés

si succulents que le blond gardien ukrainien

s'ennuyant sous son parasol ne fait qu'un bond

& les aspire à travers ses dents de fer

& son gosier les déglutit, puis chiant

des globules de graisse et de merde

qui coulent dans la fosse où la victime

la fillette sans langue - lève un regard hagard

& lit la fin de son cœur brisé

*

Comme POLOGNE / 31 , KHURBN est un livre fondamental pour pénétrer l'œuvre poétique essentielle de cet auteur qui marque ainsi l'histoire de la poésie américaine, qui a tant à voir avec l'Europe.

 

 

 

 

 

Michel

 COSEM

 

 

13/11/2014

 

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Christian Saint-Paul signale dans le lot des livres de poésie disponibles à l'achat :

1 )

"Née de la pluie et de la terre" de Rita MESTOKOSHO avec des photographies de Patricia LEFEBVRE et une préface de J.M.G. LE CLEZIO.(éditions  112 pages • 15,2 × 19,8 cm • 17,50 €)

 

 « Mon cœur est fait de branches de sapin

Entremêlées à toutes les saisons du monde

Je dors pour mieux tapisser tes rêves

Et celui du chasseur en quête d’une terre

Où il pourra alimenter son envie d’être libre

De marcher en admirant les courbes

des rivières

De nourrir sa faim et d’assouvir sa soif »

*

Le mot de l’éditeur :

Née de la pluie et de la terre est le livre d’une rencontre entre deux femmes, de civilisations différentes, qui se reconnaissent comme sœurs dans le tissage d’une

parole universelle. L’une est poète, l’autre photographe. Patricia Lefebvre a rencontré Rita Mestokosho lors des séjours qu’elle effectua chez les Innus, peuple autonome du Québec. Ses photographies accompagnent la poésie simple, authentique et chamanique d’une femme qui s’adresse aux forêts, aux lacs, aux rivières, à l’ours, au saumon, au vent ou aux nuages, comme à la grand-mère

qui lui a transmis l’amour de la vie.

Car la poésie de Rita Mestokosho est, ainsi que l’écritJ. M. G. Le Clézio, préfacier de ce livre, « pleine de cette puissance féminine qui imprègne les peuples anciens.

Quelque chose de calme et d’incorruptible qui s’ouvre sur l’avenir. » Comme lui, je suis heureux et fier de faire entendre cette voix native d’un peuple qui lutte pour sa

survie.

 

2  )

"De bronze et de souffle, nos cœurs" de Jeanne BENAMEUR, gravures de Rémi POLACK , éditions Bruno Doucey, Collection : Passage des arts, 80 pages,16 €.

 

Le mot de l’éditeur : En 2011, Jeanne Benameur inaugurait la collection « Embrasures » avec un texte fort intitulé Notre nom est une île. Trois ans plus tard, c’est elle qui signe le premier livre de la collection « Passage des arts ». Un bonheur qu’il me plaît de faire partager. De bronze et de souffle, nos cœurs est le livre d’un dialogue entre deux artistes : l’une, poète ; l’autre, plasticien. Jeanne Benameur découvre d’abord les sculptures de Rémi Polack. Elle est touchée par la présence de ces figures en déséquilibre qui aspirent à l’envol malgré le poids de la matière. Puis le sculpteur réalise des gravures à partir de ces bronzes. Les images servent alors de support à l’imagination créatrice de l’auteure, dont les mots tombent comme une pluie d’été : un pays fertile s’ouvre devant eux, des entités archaïques font leur apparition, des personnages s’animent. Au fil des pages, la vie naît de ce dialogue entre les arts. Et si gravures et poèmes s’entrecroisent, si histoires et images se mêlent, c’est que chacun des deux artistes marche dans la trace de l’autre.

Extrait :

Trouver
invisible
l’empreinte d’une main
où poser la tienne
d’un pas
où mettre le tien
Tu apprends
lentement
la confiance
dans les traces de ceux
qui ont
disparu.

3 )

"Vers les riveraines" d'Alain FREIXE , éditions L'AMOURIER, 112 pages, 13,50 €.

Né le 3 décembre 1946 à Perpignan, en terres catalanes, entre mer et montagnes, l'auteur vit et enseigne à Nice depuis 1971. Il aime à musarder entre philosophie et poésie.
Ayant été président du Centre Joë Bousquet et son temps, il a appris du veilleur immobile de Carcassonne deux choses : d’abord que si un sol et un paysage font un homme, cela ouvre sur la responsabilité de manifester ce qu’ils peuvent accomplir à travers lui. Ensuite, à aimer les revues, ces lieux où s’élaborent, sans bruit autre que celui de la langue, de nouvelles perspectives et où l’on voit poindre de nouvelles voix. 
Ainsi il collabore, entre autres à Arpa, Lieux d’être, Europe, Le Nouveau Recueil, Trames…, anime les comités de rédaction de La Sape, Friches et Parterre Verbal, il participe à la diffusion de la poésie dans le cadre associatif et institutionnel. 
Pour lui, convoyer la poésie est affaire d’amitié si l’amitié est ce nom autre que prend la littérature quand elle se pense comme question.

"Après Avant la nuit (2003), Dans les ramas (2007), Vers les riveraines poursuit la marche entamée avec Comme des pas qui s’éloignent (1999).
Marche tâtonnante, les pas se touchant là où ils s’écartent, enjambées s’efforçant d’être attentives à ce qui vient au devant d’elles se découvrant, mot à mot. Où chemine l’écriture s’ouvrent les sentiers du temps : hier, aujourd’hui et demain s’y croisent, se perdent ici pour réapparaître plus loin. S’ouvrent les questions qui de l’homme sont le sol. Et le ciel.
Vers les riveraines est un livre dont la composition fait alterner textes en prose et textes en vers, donc des rythmes et des phrasés différents. Et tout cela pour que ça tienne : ponts, passerelles, passages.
Vers… l’idée est toujours celle d’un mouvement. Depuis Les Échappées réfractaires qui ouvrent l’ouvrage pour dire la résistance aux très hautes / fortes lumières, celles aveuglantes qui portent / trouent le monde vers ces Jours noirs qui le terminent sans le fermer, spirale de "parfum et musique", couleur noire de l’inattendu et de "l’impossible vivant" (René Char).
Ainsi les "riveraines" sont-elles un des noms possibles pour ce qui en manque. Un des noms pour ces choses qui ne se donnent pas à voir et se voient pourtant. Lueurs à entendre dans le tremblé des rives. Ces riens où trouve à se réancrer le vécu et le temps à se déplier à nouveau." s'explique Alain Freixe .

Extrait


Échappées réfractaires

Le monde, c’est mur sur mur. Ombres de pendules aux aiguilles de sables mouvants et silences barrés de froid, de nuit et de cris.
Ici, on ne passe pas. On est cerné. Pris dans la houle des murs. Seule la mort bat de l’aile entre mousses, lichens et salpêtre. C’est à peine si on le voit se poser. Cirer quelques visages et prendre des amis à ses affiches mal collées.
Par où passer quand le monde fait la roue entre torpeur et hypnose dans la nuit du sens ?

Malgré des yeux paralysés, les mots cherchent la brèche. Traversent parfois. Éboulent autour, un peu. Certains donnent consistance à la traversée tandis que d’autres se perdent au dehors. Restent ces échappées, bordées du noir âpre des plaies, ces meurtrières sur la nuit. Quand la nuit est toute la nuit.

Ni empreintes, ni contours qui seraient lambeaux de chair séchée au feu du regard, les mots que nous aimons sont enjambées risquées, courses poudreuses, écarts et pas.
Ce sont eux que l’on entend marcher dans les livres, rompre quelques ronces, écarter brisées et feuilles mortes, s’éloigner en quelques passées anciennes, se perdre. Et vibrer, longtemps. Après.
Oui, à lire, c’est cela qu’on entend. Cette avancée. De nuit. Tandis que se taisent les cris du monde. Que refluent les voix des amis. Que se brouillent les traces.

Celui qui lit est seul. De trous noirs en trous noirs. Comme aspiré dans le grand champ des pages. Seul, dans le livre. À mener une course aux terres les plus froides de soi. Sous grande lune dont s’est armé un ciel tout occupé à éventrer les banquises qui craquent de tous leurs os glacés.

À refermer le livre, le cœur ira dormir. Au chaud des débâcles d’eaux vives. Front contre nuit, il saura que dans les pierres creuses, ces têtes de mort en charpente pour l’écarté des métamorphoses, que dans ces cargneules, demoiselles aux vanités sombres, poussent des merisiers, portes claires qui s’ouvrent sur l’autre côté où ne meurent plus les heures. Malgré la pluie.
Car il pleut comme il respire sur un dehors déjà noyé d’eau. Et sur les vitres, une buée d’âme aveugle les forêts. Et tous les chemins du monde. Jusqu’aux murs.

Dehors la pluie recoud à grand peine les roses.
Tout est toujours en ordre en la terre compacte. Et nous restons, à perte de vue, à perte de nom, en suspension. À cause des coups. À cause de tout ce qui nous bat le cœur dans le temps disjoint.
Ce n’est pas le rapport au temps qui importe, c’est son port.
Comment portez-vous le temps qui vous porte ?
Comment parlez-vous des morts ?

C'est précisément un ami de longue date d'Alain FREIXE qui est l'invité de la semaine, Michel COSEM, poète, romancier, éditeur de la revue Encres Vives et des éditions éponymes, qui vient parler de son dernier roman, le troisième aux éditions De Borée, "L'Aigle de la frontière", 288 pages, 20 €. 

Michel Cosem n’a jamais cessé d’écrire : des romans pour grands et petits lecteurs,

des contes et des poèmes où brille la plume très personnelle de cet authentique

« raconteur d’histoires ». L’Aigle de la frontière, vient ajouter une belle pierre à une œuvre plusieurs fois primée.

Ce poète qui nous livre depuis des décennies des livres de poésie qui forgent là aussi, une œuvre considérable et également plusieurs fois primée (prix Artaud, prix Malrieu entre autres), ne fait pas de différence entre son écriture de poèmes et celle de romans et récits. Relater une histoire, fût-elle belle, ne suffit pas à en faire un roman. Celui-ci se découvre par la langue, par ce travail qui est le travail d'artiste qui donne sa vie et ses émotions au récit. Et la langue qu'utilise Michel COSEM produit avec naturel cette métamorphose de l'événement décrit en tension possessive. L'addiction à la poursuite du récit est immédiate, et c'est là la preuve que l'artiste a réussi son travail. Dans ce roman, le lecteur retrouve, un univers familier de l'auteur qui a passé, enfant déjà des vacances à Luchon, qui connaît bien le Val d'Aran. La montagne est le personnage dominateur du roman. La Nature a toujours fasciné COSEM qui vit dans le bonheur ténu d'en rendre compte. Les lacs, les bergers sont l'essence même d'une poésie émerveillée mais fragile. La ville aussi est personnage de ce roman. Luchon connaît une vie touristique facile, c'est un lieu de plaisir. Le héros du roman se retrouve dans cette ville, complexe sous ses apparences festives. Car les allemands de l'armée nazie sont très présents à Luchon, ville stratégique du fait de sa proximité avec la frontière espagnole. La frontière, même intangible est également un personnage du roman. L'auteur, lors de l'entretien, s'amuse à décrire cette jubilation qu'il éprouvait, enfant à avoir un pied en Espagne et l'autre en France.

Ce roman est aussi l'approche d'un progrès humain, moral par la voie initiatique toute simple de l'instituteur Gilbert qui donne à Jean-Christophe, héros du roman, la conscience qu'il n'avait pas. La question sur le rôle du chef est posée dans ce roman qui se révèle au delà de son esthétique baigné de Nature bouleversante, porter des valeurs éthiques denses et puissantes. Un grand roman, sans hésitation !

 

 "Une ode à la nature et à la montagne sous la plume d’un auteur chevronné." annonce l'éditeur qui résume ainsi le livre :

"De petit contrebandier, Jean-Christophe devient passeur pour la Résistance Jean-Christophe vivote de contrebande à la frontière pyrénéenne.

Il court les jupons, mais il n’est amoureux que de sa montagne, de sa liberté. L’époque de l’insouciance se termine pourtant quand il tire sur un douanier sur le point de l’attraper et, surtout, lorsque le pays plonge dans la guerre. D’abord les réfugiés espagnols, les délations. Puis l’arrivée des Allemands. Fini les fêtes, les touristes, les chars de fleurs…

Sous l’impulsion de Gilbert, l’instituteur du village, il prend conscience

de la gravité des évènements et du rôle qu’il se doit désormais de tenir…

Lecture d'extraits par Michel COSEM.

"Le soleil brillait sur les grandes plaques de neige qui occupaient encore les hauts sommets. Les arêtes de pierre tranchaient vigoureusement le ciel bleu. L’air était vif et frais. Jean-Christophe marchait le cœur léger. Était-ce le printemps qui le rendait ainsi ? Un souffle tiède montait des basses vallées et l’on y devinait des odeurs multiples de sève, de fleurs, de terre aussi, de torrents et de cascades. Jamais il ne s’était senti aussi bien, aussi heureux, aussi certain de l’avenir, un peu trop peut-être. Le poids de ses petits articles de contrebande : quelques paquets de cigarettes, deux flacons d’alcool, des médaillons d’argent travaillés dans des ateliers de Cordoue, des bracelets, des boucles d’oreilles, du savon odorant, ne se faisait pas même sentir. Pourtant il aurait dû se méfier. Il allait sortir de la forêt de sapins, marcher à découvert entre les gros rochers. Le torrent dont le bruit permanent l’empêchait de savoir ce qui se passait autour pouvait cacher quelque piège. Il avait bien fait attention de contourner l’Hospice de France, cette énorme bâtisse à demi abandonnée où se retrouvaient toutes sortes de gens : bergers en mal de solitude, promeneurs montés depuis Luchon, contrebandiers aussi et évidemment douaniers venus s’informer et s’encanailler par la même occasion. Il n’avait pas envie de côtoyer toute cette faune préférant penser à lui-même, à ce qu’il ferait au retour à Luchon. Il venait de traverser la frontière sans encombre. De plus l’air l’enivrait tout simplement.

– Halte !

Ce cri venait de claquer."

 

Enfin, Michel COSEM donne lecture de quelques poèmes extraits de "Ainsi se parlent le ciel et la terre" paru à L'Harmattan.

 

 

 
 

 

Chantal DANJOU

 

 

06/11/2014

 

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Christian Saint-Paul présente en préambule les deux dernières publications des éditions Encres Vives : 1 ) le 435ème numéro de la revue, consacré à François COUDRAY avec "Suite pour une montagne". Ce professeur de lettres est musicien et poète. Ses deux premiers recueils ("Saisons-Pérégrinations", 2008; "écrit avec de la terre" 2010) ont paru dans les revues Triages, Contre-allées, N4728, Les Citadelles. Ses projets l'amènent régulièrement à faire dialoguer poésie, musique, théâtre et arts plastiques. Il travaille avec la plasticienne Nicole Courtois, le compositeur Matthieu Lemennicier et la comédienne Clémentine Amouroux. Le recueil est dédié au père de l'auteur.

 Lecture d'extraits.

 

elle est revenue ce matin avec une telle violence

 

   haute et sombre paroi derrière les brumes qui se

déchirent, au dessus des marais

                                                                       roche   nuit

ruissellement                      et la forêt sans couleur sur la

falaise

           

                        lauze plis du temps    et l'odeur de la

neige encore

*

comme une main déchirerait ma chair, la broie et

me consume, elle est         la saison prisonnière

l'enfance le temps du père la terre

 

me déchire et ravit

*

                                          2 ) dans la collection Encres Blanches, d'Ali BOUDJEDIR  "Lever du jour vu d'une colline". Ce poète vit en Algérie; il enrichit le patrimoine francophone de la poésie algérienne de langue française. Il a publié à Encres Vives : "Mots mélancoliques aux reflets d'or", "Des bleus à l'âme", "Sous les pas de l'ombre", "L'alphabet de l'espérance", "Poèmes couleur de soleil".

"J'aime donner la parole à des poèmes enfantés par la souffrance, ou par l'enchantement de l'expérience vécue, dans la clarté sereine d'une conscience responsable. Chaque mot se fait blessure ou fleur : alors le poète, consommant les peines et les joies de tous, consomme la plénitude des mots" écrit Ali BOUDJEDIR à propos de ce recueil.

Lecture d'extraits.

Sénac

 

Voici le moment où je m'étale

De toute ma joie

Lorsqu'au clair de l'aube

Mon peuple

Beau comme une mer en colère

Se soulève et va

De vague en vague

Répandre la lumière

Sur les rêves lointains

De la tolérance

 

Tu formes une chaîne de paix

Au milieu de l'horreur

Et tu pardonnes les yeux salés

Au mal ténébreux

L'ombre de l'eau entre les dents

Protège ta vie de sable

Beau comme Sénac

Qui a irrigué cette terre

De son amour

De ses poèmes

Et de son sang

 

Brave la moisson

Et le peuple qui pleure les braves

*

L'émission est ensuite consacrée à l'invitée : Chantal DANJOU.

Poète,  nouvelliste et critique littéraire, par ailleurs membre du conseil de rédaction des Editions Encres Vives, elle vit et travaille aujourd’hui dans le Var après un long séjour parisien. Docteur ès lettres, professeur durant de nombreuses années, elle intervient à présent dans des instituts universitaires de formation d’enseignants (direction de mémoires et conceptions de projets concernant la lecture et l’expérience poétiques). Depuis 1989, elle participe à faire connaître la poésie contemporaine avec l’association qu’elle a cofondée, La Roue Traversière : présentation d’auteurs ; tables  rondes autour d’éditeurs de poésie ; interdisciplinarité artistique ; le poète et son traducteur.

Son œuvre créatrice, toujours en pleine construction, offre à ce jour un palmarès fort riche :

Suite poétique

 

La Cendrifère, chez l'auteur, 1980

Mythe de Migrale, Ed. St Germain des Prés, Paris, 1985

Le Livre de la Soif, Ed. L'Harmattan, Paris, 1993

Lieux / Dits, préface de Dagadès, Ed. Ass. Clapas, Aguessac, coll. Franche Lippée, 1994

Les Consonnes de Sel, Ed. L'Harmattan, Paris, 1995

Muse au beau visage penché, Ed. Encres Vives, Colomiers, 1996

Terres Bleues, Ed. L'Harmattan, Paris, 1998

Éloge d'une absence verte, Ed. Encres Vives, Colomiers, 2002

D'ocre et de théâtre, Ed. Encres Vives, Colomiers, 2003

Malgré le bleu, Ed. du Nouvel Athanor, Paris, 2005

Toko no ma, Ed. L’Improviste, Paris, octobre 2005

Poètes, chenilles, les chênes sont rongés, Ed. Tipaza, Cannes, 2008

Blanc aux murs rouges, Ed. Encres Vives, Colomiers, 2009

Pension des oracles à l’auvent de bambou, Ed. Encres Vives, Colomiers, 2011

La mer intérieure, entre les îles, Ed. Mémoire Vivante, Paris, 2012

L’oreille coupée, Ed. Encres Vives, Colomiers, 2012

Femme qui tend la torche, Ed. Mémoire Vivante, Paris, 2014

L’ancêtre sans visage, Ed, Colodion, à paraître

 

Livre d’artistes

 

La Fendillée, sur des gravures de Liliane Aziosmanoff, 1999

Sans titre, avec Martine Botella (mise en scène) ; et Françoise Rhomer (encres), 2004

Sans titre, avec Youl, 2005

Formes, récits du feu, avec Henri Yéru, Les Cahiers du Museur, coll. A côté, Nice, 2012

Jour Nuit Jour, Livre I, avec Henri Yéru, La Roue Traversière, 2013

 

 

 

Nouvelle, récit, roman, essai

 

Damier de silence et parole, Ed. L'Harmattan, Paris, 2001, essai suivi d’entretiens avec Jean-Claude Villain

Les Amants de glaise, Ed. Rhubarbe, 2009

 

Anthologie, publication collective

 

 

« De la poésie comme exercice spirituel », sur Jean-Claude Renard, Actes du Colloque de Thessalonique, P'U de Pau, 1995

Êtres femmes, poèmes de femmes du Québec et de France, coédition Le Temps des Cerises / Les Ecrits des Forges, 1999

Et si le rouge n’existait pas, anthologie poétique, éd. Le Temps des Cerises, 2010

Pour Haïti, éd. Desnel, 2010

Nous, la multitude, éd. Le Temps des Cerises, 2011

Les poètes en Val d’hiver, Anthologie, éd. Corps Puce, 2011

Anthologie de la poésie érotique féminine contemporaine, textes réunis par Giovanni   Dotoli, éd. Hermann Lettres, 2011

Le partage des mondes, éd. TipaZa, 2012

Jean-Max Tixier, écrivain pluriel, Actes de Colloque, Université de Toulon, Var et Poésie, 2014

Traduction

 

Blaues Land, recueil traduit en allemand par Rüdiger Fischer, Ed. Pop lyrik, Ludwigsburg, 2006

Le Livre de la Soif, Les Consonnes de Sel, extraits traduits en grec par Georges et Maria Fréris (Université Aristote de Thessalonique ; ΕλευόІς Revue)

Malgré le bleu, extraits traduits en espagnol par José Marìa Lopera (Revue Álora, la bien cercada"la

 

Réception des poèmes, des ouvrages et de l’œuvre

 

Les publications de Chantal Danjou ont donné lieu à de nombreux articles critiques en France et à l’étranger. A noter :

Université Aristote de Thessalonique, 1993 ; Le Théâtre Molière – Maison de la Poésie, Paris, 1999,  lecture-rencontre avec l’auteur présentée par Sylvie Verny ; Numéro spécial de la revue poétique Encres Vives, en hommage à l’auteur, 2004 ; Université de Bouzareah, Alger : autour du travail de l’auteur, 2006 ; Université Toulon-La Garde : autour de Toko No Ma, 2010 / 2011 ; Poésie / première n° 49, étude de Monique Labidoire sur l’auteur et extraits, 2011 ; 406 ème Encres Vives consacré à l’auteur.,  Des îles et des montagnes ou Chemins de poésie et de prose, 2012 ; Université d’Avignon : autour de La mer intérieure, entre les îles et de Femme qui tend la torche, 2013.

 

L'entretien, sur la genèse de cette œuvre, le sens de la langue, sa posture particulière, est illustré de lecture de poèmes par Chantal DANJOU.

Michel COSEM a bien eu raison de publier deux numéros d'Encres Vives, le 315ème "Avec Chantal DANJOU" et le 406ème "Arrêt sur image Chantal DANJOU  Des îles et des montagnes ou Chemins de poésie et de prose", pour mieux cerner l'importance de ce long travail d'écriture, devenu très vite un acte militant de la parole à sauver.

En lisant Chantal DANJOU, le mystère qu'elle crée par la précision des mots, la concision qui l'écarte de tout pathos, la réflexion de Pessoa se vérifie : "dans un poème, nous devons comprendre ce que veut le poète, mais nous pouvons sentir ce qui nous plaît ".  Et les poèmes de Chantal DANJOU nous plaisent !

Ses recherches sur la poésie l'ont conduit à interroger l'œuvre mystique de la poésie de Jean-Claude RENARD, et à publier "De la poésie comme un exercice spirituel". Elle s'explique sur cette démarche, déclenchée par l'idée de Max-Pol FOUCHET de consacrer un numéro de sa revue aux poètes de la spiritualité.

Pour Chantal DANJOU, écrire de la poésie, c'est manifestement vouloir dépasser les frontières, c'est s'engager tout entier dans le dépaysement du lieu et de soi.

Et la poésie de Chantal DANJOU est une poésie de haut vol de ce siècle où les femmes poètes tiennent un rang injustement jusqu'alors, jamais égalé.

Lecture de poèmes.

 

tout repose

mais la poudre

piment

cumin

été violent

à tuer la tourterelle turque

- chante l'oiseau de lui-même -

à la surface

ventre gris

collier noir égrené quand elle se renverse

pierre après pierre puis silencieux puis dissous

*

mort ouverte quel grand jardin

le sud arrondi à l'excès

 

mains au henné

mucharabieh miniature

 

l'ombre se construit sous les bancs

dans les trous de métal dans les yeux

 

oiseaux diagonales des fontaines

coupent les palmiers en dessous de leur rêve

 

papyrus lotus dans les bassins

sous l'eau se passe-t-il la même chose que sur terre

*

(extraits de "blanc aux murs rouges" E.V. n° 374)

  

Poète de l'oralité autant que de l'écrit les deux inséparables de la poésie, elle annote des poèmes comme des scènes de théâtre :

 

(Un papillon va d'un bout à l'autre de la scène plusieurs fois de suite)

Souvent la peur. Sur mon bras, sa caresse aux anneaux rouges. Chenille. Pour qu'elle vienne, il y avait de l'immobilité. Lourde, terreuse, profonde. Il y avait une source. Un principe d'eau, de bleu, de présence. Mais. Dans ce qui s'allonge et foule l'herbe. Une condamnation. De la guêpe, du moucheron, de la chenille. Ce qui se pose est rompu. Parfois quelque chose s'approche. Une étreinte future. Un papillon à mourir dans son dernier va et vient

* (extrait de "D'Ocre et de théâtre" E.V. n° 304)

 

L'entretien se conclut sur l'acquiescement d'une pensée de Judith BALSO selon laquelle on ne peut partager le diagnostic d'un affaiblissement contemporain de la poésie, que le travail des poètes se poursuit. Qu'il a lieu. C'est en ce sens que le monde est un monde-pensée.

Enfin, le générique de fin est remplacé par "Galop de Camargue" de Manitas de Plata que Chantal DANJOU a eu la chance de rencontrer dans la région de Montpellier.

 

Chantal DANJOU comme tous les grands artistes élargit notre vision du monde. Nous entrons dans son "monde-pensée" qui est celui de l'espérance venue non du rêve, si contraire à la poésie, mais d'une supérieure lucidité, celle, difficile, de la compréhension de soi-même, qui conduit inéluctablement à la compréhension des autres.

 

 

 

 

 

 

Jean-Luc Pouliquen

30/10/2014

 

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Christian Saint-Paul joint au téléphone Michel BAGLIN qui donne un récital avec le poète chanteur Jacques IBANES : "Partir" à la Cave Poésie René Gouzenne les 3 et 4 novembre 2014. "Partir" avec ces deux artistes, c'est prendre un ticket pour un voyage en terre de poésie, au cours d'un récital concocté par deux amis, et mêlant poèmes et chansons. Un document sonore sur ces mémorables soirées sera en ligne sur notre site à la rubrique "documentation sonore".

Lecture ensuite de quelques poèmes de "Voix Vives de méditerranée  Anthologie Sète 2014" éditions Bruno Doucey, 20 €.

 

Jean JOUBERT (extrait de "L'alphabet des ombres",éd.Bruno Doucey, 2014

Page du livre noir

C'est sur le livre noir d'un ciel d'orage

qu'une main brusque assurément de feu

écrit en lettres sibyllines

la prophétie.

 

La terre assurément est au plus noir.

Sous les lampes saisies d'un lourd sommeil

seul veille encore le guetteur obstiné.

 

Que le guetteur s'attarde,

qu'il persévère,

qu'il s'acharne à saisir

les mots pressants d'une langue de flamme.

 

La page à peine lue,

le livre sur l'énigme se referme.

*

L'émission est ensuite consacrée à l'invité : Jean-Luc POULIQUEN.

D'emblée, Saint-Paul le situe comme un acteur de l'apologie de la littérature en langue d'Oc, en citant sa brillante publication : "Entre Gascogne & Provence, Itinéraire en lettres d'Oc, Entretiens avec les poètes Serge Bec et Bernard Manciet" Edisud, 1994, 160 pages. Dans ces entretiens devenus aujourd'hui historiques, et qui sont une mine de renseignements pour tous les lecteurs épris de la poésie occitane, Jean-Luc POULIQUEN, posait déjà la question récurrente du "lieu" : "Être d'un lieu, avec les mains ouvertes, relève d'une ligne de conduite qui ne s'observe pas sans mal. Dans "Le Triangle des Landes", vous écrivez, Bernard Manciet : "bloquée entre les peuplades de l'Adour et celles de Leyre, de l'Albret et du littoral, cette lande n'a pu survivre qu'en se retranchant".

Voilà qui contraste avec le brassage méditerranéen de Serge."

Oui, l'on n'emprunte pas les mêmes routes selon que l'on fait face à l'océan ou à la mer.

Bernard MANCIET est maintenant dans la collection poésie de poche de Gallimard, Serge BEC qui vit toujours en Provence, a publié ses derniers livres aux éditions Cardère.

Cette générosité qui conduit Jean-Luc POULIQUEN à aller au plus près des poètes qu'il aime, nous la retrouverons tout au long de ses activés créatrices, avec ses aînés comme ceux par exemple de l'Ecole De Rochefort.  Mais écoutons le : "Je suis né en 1954 à Toulon dans le sud de la France. Ma première enfance a été méditerranéenne tout comme mon adolescence que j’ai passée non loin de Marseille. Arrivé à l’âge adulte, après un séjour de quelques mois en Afrique, j’ai souhaité revenir vivre dans le pays de ma jeunesse où s’enracine je le crois mon écriture et ma vision du monde. C’est en terre méditerranéenne que s’est développé l’essentiel de ma poésie et que se sont produits les événements les plus déterminants dans mon itinéraire de poète. Parmi eux, il me faut citer ma rencontre avec Jean Bouhier, le fondateur de l’Ecole de Rochefort. L’Ecole de Rochefort est un mouvement poétique fondé en 1942 où se sont retrouvés des poètes qui ont opposé au Surréalisme leur Surromantisme. Elle a compté dans ses rangs René Guy Cadou, Jean Rousselot ou encore Jean Follain. Il me faut citer encore ma rencontre avec Daniel Biga, de Nice, dont l’expression au début des années soixante a profondément renouvelé une poésie qui ne pouvait plus s’en tenir à l’humanisme de l’après-guerre. J’y ajouterai ma fréquentation assidue de quelques poètes de langue d’oc, cette langue que l’on parlait autrefois dans tout le sud de la France, avant que le français ne soit imposé sur tout le territoire national. L’obstination de quelques poètes contemporains à l’utiliser comme le véhicule de leur création m’a permis de rentrer dans des imaginaires que le français ne pouvait porter, en particulier pour tout ce qui concerne notre attachement à une terre et une civilisation qui en découle. Ce fut pour moi une ouverture à toutes les cultures du monde. Il me faut enfin parler du philosophe Gaston Bachelard, ami des poètes, dont la poétique sur les quatre éléments m’a amené sur les chemins d’Empédocle et une approche du poète où se mêlent poésie, philosophie et thaumaturgie. À chacun des noms cités, j’ai consacré une étude ou un livre. Je citerai simplement le dernier Gaston Bachelard où le rêve des origines qui vient compléter vingt années de création poétique regroupée dans Mémoire sans tain (Poésies 1982-2002). Les deux livres ont été publiés par les éditions L’Harmattan à Paris, en 2007 et 2009."

Commentaire et bibliographie selon Wikipédia :

 

 Ses poèmes, son activité de critique littéraire, l’édition (il a dirigé les Cahiers de Garlaban de 1987 à 1997), les ateliers d’écriture qu’il anime ainsi que les différents événements culturels auxquels il participe (après avoir été membre de 2001 à 2009 du comité du festival des Voix de la Méditerranée de Lodève, il est actuellement membre du comité international de coordination du festival Voix vives, de Méditerranée en Méditerranée de Sète) s’inscrivent pour lui dans une même tentative pour remettre la poésie au cœur de la Cité. Il a gardé en cela les préoccupations sociologiques qu’il avait développées en suivant les enseignements de Michel Crozier et Henri Mendras à l’institut d'études politiques de Paris.

Bibliographie

Poésie

·         Mémoire sans tain, Les Cahiers de Garlaban, 1988.

·         Cœur absolu, Les Cahiers de Garlaban, 1990.

·         Être là, Les Cahiers de Garlaban, 1992.

repris dans :

·         Mémoire sans tain - Poésies 1982-2002, préface de François Dagognet, L'Harmattan, collection Poètes des cinq continents, Paris, 2009

·         Vers et proses géographiques

·         Le champ, Chroniques de Haute Provence, Digne, 1998.

·         Un chemin, Autre Sud, Marseille, 1999.

·         Ce rivage où tu accostas, OC, Mouans-Sartoux, 2003.

·         Un village dans la ville, Chroniques de Haute Provence, Digne, 2003.

·         Les Chants de Vassouras, Revue des Archers, Marseille, 2009.

repris dans :

·         La terre du premier regard3, L'Harmattan, collection Poètes des cinq continents, Paris, 2011

Chroniques, correspondances, récits

·         À la Goutte d'Or, Paris 18e, Éditions AIDDA, Paris, 1997

·         Les Objets nous racontent, Éditions des Vanneaux, 2008

·         En souvenir de l'arbre à palabres (avec Yvonne Ouattara), L’Harmattan, collection Écrire l’Afrique, Paris, 2009

·         Un griot en Provence, L'Harmattan, Paris, 2012

·         Sofia en été, L'Harmattan, collection Témoignages poétiques, Paris, 2012

·          

Dialogues :

·         Le droit des hommes à vivre (avec Jean Bercy), La Pébéo, 1983.

·         Fortune du poète (avec Jean Bouhier, fondateur de l'École de Rochefort), Le Dé bleu, Chaillé-sous-les-Ormeaux, 1988,(ISBN 2-900768-64-0).

·         Sur la page chaque jour (avec Daniel Biga), Images de Ernest Pignon-Ernest, Z’éditions, Nice, 1990, (ISBN 2-87720-064-7).

·         Entre Gascogne et Provence (avec Serge Bec et Bernard Manciet), Édisud, Aix-en-Provence, 1994

·         La diagonale des poètes (avec Marc Delouze et Danièle Fournier), préface de Henri Meschonnic, La Passe du Vent, Lyon,2002.

·         Bachelard : un regard brésilien (avec Marly Bulcão), préface de François Dagognet, L’Harmattan, collection Ouverture philosophique, Paris, 2007

·         Soigner et penser au Brésil (avec Ivan Frias), L’Harmattan, collection Questions contemporaines, Paris, 2009).

·         Le poète et le diplomate (avec Wernfried Koeffler), Prologue d'Adolfo Pérez Esquivel, L'Harmattan, Paris, 2011

·         Paroles de poètes/Poètes sur parole (avec Philippe Tancelin), L'Harmattan, collection Témoignages poétiques, Paris,2013.

Ateliers d'écriture

·         Un voyage en écriture - Jeu de l'imaginaire (avec Cathy Bion), Éditions Plur'Art, Paris, 1996.

·         Un poète dans les écoles de la Goutte d'Or, Les Cahiers Robinson, no 11, Arras, 2002.

·         Les enfants et les images poétiques  : une méthode d’écriture d’inspiration bachelardienne, Figures – Cahiers sur l’image, le symbole et le mythe, no 30, Dijon, 2006.

Études critiques

·         Gaston Bachelard ou le rêve des origines, préface de Marly Bulcão, L’Harmattan, collection Ouverture philosophique, Paris,2007

·         Un petit traité d'émerveillement, préface aux Lettres à Louis Guillaume de Gaston Bachelard, La Part Commune, 2009).

·         Ce lien secret qui les rassemble, Éditions du Petit Véhicule, collection Sur les chemins de Rochefort-sur-Loire, Nantes, 2010, réédité en 2014 chez le même éditeur dans la collection Les Cahiers des Poètes de l’École de Rochefort-sur-Loire

Traduction

(du portugais au français)

·         Fagulhas do Tempo/Étincelles du temps, de Pablo Barros, Éditions des Vanneaux, 2010

·         Zona de Caça/Zone de chasse, de Jaime Rocha, Éditions Al Manar, 2013

Publications à l'étranger

·         Çocuklar Şairdir - Poésie de l’enfance, (entretien avec Azadée Nichapour) et Yanaştiğin bu kiti - Ce rivage où tu accostas, Adam Sanat, no 230, Istanbul, Turquie, 2005.

·         Préface aux Causeries (1952–54) de Gaston Bachelard, édition bilingue Français-Italien, il melangolo, Genova (Italie), 2005

·         As criancas são poetas, método para despertar a poesia, préface de Marly Bulcão, traduction et postface de Bruno Torres Paraiso, Editora Booklink, Rio de Janeiro, Brésil, 2007

·         Bachelard, Berdiaeff et l'imagination, Sapienza - Rivista di Filosofia e di Teologia (Naples), Vol.61°, 2008.

·         Os cantos do vale do café, Nova Águia no 4, Lisboa, (Portugal), 2009.

·         As Pierres Vives de Bertrand d'Astorg, Revista Triplov de Artes, Religiões e Ciências, no 3, (Portugal/Brésil) .

·         Louis Guillaume, Gaston Bachelard, une amitié féconde, sur le site russe Экзистенциальная и гуманистическая психология .

·         Marcel Pagnol : écrivain et cinéaste de la Provence, sur le site de l'Institut d'Études Méditerranéennes de Busan (Corée du sud) .

Films

·         Água das Origens et Passo a passo, mise en images dans deux vidéodanses, de Eau des origines et de Pas à pas, par le réalisateur et chorégraphe brésilien André Meyer.

  • Jean-Luc Pouliquen ou le Voyageur de mémoire, no 2 de la Revue Chiendents - cahier d'arts et de littérature, Nantes, Éditions du Petit Véhicule, octobre 2011.

Les Cahiers des Poètes de l’École de Rochefort  n°5 : Ce lien secret qui les rassemble septembre 2014

Son blog : http://loiseaudefeudugarlaban.blogspot.fr/

 

*

Jean-Luc POULIQUEN lit ses poèmes.

Pour l'émission "les poètes" et son site  il nous autorise à reproduire quelques inédits

 

EAU DES ORIGINES

 

Eau des origines

où ont baigné nos premiers rêves,

je t’invite aujourd’hui

à couler dans le jardin de nos pensées

Irrigue-le , arrose ses fleurs,

afin qu’elles s’ouvrent et parfument

tout notre être

 

Eau de notre naissance

- enveloppe de sérénité -

déchirée par une poussée

inéluctable

 

Eau de notre naissance

depuis longtemps évaporée

reviens à nous

Défais les fils des nuages

fais rouler tes gouttes

sur nos visages,

dépose sur notre peau,

sur notre cœur,

un film protecteur

 

La terre est notre nouvelle matrice,

le temps, son liquide amniotique

 

Si nous voulons

que notre profil définitif

se déboîte

des lèvres de l’infini,

 

il nous faut

abandonner au vent

la violence de nos colères

dénouer notre nombril, notre égoïsme,

nous emplir du murmure collectif,

 

retrouver ce cordon

par où circulent les cristaux des minerais,

la sève des arbres, les sucs de leurs fruits,

 

y puiser la force

de donner à notre âme

ses contours de lumière

 

malgré la nuit et ses démons

malgré l’hiver et ses tempêtes.

*

 

OFFRANDE DE L'EAU

 

L’eau s’offre à toi

dans la légèreté du jour

 

Elle t’abandonne sa sagesse

et sa transparence

 

Elle sait que ton corps

va troubler son repos

 

Mais elle accepte la métamorphose

les remontées des profondeurs

 

Par la nage et le bain

tu ramènes à la surface

ses sourires endormis

que tu disperses ensuite

en mille gouttes dans le ciel.

*

Jean-Luc POULIQUEN un poète fraternel, méditerranéen, un de ceux que le Breton Armand Robin aurait reconnu quand il disait : "A l'heure du danger j'appellerai / Ceux pour qui mes nuits mes jours ont existé / Ils viendront, les poètes du monde entier ..." 

 

 

 

Jean-Michel TARTAYRE

 

23/10/2014

 

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Christian Saint-Paul indique qu'au même moment où se déroule cette émission, à Paris se tient "l' hommage au poète Bruno DUROCHER"  un Conrad des lettres françaises dans le cadre des Journées de la Communauté Franco-Polonaise à la Bibliothèque de Paris.

Bruno Durocher, né Bronislaw Kaminski le 4 mai 1919 à Cracovie (Pologne), a été un météore de l’avant-garde poétique polonaise.
Surnommé à 17 ans “le Rimbaud de la poésie polonaise” pour ses recueils Poèmes barbareset Contre, il n’aura pas le temps de publier son texte La Foire de Don Quichotte, qu’il avait lu à ses amis au Théâtre Cricot. En effet, il est arrêté en septembre 1939 à Gdansk, au bord de la Baltique, où les allemands venaient de débarquer pour envahir la Pologne.

S’en suivent six longues années de camp de concentration comme prisonnier politique, dont l’essentiel à Mathausen…
Libéré le 5 mai 1945, il arrive à Paris, ayant perdu toute sa famille. Il décide de devenir écrivain français.

En 1949, Pierre Seghers publie son premier recueil de poésie, Chemin de couleur. Il est alors salué par Eluard, Cendrars, Reverdy, Supervielle, Char, et beaucoup d’autres de ses pairs. Il décide ainsi de fonder en 1950 avec Jean Tardieu, Jean Follain et André Frénaud, la revue Caractères, qui se doublera très vite de la maison d’édition du même nom. De grands auteurs français et étrangers y seront publiés.

Décédé en 1996, Bruno Durocher, Prix Europe posthume en 1998, figure aujourd’hui dans de nombreuses anthologies et dictionnaires, dont le Dictionnaire des Écritures migrantes, parût à l’automne 2010. Certains de ses livres sont traduits et publiés à l’étranger, et un hommage lui a été rendu en 2006 par la BNF pour les dix ans de sa mort. Des travaux universitaires en France et à l’étranger sont même consacrés à son œuvre.

La publication de tous ses écrits est actuellement en cours sous la forme d’une anthologie de plusieurs tomes.

Ses livres:

Œuvre Complète
Tome I: les livres de l’homme
Tome II: les mille bouches de l’homme à commander aux éditions Caractères.

Une émission pour la parution du tome II de ses œuvres lui sera consacrée. 

 

Saint-Paul invite les auditeurs et en particulier les jeunes poètes à prendre connaissance de la création du :

Prix International « Matiah Eckhard ».

" Il faut rallumer le feu de la Vie par la musique et l’Amour" écrit  

Matiah Eckhard dans son livre: " Lointains chants sacrés d’où je suis né".

Matiah était un jeune poète et musicien disparu à l’âge de 19 ans, en janvier

2014. Sa poésie révèle, entre autres, son amour pour la vie et sa musique

témoigne de son envie de partage et d’amitié.

C’est dans cet esprit que l’association Euromedia communications, qui a édité

le livre de Matiah Lointains chants sacrés d’où je suis né (2014), organise un

Concours international des jeunes créateurs pour encourager la création

artistique et poétique.

Chaque année le prix sera organisé dans des pays différents. En 2015 il sera

attribué en France aux jeunes poètes entre 12 et 25 ans : les candidats peuvent

s’inscrire du 1er octobre jusqu’au 31 décembre 2014 à l’adresse suivante:

prix.matiah.eckhard@gmail.com et envoyer leurs poèmes par mail avant le 31

mars 2015.

1er prix (un chèque de 300 €)

2eprix (200€)

3eprix (100€)

La cérémonie d’attribution du prix aura lieu fin mai 2015.

 

Association Euromedia Communications : tél. 06 79 68 12 06

 

Saint-Paul revient ensuite sur la parution aux éditions Bruno Doucey de "Voix Vives de méditerranée en méditerranée  Anthologie Sète 2014", 250 pages, 20 €.

Plus de quarante pays étaient représentés au Festival de Sète et la poésie a résonné dans la ville en près de vingt langues. L'anthologie prestigieusement conçue par Bruno Doucey réunit la totalité des poètes du Festival, chacun y étant publié dans sa langue et traduit en français. Un gros travail et un livre d'exception qui resserre les liens sacrés autour de la Méditerranée.

Lecture de la française Jeanine GDALIA

Sable

 

Il glisse entre tes

doigts

s'écoule

 

tu lui confies des

secrets

traces éphémères

 

Amour Bonheur Vie

 

Enfoui

tu rêves...

une

tombe au

soleil.

*

de Jean-Luc POULIQUEN

Les chapitres du temps

 

Pays

reçu en héritage

 

Ton histoire

et ta langue

ont traversé

les ventres rebondis

de nos mères

 

Ton mystère

continue de féconder

nos mémoires

 

C'est dans

les chapitres du temps

que tu te livres

et te révèles

*

du poète espagnol Manuel VILAS

Daddy

 

Ne bois plus, papa, s'il te plaît.

Ton foie est mort et tes yeux sont encore bleus.

Je suis venu te chercher. Maman ne sait pas.

Au café, ils ne te font plus crédit.

Ils voulaient appeler la police,

mais ils m'ont d'abord prévenu,

par compassion.

 

Papa, s'il te plaît, réagis, papa.

Ca fait des mois que tu ne vas plus travailler.

Les gens ne t'aiment pas, plus personne ne t'aime.

Meurs loin de nous, papa.

S'il te plaît, meurs très loin de nous.

Tu nous dois bien ça.

Tu étais toujours de mauvaise humeur.

On t'avait presque oublié, mais ils nous appellent du café.

Va-t-en très loin, tu nous dois bien ça.

C'est la seule faveur que je te demande.

*

L'émission précédente a été consacrée à Werner LAMBERSY; Saint-Paul invite les auditeurs à lire également "Les cendres de Claes battent sur mon cœur" recueil qui constitue le n° 409 de la revue Encres Vives (6,10 € le volume, abonnement 34 € à adresser à Michel COSEM, 2, allée des Allobroges, 31770 Colomiers).

 

Les cendres de Claes

Battent sur mon cœur

 

Et ce cœur ne bat plus

 

Que pour un poème

Encore

Qui répète : la poésie

N'existe pas

 

Mais quand même

Un peu plus

Que le reste peut-être

 

Je ne sens presque

Plus

Rien du piaffement

Sauvage

 

Du sang

Dans la stalle close

Des côtes

 

Ni du branle

Ou du galop de mon

Souffle

 

Quand l'enfourchent

Et le montent à cru

 

Les cavaliers

Huns de la horde des

Steppes

........................

 

Saint-Paul s'entretient avec son invité : Jean-Michel TARTAYRE.

 

Voici sa présentation par Wikipédia :

" Après des études littéraires et avoir exercé la profession de libraire, Jean-Michel Tartayre devient professeur de lettres modernes en lycées et collèges. Il est l'auteur d'une vingtaine de recueils de poèmes publiés aux Dossiers d'Aquitaine, au GRIL, à Encres vives. Il collabore à de nombreuses revues littéraires, notamment : L'Arbre à paroles, La Nouvelle Tour de Feu, Séquences, La Revue des Dossiers d'Aquitaine, Inédit Nouveau (éd. du GRIL), Isis, Encres vives, Lélixire (éd. Robin), Multiples et L'Ours polar. En 2011, il participe à la 10e édition du Festival du Livre d'artiste "Sous couverture" de Saint-Antonin-Noble-Val (Tarn-et-Garonne), en faisant une lecture de ses poèmes.

 Il écrit aussi bien sur des sujets scientifiques ou historiques que sur la poésie, mais il manifeste également sa créativité dans des recueils de poèmes ou de proses qui ne sont jamais vraiment des contes ni des nouvelles.

Ce qui l'intéresse en poésie, c'est l'espace de liberté, l'ouverture dirait Umberto Eco, la suggestion dirait Stéphane Mallarmé, deux concepts qui par ailleurs définissent la modernité poétique :

 « Aujourd'hui, le poème adopte tellement de formes signifiantes que le genre dont il relève est difficilement classable. Ce qui m'attire donc, c'est cette tendance à la confusion des genres et l'importance accordée à l'image, au paysage intérieur et/ou extérieur ».

 Jean-Michel Tartayre est très attaché aux lieux dans ses poèmes :

 « La notion de lieu(x) en poésie m'apparaît fondamentale. Le poète se situe toujours par rapport à un espace ou à un lieu (aussi vague soit-il) lorsqu'il entreprend d'écrire, qu'il s'agisse de l'espace de la page blanche, des espaces textuel, imaginaire, environnemental, ou du topos. Et l'art du poète consiste à donner à voir de façon originale, singulière, sa perception d'un certain état des lieux, soit qu'il se plaise à traiter des lieux communs, soit qu'il s'attache aux lieux moins ordinaires, mais toujours, dans les deux cas, avec une volonté de dépayser, de métamorphoser la banalité en fait notable, d'accoster le quai d'un nouvel univers, inconnu, étrange »

Son recueil Van Gogh tonnante clarté est une véritable recréation en poésie des thèmes et paysages à la fois si quotidiens et si éternels du peintre. « Il superpose son propre langage à celui de l'artiste-peintre et parvient ainsi à une saisissante approche de l'œuvre, examinée avec une précision d'entomologiste... et de poète inspiré. »

 Michel Cosem a souligné chez cet auteur « une écriture à la fois nostalgique et révoltée ». Pour Jeannine-Julienne Braquier, il est « un compositeur d'images, de musiques et un agitateur de sentiments exprimés tout en nuances » Jean-Michel Tartayre définit sa poésie comme « une poésie réaliste et populaire, où l'étrangeté n'est au demeurant pas exclue. » " Voici la liste de ses nombreuses publications, majoritairement publiées aux éditions Encres Vives et que vous pouvez vous procurer , chaque volume, 6,10 €, 2 allée des Allobroges, 31770 Colomiers.

 

 Recueils de poésie

 

Transparences (Les Dossiers d'Aquitaine, 2000)

Moderne Aventure (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 185, 2005)

Toulouse Blues (Encres vives, coll. "Lieu" n° 165, 2005)

La Fugue mauricienne (Encres vives, coll. "Lieu" n° 168, 2005)

Urbain nocturne (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 221, 2005)

Polymnie de notre temps (Éditions du GRIL, coll. "Princeps" n° 35, 2005)

Espaces mouvants (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 265, 2006)

Rue du Hamel (Encres vives, coll. "Lieu" n° 187, 2007)

Van Gogh tonnante clarté (Éditions du GRIL, coll. "Princeps" n° 44, 2007)

Les Grands Soirs (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 294, 2007)

Les Grands Soirs (II) (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 321, 2008)

Les Chutes (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 332, 2008)

Série « La Femme au caducée »

1- Nerf ou pinceau (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 349, 2008)

2- Entrelacs (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 383, 2009)

3- Des Affaires (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 392, 2009)

4- Du Combat (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 410, 2010)

5- Des Soins (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 440, 2010)

Pi la lettre et le nombre (Éditions du GRIL, Coll. "Princeps" n° 90, 2011)

Série « Trottoirs »

Trottoirs Variations 1 (Encre vives, coll. "Encres blanches" n° 471, 2011)

Trottoirs Variations 2 (Encre vives, coll. "Encres blanches" n° 486, 2011)

Trottoirs Variations 3 (Encre vives, coll. "Encres blanches" n° 495, 2012)

Trottoirs Variations 4 (Encre vives, coll. "Encres blanches" n° 498, 2012)

Trottoirs Variations 5 (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 517, 2012)

Pandore (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 525, 2012)

Blue walker (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 539, 2013)

Leghorns (Encres vives, coll. "Encres blanches" n° 556, 2013)

Marines (Encres vives, coll. "Encres vives" n° 425, 2013)

Rythmes de Chinatown (Encres vives, coll. "Lieu" n° 291, 2014)

 Publications en revues

L’Arbre à paroles, Inédit Nouveau, Isis, Multiples, Lélixire, Encres Vives, La Nouvelle Tour de Feu, Séquences…

« Scènes de la nuit blanche » / ill. Jean-Claude Claeys. L'Ours polar, 06/2008, n° 45-46, p. 65-69.

« Marche du serpent philosophe ». Inédit Nouveau, 01/2009, n° 228.

« La Femme au caducée », Multiples, 10/2010, n° 77, p. 71-80. Coll. "Découverte" n° 16.

« D'après complaintes », Lélixire : la revue littéraire des Editions Robin, automne 2013, n° 6, p. 26.

Présentation des publications

Transparences. Bordeaux (7 impasse Bardos, 33800) : les Dossiers d'Aquitaine, impr. juin 2000, 47 p. Coll. "Poésie".

Transparences, premier recueil publié de l'auteur, se fonde sur le principe d'une écriture du quotidien, orientée vers l'interprétation de l'instant présent et des structures d'ordre culturel qu'un tel contexte sollicite. Ainsi, de nombreux textes ici peuvent se concevoir comme des réécritures d'œuvres célèbres qui nourissent l'inspiration et complètent justement le regard porté sur le monde. De fait, Jean-Michel Tartayre, adoptant de façon régulière la forme éclatée, donne à voir du poème un creuset médiatique où filtre une pluralité d'informations à travers le prisme de la sensibilité et de l'entendement, ce dans le cadre d'une pratique, ou d'une mise en œuvre, voulue objective, sinon "transparente".

Espaces mouvants. Colomiers : Encres vives, décembre 2006, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 265. Prix : 6,10 €

Espaces mouvants... Pourquoi espaces ? Bien parce que la notion de lieu(x) en poésie m'apparaît fondamentale. Le poète se situe toujours par rapport à un espace ou à un lieu (aussi vague soit-il) lorsqu'il entreprend d'écrire, qu'il s'agisse de l'espace de la page blanche, des espaces textuel, imaginaire, environnemental, ou du topos (en rhétorique). Et l'art du poète consiste à donner à voir de façon originale, singulière, sa perception d'un certain état des lieux, soit qu'il se plaise à traiter des lieux communs, soit qu'il s'attache aux lieux moins ordinaires, mais toujours, dans les deux cas, avec une volonté de dépayser, de métamorphoser la banalité en fait notable, d'accoster le quai d'un nouvel univers, inconnu, étrange. Pourquoi mouvants ? Peut-être parce que ces espaces changent sans cesse d'aspect, de forme, d'un poème à l'autre, d'une unité de sens à l'autre, et qu'ils se renouvellent au gré de l'inventivité.

Rue du Hamel. Colomiers : Encres vives, mars 2007, 16 p. Coll. "Lieu" n° 187. Prix : 6,10 €

La rue du Hamel se situe dans le quartier Saint-Michel, l'un des lieux les plus populaires de Bordeaux dont le profil démographique est surtout marqué par la présence des étudiants. Je passai près de deux ans dans un vieil immeuble de cette rue, plus exactement dans un studio au premier étage, ce dans le cadre de la formation aux métiers du livre suivie à l'IUT Montaigne. Antonio Defonseca, mon double en quelque sorte, y fait l'expérience des jours que je vécus entre le hasard des rencontres et les moments de solitude habités, ici peut-être plus qu'ailleurs, par la chanson grise. De cela ne pouvait s'extraire qu'une poésie réaliste et populaire, où l'étrangeté n'est au demeurant pas exclue.

Moderne aventure. Colomiers : Encres vives, février 2005, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 185. Illustration de couv. : Patrick Guallino. Prix : 6,10 €

Au regard de Moderne aventure, l'écriture fut très influencée par mon goût pour le dépaysement. Je me suis inspiré de mes souvenirs d'ici et d'ailleurs que composent essentiellement mon expérience des voyages le long des routes de France et de Navarre, et l'attrait de prédilection que j'éprouve pour la musique (le jazz en particulier) et la littérature. De fait, j'ai cherché à composer cet ensemble comme on écrit une partition, alliant aux images de la fable les rythmes d'un "lyrisme de l'âme" tel que le dit Charles Baudelaire dans sa Dédicace à Arsène Houssaye, préface du Spleen de Paris, et ce sous la forme de poèmes en prose. Mais la primauté de mes impressions revient au plaisir que j'eus à écrire chacun de mes textes, plaisir rare s'il en est.

Toulouse Blues. Colomiers : Encres vives, mars 2005, 16 p. Coll. "Lieu" n° 165. Prix : 6,10 €

Toulouse Blues c'est le chant prismatique conçu en l'honneur de la ville où je suis né. Toulouse apparaît moins ici objet de mimésis institutionnelle que sujet d'hymnes qui la racontent entre spleen et boogie-woogie. Et je constate aussi qu'Elle me conte et me peint du rose au noir selon le climat des jours maquillant ma présence dans la métropole, du berceau jusqu'à l'âge d'homme.

La Fugue mauricienne. Colomiers : Encres vives, septembre 2005, 16 p. Coll. "Lieu" n° 168. Prix : 6,10 €

J'avais vingt ans en juillet 1987 lorsque je partis pour l'île Maurice après avoir vendu ma voiture. L'argent de cette vente me permit de réaliser un rêve d'enfance : celui d'aller voir ailleurs, sous les tropiques, le monde tourner, celui de franchir la barrière de papier en couleurs représentant un coin de paradis, placardée sur le mur de ma chambre. Et c'est l'aventure que j'ai découverte, multiple et profuse, comme la lumière et les gens de là-bas.

Urbain nocturne. Colomiers : Encres vives, octobre 2005, 16 p. Coll. "Encres Blanches" n° 221. Illustration de couv. : Sylvaine Arabo. Prix : 6,10 €

Urbain nocturne s'inscrit dans un concept qui m'est cher, celui de la poésie-polar. Ici, la lyre moderne (ou postmoderne, c'est selon) de Polymnie, muse qu'on imagine aujourd'hui dans une jupe serrée, cuir véritable, buvant du gin façon très mâle, à l'heure où les matinaux ont depuis longtemps pris la douche, ici donc la lyre moderne de Polymnie s'accorde au torrent de noirceurs du polar que nourrissent les concerts de flingues, les crissements de pneus, le chant des sirènes de la police ou des ambulances, les hurlements de la misère que de toute manière la haute n'entendra jamais, etc. Et le cadre de cette cacophonie est la ville la nuit. Et comme, depuis l'enfance, j'ai toujours eu le fantasme de New York, comme j'ai tant rêvé New York / New York City sur Hudson, ainsi que le dit la chanson, ces textes s'ouvrent dans leur grande majorité sur la Big Apple.

Polymnie de notre temps. La Hulpe : Éditions du GRIL [Groupe de réflexion et d'information littéraires], 2005, 30 p. Coll. "Princeps" n° 35. Éd. originale num., réservée aux souscripteurs. Volume pouvant être réimprimé à la demande.

Quel rapport, ou plutôt quels rapports entre la muse antique de la Rhétorique et ce recueil de poèmes ? Il n'est pas toujours simple de se référer aux anciens, qui ne donnaient pas aux noms et aux mots la même acception que celle d'aujourd'hui. Aristote pensait poésie autrement que nous et de notre côté, nous attribuons à la rhétorique un sens péjoratif qu'elle ne mérite pas. Heureusement la muse sauve le terme : couronnée de fleurs, de perles, de pierreries, elle charme et persuade. Comme nous devrions le faire et n'y parvenons pas. J.-M. Tartayre préfère la considérer comme patronne des hymnes (le nom l'indique) et de la poésie lyrique. ll se souvient qu'elle inventa l'harmonie, l'orchestique et même la géométrie ! Il lui prête dans son recueil un regard aigu sur l'actualité du monde et une présence vive dans son expérience personnelle. D'où le ton intime et humaniste à la fois de ces poèmes.

Van Gogh tonnante clarté. La Hulpe : Éditions du GRIL [Groupe de réflexion et d'information littéraires], 2007, 34 p. Coll. "Princeprs" n° 44. Éd. originale numérotée réservée aux souscripteurs. Volume pouvant être réimprimé à la demande.

Encore un livre consacré à Vincent Van Gogh. Et de plus un recueil de poèmes. N'est-ce pas trop ? La réponse est aisée : cet artiste est absolument inépuisable parce qu'il fut la modernité même, comme bien peu d'autres. Il n'est pas jusqu'aux avant-gardes les plus pointues qui ne se réfèrent à lui et à cette oeuvre de passion pure. Jean-Michel Tartayre l'a si bien compris qu'il s'est refusé à faire de la critique artistique ou a décrire les tableaux qu'il évoque. C'est une véritable recréation en poésie des thèmes et paysages à la fois si quotidiens et si éternels du peintre. Le poète a d'ailleurs toujours privilégié ce type d'écriture, recréant ainsi Toulouse, l'île Maurice où il vécut aussi, la mythologie avec sa muse Polymnie et tous ses autres quotidiens. Van Gogh figure très à l'aise dans cette poésie où transparaissent les lettres modernes qu'il enseigne, mais aussi la science, l'histoire et la passion des livres approfondie encore par un passage dans l'univers de la librairie.

Les Grands Soirs. Colomiers : Encres vives, octobre 2007, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 294. Illustration de couv. : Alain Lacouchie. Prix : 6,10 €

Les grands soirs... ceux qui s'ancrent avec force dans la mémoire, ceux qui, revêtus alors de couleurs et de tonalités si marquantes, participent de moments festifs où toutes sortes d'appétits sont sollicités, tellement bien qu'on se sent très vite obligé d'en dire quelque chose, avant d'en revivre de nouveaux, peut-être plus insolites encore, et d'en redire quelque chose, quand les mots sont parés ou quand les habite la quête d'un changement

Les Grands Soirs (II). Colomiers : Encres vives, mars 2008, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 321. Illustration de couv. : Sylvaine Arabo. Prix : 6,10 €

Les Grands soirs, la suite ;  pour rendre compte une nouvelle fois de cette période somme toute génératrice de mystères qui occupent les pensées du veilleur au point de le pousser à écrire en poésie, à dire ce climat si particulier précédant la nuit comme un seuil de l'aventure onirique, où se rencontrent l'Inspiratrice du quotidien et le Désir d'embrasser l'Inconnu, dans l'attente d'une visite, attente tout en paroles de joie spontanée. Les Grands soirs, la suite, un étrange bâillement du jour en vis-à-vis de l'ombre.

Les Chutes. Colomiers : Encres vives, mai 2008, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 332. Illustration de couv. : Alain Lacouchie. Prix : 6,10 €

Les Chutes devraient se comprendre moins dans le sens d'effondrement que dans celui de cadence, par le biais de laquelle le poète évoque l'action de tomber moralement non sans la perspective de trouver la rédemption auprès de la femme aimée, à la fois guide spirituel et maîtresse des émotions, savante organisatrice de l'ordre des choses et des mots, jusqu'à la partie finale où tombe la voix. Femme étrangement élastique qui retient l'avancée dans le vide et femme confidente, que le statut de destinataire privilégié élève au rang de baume au cœur.

Pandore. Colomiers : Encres vives, décembre 2012, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 517. Illustration de couv. : André Falsen. Prix : 6,10 €

La première occurrence de Pandore apparaît dans Les Travaux et les Jours du poète grec Hésiode, que l'on situe entre le VIIIe et le VIIe siècle avant Jésus-Christ. L'auteur propose dans cette œuvre de 826 vers son interprétation du péché originel et de sa condamnation. Pandore y est présentée comme la figure du châtiment imposé aux hommes par Zeus après l'épisode de la transgression commise par Prométhée, qui déroba son feu pour le leur confier : "Et de rire le père des dieux et des hommes. / Il invita le célèbre Héphaïstos à pétrir au plus vite / de la glaise et de l'eau, à y mettre une voix humaine / et la force, à y joindre un visage divin de déesse, / une charmante beauté virginale..." Cette généalogie poétique amène naturellement le lecteur à identifier Pandore comme le pendant d'Ève des récits génésiaques. Dans le présent recueil, j'ai tâché de réinterpréter à ma manière le mythe en m'attachant d'abord et surtout à son attribut majeur : celui de la féminité. J'ai choisi d'inscrire le personnage dans l'histoire d'une femme luttant en faveur de sa propre libération et ce dans un contexte qui se veut à l'image de celui que peuvent connaître de nos jours les populations confinées dans les zones de conflit, dans l'histoire d'une femme investie d'une mission de surveillance en faveur du projet pacifiste et indépendant de son pays. J'ai somme toute choisi de transposer la condamnation originelle en sorte de rédemption.

Série "Trottoirs"

Trottoirs Variations 1. Colomiers : Encres vives, juin 2011, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 471. Illustration de couv. : Silvaine Arabo. Prix : 6,10 €

Trottoirs peut se concevoir comme le thème d'une série d'ouvrages traitant de la poésie du quotidien et le lieu par excellence de la foule métisse au sein de laquelle cristallisent la rencontre, le langage amoureux des rues ou, au contraire, celui de l'indifférence, voire du conflit. Des scènes s'y font jour dont l'intensité dramatique anime la mémoire et l'esprit de l'auteur de ces pages aux soirs des longues journées quand le besoin immanent d'en révéler l'image et la musique convoque le langage des sens dans le cadre de leur étroite coopération, aussi vitale qu'intime.

Trottoirs Variations 2. Colomiers : Encres vives, décembre 2011, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 486. Illustration de couv. : André Falsen. Prix : 6,10 €

Cet opus est un nouvel ensemble de variations dont la structure s'organise autour du même motif : celui des trottoirs. La ville peut s'y percevoir comme un personnage à part entière, tant elle demeure un élément constitutif du champ sémantique, et le cadre d'une aventure au quotidien qui ressortit principalement à l'observation des scènes de rues se déroulant sous les yeux d'un "je" témoin mais aussi actant, dans la mesure où son passage participe de l'animation ambiante qu'il entend dépeindre. La présence féminine se révèle, là encore, comme l'agrément qui confère au spectacle, à l'écriture, leur dynamique fondamentale et son corollaire : la dimension de plaisir.

Trottoirs Variations 3. Colomiers : Encres vives, janvier 2012, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 495. Illustration de couv. : André Falsen. Prix : 6,10 €

Ce troisième opus consacré à la poésie des trottoirs peut se concevoir comme un nouvel hommage rendu à la féminité. Un personnage y demeure à cet égard traité par l'auteur avec l'insistance que seul le sentiment amoureux est capable d'occasionner, celui de la femme de Conakry, figure du dépaysement et du charme constitutive d'une praxis ouverte sur diverses régions du monde, en particulier l'Espagne ; autant de lieux dans lesquels s'inscrit sa présence aux côtés de celui qui prit le parti, à l'exemple du présent ouvrage, de dire leurs voyages de conserve parmi la foule des voies piétonnières et son vacarme convoquant les signes d'une dramaturgie.

Trottoirs Variations 4. Colomiers : Encres vives, mai 2012, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 498. Illustration de couv. : André Falsen. Prix : 6,10 €

Ce quatrième volet poétique inscrit le leitmotiv des trottoirs dans le cadre d'une remémoration ayant trait à plusieurs séjours que je fis au Maroc. La femme de Casablanca, personnage récurrent du recueil, peut se concevoir comme la clé d'une lecture de cette région africaine alliant la magie de l'exotisme oriental avec l'intention réaliste de donner à voir en détail les lieux parcourus, ce dans la mesure où sa présence permet seule l'itinéraire jubilatoire jusqu'aux confins du désert et la disponibilité du symbole ; un être principalement entendu sur le mode de l'éthique et de l'esthétique eu égard à l'amour ou à la liberté qu'il incarne ; femme libre, femme guide dont l'irrésistible charme appelle à l'heuristique du bon génie à l'œuvre sur tous les chemins, sur tous les trottoirs qu'elle et moi avons arpentés, contemplés.

Série "La Femme au Caducée"

 Nerf ou pinceau. Colomiers : Encres vives, décembre 2008, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 349. Illustration de couv. : Patrick Guallino. Prix : 6,10 €

Nerf ou pinceau s'inscrit dans une démarche intellectuelle comparable à la marche silencieuse et avisée du serpent parmi les grands déserts au relief tourmenté. Il s'agit d'un ensemble où la dimension dialogique de chaque texte apporte un éclairage sur des questions d'ordre philosophique touchant le plus souvent à l'ipséité. Être ou ne pas être dit Shakespeare. De fait, la pensée du poète doit se concevoir moins comme une spéculation aux finalités absconses, voire incompréhensibles, que comme une progression effective vers le bonheur, convoquant au besoin les ressources de la psychanalyse afin de ne négliger aucun outil susceptible de l'aider à gagner sa destination, à se rendre à bon port plutôt qu'à quelque indésirable fatalité. Ainsi, l'écriture allie à la syntaxe des réseaux de signification totalement orientés vers l'éros. La Femme y joue logiquement le premier rôle, à la fois en tant qu'organisatrice de l'entrevue du poète avec lui-même, en tant que maïeuticienne, en d'autres termes maîtresse en maïeutique, et unique élément de réponse en qualité de valeur absolue et matrice du monde incarnée. Elle trône, un caducée à la main, et caresse les serpents quand vient le temps de sa repartie, quand elle sait que son intervention demeure indispensable, comme un nerf détendu, un jet de lumière, aussi péremptoire que celui d'une pierre.

Entrelacs. Colomiers : Encres vives, octobre 2009, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 383. Illustration de couv. : Valérie Gaubert. Prix : 6,10 €

Entrelacs succède à Nerf ou pinceau selon un ensemble qui se fonde sur une structure dialogique entre, d'une part, la femme au caducée et, d'autre part, son destinataire privilégié, image d'une âme en proie au questionnement et dont le regard introspectif révèle une nature quelque peu désorientée ou troublée par un manque indéfinissable que seule son interlocutrice paraît combler. La parole représente à cet égard le primat des échanges qui se donnent libre cours sous l'égide de cette dernière en laquelle la raison s'allie à la sensibilité pour accorder aux interrogations subjectives leur part de logique et d'ancrage dans la perspective de l'union sacrée qui mettra un terme à l'angoisse de la solitude, aux affres de l'illusion, en faveur de la préhension des sens, du bon sens où la force se joint au principe de réalité dans l'élégance d'un sourire, d'un rire francs.

Des Affaires. Colomiers : Encres vives, novembre 2009, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 392. Illustration de couv. : Alain Lacouchie. Prix : 6,10 €

Des Affaires, troisième volet de la série mettant en scène l'entrevue entre la femme au caducée et l'image d'une âme en quête d'une meilleure connaissance d'elle-même, inscrit les dialogues qui se donnent cours dans le cadre d'une correspondance avec la chose économique, au regard de laquelle le rôle du caducée prend tout son sens, à la fois comme symbole du commerce et attribut par excellence de Mercure. Il doit également se concevoir comme le sceptre qui caractérise le principal personnage féminin, et le signe de sa suprématie dans le débat qui, en l'occurrence, progresse, au fil des textes qui se succèdent, selon un rapport d'analogie entre la structure du moi et l'ordre des échanges qui animent la société moderne dans laquelle il évolue.

Du Combat. Colomiers : Encres vives, février 2010, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 410. Illustration de couv. : Sylvaine Arabo. Prix : 6,10 €

Du Combat, quatrième volet d'une série de scènes entre la femme au caducée et l'image du poète amant que corrobore et complète tout du long l'interprétation d'un analyste, peut se concevoir comme une nouvelle tentative de conférer à la parole et aux vocables qui le structurent le moyen d'accéder au bonheur de l'existence, à la joie de vivre, au-delà du sentiment de solitude et des questionnements angoissés qu'il convoque de façon très souvent péremptoire. Le mot s'inscrit, en l'occurrence, tel un outil destiné à remédier à toute forme d'adversité, de conflit ou de tension prégnante entre différentes entités aussi antinomiques, par exemple, que celles du bien et du mal, ou entre les instances d'ordre psychique telles que le ça et le surmoi et que la main-d'oeuvre, entendue comme le travail du poète ouvrier, à l'égard duquel ledit mot représente la matière première, a pour objectif d'arbitrer dans les limites d'une arène des sens.

Des Soins. Colomiers : Encres vives, décembre 2010, 16 p. Coll. "Encres blanches" n° 440. Illustration de couv. : Patrick Guallino. Prix : 6,10 €

Des Soins, cinquième volet de la série d'ordre dialogique mettant en exergue le tête-à-tête entre une âme en quête d'elle-même et la femme au caducée, adepte des solutions pragmatiques et dotée d'un sens de la repartie qui s'ancre dans le réalisme, se fonde sur une structure thématique tout orientée vers la thérapie par la parole. À cet égard, le dialogue conçu comme échange primordial et moyen curatif étroitement subordonné à la pratique de la maïeutique peut être perçu tel un à valoir, une promesse, sur les probabilités d'un avenir heureux et créatif concernant l'union de ces deux êtres.

La Femme au caducée

Recueil de 12 poèmes (prépublication du recueil Des soins). Sommaire : En guise d'introduction - Après le coup de tondeuse - Lavomatic - Circus - Pardon ? - Fin du monde - L'Amicale de boules - Plus dure sera la chute - Dans la salle de bains - Strip-tease - Couci-couça - Des pompes à cirer.

Revue Multiples, octobre 2010, n° 77, p. 71-80. Collection "Découverte" n° 16. ISBN 2-902032-44-7. Prix : 15 €. Abonnement : Henri HEURTEBISE - 9 chemin du Lançon - 31410 LONGAGES - Tél. 06 77 07 81 28

 Nouvelle

Scènes de la nuit blanche / illustrations de Jean-Claude Claeys.

L'Ours polar, juin 2008, n° 45-46, p. 65-69. ISSN 1295-8743. Prix : 6 €.

Ce numéro double met l'accent sur les collections noires d'Actes Sud. Il présente également une étude sur les quatre premières saisons du "Dr House" au cynisme renommé, et une nouvelle de Jean-Michel Tartayre illustrée par Jean-Claude Claeys. Site K-libre.

L'entretien avec Saint-Paul porte essentiellement sur sa posture de poète épris des lieux, voulant en décrypter les mystères, connaître leur histoire et les apprivoiser.

Un poète, "à la fois nostalgique et révolté" selon la formule de Michel COSEM, et prolixe, que nous aurons plaisir à retrouver au fur et à mesure de ses publications.

 

 

 

 

 

16/10/2014

 

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul rappelle qu'à Carcassonne l’exposition du Centre Joë Bousquet et son Temps donne à voir 70 œuvres de Max Ernst et 20 dessins de G. Ribemont-Dessaignes. Ces œuvres graphiques sont accompagnées de vingt trois vitrines qui présentent le cheminement poétique de G. Ribemont-Dessaignes et de Joë Bousquet, leurs liens avec l’œuvre de Max Ernst. Que le samedi 18 octobre 2014, à 15h aura lieu une lecture de La Ballade du soldat par Yves Ughes, poète.

Yves Ughes est né à Nice, en 1951. Il y grandit dans un quartier de saveurs, au sein d’une famille d’origine italienne. Il découvre au Collège la force de la poésie, cette onde de choc le porte encore. Il suit des cours lumineux à la faculté des Lettres de Nice, notamment ceux de Michel Butor, et devient professeur de Lettres Modernes.

L’Education Nationale lui apprend alors à voyager : nominations au Havre, à Port de Bouc, à Castellane. Installation définitive à Grasse en 1986.

Yves Ughes pousse alors la porte de l’Association Podio, qui travaille pour la Défense et l’Illustration de la poésie, notamment dans les Alpes Maritimes.

Dès 1992, il y prend une part active, se fixant un rythme régulier de conférences. Les auteurs abordés témoignent d’un ancrage méditerranéen qui n’échappe pas pourtant à l’influence américaine. Pavese, ou la trace de la couleuvre. Montale, ou la souffrance des pierres. Reverdy, homme de main, homme de peine. Audiberti, ou le cri confus des catastrophes, Kerouac ou les rues de la lumière vide.

Il est désormais Président de cette association qui œuvre depuis trente ans avec, en exergue, cette interrogation d’Hölderlin : Pourquoi des poètes en ces temps de détresse ?

Ses ouvrages sont édités essentiellement par l’Amourier.

 

Les journées culturelles franco-algériennes se terminent avec la présentation de l'œuvre de SLIM, bédéiste et pionnier de la caricature algérienne, avec la projection d'un film le lundi 20 octobre 2014 à 20 h au cinéma l'Utopia à Toulouse, et une rencontre le mardi 21 octobre 2014 à la librairie toulousaine BD Fuhue à 19 h.

 

Saint-Paul s'attarde ensuite sur la parution du n° 63 de la revue Diérèse poésie et littérature, 322 pages, 15 €, abonnement 40 € à adresser à Daniel Martinez, 8 avenue Hoche, 77330 Ozoir-la-Ferrière. Ce lourd et sublime pavé de poésie, richement illustré, nous conduit par les chemins de traverse de la littérature et de la poésie avec un sommaire de très nombreux artistes, connus ou à découvrir. Il offre la particularité de recéler de multiples notes de lecture intitulées "Bonnes Feuilles" qui sont une mine d'or pour connaître les publications de livres de poésie.

Lecture de poèmes d'Isabelle LEVESQUE.

Tu tiens,

 

gardien,

socle du sable

poussière de je.

 

Je suis le vent

porteur d'humeurs sombres.

 

Gardien de phare,

tu es la nuit éclairée.

Pas une étoile.

Tu es

le ralenti des crocs du sort.

 

Tu es sur la falaise,

chant long

pour.

*

Lecture de la critique de "Ravins des Nuits que tout bouscule" d'Isabelle LEVESQUE par Bernard DEMANDRE figurant dans les Bonnes  Feuilles de la revue.

Lecture de poèmes de Daniel MARTINEZ.

En miroir

 

Essaims au cœur de juin vont ces oiseaux

chassant d'un seul afflux les troubles anciens.

Le poème aussi inlassable

sur le point vert des branches

ne serait-il fixant son secret

l'écho de la dernière nuit

l'humeur fuyante qu'aura dispensée l'aube

lorsque la plus longue voie lactée

éteinte au simple passage

d'une flamme argentée

sur les cimes des conifères

calligraphie les lèvres, ouvre enfin

la paroi du vide au fil du moindre vent

pourrais-je le nommer

*

Saint-Paul fait ensuite entendre la voix envoûtante d'une des plus belles voix de la Méditerranée, comme il l'avait fait pour Yasmin LEVY, celle de Françoise ATLAN, qui après dix années passées au Maroc, d’Essaouira à Fès, de Marrakech aux montagnes de l’Atlas, vient de créer La Compagnie Yemaya

à Marseille. « Marseille comme Essaouira, est une ville ouverte sur le monde, une cité aux cultures additionnées et aux identités plurielles. Il était évident pour moi qu’elle serait le point d’ancrage de cette exaltante et nouvelle aventure qu’est la création de ma Compagnie. Une Compagnie à l’architecture qui rappellerait celle d’un plafond orné de stucs et de zelliges : s’ y mêlent les projets musicaux, créations, concerts et enregistrements, pédagogie, édition, collectages, diffusion et mise en lumière des patrimoines communs et spécifiques des traditions de la Méditerranée.» Diffusion de "Mama mia" chant séfarade.

 

Comme il l'avait annoncé les semaines précédentes, Saint-Paul a tenu à lire en entier le recueil de Werner LAMBERSY

"CONTUMACE" constituant le 433ème numéro d'Encres Vives (le n° 6,10 €, abonnement 34 €, Michel Cosem, 2, allée des Allobroges 31770 Colomiers).

Pour la biographie du poète, il y a lieu de se référer à celle écrite par Françoise TROCME sur son excellent site : http://poezibao.typepad.com/poezibao/2005/05/werner_lambersy.html

"Werner Lambersy est né le 16 novembre 1941 à Anvers. Issu d’un milieu néerlandophone, il choisit d’écrire en français. Il effectue de nombreux voyages en Orient. Il vit à Paris depuis 1982 et est attaché à la promotion des lettres belges à paris (Centre Wallonie-Bruxelles).
Il a été lauréat, parmi de nombreux autres prix, du Grand prix de Poésie 2004 de la SGDL (Société des Gens de Lettres).Bibliographie (de poésie), non-exhaustive
Caerulea, VDH, 1967.
Radoub, VDH, 1967.
À cogne-mots, VDH, 1968.
Haute tension, VDH, 1969.
Temps festif, VDH, 1970.
Silenciaire, Henri Fagne, 1971.
Moments dièses, Henri Fagne, 1972.  
Groupes de résonances, Henri Fagne, 1973.
Le cercle inquiet, Henri Fagne, 1973.
Protocole d’une rencontre, Henri Fagne, 1975.
33 scarifications rituelles de l’air, Henri Fagne, 1976. Deuxième édition, 1977.
Tous ces livres publiés chez Henri Fagne ont été réédités au Taillis Pré en 2004
Maîtres et maisons de thé, Le Cormier, 1979. Deuxième édition, 1980. En poche chez Labor, 1988, réédition chez Hors Commerce, 2003
Le déplacement du fou, Le Cormier, 1982, réédition l’Orange bleue, 1995 & 2000
Quoique mon cœur en gronde, Le Cormier, 1985
Paysage avec homme nu dans la neige, DurAnKi, 1982.
Géographies et mobiliers, DurAnKi, 1985, réédition Ecrtis des forges, 1991
Komboloî + ChandMala, Le Dé bleu, 1985. Deuxième édition, 1986.
Stilb, édition de luxe, B.G. Lafabrie, 1986.
Noces noires, La Table Rase/Noroît, 1988 et 1989
L’arche et la cloche, Les Éperonniers, 1988 et 1989
Talkiewalkie angel, Unimuse, coll. Lubies, 1988.
Un goût de champignons après la pluie, L’Arbre à Paroles, coll. Le Buisson ardent, 1989.
Cantus obscurius, Architecture Nuit II, Éd. du Théâtre Vesper; Les Éperonniers, 1989.
Maîtres et maisons de thé, Bruxelles, Labor, coll. Espace Nord, préface de L. Bhattacharya; lecture de V. Engel.
Entrée en matière, Montpellier, éd. Cadex, 1990 et 1993. Ill. de Anne Rothschild.
Architecture nuit, Echternach, Montréal, Bruxelles, Préface de Frans De Haes.éd. Phi, Le Noroît, Les Éperonniers, 1992.
Volti subito, Chaillé sous les Ormeaux; Trois Rivières; Amay, Le Dé Bleu, Écrits des Forges, L’Arbre à Paroles, 1992.
La nuit sera blanche et noire, Éd. Jacques Boulan, 1992. Triptyque de Lionel.
Grand beau, éd. Petits classiques du grand pirate, 1992. Ill. de Roland Renson
Architecture nuit, Phi, 1992
Le nom imprononçable du suave, Amay, L’Arbre à Paroles, 1993. Coll. Buisson ardent.
Quinines, Charlieu, La Bartavelle, 1993. Coll. La main profonde, préface de J.C. Bologne, ill. de Lionel.
La nuit du basilic, éd. Commune mesure, 1993. Ill. de Claudine Du Four.
Quinines / Grammaire du désordre, La Bartavelle, 1993
L’écume de mer est souterraine, Nantes, Le Pré Nian, 1993, ill. de Bracaval.
Stilb suivi de Iréniques, dessins J. Clauzel, Cadex, 1994
Errénité, Gallargues le Montreux, éd. À travers, 1994, ill. de Jacques Clauzel
Tirages de têtes, photos J.-P. Stercq, La lettre volée, 1995
Journal d’un athée provisoire, Phi, 1996
Chroniques d’un promeneur assis, Cadex, fusains E. Koch, 1997
La Magdeleine de Cahors, Labor, 1997
Pays simple, fusains J.-C. Pirotte, Cadex, 1998
Petit rituels sacrilèges, L’amourier, 199_
D’un bol comme image du monde, avec G. Lalonde, Le loup de gouttière, 1999
L’horloge de Linné, Phi, 1999
Écrits sur une écaille de carpe, dessins d’Otto Ganz,L’amourier, 1999
Dites 33c’est un poème, Le Dé bleu, 2000
Singuliers regards, avec D. Serplet, CFC, 2000
Je me noie, dessins de S. Kaliski, L’Amourier, 2001
Pour apprendre la paix à nos enfants, avec Léo Beeckman, Cadex, 2001
Ecce Homo, avec otto Ganz, Maelström, 2002
Puits, cachettes et passage, avec D. Serplet, Syllepse, 2002
Carnets respiratoires, photos d’Henri Maccheroni, Cadex, 2004
Journal par dessus bord, Phi, 2004
Échangerais nuits blanches contre soleil même timide, l’Amourier, 2004
Rubis sur l’ongle, Hermaphrodite, 2005
L’érosion du silence, Maelström, 2005
La toilette du mort, les ennemis de paterne berrichon, 2005
Uluru ( + trad. en anglais de D. de Bruycker), La cour pavée, J.Ricard, 2005.
Traité des corridors, avec D. Serplet, 2005
Coimbra ou l’antiphonaire d’Orphee, Dumerchez, 2005
Les gratte-pieds de Didier Serplet, c.f.c., 2005une 
fiche bio-bibliographique sur le site du service du livre luxembourgeois
sur le site de Le Zèbre international, 
revue internationale de poésie francophone

 

Le blog de Werner LAMBERSY : http://wernerlambersy.hautetfort.com

 

"Contumance" est le recueil d'un grand voyageur certes, mais de celui qui voyage autant dans les livres et la pensée des grands auteurs. Son texte, oral, fluide comme du Cendrars en est parsemé. Les citations s'intègrent donc aux mots du poète qui en se les appropriant les fait vivre plus fort encore.

Une poésie puissante, virile sans ostentation, allant directement à l'essentiel, à la source de la langue et de l'émotion, mais en gardant tous les acquis des précurseurs en la matière.

LINGUA IMPETUOSA

 

Un chant

pour la première fois

encore

 

et l'aiguière du temps

versant l'ombre

des heures

 

sur les mains

savonneuse de l'oubli

 

sur la peau nue

des paumes du nombre

 

et les coudes

harmonieux de l'espace

 

mais c'est confus

pareil aux bruissements

fossiles

 

de l'âme dans le violon

des astres

 

ayant mon souffle pour

toute puissance

je monte

au-devant de ce silence

où je retrouve ma patrie

                        Jean Tardieu

j'ai froid

je veux rentrer dans

le bain chaud d'un ventre

 

rester

comme les insectes dans

l'ambre

 

une planète

un pépin dans la pomme

qu'on coupe

 

je veux sous la guillotine

ou la scie circulaire

des soleils

 

que la vie parle d'amour

......

*

Enfin après la lecture de "Contumace", Saint-Paul lit des extraits du numéro suivant d'Encres Vives, le 434ème consacré à un recueil  "L'Illusion essentielle" d'Eric BARBIER, qui vit près de Tarbes et qui est un auteur familier maintenant de cette émission. Poète du lieu, de la montagne, du souffle acquis au cours des ascensions dans les chemins des Pyrénées et ceux, tout aussi enivrants, de la poésie.

...

Pourquoi avoir voulu ici retrouver le lieu ? Regagner l'image.

Comme un retour en semblable solitude quand persistent certaines compagnies.

Sentiers souvent parcourus est-ce ici l'intermède ou la permanence qui se vérifierait dans les derniers frissons des eaux.

Quand plusieurs soleils se ligueraient pour accomplir cette sécheresse, quand un unique midi nous prend dans les ondoiements de la chaleur.

Trop tôt quitter le récit donné par le seul arbre persistant à se dresser sur ces pentes.

Des jours où l'on pourrait se croire en avance, en avant de soi et de ce qui entoure.

 

Retour en des lieux qui furent initiateurs, où commença à se dissiper le voile brumeux qui s'attardait depuis si longtemps sur le pays intérieur.

Clore une époque l'air adopte d'autres accents c'est un voyage aussi que la chair reprend. Mais dans quel ciel au plus près approché donner corps à ce voyage ? Encore les phrases nous cherchent.

*

L'émission s'achève sur l'évocation de cet éditeur, poète et romancier infatigable qu'est Michel COSEM qui vient de publier son dernier roman "L'Aigle de la frontière" aux éditions De Borée (280 pages, 20 €).

  "Jean Christophe mène une vie insouciante dans une station à la mode dans les Pyrénées. Il va de rencontres en rencontres, fait de la petite contrebande à travers la frontière, mais il n'est amoureux que de sa montagne, de sa liberté. L'époque de la désinvolture se termine pourtant lorsqu'il tire sur un douanier sur le point de l'arrêter et surtout, lorsque le pays plonge dans la guerre. D'abord les réfugiés espagnols, les délations. Puis l'arrivée des Allemands. Fini les fêtes, les touristes, les promenades au bord des lacs, les chars de fleurs... Sous l'impulsion de Gilbert, l'instituteur, il prend conscience de la gravité des événements et du rôle qu'il doit désormais tenir."

 

 
 

 

Francis PORNON

09/10/2014

 

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En préambule, Christian Saint-Paul exprime sa reconnaissance à ses amis qui lui ont offert ce très beau livre : "Les Poilus Ariégeois dans la Grande Guerre" 1914 - 2014; 1919 - 2019; hommage aux soldats de l'Ariège et de Midi-Pyrénées mobilisés au 17ème Corps d'Armée. Ouvrage collectif de l'Association du Centenaire de la Grande Guerre en Ariège, dédié à Julien, Gustave Langrenez, né le 24 octobre 1898 à Benagues, mort au champ d'honneur à 17 ans le 4 septembre 1916 dans la Somme.

C'est une collaboration exceptionnelle de rédacteurs pertinents qui a abouti à la réalisation de ce puissant ouvrage qui fait le bilan érudit de l'implication de nos soldats occitans dans cette guerre terrible. Enrichi superbement de photos d'époque, de dessins, de croquis de batailles, ce livre d'Histoire nous rappelle que 162 334 soldats de cette région, qui englobe les trois quarts de l'Occitanie et qui va de Bordeaux à Montpellier, ont donné leur vie pour la France. Pour le centenaire d'évocation de cette guerre épouvantable qui a préparé la suivante, il est bon de se souvenir, par la richesse des détails qui font la réalité des choses, de nos proches ancêtres qui ont subi tant de souffrances.

Le livre peut être commandé en relation avec la ville de Pamiers.

 

Christian Saint-Paul signale la parution de: NOUVEAUX DÉLITS Revue de poésie vive et dérives Numéro 49

Oct. Nov. Déc. 2014

 Cathy GARCIA poursuit inexorablement son excellent travail éditorial et nous livre un nouveau numéro aussi dense et soigné que les précédents. Une mise en page impeccable, des illustrations originales d'une évidente réussite esthétique  - il faut dire que Cathy est aussi une artiste accomplie (dessins, peintures, collages, photographies) - et un sommaire éclectique et ouvert sur le monde. Voici ce qu'elle écrit en guise d’édito :

 

Le missionnaire européen était assis accroupi avec les Indiens Hurons en grand cercle autour d’un feu de camp. C’était une position à laquelle il n’était pas habitué, et il avait le sentiment qu’elle ne l’aiderait pas à convaincre les Indiens de partager son point de vue. Néanmoins il leur a exposé courageusement l’idée selon laquelle il n’était pas un mais deux. En l’entendant les guerriers ont éclaté de rire et ont commencé à jeter de gros bâtons et de la poussière dans le feu. Un étrange mélange de terreur et de ressentiment a alors envahi le cœur du missionnaire. Lorsque les rires ont cessé, il a poursuivi son exposé. Avec patience, il a expliqué aux sauvages que ce corps fait de chair et de sang qu’ils voyaient assis devant eux n’était qu’une coquille extérieure, et qu’en lui un corps invisible plus petit habitait, qui un jour s’envolerait pour vivre dans les cieux. Les Hurons ont gloussé de plus belle, en se faisant des signes de tête entendus tout en vidant les cendres de leurs pipes en pierre dans le feu crépitant. Le missionnaire avait le sentiment d’être profondément incompris, et était sur le point de se lever pour regagner sa tente, vexé, lorsqu’un vieil homme près de lui l’a arrêté en lui saisissant l’épaule. Il lui a expliqué que tous les guerriers et les chamans présents dans le cercle connaissaient l’existence de ces deux corps et qu’ils avaient également de petits êtres qui vivaient en eux, au cœur de leurs poitrines, et qui s’envolaient eux aussi au moment de la mort. Cette nouvelle a réjoui le missionnaire, et l’a convaincu que les Indiens étaient désormais sur le même chemin spirituel que lui. Avec un zèle renouvelé, il a demandé au vieil homme où, selon son peuple, ces petits êtres intérieurs s’en allaient. Les Hurons ont tous recommencé à rire, et le vieil homme a désigné du doigt la cime d’un énorme cèdre millénaire dont la silhouette se dressait dans la lueur du feu. Il a dit au missionnaire que ces « petits êtres » allaient au sommet de cet arbre puis descendaient dans son tronc et ses branches, où ils vivaient pour l’éternité, et que c’était pour cela qu’il ne pouvait pas l’abattre pour construire sa petite chapelle.

Sam Shepard in Chroniques des jours enfuis
 

Au sommaire de ce numéro : 

Délit de poésie : Thomas Sohier, Patrick Devaux (Belgique) et Jean-Jacques Dorio

Délit pin pom et autres poèssessions : Paul Féval

 Délit de réponse : Pascale de Trazegnies & Cathy Garcia,

Poème  pour  deux  voix  ou  deux  mains

 Délit de suite dans les idées : Cyril C. Sarot, Ces traces laissées dans le sable

 Résonances : Chroniques du Diable consolateur de Yann Bourven

 

Saint-Paul renonce à lire ce jour, le poème à deux voix ou deux mains de Pascale de Trazegnies & Cathy Garcia, car ce texte doit être lu comme il est bien précisé, à deux voix.

Lecture d'un texte plein d'humour de Cyril C. Sarot.

Le n° 6 €, abonnement : 25 € à adresser à Association Nouveaux Délits, Létou, 46330 Saint Cirq-Lapopie.

 

Christian Saint-Paul reçoit son invité, l'écrivain et poète Francis PORNON qui vient de publier chez Loubatières  : "Jaurès à Toulouse  lieux et mémoire"

 

Le sait-on ? Jean Jaurès – « apôtre de la paix » – fut adjoint au maire à Toulouse durant deux ans et demi. Il laisse dans la Ville rose une empreinte indélébile de son engagement et de ses réalisations. Voici des écoles et des facultés, le théâtre et les Beaux-Arts, mais encore des lieux de rencontre comme l’ex-hôtel d’Espagne et le siège du Parti Ouvrier de France, ou même des lieux de conciliation comme l’ex-dépôt des tramways hippomobiles… C’est un beau livre contenant une série de textes inédits (évocations personnelles et littéraires) préfacés par Georges Mailhos et postfacés par Jean-Michel Ducomte, dont le contenu historique est avéré et garanti par l’historien Rémy Pech, avec en regard des illustrations artistiques originales (dessins au crayon et au fusain) de l’artiste Amina Ighra. Il s’agit d’une démarche singulière parmi les publications touchant Jaurès, propre à évoquer à la fois les traces de la pratique du personnage dans la ville, aussi bien que son génie humaniste devenu tutélaire de la République.

97 pages, 25 €

 

Au cours de l'entretien avec l'auteur, lecture d'extraits du livre. Comme le souligne fort bien, avec cette aisance d'analyse qui fait sa renommée, Georges MAILHOS, "ce livre est un livre de conviction, d'agrément et d'amour, et, au total, de plaisir, comme savait le définir Jaurès, celui qui "prend le cœur, en même temps que le cerveau". Par la plume et le crayon de nos auteurs, ces lieux deviennent des sites où choses et gens, pour faire figure, ne se détachent et ne prennent sens que dans un paysage mémorial et symbolique."

Il peut paraître étonnant que les deux séjours de Jean Jaurès à Toulouse, une fois deux ans, une autre fois deux ans et demi, ait pu à tel point imprégner la ville pour une heureuse postérité. Jaurès fut maître de conférences à la Faculté des Lettres et c'est au sein du Conseil Municipal qu'il exerça avec ferveur les fonctions d'adjoint au maire chargé de l'instruction publique. Ceci au cours d'une période de notre histoire où l'éducation était un des principaux enjeux de l'innovation politique. Mais c'est aussi à Toulouse et cela se prolongera même lorsqu'il aura quitté la cité, que Jaurès donna à "La Dépêche de Toulouse" (devenu aujourd'hui "La Dépêche du Midi") ses articles les plus fameux et ses critiques littéraires qu'il signait "le liseur". L'ensemble de cette action dynamique constitue un irremplaçable témoignage de cette époque.

Francis PORNON évoque tous les lieux visités dans son livre et si bien restitués par les dessins d'Amina IGHRA. Le portrait qu'elle réalise de Jaurès et qui est en couverture du livre, est saisissant de vie; c'est un Jaurès loin des clichés du barbu sévère, son visage dégage une jeunesse au regard clairvoyant et terriblement bienveillant.

Francis PORNON a bâti son livre comme une œuvre littéraire avant tout. C'est en poète qu'il observe son sujet, homme mythique assurément, évoluer dans la ville et dans la pensée. Il le suit, en s'immisçant dans ce chemin, en mêlant ses propres souvenirs des lieux à ceux du début du XXème siècle. Il en résulte un récit vivant, sensible et une vraie appropriation des lieux par le lecteur.

Beaucoup de ces lieux à découvrir en lisant le livre, en un siècle ont changé. Tel grand magasin occupe par exemple l'emplacement du Café de la Paix (nom prémonitoire) que fréquentait Jaurès avec ses collègues de la Faculté.

Il y a une délectation à lire ce livre, si bien conçu, qu'il est un livre d'art; le plaisir bien entendu est encore accru pour les toulousains qui vénèrent toujours les lieux dont il s'agit. Mais c'est aussi le souffle de l'histoire et de l'esprit qui accompagne ces promenades où nous entraînent Francis PORNON. Il nous fait imaginer la confrontation Jaurès Guesde, Jaurès de Fitte, le tribun étant avant tout un philosophe dont la thèse de doctorat portait sur la réalité du monde sensible. Il voulait que la culture s'adresse à tous, ce qui à l'époque était une authentique audace. Au lycée de Fermat, son discours de distribution des prix, dans cette noble demeure, résonne encore dans les vieux murs et pourrait être écrit aujourd'hui : "La vie a singulièrement resserré devant vous, jeunes gens, l'espace du rêve ; la lutte pour l'existence est devenue tous les jours plus rude ; toutes les vois sont encombrées et piétinées et vous le savez, et de bonne heure vous faîtes effort".

L'émission s'achève sur les dernières phrases de la postface de Jean-Michel DUCOMTE: "Jean Jaurès est inscrit dans l'asphalte et la pierre de Toulouse, cela le savent même ceux pour qui l'évocation de son nom se limite à une commodité. Mais la mémoire de ce qu'il fut et continue de représenter se loge principalement dans l'imaginaire ou la pensée de tous ceux que continue encore de guider l'exemple de son action et la grandeur de sa pensée. Ceci rend d'autant plus incompréhensible, alors que les Toulousains lui rendaient un ultime hommage en 1924 lors de la translation de ses cendres au Panthéon, le silence de la municipalité radicale du moment conduite par Paul Feuga".

Merci à Francis PORNON de nous avoir donné pour notre patrimoine historique et littéraire toulousain, ce livre aux correspondances parfaites entre les textes et les dessins d'Amina IGHRA, les deux artistes s'inscrivant dans un même élan lyrique mais sobre.     

 

 

 
 
 
 
 
 
 

Moncef BENOUNICHE

Philippe SAMSON


 
 
 
02/10/2014

 

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Charles DOBZYNSKI nous a quittés le 26 septembre 2014 alors que nous avions d'autres projets avec lui. Claude Bretin et Christian Saint-Paul présentent leurs condoléances à la famille du poète ainsi qu'à tous ses proches et à tous ceux que son brusque départ affecte. Sa vie fut celle d'un héros de roman, d'ailleurs un de ses derniers livres de poèmes a pour titre "Je est un juif, roman", journaliste, critique de cinéma, directeur de la revue Europe de nombreuses années, écrivain, il fut surtout dans l'âme un poète et habitait le monde en poète. Né en 1929 à Varsovie, il présidait le jury du prix Apollinaire et était membre de l'Académie Mallarmé. On lui doit aussi un riche travail de traducteur (Rilke, Maiakovski, Markish, Suskever) et une Anthologie de la poésie yiddish, qui fait autorité et est rééditée. Les auditeurs sont invités à se reporter aux émissions qui lui ont été consacrées en 2014 et à l'écouter s'expliquer sur sa vie et sa démarche militante, politique et essentiellement poétique. Nous reviendrons sur cette œuvre qui englobe plus d'une trentaine de livres de poésie, les derniers étant publiés par Daniel COHEN, dont il faut saluer l'inlassable travail, aux éditions Orizons (voir notre rubrique éditions Orizons sur notre site).

Lecture d'extraits de "Ma mère, etc., roman" et de "Je est un juif, roman" (collection Profils d'un classique, éditions Orizons).

 

Auschwitz, la mémoire en morceaux

 

Vivre inventa pour moi son road movie,

jusqu'à la mort, mot-clé en polonais.

Varsovie au cœur des ruines renaît,

Intacte la splendeur de Cracovie,

Siècles enclos au château de Wawel.

Le train cahotant parmi les décombres,

a débouché sur l'empire des ombres.

Le monde pivota dans l'irréel :

de Birkenau pointaient les miradors,

un ciel cendreux, linceul qui se démaille,

un sol scindé par le garrot des rails.

Ici s'ouvraient les portes de la mort

Auschwitz d'avant tous les pèlerinages

pré-agencés aux tréfonds de l'enfer.

Moi je marchais dans l'histoire à l'envers,

dans un néant comme brut de coffrage.

Dédales d'ossements, dents à plein seaux,

Ô reliquats démembrés d'une Bible,

Mère c'est par tes yeux, dans l'indicible,

que me cribla la mémoire en morceaux.

 

(Charles DOZYNSKI à Radio Occitania a raconté ce voyage de 1954, premier retour dans son pays natal, au cours duquel il visita le camp d'Auschwitz et en fit le récit à sa mère.)

*

Peuple de la diversité

 

Aux Juifs la Perse fut toujours

leur souche leur emblave

venus de Babylone et d'Our,

 

de leur long périple d'esclaves.

 

Tout Juif est une mosaïque

de mémoire et de passions

la grande saga judaïque

 

ne peut se clore en nation.

 

On se lègue sa différence

que l'on soit de l'Est ou du Sud

natif de Pologne ou de France

 

survit la graine du Talmud

 

Abraham balise ancestrale

abattant les idoles fit

d'un Dieu monique sa morale,

 

du retour sa philosophie.

 

Peuple pluriel Peuple en phase

brassant les langues de l'ailleurs

le Sépharade ou l'Ashkénaze

 

de l'exil obscurs orpailleurs.

 

Juifs de Cordoue et de Séville

orfèvres dévots du Yémen

dans le ciel de vos yeux scintille

 

un diamant de l'espèce humaine.

...

*

       La Fête et la Foi

 

Terre synthèse ou terre sainte

faut-il choisir

quand l'une à mes pas s'est éteinte 

 

et l'autre est encore à venir ?

 

Dans la filière de l'hébreu

ma langue cherchait sa ressource

je vivais dans la discordance

 

des embranchements du parler.

 

Erosion des liturgies

déjà le ver est dans le fruit

là où le dogme se déguise

 

la fête remplace la foi.

*

Saint-Paul revient sur l'importance et la qualité de la 30ème quinzaine littéraire et artistique de l'Atelier Imaginaire qui se déroulera, à Lourdes et à Tarbes du 8 au 22 octobre 2014, pour la décade littéraire, les Journées Magiques du 16 au 20, les Livres secrets le dimanche 19 octobre. Hommage sera rendu à Claude NOUGARO au cours de plusieurs soirées, le poète et traducteur Jean PORTANTE y présentera son dernier livre "Le travail de la baleine" , les éditions RHUBARBE y fêteront leur 10ème anniversaire, etc. Guy ROUQUET a fabriqué un programme de grande envergure qui rend compte du meilleur de notre époque et pas seulement puisque Victor HUGO et Paul VERLAINE seront présents par le truchement de deux expositions.

Un programme à consulter vite sur : http://www.atelier-imaginaire.com

*

A Carcassonne au CENTRE JOË BOUSQUET ET SON TEMPS

Maison des Mémoires – Maison Joë Bousquet

53 rue de Verdun -  vous pourrez admirer une exposition et participer à des animations :

 

Samedi 18 octobre 2014, à 15h

MAX ERNST

G. RIBEMONT-DESSAIGNES

LA BALLADE DU SOLDAT

1914-1918 : la guerre en images

34 lithographies de Max Ernst

accompagnées des essais

 

EXPOSITION

du 27 juin au 29 novembre 2014

Entrée libre

(du mardi au samedi, de 9h à 12h et de 14h à 18h)

Mise en œuvre par René PINIES

avec le concours de la Galerie CHAVE - Vence

 

 

Samedi 18 octobre 2014 à 15h

 

RENCONTRE

avec Pierre CHAVE,

Galeriste, lithographe, éditeur

« Histoire d’un livre : Max Ernst,

Georges Ribemont-Dessaignes »

Rencontre suivie d’une lecture de :

« La ballade du soldat »

de G. Ribemont-Dessaignes

par Yves UGHES, poète

Lecture de La Ballade du soldat

Yves Ughes est né à Nice, en 1951. Il y grandit dans un quartier de saveurs, au sein d’une famille d’origine italienne. Il découvre au Collège la force de la poésie, cette onde de choc le porte encore. Il suit des cours lumineux à la faculté des Lettres de Nice, notamment ceux de Michel Butor, et devient professeur de Lettres Modernes.

L’Education Nationale lui apprend alors à voyager : nominations au Havre, à Port de Bouc, à Castellane. Installation définitive à Grasse en 1986.

Yves Ughes pousse alors la porte de l’Association Podio, qui travaille pour la Défense et l’Illustration de la poésie, notamment dans les Alpes Maritimes.

Dès 1992, il y prend une part active, se fixant un rythme régulier de conférences. Les auteurs abordés témoignent d’un ancrage méditerranéen qui n’échappe pas pourtant à l’influence américaine. Pavese, ou la trace de la couleuvre. Montale, ou la souffrance des pierres. Reverdy, homme de main, homme de peine. Audiberti, ou le cri confus des catastrophes, Kerouac ou les rues de la lumière vide.

Il est désormais Président de cette association qui œuvre depuis trente ans avec, en exergue, cette interrogation d’Hölderlin : Pourquoi des poètes en ces temps de détresse ?

Ses ouvrages sont édités essentiellement par l’Amourier…

Galerie fondée en 1947 par Alphonse Chave qui, jusqu'à sa mort en 1975, mena une double activité de marchand de tableaux dans sa galerie et de marchand de jouets et de matériel pour les arts dans son bazar voisin.

En 1975, son fils Pierre Chave, qui est aussi lithographe et éditeur d'ouvrages à tirage limité (de Max Ernst, Fred Deux, Georges Bru, Kim En Joong...) lui a succédé.

Les expositions qui y sont organisées témoignent d'une recherche exigeante de créateurs connus ou moins connus, suivant un itinéraire cohérent et original en dehors de tous regroupements, tendances répertoriées et modes artistiques.

C'est un haut lieu de l'art insolite et de l'édition de livres illustrés.

Au cours de ces dernières années, on a pu voir sur les cimaises des trois étages de la galerie des œuvres de créateurs comme Henri Michaux, Jean Dubuffet, Max Ernst, Eugène Gabritschevsky, Man Ray, Georges Ribemont-Dessaignes, Dado, Fred Deux, Michel Graniou, Michel Roux, Pascal Verbena , Kim En Joong, Georgik...

La galerie participe régulièrement à des expositions dans des lieux institutionnels.

Elle est dirigée par Pierre et Madeleine Chave.

LA BALLADE DU SOLDAT

Max ERNST – G. RIBEMONT-DESSAIGNES

LA GUERRE DE 1914-1918 EN IMAGES

1914, la guerre ... Max Ernst est mobilisé pendant quatre ans sur le front allemand... «"Victorieux, nous allons battre la France, mourir en valeureux héros!" devions-nous chanter, la rage au cœur, pendant de longues marches nocturnes» ((Ecritures, Max Ernst, 1970)

Paul Eluard écrivait « En février 1916, le peintre surréaliste Max Ernst et moi, nous étions sur le front, à un km l'un de l'autre. L'artilleur allemand Max Ernst bombardait les tranchées où, fantassin français, je montais la garde. Trois ans après, nous étions les meilleurs amis du monde et nous luttons ensemble, depuis, avec acharnement, pour la même cause, celle de l'émancipation totale de l'homme ».

Dans ce même temps, Georges Ribemont-Dessaignes, ami de Picabia, Duchamp, Max Jacob était sur le front français. Il écrivit plus tard dans Ligne suivie par ma peinture  «… 1913, en cette dernière année je décidai de ne plus peindre, étant donné qu'il n'y avait pas de raison de peindre d'une manière plus que d'une autre... Ce n'est qu'en 1916, lorsque je fus mobilisé dans les bureaux de l'Ecole de Guerre que je fus repris tout à coup d'une activité intellectuelle : j'écrivis des poèmes, aujourd'hui perdus, puis une pièce de théâtre, l'Empereur de Chine. On sait que cette pièce s'incorpora tout naturellement à Dada, lorsque celui-ci fit son entrée à Paris...»

Car, en 1917, Dada voyait le jour à Zurich et se propageait à Cologne, Berlin, Munich et Paris où G. Ribemont-Dessaignes fut, avec Tzara, l'un de ses membres les plus actifs, tandis qu'en 1918, Max Ernst, démobilisé, vivait à Cologne où s'ouvrait une maison Dada et participait avec la même passion aux différents groupes qui se formaient dans l'effervescence de l'après-guerre.

Tout naturellement, Georges Ribemont-Dessaignes et Max Ernst, qui vint alors à Paris, se rencontrèrent à différentes reprises en particulier au Sans Pareil, où eut lieu la présentation de l'Empereur de Chine et la première exposition Max Ernst en France. Ils se lièrent d'amitié, se perdirent de vue… et se retrouvèrent en 1965 autour de l'exposition Hommage à GRD pour ses 80 ans à la Galerie Alphonse Chave, à Vence.

A cette occasion G. Ribemont-Dessaignes qui, pendant toute sa vie, avait su garder son sens du dérisoire, sa passion anticonformiste et sa volonté de dénoncer, avec violence, la bêtise qui conduit aux patriotismes ou nationalismes idiots et à la guerre, montra à Max Ernst un de ses écrits auquel il tenait particulièrement : La Ballade du soldat. Max Ernst fut enthousiasmé et décida de l'illustrer.

A partir de ce moment, entre Georges Ribemont-Dessaignes à Saint-Jeannet, Max Ernst à Seillans et Pierre Chave, lithographe à Vence, il y eut de nombreux échanges : une lithographie devait accompagner le texte, mais finalement Max Ernst se laissant emporter par la beauté caustique et la virulence de ce long poème réalisa trente-quatre lithographies originales.

C'est ainsi qu'est né l'album La Ballade du soldat, achevé d'imprimer en 1972.

Par ailleurs, les auteurs ont souhaité que deux versions l'une anglaise, l'autre allemande soient publiées afin de sensibiliser le plus grand public aux horreurs et à la bêtise de la guerre.

L'exposition montre cet album et sa suite de trente-quatre planches sur papier Japon, ainsi  que des épreuves d'essai, annotées par Max Ernst durant la réalisation de ce travail qui dura près de sept ans.

*

L’exposition du Centre Joë Bousquet et son Temps donne à voir 70 œuvres de Max Ernst, 20 dessins de G. Ribemont-Dessaignes.

Ces œuvres graphiques sont accompagnées de vingt trois vitrines qui présentent le cheminement poétique de G. Ribemont-Dessaignes et de Joë Bousquet, leurs liens avec l’œuvre de Max Ernst.

 

Joë  BOUSQUET :

 

… Je devais vivre entre quatre murs fasciné, regardé par les plus beaux tableaux du monde. Les plus magnifiques de ces tableaux sont l'œuvre de Max Ernst. Je ne connais pas de désespoir que la contemplation de ces peintures ne réussisse pas à dissiper. L'armistice à peine signé, Max était revenu à Paris, sans régulariser sa situation. Il y travaillait aux côtés de Paul Éluard qui n'était connu que par quelques plaquettes. Blessé depuis deux ans, je vivais au milieu de ma famille, moralement seul, sans guides, sans autre espoir que les chimères de guérison enfantées par l'instinct de conservation. Un jour, j'ai été profondément troublé par un poème d'Éluard : j'ai senti (1921 ou 1922) que cela tuait tout ce que l'on avait jusque-là appelé poésie. J'ai écrit à Éluard. Bientôt, j'ai vu en reproduction les premiers Max Ernst.

A peine le peintre sut-il dans quelle situation je me trouvais, il m'envoya une toile splendide, une forêt merveilleuse, entourée d'un cadre qu'il avait étoffé avec deux bandes de liège vierge. Saisi d'une émotion inconnue à la vue de la peinture, j'arrachai à pleines mains les manchons de liège, me blessai aux très longs clous qui les fixaient à la baguette et demeurai haletant devant cette image enfin nue comme un miroir sans fond, où la matière ligneuse se renouvelait comme un million d'oiseaux d'air dans une cascade. Devant un portrait de la matière, je n'avais pu supporter que la matière fût. Je venais de comprendre que ce peintre était le grand homme, le plus grand homme d'un monde où tous les individus me ressembleraient. Puis Max Ernst est venu me voir... Chaque fois que la durée de ma survie m'a paru intolérable, j'ai aussitôt pardonné à mon infortune, rien qu'à lever les yeux sur les tableaux dont mon ami m'avait entouré, avec lesquels il m'a élevé, préservé : j'ai pensé que le fait merveilleux du 27 mai 1918 ne prenait tout son sens devant la peinture, la poésie et devant les guerres qu'en me faisant, toute une longue vie, le témoin de l'œuvre de génie qui l'opposait au désespoir, à la douleur et aussi à la résignation, à la déchéance morale.

À contempler, dans l'avenir, les Max Ernst qui resteront réunis à Carcassonne, on apprendra que les arts, sous toutes leurs formes, sont les chemins, hostiles presque toujours, mais bon gré mal gré les chemins d'un Art majeur qui n'a pas de patrie, qui s'oppose aux patries. Le génie réconcilie toujours tous les aspects contradictoires de la nature humaine…

Extrait du manuscrit de Joë Bousquet dédié à la photographe Denise Bellon

 

Ce texte a été édité une première fois par les éditions Rougerie.

Le Centre Joë Bousquet a conçu une nouvelle édition réunissant photographies et textes sur l’intitulé :

« Au gîte du regard.  Denise Bellon – Joë Bousquet »

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Vient de paraître : Jaurès à Toulouse  lieux et mémoires 

de Francis Pornon dessins d'Amina Ighra (Ed. Loubatières)

 voir couverture

L’écrivain Francis Pornon, auteur de romans sur Toulouse, raconte l’action de Jean Jaurès dans la « ville rose » où « l’Apôtre de la paix », dont on commémore l’assassinat en 1814, avait été adjoint au maire. Le professeur de philosophie ne se contenta pas de donner à Toulouse des cours du soir pour les travailleurs ni de résoudre des conflits sociaux comme celui des traminots. Il construisit, développa et inaugura en outre nombre d’institutions publiques : écoles, facultés, Beaux-arts, etc. Il aida aussi des institutions comme le théâtre du Capitole et les Jeux Floraux, arguant que le peuple a besoin de culture comme d’éducation.

Ce beau livre : « JAURES A TOULOUSE, lieux et mémoire » (éditions Loubatières) avec des dessins d’Amina Ighra, a été réalisé sous le conseil historique de Rémy Pech (doyen honoraire de l’Université Jean-Jaurès), avec une préface de Georges Mailhos (secrétaire perpétuel de l’Académie des Jeux Floraux) et une postface de Jean-Michel Ducomte (président de la Ligue de l’Enseignement).

Ce livre donnera lieu à une émission le 9 octobre.

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Christian Saint-Paul reçoit ses invités : Moncef BENOUNICHE et Philippe SAMSON venus présenter le programme des Journées culturelles franco-algériennes de Toulouse, 2ème édition, du 7 au 23 octobre 2014. Ce programme figure en page d'accueil de notre site. Pour plus de détails voir : http://www.assolapres.fr/2emes-journees-culturelles-franco-algeriennes-de-toulouse-2/

Moncef BENOUNICHE représente l'association Les Ami-e-s d'Averroès, Philippe SAMSON l'association L'après, qui avec l'association Les Pieds Noirs Progressistes et leurs Amis, sont les trois associations instigatrices de ces journées. Averroès (1126-1198) était disciple d'Aristote; ce cordouan demeure l'un des esprits les plus brillants du Moyen Âge dont la pensée influença tout l'Occident. Ce savant en tous domaines (poésie, mathématiques, philosophie, théologie, droit) défendit la nécessité de l'interprétation du Coran, démontrant ainsi que révélation et raison philosophique n'étaient nullement en contradiction. Mais déjà, une telle pensée exposait au ban de l'orthodoxie régnante. Il dut quitter Cordoue et mourut en résidence surveillée à Marrakech. Dès le milieu du XIIIème siècle son œuvre fut traduite en latin.

L'association L'Après organise des débats culturels et a créé Le Récantou, une vente directe de produits agricoles avec la librairie Fleury. Elle bénéficie du soutien de la Ville de Toulouse et s'active sur les deux volets de la culture (intellectuelle et agricole).

Moncef BENOUNICHE lit un large extrait d'un texte de PENA-RUIZ, philosophe, auteur du "Dictionnaire amoureux de la laïcité" qui donnera une conférence dans le cadre de ces journées le 15 octobre. Le philosophe donne les fondements du véritable vivre ensemble.

Un poème de Jean SENAC figure emblématique de la poésie algérienne de langue française, et mis en musique par Gilles MECHIN accompagné par Alain BREHERET est diffusé.

Toutes ces animations se dérouleront dans des lieux toulousains : l'Espace des diversités et de la laïcité, les librairies Fleury et La Renaissance, BD Fugue, le cinéma UTOPIA et la Maison de quartier de Bagatelle.

Hommage avec lecture de textes par les comédiens Danièle CATALA et Liès KAOUAH,  sera rendu au dramaturge algérien Abdelkader ALLOULA qui fut abattu le 10 mars 1994 de trois balles dans la tête. Lecture par Moncef BENOUNICHE de "Vingt ans déjà" un texte du frère d'Alloula qui vivait à Oran.

Lecture par Saint-Paul de textes du poète algérien installé près de Toulouse Abdelmadjid KAOUAH.

 

Flamme Toulouse Femme

 

Flamme Toulouse

La cathédrale autour

Tournent les livres, les vies

C'est un grand manège

Qui conduit de Notre-Dame d'Afrique

Aux Jacobins.

De leur temps les temples

Servaient d'étables aux bêtes du Bon Dieu

 

Toulouse femme

Tournoyant au son

Des stridences du raï

Qui battait la mesure

Aux hanches langoureuses

De l'Odalisque

Dont je remonte les reins

Sans jamais connaître la satiété

 

Elle a la bouche de braise

Comme quand le disque du soleil

Plonge sa morsure dans la couche de la Garonne

 

Tout est feu

Couronnés d'incandescence

Sur Toulouse

 

Les mortels s'aiment

Sur les pelouses du Cours Dillon

Tandis qu'un tam-tam

Se fracasse le crane contre

Le parvis du Pont-Neuf

 

Femme nouvelle, bonne nouvelle

Brûlante comme l'ardoise rouge

De Toulouse

 

Contre laquelle je m'écorche les mains

D'amour

*

La figure de Mohamed BENCHICOU qui passa deux ans de sa vie en prison et qui a écrit "Le mensonge de Dieu" est citée lors de l'entretien radiophonique. Le héros marocain Abdelkrim KHATTABI qui infligea en 1921 sa première défaite à l'armée coloniale espagnole et créa l'éphémère république du Rif, confédérant les tribus, fera lui, l'objet d'une conférence le 13 octobre dans la Maison de quartier de Bagatelle par un poète historien Amar BELKHDJA. Le lendemain il participera à la Librairie Fleury à une table ronde où les poètes écrivains Michel BAGLIN, A. KAOUAH et Anne PLANTAGENET animeront un débat sur "Littérature et mémoire ; récits des deux rives". La librairie La Renaissance accueillera elle, le 16 octobre une conférence sur "l'Algérie 50 ans après l'indépendance", et la Librairie BD Fugue organisera une rencontre avec le dessinateur pionnier de la caricature algérienne SLIM, le 21 octobre.

La dictature de Bouteflika est considérée par Moncef BENOUNICHE comme une des pires qui soient, et la liberté de la presse n'obéit qu'à une volonté : les chiens aboient, la caravane passe.

Femmes et hommes écrivains, poètes algériens ont toujours témoigné par le langage, dernier rempart de l'intelligence, contre la violence, l'obscurantisme et la haine. Les événements de l'Histoire en route, démontrent que cette action ne peut et ne doit jamais cesser. Ces journées vont dans ce sens, de la vigilance et de l'affirmation, contre toute interdiction, même prônée de façon atroce, que la fraternité des peuples triomphe toujours.

Si l'exil fait naître souvent les plus belles pages et les plus belles œuvres, il n'en est pas moins une souffrance. Ecoutons la poète Georgette MECILI :

 

Alger la blanche

 

Alger la blanche disparaît à l'horizon

La mer d'un bleu profond

Me balance au gré du vent

Où est mon village et son minaret blanc.

Ombrageant mes chaudes journées d'été

Les orangers et leur parfum d'Orient ?

Le bateau ralentit sa course

Mon regard se fixe sur Marseille

Tout se mélange : murs blancs, murs gris

Ma gorge nouée retient un sanglot

Pourquoi ce départ, pourquoi cette vie

Que je n'ai pas choisie ?

 

 
 

 
 
 
 
 
 
 

Hagit GROSSMAN

 
 
 
 
25/09/2014

 

RETOUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Christian Saint-Paul signale la parution du dernier roman de Michel COSEM : "L'Aigle de la Frontière", 280 pages, 20 € aux éditions De Borée.

Jean Christophe mène une vie insouciante dans une station à la mode dans les Pyrénées. Il va de rencontres en rencontres, fait de la petite contrebande à travers la frontière, mais il n'est amoureux que de sa montagne, de sa liberté. L'époque de la désinvolture se termine pourtant lorsqu'il tire sur un douanier sur le point de l'arrêter et surtout, lorsque le pays plonge dans la guerre. D'abord les réfugiés espagnols, les délations. Puis l'arrivée des Allemands. Fini les fêtes, les touristes, les promenades au bord des lacs, les chars de fleurs... Sous l'impulsion de Gilbert, l'instituteur, il prend conscience de la gravité des événements et du rôle qu'il doit désormais tenir.

 

Michel COSEM, poète, romancier est aussi l'infatigable éditeur de la revue Encres Vives qui rythme la vie poétique depuis des décades. Il nous livre cette saison, trois numéros à ne pas manquer : le 432, Jean-Louis BERNARD "Dans l'inédit du gouffre" série "Arrêt sur image" qui fait le point sur l'œuvre d'un créateur en train de se réaliser; le 433, Werner LAMBERSY "Contumace", un recueil terriblement prenant par la force de la langue et qui constitue l'idéal d'un poème radiophonique, c'est à dire d'un ensemble fait pour l'oralité, et qui sera prochainement diffusé en entier si l'auteur et l'éditeur donnent leur accord; le 434 "L'illusion essentielle" d'Eric BARBIER, ce poète tarbais amoureux comme COSEM des Pyrénées et que nous retrouvons avec plaisir; ce dernier publie également aux éditions Encres Vives collection lieu : "Soleil noyé de fougères" et "Ebauches du vertige". Chaque recueil 6,10 €, abonnement pour 12 numéros : 34 €, à adresser à Encres Vives, 2, allées des Allobroges, 31770 Colomiers. L'émission "les poètes" reviendra sur ces publications à peine citées pour ne pas empiéter trop sur le temps de l'invité.

De la même manière, est évoquée la parution du dernier numéro de DIERESE, n° 63 320 pages, 15 €, Daniel Martinez , 8 avenue Hoche, 77330 Ozoir-laFerrière, abonnement 40 €.

Les auditeurs sont invités à assister à la 30ème quinzaine littéraire et artistique de l'Atelier Imaginaire qui aura lieu à Tarbes et Lourdes du 2 octobre au 8 novembre 2014. Guy ROUQUET poursuit, lui aussi, depuis trois décades, un travail impressionnant de rayonnement de la poésie et de l'art. Nous reviendrons sur ces animations étant précisé que le programme détaillé figure sur : http://www.atelier-imaginaire.com.

L'invité de la semaine est Michel ECKHARD-ELIAL, poète, essayiste, traducteur, éditeur qui vient parler non de son œuvre, mais de Hagit GROSSMAN, poète israélienne qu'il a traduit de l'hébreu en français.

Le directeur de la revue et des éditions LEVANT fondées à Tel-Aviv, s'explique sur sa démarche de rassembleur des voix des rives de la Méditerranée. Il fut un des premiers traducteurs des poètes contemporains israéliens comme Yehuda AMICHAÏ ou David AVIDAN et récemment Ronny SOMECK surnommé "le cow-boy de la poésie israélienne". Il dit quelle place prépondérante tient la poésie en Israël, qui se lit dans les journaux, et dans cette effervescence attisée par la complexité de cet Etat qui connaît régulièrement des situations de guerre, l'importance de la voix, celle de la jeune génération littéraire, de Hagit GROSSMAN. Son influence règne déjà sur la poésie en marche; elle incarne les valeurs de modernité littéraire, mais aussi les valeurs morales de cette génération toujours aussi attachée à cette patrie de providence, mais lucide sur les enjeux et les dangers de la confrontation de deux peuples aux désirs légitimes. C'est une poésie de la fraternité et de la paix que prône Hagit GROSSMAN. En 2013, elle était invitée au festival de Sète pour les Voix de la Méditerranée, puis à la Nuit de la Poésie en mars 2014. En 2015, elle participera certainement au Printemps des Poètes à la suite de la parution d'un livre de poèmes traduits en français par Michel ECKHARD-ELIAL.

Son œuvre qui connaît un retentissement indéniable en Israël, peut s'articuler autour de trois grands thèmes : 1) celui de la continuité sociale d'Israël (celle du vindicatif Ben GOURION ou du seul homme du gouvernement  que fut Golda MEIR) où l'ironie dissimule le malaise ; 2) celui de l'ars poetica propre à tout poète qui s'interroge sur le sens même de la poésie ; 3) celui de l'intime et de sa compréhension du monde, dans lequel elle se révèle un authentique poète de l'amour dans toutes ses déclinaisons, éros, agapè et charitas, atteignant ainsi d'emblée à l'universel.

Lecture par Michel ECKHARD-ELIAL de poèmes illustrant chacun de ces trois thèmes.

A ce jour, le seul livre traduit en français (toujours par Michel ECKHARD-ELIAL) et publié est : Neuf poèmes pour Shmouel aux éditions de la Margeride animées avec ferveur par Robert LOBET. Il s'agit d'un livre d'artiste réalisé à la perfection comme tous les ouvrages de cet éditeur.

Ce sont des élégies à la mémoire de son père, disparu alors qu'elle était encore  enfant. Lecture d'extraits.

 Laisse la lumière

 

Laisse la lumière dénuder l'ombre secrète sur tes bras émaciés

tes yeux bleus glacés par la grande clarté,

et moi assise hébétée  dans le noir le cou plié sous l'ombre voilée

bientôt tu ne seras plus le même

les pieds glissés dans le vêtement de la terre

dans un instant tu ne seras plus celui vers qui  le soleil se lève

te voir sombrer sous le poids de ta langue le muscle de tes poumons,

tu apprends à mourir, seul à seul avec la poussière posée sur les os

hors de la pénombre, tu revêts la lumière et te délestes du monde.

*

Métamorphose

 

La lumière de dieu brillait encore dans le temple

sur les yeux de mon père d'un éclat bleu de fleuve.

 

A l'aube son âme est devenue autre chose.

 

Le murmure du souffle à la sortie

résonne dans un temps éloigné de son corps

il est devenu parole

dans ma langue.

 

Orphelin il se présentait toujours

par son nom de famille,

Grossman

il n'était Shmouel

qu'en privé

rendant ainsi la liberté à son âme.

*

Dans ce voyage

 

Dans ce voyage j'ai cru de tout mon cœur que j'étais Jésus

réincarné ici dans la personne de ta fille.

J'y croyais et j'ai laissé croître l'hiver en moi

avec cent et une bougies, je suis juive, je respecte le shabbat.

Mais la douleur dans la poitrine me rappelle le voyage

à Rochester Minesota, où s'est échoué mon bateau

avant qu'on n'en retrouve les débris

tous les grands médecins rencontrés

dont les mains

furent vaines pour prolonger ta vie ,

la peine vient de tes actes dont je ne n'ai rien appris,

ce sera bientôt mon tour d'être allongée sur un lit

et je ne partirai plus à Rochester Minesota.

 

Pourquoi n'ai-je rien appris?

Je m'interroge, j'allume une cigarette

tes jours furent courts, pareils aux miens.

 

Sur la photo de ma chambre tu restes allongé sur la neige

et la fumée continue à s'évaporer

de ta main. 

*

Secret

 

1.

Mon père, tu es un secret,

je te cacherai aux yeux des autres

pour rien au monde je ne sortirai de cette eau

car je suis comme toi – je ne me sépare pas

du mouvement des ombres.

Au bord de la tombe bleue, ton secret s'est séparé du sable

il se répand laissant flotter tout ce que nous ne pourrons fuir

l'eau inonde la prunelle de ton absence.

Tu es comme moi, disais-tu

où suis-je?

Je me suis regardée, ce n'est pas moi

si nous nous rencontrons je tresserai la poésie de tes cheveux

je te ramènerai vers moi, tu ne pourras pas t'enfuir

tes yeux délavés par le sable profond.

 

Le mouvement des ombres de la mer de ta tombe bleue

ton regard, père,

dans la lumière ultime

m'élève. Haut.

Tu es comme moi,

où suis-je?

Je me suis regardée, non ce n'est pas moi.

Si nous nous rencontrons je tresserai la poésie de tes cheveux

sur ta poésie sombre j'étendrai une syllabe claire

et je t'emmènerai vers moi, tu ne pourras pas t'enfuir

les yeux délavés par le sable profond.

*

2.

 

J'étais un poème autour de ton cou

 un collier vivant de rimes toujours changeantes

tu n'étais plus près de moi, ni même  ton corps

perdu dans l'inconnu,

mais tu avais un poème pendu à ton cou

un collier vivant de rimes toujours changeantes.

 

Quand je te verrai je tresserai la poésie de tes cheveux

comme les jours rouges

où la vague emportait

nos pieds vers le haut,

tandis que  nos têtes plongeaient.

 

Tu es comme moi, disais-tu

où suis-je?

Je regardais celle que je ne suis plus,

quand je te verrai je tresserai la poésie de tes cheveux

tu courras vers moi par- dessus un tapis de nuages

le dos à moitié cassé à la surface d'un ciel obscur

les pieds allongés,  mon ventre éclairant

le soleil ardent sur mon ventre mutilé

à court de temps

pour la mesure  de son amour.

 

J'étais un poème autour de ton cou

jusqu'à la mer au bord de ta tombe bleue

tu m'as emmenée vers toi

je n'ai pas réussi à m'enfuir

même mes yeux trempaient dans le sable  profond.  

*

Avishag

 

Je déambule cette nuit avec un pull du siècle passé

qui va se réduire en poussière et Rochester Minnesota restera loin.

 

Même si tu avais été de l'autre côté de la route

désormais tu n'es  plus là, étendu sur un lit de rois et assisté

par la ventilation de ton âme, je ne pourrai plus écouter la voix du roi,

avec  ce pull acheté pour un dollar d'amour épuisé,

j'espérais accrocher l'armée du salut à mes épaules.

Mais tu avais froid, couchée près de toi, tu m'as demandé de descendre du lit

avant que l'infirmière ne voie un père et sa fille se réchauffer devant la mort.

.. ..

 

A présent la dernière chaleur connue avec toi

est pliée dans l'armoire, sur l'étagère du dessus,

entre les fibres de la laine la neige a fondu.

Entre les deux manches du pull de l'Armée du Salut

nous avons attendu le salut, mais il était plié dans une autre armoire.

*

Michel ECKHARD-ELIAL sensibilise les lecteurs sur le recours aux mythes bibliques dans la poésie de Hagit GROSSMAN. La dimension profondément humaine qui se dégage de l'utilisation d'images triviales, l'ancre dans la réalité présente et cette mixité de références assure le lecteur d'être en présence d'une poésie spirituelle intelligible.

Nous attendons avec impatience le prochain livre traduit en français.

 

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
18/09/2014

 

RETOUR

 

 

De retour d'Andalousie, Christian Saint-Paul exprime sa joie de se retrouver dans cet espace de liberté unique qu'est Radio Occitania. Pour s'insérer dans l'atmosphère poétique de l'émission qui perdure depuis 32 ans, il choisit de faire écouter deux poèmes d'Arthur RIMBAUD mis en musique par Laurent GUARDO et chantés par Daniel LAVOIE : "Ophélie" et "Bal des Pendus" (CD-Rom "La licorne captive" Daniel LAVOIE sur un projet musical de Laurent GUARDO, éditeur "Le Chant du Monde" 2014, diffuseur "harmonia mundi"). Puis, pour saluer le génie littéraire espagnol et méditerranéen, c'est la voix exceptionnelle de Yasmina LEVY, "Noches,noches buenas noches" qui est diffusée.

Il revient ensuite sur l'événement notable, non seulement bien sûr pour tout toulousain, mais pour tout citoyen, que constitue la parution du livre aux éditions PRIVAT "Dominique BAUDIS libre et intègre", biographie et témoignages, avant-propos de Jean-Luc MOUDENC, textes de Stéphane BAUMONT, Christian COLCOMBET et Michel DEMELIN", 320 pages, 19,50 €. Dominique BAUDIS par ailleurs écrivain authentique, laisse aussi une œuvre littéraire qui doit concerner les générations à venir en raison de son universalité, née précisément de la localisation essentielle du récit. Une émission sur le livre sur Dominique BAUDIS et également une émission sur son héritage littéraire, sont à programmer.

A juste titre, il a été reproché à cette émission de ne pas donner une légitime place à la poésie allemande. Nous nous efforcerons de corriger cette lacune, l'œuvre de Nelly SACHS par exemple, à côté de celle de Paul CELAN (roumain écrivant en allemand) a bouleversé la conscience mondiale. Un poète allemand depuis de nombreuses années familier aux poètes français et en particulier à ceux de Toulouse et qui nous rendit visite, Rüdiger FISCHER nous a quittés. Il avait traduit le livre de poèmes du poète toulousain Claude SAGUET "L'espace de la nuit" traduit également en espagnol par notre ami Eric FRAJ, dans une multi édition coordonnée par une association aujourd'hui disparue : "Le Passe-Mots". Lecture d'extraits du livre.

La solitude

chante haut dans la gorge,

et la mort ce grand vide

figé et insensible

où quelqu'un à la nuit,

danse la danse ancienne,

de celui qu'elle isole

et dont personne ne sait

que son chant tout entier

tremble et s'abandonne

au bruissement qu'accompagne

une vaine couleur.

*

Palpitante comme un feu

enveloppé de nuit

tu attends immobile,

à la haute fenêtre,

que la mer en secret

prenne appui sur ton chant

et que le soir,

cherchant son lieu,

agite des silences

en rond entre les cils.

*

Lecture ensuite d'extraits du livre de Michel HOST "Les Jardins d'Atalante", images de Danièle BLANCHELANDE, aux éditions Rhubarbe, 65 pages, 12 €. Ces douze poèmes des douze mois de l'année ont été conçus lors de promenades, révèle l'auteur, "dans un jardin cruel et délicieux , où Rousseau se fût sans doute déplu car on n'y herborise que rarement..."

SEPTEMBRE

Or Atalante demeure si me reste mémoire

de ses paroles pour moi en moi obscures proférées

 

Fenêtres de l'automne s'ouvrant sur un lac rouge

couteau

dans la poitrine du vent ou fuselage de chair vive

 

Oubli vite tu viendras brouillant nos images

contre mes tempes les feuilles ne retiennent leur

vie

dentelée qui les brûle à sa flamme

oubli demain sans doute il faudra régler nos

comptes

à moins que déjà tu n'aies réglé le mien mais

le présent là nous requiert habillé de vendanges

rosée transie où se prennent regards et pensées

 

Atalante ô flèche nocturne m'écoutes-tu

près d'un feu de broussailles ta course a-t-elle pris

fin

tes bras rompus harassés de lits tes jambes lasses

d'écarts

alourdies de caresses et de férocités

toi toute enfin es-tu donc finie

les miens les miennes depuis un siècle ou plus

encore

rivés aux roches friables poudreuses désormais

ne savent plus la morsure des ronces ni les doigts

nacrés

des amantes

et au séjour où je m'achève les deux poètes ne

m'ont pas visité  

Michel HOST auquel nous avons consacrée une émission toujours en ligne sur notre site, nous le suivons de très près.

Un des poètes chers de Radio Occitania et lu depuis plus de trente cinq ans par Saint-Paul est Marcel MIGOZZI dont la veine créatrice semble pour notre plus grande satisfaction inépuisable. Il vient de faire paraître à L'Amourier  "Des heures froides" 65 pages, 12 €. Des heures froides "impossibles à oublier malgré la vie qui continue, continue..." constate avec l'extrême lucidité qui caractérise sa posture poétique, ce poète dont nous espérons qu'il nous donnera longtemps à lire ces textes contenus au cordeau, ciselés à la loupe et précis comme la réalité. Une grande voix de cette génération qui a marqué le 20ème siècle et qui perdure sur le 21ème. Les auditeurs sont invités à se reporter aux émissions qui y font référence, étant précisé que nous aurons prochainement le plaisir de le retrouver à l'antenne.

C'est l'heure nue.

L'heure nulle que le corps n'illustre plus

De sa rougeur enfantine.

Le moment de fixer quelques vis dans le chêne

Le clair le bien capitonné

Pour le dernier huis clos. Avant

L'odeur de boue. Les souvenirs

Ne te font plus de concessions. Personne

Ne te reverra dans ta chair.

Passé perdu.

*

Sans aller jusqu'à tel âge

Qu'est-ce qu'on devient jusqu'à

Tout perdre

De sa vieille identité ?

 

Ca pue des restes de bonheur

Terrestre ou pas.

On a perdu

Même le désespoir des vieux.

 

Reste un énorme déchet gris entre les draps.

*

Le voisin de lit est un inconnu, pas une vision.

Il lance des jambes nues, les yeux

Au sommet de son délire.

 

On lui attache les bras comme à un adulte

Redevenu enfant.

L'alcool dans le sang en plus.

Allez allez plaisante l'aide-soignante avec

Dans la main la couche blanche

Et rose pour la nuit.

*

Quand d'autres à la lumière s'accotent et fument sous des arbres

On mange ici à l'heure des poules

Eau d'orange gélifiée petit pot.

 

Autrefois la bouche chantait entre les mâchoires

Le pouvoir d'engloutir des viandes sans penser

Au crâne là-haut.

 

Il ne reste désormais que la toux, le râle, le trou.

J'échangerais bien un panier de mes bons souvenirs pour entendre Et marche

Pour livrer ta dernière commode faite à la main amoureuse.

*

Lecture de l'après-lire de Jean-Claude VILAIN. "Baudelaire s'adressait à son lecteur comme à un "semblable", un "frère". MIGOZZI invite le sien à l'accompagner sans faiblesse devant l'horreur des fins privées, à soutenir, comme une leçon anticipatrice, ce violent, incontournable, et universel, face-à face. Dans sa graphie même le mot est d'évidence la mort qui dissimule son aire; mais sans les mots - fussent-ils comme ici "grabataires" - il ne resterait plus rien qu'un immense mutisme,

encore plus précocement ravageur. Rien donc à espérer. Et si la question de l'éternité encore se pose, seul l'amour pourrait la signifier : "Eternité, aimer sans elle / C'est se perdre sans se sauver". "

 

Pour mémoire, n'ayant plus de temps pour en parler comme il se doit, Saint-Paul signale la parution du dernier numéro de la revue DIERESE poésie et littérature n° 63, au sommaire d'une richesse étonnante comme toujours avec cette revue qui réserve elle, une bonne place à la poésie allemande, et met l'accent sur Luce GUILBAUD, Hubert LUCOT, Bai JUYI, Raphaële GEORGE;  323 pages pour 15 €, un vrai tour de force renouvelé à chaque parution. L'émission "les poètes" reviendra bien entendu sur ce numéro. Lecture du texte de Pierre DHAINAUT sur la mort de Rüdiger FISCHER. Abonnement à Diérèse : 40 € à adresser à Daniel Martinez, 8, avenue Hoche, 77330 Ozoir-la-Ferrière.

Enfin, Saint-Paul signale la parution de deux livres du poète provençal Andrièu RESPLANDIN : "Aquéli pichot rèn" Ces petits riens  édition L'Astrado et "Garbo" Gerbe éditions C.C.D.P. Faute de temps, ces livres seront développés dans une prochaine émission.

                     

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
14/08/2014

 

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Lecture de "L'unique saison" de Christian SAINT-PAUL, préface de Gaston PUEL par l'auteur. L'édition de 2003, deux tirages de 300 puis de 200 exemplaires, est épuisée.

"L’unique saison, la seule qui vaille, nous dit en substance Christian Saint-Paul, est celle des amours, quand « la sève honnête du désir » nous ramène à l’essentiel. Nous rend à la vie et, peut-être, à soi-même. C’est assez dire, en filigrane et à contrario, qu’on s’en éloigne dans la traversée ordinaire des jours, les tromperies de l’habitude, « parmi ceux qui s’arrogent / l’apparence des choses ».
Ces poèmes d’enthousiasme, qui rendent à Éros sa primauté à la source du chant (car ils rappellent que «  les élégies des oiseaux / sont chants de lutte / et défis de mâles »), sont donc aussi des poèmes de résistance : à l’atonie, à l’usure, aux apparences. Le corps, bien sûr, se dit ici dévêtu et « comme unique décor / comme unique loi », corps dans le plaisir, l’exaltation, le réduit des chambres et du face-à-face. Mais ce corps-là n’occulte pas le reste, ne fait pas écran, bien au contraire - « Nous ne nous détournons plus » écrit Saint-Paul qui note ailleurs que les corps repus, « par leur apaisement même » attisent notre lucidité.
Corps à vif donc, qui érotise, avive toute forme de relation à l’environnement et qui est sans doute l’autre nom de la passion. L’exaltante et douloureuse passion, qui fait souffrir de l’absence et du dépit (« pour prix de ton silence / te jeter comme un galet à la rivière / avec l’élan qui tend / la corde des pendus ! »), mais aussi renvoie le vivant à son vertige après l’amour, face à « la distance tragique du plaisir envolé ».
Éros n’est qu’aiguillon, exhortation à vivre et l’amour alors se joue parmi les autres, leurs gestes et leurs peines (le dernier poème renvoie à l’explosion d’AZF à Toulouse, aux fenêtres brisées d’Empalot), dans le chaos du monde.
« Demain les journaux apporteront / les nouvelles de la guerre. » "

Michel Baglin

 

 

 

 
 

 
 
 
 
 
 
 
 

Hélène CADOU et Jean-Luc POULIQUEN 

dans le Var devant le fort de Brégançon 

 
 
 
 
07/08/2014

 

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C'est Sergio Atzeni qui disait : "Et tu découvriras ce qui reste d'un homme après sa mort, dans les mémoires et les paroles d'autrui." Les éditions PRIVAT, fort de ce principe, viennent de publier avec une célérité et une excellence qui font honneur à ces éditions toulousaines qui perpétuent un passé prestigieux : "Dominique BAUDIS libre et intègre, biographie et témoignages, avant propos de Jean-Luc Moudenc, textes de Stéphane Baumont, Christian Colcombet, Michel Demelin", 320 pages, 19,50 €. Personnage mythique de Toulouse, Dominique BAUDIS était aussi un écrivain dont les livres puisaient dans le riche passé de "sa" ville. Nous reparlerons à la rentrée de ce livre, exceptionnel par la qualité des commentaires sur celui qui fut le maire qui présida le plus longtemps à la destinée de Toulouse. Nous parlerons aussi de son œuvre littéraire et historique qu'il nous a aussi généreusement laissée en héritage. Et cet homme a habité Toulouse en poète par cet attachement absolu à la ville et à son histoire. L'écriture lui a permis de réaliser cette vocation poétique à côté de son devoir de rationalité constante de premier magistrat de la ville.  

Ce sont toujours des éditions toulousaines, les éditions érès qui font paraître en version bilingue français / persan l'œuvre poétique complète à ce jour de l'écrivain iranien Abbas KIAROSTAMI  "des milliers d'arbres solitaires" avec des collages de Mehdi Moustahar, traduction de Tayebeh Hashemi et Jean-Restom Nasser, et par Niloufar Sadighi et Franck Merger, collection po&psy dirigée par Danièle FAUGERAS et Pascal JANOT, 840 pages, 20 €.

 dans le désert brûlant de ma solitude

ont poussé

des milliers d'arbres solitaires

C'est à travers de tels "réduits de parole" que le lecteur est invité ici à découvrir la matière discrète dont se nourrit l'œuvre du cinéaste - photographe - peintre- et poète iranien qu'est Abbas Kiarostami.

Une œuvre toute tendue vers le retrait et l’épure : soustraire pour mieux montrer, s’abstraire de la narration pour inventer des formes d’écriture qui entrent en résonance avec le monde visible.

Ne citant la poésie persane traditionnelle que pour mieux la détourner, Kiarostami crée une œuvre moderne et iconoclaste, qui a en commun avec le haïku l’image saisie au vol, l’instant fixé dans une fraction de seconde, comme sous l’objectif du photographe.

Lecture d'extraits. Une émission sera consacrée prochainement à cet auteur iranien.

 

la mer sombre

le rivage sombre

dois-je attendre le soleil

ou la lune ?

*

le clair de lune

fait fondre

la glace fine de l'antique rivière

*

la petite fille

se montre gentille

avec sa poupée

la mère... pas tellement

*

la réalité

nous laisse exsangues

la vérité

loin des yeux

*

Les tristes circonstances du conflit entre Israël et Gaza, incitent à relire le livre d'Esther BENBASSA "Être juif après Gaza", CNRS éditions, 80 pages, 4 €.

"Comment être juif après l'offensive israélienne contre Gaza ? Mais peut-on cesser d'être juif ? Juif, en tout état de cause, probablement le reste-t-on, si du moins être juif relève d'abord d'une posture fondatrice, celle du regard constant porté sur soi et sur autrui pour établir invariablement la balance entre soi et le monde. A ce juif-là, Gaza, de toute évidence, lance plus d'un défi".

Nous souhaitons à nos amis israéliens et palestiniens qu'ils vivent bientôt dans la paix et la fraternité.

 

Le 21 juin 2014 disparaissait Hélène CADOU, l'Hélène du Règne Végétal de René-Guy CADOU. Nous la savions malade, mais sa mort au début de l'été, comme un mauvais présage de cet été à venir, nous a profondément attristés. Avec elle, c'est un repère de plus qui manque dans le paysage de la poésie d'aujourd'hui. Elle avait toujours répondu présente aux sollicitations continuelles de Christian Saint-Paul. Une correspondance depuis 1965, une aide constante et inconditionnelle pour les publications qu'elle exposait à la Maison de la Culture d'Orléans. Merveilleux souvenir que celui de son sourire radieux aux yeux bleus de myosotis, quand elle nous présenta à Louisfert en 1993 La Demeure de René-Guy CADOU dans cette petite école de village qu'elle avait reconstituée à l'identique de ce jour de 1951 où s'éteignit René-Guy CADOU dans ses bras, et avec la présence de son ami Jean ROUSSELOT. Moment inoubliable pour Christian Saint-Paul quand elle le fit asseoir à la table de travail de René-Guy. Une vie exemplaire dans la fidélité vivifiante de l'homme qu'elle aimait et dont elle avait très tôt deviné le génie. Elle aimait rappeler que le poète préféré de François Mitterrand était, et oui, disait-elle, René-Guy CADOU. Il le lui avait dit à plusieurs reprises.

Il est heureux que Bruno Doucey ait réédité deux recueils d'Hélène CADOU.

On ne peut bien sûr s'empêcher de songer à quelques vers de René-Guy qui aurait tant souhaité avoir un enfant avec Hélène  :

Mon fils ! Laisse-moi t'appeler ainsi

Encore que tu ne sois pas né

Soumis aux lois tardives des gelées.

*

Je pense à toi qui me liras dans une petite chambre de province

Avec des stores tenues par des épingles à linge

*

Je pense à toi Gilles né en dix neuf cent soixante quinze

Dans une famille très vieille France de province

*

Mais il aura cette vision qui hélas sera la bonne :

 

Seigneur me voici peut-être à la veille de te rencontrer

Il fera nuit ! je serai là debout à la barrière du pré

Tu sais comme dans ce tableau de Gauguin....

*

 

Hélène après le choc de la mort prématurée de René-Guy à 31 ans, va vivre dans la permanence de sa présence. Ce ne fut pas une vie de lamentation, elle n'a jamais prononcé une plainte, mais une vie ouverte sur le monde de la poésie, sur sa propre création qui lui permettait de rejoindre au plus près René-Guy. Seghers bien entendu la publie, puis Jacques Brémond et elle construit une œuvre à part entière, qui n'est pas simplement comme elle le croyait au début "un reflet très pâle mais fidèle" comme elle l'écrivait en 1965 à Saint-Paul.

 

Pour la biographie résumée d'Hélène CADOU, voici ce qu'écrit Michel BAGLIN sur son excellent site : revue-texture.com:

Hélène Cadou :

Hélène Laurent naît à Mesquer, en Loire-Atlantique, en 1922. Après des études de philosophie, elle rencontre le poète René Guy Cadou dont le recueil « Les Brancardiers de l’aube », publié en 1937 par Jean  Digot , l’a profondément bouleversée. Elle l’épouse en 1946 et vit avec lui des années de grand bonheur à Louisfert. 
A la mort de René Guy en 1951, elle se consacre à son tour à l’écriture poétique, publie ses premiers recueils aux éditions Seghers, devient bibliothécaire à Orléans, en 1951 (adjointe de Georges Bataille jusqu’à sa mort). Très investie dans la vie culturelle, elle a été Présidente de la préfiguration de la Maison de la Culture d’Orléans, puis de celle-ci, de 67 à 75. 
Après les premiers recueils de 56 et 58, elle n’a commencé à publier qu’en 1977 ("Les Pèlerins chercheurs de trèfle", "L’Innominée") puis en 81, et de manière continue depuis. 
En retraite depuis 1987, elle est revenue à Nantes pour créer le "Centre René Guy Cadou" et à Louisfert pour créer la Demeure du poète, en 1993. 
Celle qui inspira à René Guy Cadou quelques-uns des plus beaux poèmes d’amour de la littérature française est aussi une grande voix de la poésie.

 

Bibliographie 

Trois poèmes, P.A. Benoît, 1949 
Le bonheur du jour, Seghers, 1956 
Cantate des nuits intérieures, Seghers, 1958 
Les pèlerins chercheurs de trèfle, Rougerie, 1977 
En ce visage, l’avenir, J. Brémond, 1977 (réed. 1984) 
Miroirs sans mémoire, Rougerie, 1979 
Le jour donne le signal, Le Pavé, 1981 
Une ville pour le vent qui passe, Rougerie, 1981 
Longues pluies d’Occident, Rougerie, 1983 
L’Innominée, J. Brémond, 1983 
Poèmes du temps retrouvé, Rougerie, 1985
Demeures, Rougerie, 1989 
Mise à jour, Librairie Bleue, 1989 
L’instant du givre, R. Bonargent, Châteauroux, 1993 
Retour à l’été, Maison de Poésie / Éditions Serpenoise / Presses Universitaires de Nancy, 1993 
La mémoire de l’eau,Rougerie, 1993 
Le pays blanc d’Hélène Cadou, avec des photographies de Christian Renaut, Jean-Marie Pierre, 1996 
Le livre perdu, Rougerie, 1997 
C’était hier et c’est demain, Préface de Philippe Delerm, Éditions du Rocher, 2000 
De la poussière et de la grâce, Rougerie, 2000 
Si nous allions vers les plages, Rougerie, 2003 
Une vie entière : René Guy Cadou, la mort, la poésie, Éditions du Rocher, 2003 
Le Prince des lisières, Rougerie, 2007 
Le Bonheur du jour, suivi de Cantate des nuits intérieures, réédition de ses premiers recueils, préface de Jean Rouaud. Éditions Bruno Doucey, 2012 

 

Lecture d'extraits de "Cantate des Nuits Intérieures" (Seghers éditeur, repris par Bruno Doucey) et de "En ce visage l'avenir" Jacques Brémond éditeur.

Une nouvelle émission sera consacrée à Hélène CADOU.

 

 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
31/07/2014

 

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"J'aime que la poésie soit rétive aux approches superficielles, aux jugements éphémères orchestrés çà et là. J'aime qu'elle exige du lecteur qu'il fasse lui-même un bout de chemin et, de préférence, le silence autour de lui, peut-être en lui. J'aime que, de l'éthique du poète à la pratique du lecteur, certaines correspondances s'établissent... La poésie parle pour tous, même pour ceux qui ne la lisent pas." Cette phrase de François MITTERRAND résume, avec ce talent littéraire inégalé parmi ceux de son rang, la finalité de l'émission "les poètes" qui s'adresse à tous, même à ceux qui ne lisent pas la poésie.

Ce sont trois voix d'une originalité totale, qui se côtoient et se répondent du fait de la seule volonté de les réunir pour rendre compte précisément des correspondances que nous pouvons avoir avec eux, et qui tissent, chacun à leur manière, la grande fresque du monde dans lequel nous tentons d'évoluer. Et si ces regards deviennent les nôtres, alors nous aurons progressé dans notre vision du monde. Pour cela, il faut que ces poètes soient lus par le plus grand nombre; il importe donc de contribuer à leur célébrité car "la célébrité est la reconnaissance qu'un homme est de quelque façon, d'une certaine valeur pour l'humanité" selon PESSOA.

1 ) James Sacré poète français, né le 17 mai 1939 à Cougou, village de Saint-Hilaire-des-Loges (Vendée).

Biographie et poétique selon Wikipédia :

James Sacré passe son enfance dans la ferme de ses parents en Vendée. Il est d'abord instituteur puis instituteur itinérant agricole, il part, en 1965, vivre aux États-Unis où il poursuit des études de lettres. Il y enseigne à l'université de Smith College dans le Massachusetts. Il fait également de nombreux séjours en France et ailleurs en Europe : l’Italie, la Tunisie, le Maroc. En 2001, il rentre en France et réside depuis à Montpellier. James Sacré commence à écrire dans les années 1970, en plein littéralisme. Son premier livre s'intitule néanmoins Cœur élégie rouge. Les sentiments ne seront donc pas absents de cette écriture. L’auteur a par ailleurs consacré sa thèse de doctorat au Sang dans la poésie maniériste. C’est donc d’emblée une poésie charnelle qui s’écrit, associant étroitement le cœur qui aime et celui qui bat, le cœur qui saigne et celui qui nous fait vivre de sa régulière pulsation. James Sacré est très attaché au paysage, et à la géographie. De nombreux textes sont consacrés au terroir de l’enfance. Les motifs centraux en sont la maison, la ferme, le jardin et le village. La mémoire joue un rôle important : tout un travail de remémoration est à l’œuvre afin de rendre le passé aussi vivant que le présent et de les fondre l’un dans l’autre. La poésie de James Sacré n'est pas pour autant égocentrée, elle s’ouvre à l’autre, l’appelle et l’accueille. Les voyages sont l'occasion de repenser l'identité, l'altérité et la relation amicale ou amoureuse. La passion de l'auteur pour le Maghreb, donnant lieu à de nombreux voyages, donne aussi naissance à de nombreux livres. La poésie est alors animée par un désir d'ouverture et de chaleur, de coprésence heureuse avec l'autre. Elle cherche une manière heureuse d'être ensemble, qui laisse s'écouler le temps avec douceur. L'un de ses poèmes favoris est celui où il parle d'un mariage au Maghreb dans "Viens, dit quelqu'un".

Publications

La femme et le violoncelle, J.C. Valin éditeur, 1966

La transparence du pronom elle, Chambelland, 1970

Cœur élégie rouge, Seuil, 1972

Comme un poème encore, Atelier de l'agneau, 1975

Paysage au fusil (cœur) une fontaine, Gallimard, Cahier de poésie 2 (collectif), 1976

Un brabant double avec des voiles, Nane Stern, 1977

Figures qui bougent un peu, Gallimard, 1978

L'amour mine de rien, Encre/Recherches, 1980

Quelque chose de mal raconté, André Dimanche, 1981

Des pronoms mal transparents, Le dé bleu, 1982

Rougigogne, Obsidiane, 1983

Ancrits, Thierry Bouchard, 1983

Écrire pour t’aimer, André Dimanche, 1984

Bocaux, bonbonnes, carafes et bouteilles (comme), photographies de Bernard Abadie, Le Castor astral et Le Noroît, 1986

La petite herbe des mots, Le dé bleu, 1986

La solitude au restaurant, Tarabuste, 1987

Une fin d'après-midi à Marrakech, André Dimanche, 1988 - (prix Guillaume-Apollinaire 1988)

Un oiseau dessiné, sans titre. Et des mots, Tarabuste, 1988

Le taureau, la rose, un poème, dessins de Denise Guilbert, Cadex, 1990

Je ne prévois jamais ce que je fais quand je dessine, dessins de Jillali Echarradi, Les petits classiques du grand pirate, 1990

Comme en disant c'est rien, c'est rien, Tarabuste, 1991

On regarde un âne, Tarabuste, 1992

Écritures courtes, éditions Le Dé bleu, 1992

La poésie, comment dire?, André Dimanche, 1993

Des animaux plus ou moins familiers?, André Dimanche, 1993

Le renard est un mot qui ruse, Tarabuste, 1994

Ma guenille, Obsidiane, 1995

Viens, dit quelqu'un, André Dimanche, 1996

Essais de courts poèmes, dessins de François Mezzapelle, Cahiers de l’Atelier, 1996

La nuit vient dans les Yeux, dessins de Jillali Echarradi, Tarabuste, 1997

La peinture du poème s’en va, Tarabuste, 1998

Anacoluptères, illustrations de Pierre-Yves Gervais, Tarabuste, 1998

Relation, essai de deuxième ancrit (1962-63 ; 1996), Océanes, 1999

Labrego coma (cinco veces), photographies d’Emilio Arauxo, Noitarenga, 1999

Si peu de terre, tout, éditions Le Dé bleu, 2000

L’Amérique un peu, Trait-d’union, 2000

Écrire à côté, Éditions Tarabuste, 2000

Une petite fille silencieuse, André Dimanche, 2001

Monsieur l’évêque avec ou sans mitre, illustrations de Edwin Apps, éditions Le dé bleu, 2002

Mouvementé de mots et de couleurs, photographies de Lorand Gaspar, éd. Le temps qu’il fait, 2003

Les mots longtemps, qu’est-ce que le poème attend ?, Tarabuste, 2004

Sans doute qu'un titre est dans le poème, Wigwam éditions, 2004

Trois anciens poèmes mis ensemble pour lui redire je t’aime, Cadex, 2006

Broussailles de prose et de vers(où se trouve pris le mot paysage), éd. Obsidiane, 2006

Âneries pour mal braire, éd.Tarabuste, 2006

Un paradis de poussières, André Dimanche, 2007

Le poème n’y a vu que des mots, L'Idée Bleue, 2007

Bernard Pagès : élancées de fêtes, mais tenant au socle du monde, Éditions La Pionnière/Pérégrines, 2009

Portrait du père en travers du temps, lithographies couleur de Djamel Meskache, éditions La Dragonne, 2009

Paroles du corps à travers ton pays, poème de quatre pages accompagné de deux gravures sur bois de Jacky Essirard, éd. Atelier de Villemorge, 2009

Le désir échappe à mon poème, Al Manar, Collection Méditerranées, 2009

Tissus mis par terre et dans le vent, Le Castor Astral, 2010

America solitudes, André Dimanche, 2011

Le paysage est sans légende, Éditions Al Manar / Alain Gorius, avec des dessins de Guy Calamusa, 2012

Parler avec le poème, Editions la Baconnière, 2013

Ne sont-elles qu’images muettes et regards qu’on ne comprend pas ?, lavis de Colette Deblé, Æncrages & Co, 2014

Lire aussi : « James Sacré », numéro spécial de la revue Triages, éditée par Tarabuste (Rue du Fort, 36170, St Benoit du Sault), 264 pages. Actes du colloque de l'Université de Pau, mai 2001. Textes réunis par Christine Van Rogger Andreucci, bibliographie établie par Daniel Lançon, illustrations de Mohammed Kacimi.

« James Sacré », numéro 10 de la revue Amastra-N-Gallar dirigée par Emilio Arauxo à Lalin, Pontevedra, Gallicie, Espagne, automne 2005. Comprend les contributions de Béatrice Bonhomme, Jacky Bouillon, Antoine Emaz, Celso Fernandez Sanmartin, Laurent Fourcault, Lorand Gaspar, Slaheddine Haddad, Jacques Josse, Paol Keineg, Régis Lefort, Béatrice Machet, Serge Martin, Jean-Claude Pinson, Claude Royet-Journoud, Christian Tarting.

Ce sont des extraits du recueil "Ecrire à Côté" que choisit de lire Christian Saint-Paul.

Sur le site de Régine DETAMBEL : http://www.detambel.com nous trouvons cette note de lecture d'Alain Jean-André:

 

Ecrire à côté, James Sacré, éditions Tarabuste, 13,72 €

 

De livre en livre, James Sacré reprend, avec sa phrase savamment hésitante, le même monologue envoûtant et plein de charme. Et le lecteur retrouve un ton, une petite musique qui lui parle toujours de « quelque chose de mal raconté »;. Dans Ecrire à côté, on passe d'un bistrot de Bruxelles à des petits « restau » d'Aix-en-Provence, Paris, Las Vegas, Phoenix, etc., des lieux presque vides qui lui permettent de toucher « avec sa rêverie l'épaisseur du feuillage ».
Prime d'emblée un certain mal être « sans doute que justement je suis mal accompagné / avec ma solitude et l'espèce de lassitude qui me vient... ». Mais rien de triste dans ce constat : il le fait avec douceur, simplicité, sans un mot plus haut que l'autre. Et, quand il marche dans les rues d'Aix, ou d'autres villes, il laisse poindre des bribes d'un passé peut-être douloureux (« Je pense à comment j'ai mal connu mon père, j'aurais voulu / être avec lui dans la parole et le jeu de la vie / et moins dans la colère ») voire nostalgique (« la cuisine bonne femme d'antan / ramène des souvenirs d'avoir mangé à la campagne avec ses parents »)
Dans la poésie d'aujourd'hui, James Sacré rappelle un musicien qui entonne des mélodies prenantes avec des variations sans fin : il écrit des phrases bancales, plus ou moins inachevées, floues, transformant la grammaire usuelle en une grammaire poétique, la sienne. Il donne aussi, dans une partie du livre, différents états d'un texte rédigé à partir de planches peintes par Arezki Aoun, qui n'ont rien de brouillons, mais

 signent une démarche contemporaine.
Aussi, on se demande s'il faut entièrement croire des remarques comme celle-ci : « Mon poème perdu quelque peu je sais pas / je sais pas trop ce que je voudrais dire à propos d'Aix-en-Provence et du mélange de ses habitants ». Car il a su suggérer, avec des touches délicates, une réalité méditerranéenne complexe qu'il a directement perçu. Surtout, il a déployé avec une grande virtuosité une écriture dans laquelle « le rien et la vérité se lient ».

 

2 ) Michael Edwards : Né en 1938 en Angleterre. Professeur au Collège de France, sur une chaire de poétique. Son œuvre de poète s’accompagne d’une réflexion sur la création littéraire, artistique et musicale, sur la philosophie et sur la théologie, développée dans une trentaine d’ouvrages, pour la plupart en français. Dernières parutions : Le Rire de Molière(Éditions de Fallois, 2012), De l’émerveillement(Fayard, 2008, primé par l’Académie des sciences morales et politiques), Shakespeare : le poète au théâtre (Fayard, 2009),L’Étrangèreté (CD, Gallimard, 2010), Le Bonheur d’être ici (Fayard, 2011). Présence dans Anthologie bilingue de la poésie anglaise(Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade). Un choix de ses poèmes en anglais existe en édition bilingue : À la racine du feu (Caractères, 2009). Poésie en français : Rivage mobile (Arfuyen, 2003), Ce que dit la lumière (Arts Graphiques d’Aquitaine, 2010), Trilogie(piécette, TNP/Cheyne, 2010).

Lecture d'extraits du livre : "Paris aubaine", éditions de Corlevour, revue NUNC, 168 pages, 18 €.

Paris est l’occasion d’une centaine de poèmes aux sujets très divers, unifiés par le souci constant de sonder le monde alentour dans le temps qui passe, selon la conviction, vécue et non pas théorique, que la plénitude de vie se trouve dans un ici ouvert à tout moment à son possible. Dans le plus infime événement un autre monde paraît. Les poèmes s’efforcent de recréer le visible en approfondissant toutes les formes de l’invisible, en mettant en œuvre l’intuition inquiète d’une grande vérité, d’une dynamique ternaire dans la condition humaine : création-chute-recréation, vie-mort-nouvelle naissance, bonheur-malheur-joie. Les poèmes cherchent surtout à être nouveaux, sans cesse inventifs, en sujets, formes, pensées, images. Ils essaient de bénéficier, selon le génie de la poésie française, de certaines ressources de la poésie anglaise : une pluralité de perspectives et de tons, le sérieux paraissant sous le léger, sous l’apparemment simple, le comique – l’humour – prenant tout en charge. L’anglais intervient même dans quelques poèmes, avec sa lecture autre du monde.

 

 3 ) Tarjei Vesaas  "Être dans ce qui s'en va" Rafael de Surtis, Editinter, 17 €.

Sur l'excellent site qu'il anime à Toulouse :  http://www.espritsnomades.com , le poète Gil PRESSNITZER nous livre ce commentaire :

Dérive sur l'eau, la neige, la glace

 

Nullement écrivain régionaliste ou nationaliste norvégien, Vesaas fait plus penser à Jacobsen qu'à un autre écrivain norvégien Knut Hamsun, qu'il surpasse de toute la hauteur de sa poésie-prophétie, ouverte au monde. La nature chez lui n'est pas une image convenue du Grand Nord, elle craque de pleine de menaces mais aussi d'apaisement.

 Son art de faire surgir la mort violente, comme dans la vie, au milieu des éclats fascinants du monde, en font l'un des plus grands écrivains du XXe siècle.

La paisible chronique paysanne que nous croyons lire est devenue littérature de l'abîme.

 

Cette grande pitié du monde s'exprime par des phrases souples et chantantes, mais toujours inconsolées. Vesaas ne s'enfonce pas dans le silence ou l'orgueil, il laisse sourdre une solidarité avec tous, sans rejet des faibles.

 Avancer dans un livre de Vesaas est s'avancer dans une forêt de symboles. Et pourtant pour cela il n'emploie que les outils de l'élémentaire. Il dérive ainsi sur l'eau, la neige, la glace, les oiseaux, les arbres, le lac.

 Tant de choses peuvent se produire dans un pays profané, dit Vesaas, et il nous parle autant des nuages, des cercles des vivants, que de la nuit qui tombe, de ceux qui mourront dans cette nuit, mais surtout de ceux qui n'ont pas succombé pendant la nuit et qui verront la toute petite courbe du soleil, même s'ils n'ont et n'auront jamais de nom.

 Ce que je voulais, c'est raconter le jeu caché et secret qui se passe aux heures de la nuit, un jeu dont personne ne doit être témoin.

 Tarjei Vesaas est hanté par la condition humaine et la mort en marche. Il s'approche à pas de loup du sacré de l'amour, cet amour qui unit les deux petites filles, Siss et Unn, du Palais de Glace contre la mort.

 Depuis leur rencontre à l'école, à l'étrange fuite et la mort de Unn, la très longue absence dure comme l'hiver, à la recherche du Palais de Glace et à sa découverte, le dépérissement empathique de Siss. Et enfin la débâcle du printemps et la réapparition de Unn aussi morte que vivante dans les glaces. Puis Siss vivra sachant qu'elle ne trahira jamais l'amitié morte, sauvant en elle les images de Unn. Au Palais de Glace de la mort figée s'oppose le Palais du Souvenir de l'amour fidèle. Les deux sont plus loin que le réel.

 Tarjei Vesaas est comme les chevaux de ses romans, il passe mais il sait, et il vit son rêve, dans la musique du vent avec les nuages sur les épaules. Visionnaire et écoutant, a-t-on dit de Vesaas, plus que cela, il y a du magicien dans ce grand silencieux. Il sait rendre le moindre frisson de la lumière, le moindre pas sur la neige. La nature, ou plutôt la Nature, n'est pas la source de réponses, mais il faut sans cesse l'interroger, lutter parfois contre elle et sa rudesse, s'y dissoudre enfin. Vesaas est à vivre avec recueillement indique son traducteur Régis Boyer, dans sa lumineuse introduction au Palais des Glaces. Ce qui est emblématique chez Vesaas est ce mouvement perpétuel entre le réel le plus prégnant et le rêve le plus envolé.

 Et comme des oiseaux noirs il passe dans son œuvre des angoisses, des peurs paniques. Il sème des menaces à l'orée des mots. Une grande violence tapie peut soudain éclater comme dans une musique de Sibelius. Cette violence semble provenir du fond de la terre en fusion. Il est comme un humble paysan saisi par l'effroi de l'invisible, de ce qui ose apparaître à la tombée de la raison. Le mal rôde, la nature est partout présente mais elle demeure et nous passons.

Dans le non-dit passe l'essentiel. Et parfois le mystère d'un cri soudain nous transperce. De toute façon nous avons été amenés au-delà de ce qui est dit.

Rien ne crie, rien ne dit beaucoup, ce sont des voix qui parlent, des voix qui disent nous ou je, ce sont la voix du chien, la voix de la forêt, la voix des ponts. Les ponts.

Entre bruissement de l'enfance et craquement de la glace Vesaas tisse le fragile et le différent. Un chant de pureté monte de ses livres. On doit s'avancer vers lui avec la même prudence que sur un lac gelé, et bien tendre l'oreille au moindre froissement de bruit.

 Palais de Glace, château de poésie, Vesaas nous réapprend l'absolu dans la plume, l'herbe, l'arbre qui brûle, la goutte d'eau qui se jette, et dans tous ces cours simples, ces menaces aux aguets. L'abîme est en nous, seule la neige de l'amour colmate ses fêlures. La mort n'est plus alors que l'ordre naturel, une tension finale. La cascade figée de la solitude laisse entrevoir une présence. L'eau noire du lac se referme toujours et le simple d'esprit Mattis continue à écrire à son oiseau en écriture d'oiseau.

 La frontière entre la vie et la mort est abolie, Vesaas écrit toujours au-delà des apparences. À nous de cheminer parmi ses allégories, ses obscurs couloirs, ses flambées de nature. Vesaas est grand, le Palais de Glace vous emprisonnera comme il retient encore Unn, la petite fille figée dans l'au-delà.

 

Il neige, il neige sur des ponts silencieux, Des ponts que les autres ignorent

 

À nous, désaccordés du monde, exilés de la vie, Vesaas nous fait signe. Il se tient souriant à l'orée du givre et nous dit d'entendre les avertissements muets de la Nature. Il parle depuis la nuit des temps, la nuit des temps, jusqu'à l'extinction de nos cœurs de terres intérieures. Le mystère des choses est avancé. Un passage est ouvert par ses livres.

 

Toi et nous en total silence (Vesaas)

 

Lecture d'extraits du livre par Christian Saint-Paul. 

 

 

 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
Paul
 
 ARRIGHI
 
 
 
 
24/07/2014

 

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Christian Saint-Paul invite les auditeurs à lire le dernier ouvrage d'Hervé TERRAL professeur de sociologie à l'Université Jean-Jaurès à Toulouse : "L'Occitanie en 48 mots" aux éditions IEO, 220 pages, 14 €.

Ces 48 mots sont comme autant d'entrées dans la pensée et les enjeux de la langue et de la culture occitanes. Ceci pour mieux se comprendre et se connaître.

Et pour ceux qui veulent pratiquer l'Occitan, le livre de Joan-Claudi SERRAS "TOT en UN" Lexic Occitan / Français; Français / Occitan aux éditions IEO, 800 pages, 19 €. Avec ses 70 000 entrées ce lexique du temps présent est facile à utiliser pour aller de l'occitan (languedocien) au français ou du français à l'occitan.

 

Saint-Paul évoque de nouveau le livre de Marcel MIGOZZI "De bogue et de roc / Di riccia è rocca, L'amour l'amort / Amor amorti " avant poème de Jean-François Agostini, traduction en langue corse de Stefanu Cesari. Une poésie métaphysique qui renoue avec le couple infernal de l'amour et de la mort, avec subtilité et ironie, toujours dans une réussite de la langue. Et cette force passe d'une langue à l'autre, du français au corse avec le même bonheur. Lecture d'extraits en français et en corse par l'invité de l'émission.

On dit l'amour l'amort les deux

Dans le même miroir

 

L'une sans avenir l'autre

Enfermé dans un mot

 

Mais passons sur les deux

Corps

Le même

Mort et amoureux

*

Si dicini amor amorti i dui

In u stessu spechju

 

Una senza avvena l'altra

Chjusa 'n una parola

 

Ma passemu nant'à i dui

Corpu

U stessu

Mort'ed amurosu

*

 

Christian Saint-Paul reçoit ensuite son invité : Paul DAUBIN alias Paul ARRIGHI qui a fait paraître :

"Fulgurances des Êtres, des Lieux Et des Mots"

Textes et Poésies.

Le livret est en vente sur Amazon et Priceminister,10 €. 

Envoi possible également depuis le domicile de l'auteur

 à contacter par courriel à l'adresse :

 paul20.arrighi@numericable.fr

 (prix : 10€ + 2,50 € de participation aux frais d'envoi) 

en précisant l'adresse d'envoi.

 

Ce recueil évoque les thèmes suivants, nous dit l'auteur :

"Souvenirs d’Enfance situés avant 1962 en Kabylie à Akbou où mes parents enseignaient, puis à Luchon où se situe la maison maternelle et où tant de souvenirs de jeux avec mon frère Régis sont encore présents à mon esprit. Sur les Chemins de

Toulouse correspond l’éloge de ma chère ville définie par René-Victor Pilhes comme

« subtile, épicurienne et tolérante » largement ouverte aux influences Méditerranéennes. Sur les Chemins de Toulouse correspond l’éloge de ma chère ville définie par René-Victor Pilhes comme « subtile, épicurienne et tolérante » largement ouverte aux influences Méditerranéennes.

J’y dépeins le Toulouse des quartiers de ma jeunesse, le faubourg Bonnefoy, Croix-Daurade, l’atmosphère enflammée du lycée Raymond Naves puis les différents quartiers de Toulouse où j’ai résidé après mon retour dans cette belle ville en 1992. La Corse, l’île enchanteresse correspond aux lieux et aux arbres souvent emblématiques de cette île si « souvent conquise jamais soumise » qui sait si bien aimanter ses amoureux et ses fidèles et leur rend leur attachement au centuple. Les poésies de Révolte et de Feu décrivent mes passions parfois mes indignations. Aujourd’hui que j’ai atteint 60 ans, prétendument l’âge de la sagesse, j’ai gardé vivant cette faculté de m’indigner et de me révolter avec mes mots car comme l’a écrit Gabriel Celaya «« La poésie est une arme chargée de futur ». Renouveau des saisons et petits bonheurs regroupe des poèmes sur les saisons, quelques lieux que j’ai découverts et aimés et pour finir, évoque nos compagnons les chiens qui sont une source de confiance et de réconfort."

 

Paul Arrighi est né à Bougie, désormais Bejaia, en Kabylie, d’un père Corse, professeur d’anglais, et d’une mère Pyrénéenne, institutrice, le 26 février 1954. Ses premières années se sont passées sous l'état de guerre. De cette enfance vécue à Akbou reste profondément enfouie les senteurs d'olives de l'épicier mozabite, les senteurs de viande d'agneau sur l'étal du marché et ce goût à la fois acide et sucré des nèfles. «Rapatrié» en 1962 dans les Pyrénées, Paul a toujours gardé une nostalgie pour les paysages méditerranéens et éprouve encore la sensation d’avoir quitté une terre ocre de soleil. Il a ensuite vécu sa jeunesse à Toulouse à l’école Bonnefoy et au lycée Raymond Naves mêlant alors dans un creuset culturel réussi, les enfants de «pieds noirs », les fils de réfugiés espagnols et les jeunes des faubourgs toulousains. Mai 1968 a éclaté alors qu’il avait 14 ans et l’a éveillé plus tôt à la vie de la cité. Paul Arrighi a ultérieurement fait des études d’histoire terminées par une maîtrise et bien plus tard, par une thèse de doctorat soutenu le 12 mars 2005 sur le juriste antifasciste, Italien et Européen, Silvio Trentin, figure de l’antifascisme et de la Résistance et libraire à Toulouse. Silvio Trentin était de ces êtres rares qui savent relier la pensée et l'action. La montée du fascisme en Italie, puis la guerre, vont servir de cadre à son engagement politique. Universitaire, juriste, homme politique, combattant, Européen, il fut tout cela à la fois. Son opposition à l'oppression le conduit à quitter l'Italie pour la Gascogne en 1926, puis Toulouse ou il ouvre une librairie. Celle-ci, 46 rue du Languedoc, devient vite un foyer ouvert aux idées progressistes. Son soutien aux républicains espagnols l'amène à se rendre à plusieurs occasions à Barcelone. La deuxième guerre mondiale survient et son engagement devient résistance. Il soutient, organise, théorise la Résistance; son organisation - Libérer et Fédérer - sera un mouvement original de reconquête de la liberté dans le Sud de la France. Mais la lutte a lieu aussi en Italie et Silvio Trentin ne peut pas ne pas y participer. Il retourne dans son pays, il combat, il est fait prisonnier. Il meurt en détention en 1944. Dans cette dense biographie - écrite à partir de sa thèse soutenue en 2005-, Paul Arrighi rend hommage à ce grand Européen dont l'action et la pensée continuent aujourd'hui encore à servir d'exemple. Son livre, chez l'éditeur toulousain Loubatières est magnifiquement préfacé par Rémy PECH, Professeur des Universités et historien notoirement connu entre autre pour ses livres sur Jaurès, figure qui a aussi marqué la vie toulousaine.

Paul Arrighi aime beaucoup la Corse ou il a tant de fois séjourné depuis son enfance dans le village paternel. Ses goûts et les valeurs essentielles qu’il s’efforce de promouvoir sont : la liberté, la curiosité d’esprit, l’ouverture aux autres. L’écriture de la poésie est en quelque sorte devenue pour lui une sauvegarde et un talisman dans l’attente hypothétique d’un monde plus tolérant ainsi que de l’émergence d’un indispensable nouveau rapport avec la nature.

 

A lire cette « Fulgurance des Lieux et de Mots », le lecteur comprend tout de suite qu’il est invité à partager le regard que projette l’auteur sur sa propre vie et sur les lieux qui ont imprégné cette vie.

Et que pouvait connaître mieux Paul Arrighi, sinon son vécu ?

Pas d’autres matériaux, car l’Histoire qu’il intègre aux tableaux subjectifs de ses jours et des lieux où ils défilent, est ressentie, non comme un fait extérieur, objectif, mais comme une expérience qui a forgé son devenir.

Car l’authentique Historien qu’est Paul Arrighi (son livre sur Silvio Trentin est la référence en la matière) prend fait et cause avec ostentation pour les personnages qu’il a élus. En réalité, l’auteur ne se départit jamais de sa forme efficace de militantisme, celle d’un parti pris sans ambiguïté, suivi d’une célébration des héros de l’Histoire. Ce sont ces figures de l’Histoire, souvent d’ailleurs contemporaines, dont ils s’emparent, qui façonnent la personnalité intime du poète.

Et en célébrant Silvio Trentin, Mikis Théodorakis, John Lennon, Coluche et Léopardi, il nous dévoile son monde comme si de rien n’était. Mais son monde devient le monde. Il ne saurait le chanter autrement. A travers ces figures mythiques ou l’épopée de la Retirada, il nous livre l’essentiel. Pour Paul Arrighi, il n’existe pas d’autre réalité que celle de sa conscience humaine, celle avec laquelle, inlassablement, il a fabriqué son monde qu’il nous invite à contempler.

Et en le suivant dans sa pérégrination qui rend compte déjà d’une longue vie, ce n’est pas seulement une bonne conscience qu’il nous offre, mais plutôt l’exercice d’une amitié sans ruse pour le lecteur.

 

Le poète qui poursuit une finalité aussi généreuse ne s’embarrasse pas de fioritures ni de recherches coûte que coûte d’un style nouveau. Il écrit comme il est. Spontané, d’une sensibilité à fleur de peau, protecteur du plus faible, avec la fierté paradoxale de l’humilité.

Ce qu’il a à dire est toujours un témoignage, celui de sa subjectivité créatrice. Aucun obscurantisme dissolu dans les mots qu’il emploie. La simplicité. Celle de sa joie de vivre, du parti pris d’une vie bon enfant. Celle d’un bonheur simple qui l’a accompagné toute son enfance et sa jeunesse. Celle d’une douceur de vivre, d’une tendresse enveloppante qui ferait de lui un homme égaré, si elle lui était retirée. Il écrit donc avec sa tendresse familière, celle qui fait dire : « Quand il fait printemps », « les plus jolies filles se promenaient en groupe, /c’est une raison bien suffisante pour nous y retrouver », « l’espoir (…) c’est de ne pas faire perdre sa dignité à son adversaire », « ceux qi aiment l’eau très fraîche / Peuvent nager avec les truites », « depuis tant de siècles nous cultivons l’olive, / que des fleuves d’huile pourraient sortir des jarres ».

Né en Kabylie, Paul Arrighi a conservé « une nostalgie inguérissable pour les paysages méditerranéens ».

Ces paysages, il a la chance de pouvoir les admirer en Corse, patrie d’origine de son père poète. Et la vénération qu’il voue à son père finit par se fondre dans l’amour de cette terre corse qu’il retrouve toujours avec volupté et où les arbres emblématiques de la Méditerranée, les oliviers, « veillent désormais sur la quiétude des geais, des renards et des bandits ».

De son origine corse, le poète éprouve « le sentiment tragique de la vie » qui terrassait Miguel de Unamuno, mais sa forte imprégnation toulousaine tempère l’absolu de ce sentiment.

Car la ville, insidieusement, a laissé des marques définitives. Nul n’échappe à l’emprise d’une jeunesse vécue dans les quartiers de Bonnefoy ou Croix-Daurade. Et l’historien est comblé de toutes les épopées que connut la cité depuis l’antiquité. Et fasciné par le Gai Saber qu’il ne conçoit que comme devant se prolonger éternellement. L’amour courtois est toujours de mise et le regard bienveillant qu’il jette toujours aux dames, en est une de ses manifestations.

Cette enfance heureuse qu’il connut en Kabylie et à Toulouse, fit aussi escale dans la maison familiale de Luchon, au cœur des Pyrénées. Encore un lieu d’enchantement pour cette âme ravie, baignant  dans la chaleur familiale de sa grand-mère, de son frère et de ses parents. Ce bonheur, imprimé au fer rouge dans sa mémoire, l’aidera à reconnaître la beauté différente des lieux de passage. Et son cœur demeure joyeux, voire facétieux : « Au bord du Canal Saint-Martin / paraître sérieux semble vain ».

Mais toute chose a une fin. La belle maison construite sous l’Empire à Luchon, est vouée à la démolition. Que peut-il rester d’une vie ? Qu’elle ait eu un sens : « Si je mourais demain, / Donner sens à ma vie, / C’est là, un vrai dessein ».

Et lui qui affirme : « Que jamais les violents n’ont créé le demain », dans un poème dédié à six poètes disparus qui ont chanté la liberté parfois jusqu’à en mourir, met en garde, comme dans un dernier sursaut, contre « la violence (…) qui rend esclave des idées ».

 Pour chercher le sens à toute vie, c’est « l’amitié » qui doit être « la boussole ».

Ainsi, l’idée rimbaldienne de « changer la vie », pour Paul Arrighi se réalise par la douce affection, à la fois à nos semblables, les hommes, et aussi au monde, dont ils ont hérité et qu’ils créent inlassablement à leur image.

Lecture de poèmes extraits du recueil par l'auteur et lecture de "La Retirada" par Christian Saint-Paul.

Avec la publication de ses poèmes, Paul DAUBIN alias Paul ARRIGHI nous livre sa vision intime des choses de sa vie quotidienne et du monde. Souhaitons que ce fou d'histoire nous permettra bientôt, avec l'équipe qui s'est formée autour de ce projet, de connaître la vie et l'œuvre d'un autre personnage qui a façonné la culture et la vie toulousaine : le docteur Camille SOULA. Nous attendons cette publication avec grande impatience.

 

 

 
 
17/07/2014

 

Manijeh

 NOURI

 

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En préambule, Christian Saint-Paul invite les auditeurs à se rendre le samedi 19 juillet 2014 à 21 h à Saint-Félix Lauragais au Chai du Domaine du Ravan, au récital du Trio Vicente PRADAL (chant), Paloma PRADAL (chant flamenco) et Rafael PRADAL (piano), autour des grands auteurs espagnols et du chant flamenco. Le génie musical des PRADAL fait rayonner avec un exceptionnel bonheur la poésie espagnole et le flamenco. Toulouse s'honore de cet héritage culturel qui se perpétue depuis trois générations.

Diffusion d'un poème de NERUDA mis en musique et chanté par Vicente PRADAL.

 

La revue ENCRES VIVES nous livre trois numéros pour l'été (chaque volume, 6,10 €, abonnement 12 n° 34 €, à adresser 2, allée des Allobroges 31770 Colomiers) ; les n° 429 et 430 constituent une anthologie des auteurs des EDITIONS DE L'ATLANTIQUE qui étaient dirigées par Samuel POTIER et Silvaine ARABO et qui ont tant œuvré pour la diffusion de la poésie contemporaine. Michel COSEM qui poursuit une démarche généreuse depuis 1960, a tenu à rendre hommage au travail éditorial de ces éditions et accueille dans deux numéros une anthologie rassemblant tous les auteurs publiés de 2008 à 2013. Nous y retrouvons bien sûr des poètes familiers mais également des poètes à découvrir. Il en résulte que ces deux numéros se révèlent un document précieux sur un aspect de l'état de la poésie aujourd'hui. Une riche lecture que ce rassemblement de poètes !

Le numéro 431 d'Encres Vives reprend un recueil de Pierre COLIN : "Grèce Obscure" avec des photographies de Maïté COLIN. Nous avions déjà évoqué ce recueil et lu des extraits dans les dernières semaines, à la suite de la disparition de Pierre COLIN. Que Michel COSEM le diffuse maintenant dans le circuit des abonnés est une excellente initiative. Voici ce qu'il écrit sur sa démarche:

 " Combien est cruel d’apprendre brusquement la mort d’un ami, d’un compagnon alors que l’on a l’intention de lui écrire. Cela vient de se passer avec Pierre Colin. Il nous a quittés un jour de mai, lui qui avait mené tant d’actions d’avant-garde pour que la poésie ne soit pas oubliée dans le monde de la jeunesse et qui accordait tant d’importance à l’écriture poétique qui était son principal outil de communication avec le monde. Il avait beaucoup à dire encore et à faire.

Je ne puis m’empêcher de repenser à toutes les actions que nous avons menées ensemble. Les images reviennent sans que je les sollicite : nous voilà dans la cour d’un lycée d’Avignon réalisant avec Michel Ducom les premiers ateliers d’écriture en France lors du Festival., nous revoilà dans ses cafés littéraires qu’il organisait avec son groupe à Tarbes, mais aussi lors des rencontres poétiques de Quimperlé et je ne parle pas des réunions de travail à Toulouse ou l’adorable petit port breton de Pors Poulhan qu’il aimait.

Au-delà du militantisme il y avait chez Pierre Colin (et toutes les publications d’Encres Vives en témoignent) un souci de la langue exacte et forte productrice d’imaginaire, un alliage original de la réalité et du mythe sans aucune concession ni lieu commun.

Voici plutôt qu’un hommage traditionnel une nouvelle lecture de ces poèmes écrits en Grèce où il est retourné avec Maïté si souvent et qui prouvent combien son regard sur le monde était profond, heureux, fraternel et volontiers donné en partage."

Pierre Colin a publié dans la collection « Encres Vives » (le catalogue général des éditions est accessible en page d'accueil du site les-poetes.fr) :J’ai dit mon nom, folie dans les syllabes/Les mots n’ont pas de langue/ Se désagrègent, se décousent nos manteaux de disants/Tout retourne au bercail des langues/Soleil de l’apocalypse. Dans la collection Lieu : Grèce obscure/Lettre de Mitylène. Il fut un temps membre du comité de la revue.

Lecture d'extraits du recueil.

Elle allonge une jambe qui aussitôt

prend feu. L'œil jette ses crécelles

de becs. La lèvre se dilate,

fleurit, épine, ergot, combat.

 

Bras qui roulent, la mer au poing.

Le chignon fleurit nuit et jour.

Guerre aux fronts, vieux démons !

 

Elle éclaire sa voix d'un petit bout

d'écume. D'île en île, la hanche obscure,

la cuisse en friche, va et vient.

 

C'est la cheville, l'oriflamme,

la nef. Femme.

 

Ciel grec,

Juillet 95

 

Jean-Pierre CRESPEL un auteur également publié par Encres Vives, a fait paraître aux éditions Tensing, (www.editions-tensing.fr) 108 pages, 9 €, Illustration – Penny Parker : "La Nuit Multitude" poèmes. Saint-Paul salue cette initiative car il s'agit en grande partie de la reprise de recueils publiés initialement dans des livres d'artiste à tirage limité. L'ensemble, d'une grande cohérence, rend compte de la personnalité lyrique pleinement assumée d'une écriture "enchanteresse" comme aurait dit le surréaliste Jean-Pierre LASSALLE.

"Le loup silencieux du solstice d’hiver, traverse le temps jusqu’à moi, pénétrant les murs maîtres, les cloisons, la silhouette inquiétante des meubles dans la pénombre, à certaines heures de la nuit.

Parcourt sans fin les collines érodées, traverse rivières et marécages, basses terres de tourbières enneigées, forêts boréales, prairies, montagnes rocheuses, grands lacs et grandes plaines.

Je perçois son halètement, son souffle retenu."

Jean-Pierre Crespel a fait ses études supérieures à Paris X-Nanterre et Paris I-Panthéon Sorbonne- Ecole Pratique des Hautes Etudes- 4ème section.

Il est titulaire des diplômes de l’enseignement supérieur de philosophie et d’esthétique - Histoire de l’Art, Trecento et Renaissance Italienne.

Il a commencé à écrire et publier dès l’âge de 16 ans, notamment dans la revue Encres vives, Dire, Impact 10 et Verticales 12 et dans un grand nombre d’anthologies française, suisse, roumaine et israélienne.

Lecture d'extraits.

Se souvenir de l'oubli

1

Ce que j'ai oublié

tressaille en récits invisibles

dans la prudence des braises assagies

 

L'île d'enfance sommeille si loin

dans un lieu si étrange

où les visages frôlent d'autres ombres

 

et ce qui a été perdu

réapparaît malgré nous

 

Un empan de jour plaintif

s'insinue dans l'embrasure

et s'installe aux fenêtres

 

Souveraine

l'étrangeté de l'instant

étreint les mains

 

Gardiennes des solitudes

Les falaises dessinent leurs promontoires

calcaires et se penchent vers la mer

 

L'émission est ensuite consacrée à l'invitée, Manijeh NOURI.

 

Manijeh Nouri, d'origine iranienne, est enseignante de langue et de littérature persanes. Elle a traduit des œuvres de poésie mystique persane, notamment celles de Rûmi. Familière de l'émission "les poètes", où elle vient régulièrement présenter les évènements auxquels elle participe, quand elle n'en est pas l'instigatrice, son inlassable travail de traduction a été récemment récompensée par un prix international qui lui a été remis à Téhéran. Chercheuse en lettres persanes, elle est spécialiste reconnue de la littérature mystique. Polyglotte, elle intervient au sein des congrès et colloques universitaires en Europe et en Orient. On lui doit entre autres  "Coeur et Beauté ou Le Livre des Amoureux" de Fattâhi de Nishâpur, aux éditions Dervy, et "La Conférence des Oiseaux" de Attâr aux éditions du Seuil.

 D'un dynamisme inébranlable, cette militante intellectuelle pour la paix est en communion d'esprit avec les poètes occitans et s'est investie dans la défense de cette culture humaniste.

Ainsi, elle a créé une association culturelle, partenaire de la Convergence Occitane: "Ariana / regards persans" qui du 11 au 14 mai 2014, a invité Cheikha Nour, actuelle Grand Maître de l’ordre des soufis Mevlevi (Derviches) en Turquie et grande personnalité du monde soufi international.

Deux conférences ont présenté  la philosophie de Rumi sous deux thèmes différents:

- « Rumi, l’Amour et l’Humain »le 12 mai

- « Rumi et l’Europe » le 13 mai

Il importe à Manijeh NOURI de faire connaître au mieux l'universalité du message poétique de ce maître mondial de la poésie mystique.

Elle revient en conséquence sur un des thèmes traités à Toulouse, RUMI et l'amour avec sa publication chez Dervy, un livre magnifique accompagné d'un CD-Rom : "Le sens de l'amour chez Rûmi" (256 pages, 38 €).

 Ce livre de poésie mystique écrit en persan, traduit en français, nous fait découvrir la haute littérature soufi persane. Voyage de beauté, de paix et de joie. Ce magnifique livre bilingue est illustré d'enluminures anciennes et accompagné d'un CD de poèmes lus en persan et en français.

 

Qui est RÛMI ?

Grand poète, philosophe et Maître Soufi Djalâl ud-Dîn Rumi, originaire de Khorassan en Perse, est né en 1207 à Balkh et mort en Turquie, à Konya en 1273.

Sa pensée a profondément influencé le soufisme.

La musique, la danse et le chant font partie intégrante de sa pratique spirituelle.

Il est le fondateur de l’Ordre des Soufis Mevlevi (Derviches) en Turquie.

Les poèmes lyriques et amoureux

Ce genre poétique, contemporain de la poésie de cour, naquit également au IXe siècle au Khorassan, là où le persan dari était devenu langue officielle et littéraire. Le ghazal, qui devient le nom spécifique pour ce genre poétique aux XIe-XIIe siècles, est récité ou chanté et souvent accompagné d'instrument de musique. Les poètes s'attachent toujours à la concision, soignent l'impression de douceur et la beauté des mots et s'essayent à obtenir le sens le plus subtil. C'est pour pouvoir exprimer au mieux les sentiments et les passions de l'amour, les états de l'amoureux que le ghazal est chanté.

Plus tard, les poètes soufis, tel Sanâ'i, ‘Attâr et Jalâl ud-din Rumi utilisèrent le genre du ghazal pour chanter leur extase mystique et exalter ainsi leur passion envers Dieu. Jalâl ud-din Rumi et Saadi eurent une influence considérable sur la poésie persane et après eux la distinction entre le ghazal amoureux et le ghazal mystique s'effaça.

L'immense recueil de poème de Jalâl ud-din Rûmi « Mowlânâ », intitulé Divan Shams est le meilleur exemple de ce genre poétique en persan. Voici un fragment d'un ghazal extrait du Divan Shams :

Mourez, mourez en cet Amour,
Lorsque vous mourrez, vous tous recevrez l'Esprit,
Mourez, mourez et n'ayez pas peur de cette mort
Car vous vous élèverez de cette terre et vous rejoindrez le ciel.
Mourez, mourez et coupez cette âme concupiscente car cette âme concupiscente est
Comme une chaîne, dont vous êtes le prisonnier.
Prenez une pioche dans la fosse de votre prison,
Soyez à l'affût dans la fosse de votre prison,
Lorsque vous serez arrivés à casser votre prison,
Vous serez tous des rois et des émirs.
Mourez, mourez et sortez de ce nuage,
Quand vous serez sortis de ce nuage,
La lune pleine, tous vous serez.

(Ghazal 1636)

Manijeh lit dans les deux langues, persan et français des poèmes de Rûmi.

Elle souligne qu'il faut entendre la sonorité du persan, très attaché à la forme métrique, qui en fait une musique scandée. Elle précise qu'il existe dans la poésie persane 38 formes de métriques différentes. Le rythme est fondamental dans la poésie. Le poème privilégie les rimes intérieures.

RÛMI est l'incarnation d'une civilisation lettrée qui dit  l'amour, la danse, l'écoute, l'alchimie.  L'alchimie elle-même se différencie selon trois formes : la forme du laboratoire, la forme du livre et la forme de l'être humain. C'est cette dernière alchimie qui est l'essentielle; c'est l'abandon de l'ego. Ce n'est plus la raison raisonnante qui domine. L'amour est un autre royaume qui est en nous. Du reste, le persan dispose de 64 mots pour "amour". "Sheq", l'amour universel est le plus utilisé.

C'est cet amour qui envahit notre cœur qui parvient à étouffer notre ego et fait de nous, un être en harmonie avec le cosmos.

Lecture de poèmes par Manijeh NOURI et également diffusion de musique classique persane avec Mohammad REZA SHADJARIAN, et audition d'un extrait des "Douze séquences du Reng-e- Shahr Ashub par MUSAVI.

Toujours passionnée et passionnante, Manijeh NOURI nous entraîne dans un monde voisin du Paradis, celui de l'Amour et de la Paix ! 

 

 
 
10/07/2014

 

Jean-Pierre DENIS

 

 

 

 

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Christian Saint-Paul reçoit son invité : Jean-Pierre DENIS venu présenter son deuxième recueil de poésie "Manger parole" aux éditions Ad Solem et exposer sa démarche créative dans laquelle la poésie est fondamentale, pour ne pas dire vitale.

L'auteur raconte l'histoire de sa famille et sa propre histoire qui en découle.

Wikipedia le résume ainsi :

"Jean-Pierre Denis est un journaliste, écrivain et poète français et catholique. Toulousain d'origine, (il raconte dans "Nos enfants de la guerre" que sa mère et sa tante, juives, ont été protégées et sauvées dans un couvent de l'Aveyron par Marguerite Roques et Denise Bergon, avec l'appui de Monseigneur Saliège), il fait ses études au Lycée Saint-Sernin, y est primé pour un journal lycéen (La Loupe), et est reçu à Science Po. Il devient journaliste, et après un passage en Asie, après Europe 1 et Le Monde des Religions, il devient directeur de la rédaction de l’hebdomadaire chrétien La Vie. Il participe comme chroniqueur ou comme invité à de nombreuses émissions de radio ou de télévision.

Ouvrages

·         Nos enfants de la guerreÉditions du Seuil, 2002

·         Dans l’éblouissant oubli, ,Ad Solem, 2010

·         Pourquoi le christianisme fait scandale, éloge d’une contre cultureÉditions du Seuil, 2010

·         Manger parole, Ad Solem, 2012

Notes et références

1.    Pierre Dharréville, « Pierre Dharréville a lu Jean-Pierre Denis Des mots de justes [archive] », L'Humanité, 17 juin 2002

2.    Denis Slagmulder, « Elle a tendu la main aux Juifs [archive] », La Dépêche du Midi, 4 mars 2012

3.    Dans l’éblouissant oubli… Ce titre, d’une merveilleuse sonorité [archive]

4.    Monique Petillon, « "Dans l'éblouissant oubli" de Jean-Pierre Denis [archive] », Le Monde, 12 août 2010

5.    Jean-Pierre Denis, éloge d’une contre-culture : le christianisme [archive]

6.    Dominique Greiner, « Les défis et les chances d'un christianisme minoritaire [archive] », La Croix, 26 septembre 2010

7.    Stéphanie Le Bars, « "Pourquoi le christianisme fait scandale", de Jean-Pierre Denis : chrétiens, parlez haut ! [archive] », Le Monde, 9 septembre 2010

8.    Catherine Coroller, « L’église au seuil de la reconversion [archive] », Libération, 13 novembre 2010

9.    François-Xavier Maigre, « Exaltation. Manger Parole de Jean-Pierre Denis [archive] », La Croix, 29 novembre 2012

10.  Émilie Eyzat, « Anaphores et enjambements [archive] », Le Point, 23 août 2012

·         Blog de Jean-Pierre Denis

·         « Le jeu est aujourd'hui extrêmement ouvert»Le Parisien, 12 février 2013, interview de Jean-Pierre Denis à propos de la démission de Benoît XVI.

·         "La chasteté est révolutionnaire"L'Express, 13 septembre 2010, interview de Jean-Pierre Denis.

·         Subversive, l'Eglise?L'Express, 13 septembre 2010, interview de Jean-Pierre Denis."

Dans l'entretien Jean-Pierre DENIS accorde une large place à ses origines à la fois catholique par son père et juive par sa mère. Il insiste sur le rôle joué par Monseigneur SALIEGE évêque de Toulouse sous l'occupation de la ville en 1942. Le texte qu'il fit lire dans toutes les églises de son diocèse est un texte universel. Il vise toute oppression et toute ségrégation. L'homme d'Eglise avait su constituer un réseau de sauvegarde qui a permis de sauver de la déportation un grand nombre d'enfants juifs. Madame ROQUES du couvent de l'Aveyron a été reconnue "Juste parmi les Nations". C'est elle qui avait répondu quand Jean-Pierre DENIS l'interrogeait sur son implication courageuse pendant la guerre : "Nous avons eu beaucoup d'enfants et nos enfants sont nos enfants de la guerre". C'est elle, en réalité qui a donné le titre du roman "Nos enfants de la guerre".

Revenant sur l'action du cardinal SALIEGE, Jean-Pierre DENIS fait valoir que la parole qu'il a donné à écouter est une parole qui a nourri les fidèles, et au delà la population et plus tard l'humanité. Cette parole a incité beaucoup de gens à faire de petits gestes qui ont permis de sauver beaucoup de gens. Une parole qui ne nourrit pas n'est pas une parole. De la même manière une poésie qui ne nourrit pas n'est pas une poésie. Déjà dans Ezéchiel, il y a cette image de la parole qui nourrit, cette image de manger la parole.

Ce poète est un homme d'expériences. C'est un journaliste heureux qui aime son métier. Il a vécu au Japon, s'est intéressé aux religions dans leur diversité. De cette riche vie qui continue, il a compris que l'on peut ouvrir des portes qu'on ne croyait pouvoir ouvrir. Son intérêt pour l'univers et la personne humaine est toujours aussi fort. Comme journaliste, il fait l'apologie de la radio. C'est une bonne passeuse de parole. La télévision se fixe toujours sur l'image qui finit par l'emporter sur la parole.

Si l'écriture poétique et celle de l'essai peut sembler dans une apparente continuité d'un travail sur les mots, il s'agit en fait de domaines très éloignés. Car la poésie est d'un autre ordre. Par exemple, même s'il est sain d'avoir des doutes sur ses propres idées, quand on connaît la vertigineuse évolution des savoirs et des idées, on prend des coups pour défendre ses idées. Mais la poésie, elle, ne défend rien. Elle est désarmée et inutile. En plus, il n'y a pas d'intérêt économique en poésie. Ce qui n'empêche nullement qu'il faut impérativement lui donner sa place. Mais pourquoi en a - t- on peur ? Dans une librairie toulousaine, il a fait remarquer que dans le rayon poésie, il existait une différence considérable avec les autres rayons : tous les auteurs présentés étaient des auteurs morts. Le bon poète est le poète mort. Ce n'est pas le cas partout; en Espagne les poètes vivants sont exposés dans les rayons des librairies et ils sont lus. La France ne réserve qu'une place marginale à la poésie. Ce qui ne l'empêche pas d'exister et de haut vol.

Le bruit médiatique n'est pas la parole, c'est son double trompeur. Et rien n'est plus beau que le silence entre deux personnes qui s'aiment.

Jean-Pierre DENIS a beaucoup étudié les rituels. "Manger parole" fait bien sûr référence au rituel de l'eucharistie. Il se situe dans le prolongement du Prologue de l'Evangile de Jean. Le Verbe est Dieu. Dieu est Parole. Cette parole est profondément habitée. Or, aujourd'hui cette parole est enfouie, perdue, et il faut la retrouver.

L'auteur lit de larges extraits de "Manger parole".

Face au verbiage de la mort
La parole a tenu tête
Opposant un silence obstiné


"Avec ce deuxième recueil poétique, Jean-Pierre Denis nous propose un grand psaume de pèlerinage, scandé par quatre chants: L'oiseau mort – La porte close – Des beaux exaltés – Du cœur en éveil. Quatre chants, comme quatre déclinaisons de ce qui, tour à tour, nous immobilise en nous fermant à la vie, ou nous projette hors de nous, dans la quête violente ou chimérique d'une identité d'emprunt.
Une question résonne silencieusement dans ce recueil, toute de force contenue: Qui de la vérité ou de l'illusion aura le dernier mot? Peut-être la parole elle-même, qui s'est dépouillée de toute grandeur pour nous donner la vie.

Comme des signes dans la poussière
Comme un miroir tendu sur le bois
Pour que s'y voie le monde tout entier."


"Avec la violence salvatrice de l’amour, ces psaumes de la parole claquent la porte de nos tombeaux confortables pour faire entrer le vent cinglant de la vie. Le souffle même, il est vrai, est parole." conclut Jean-Marc BASTIERE sur son blog "La Procure."

 

Il annonce qu'en septembre paraîtra son troisième livre de poésie : "Me voici forêt" qui comprendra mille quatrains sur les arbres.

Nous aurons donc le plaisir de rendre compte de ce futur livre.

 

 

 

 

 

 
 
03/07/2014

Michel HOST

 

 

 

 

 

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03/07/2014

Michel HOST

 

 

 

 

 

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Christian Saint-Paul signale la parution de "Fulgurance des Êtres, des Lieux Et des Mots" Textes et Poésies, préface de Christian Saint-Paul, de Paul DAUBIN, 104 pages, 10 € disponible sur Amazon et PriceMinister.

Paul DAUBIN est le nom de signature des poèmes et textes de Paul Arrighi qui, comme il est mentionné dans la 4ème de couverture du livre, "est né à Bougie, désormais Bejaia, en Kabylie, d’un père Corse, professeur d’anglais, et d’une mère Pyrénéenne, institutrice, le 26 février 1954. Ses premières années se sont passées sous l'état de guerre. De cette enfance vécue à Akbou reste profondément enfouie les senteurs d'olives de l'épicier mozabite, les senteurs de viande d'agneau sur l'étal du marché et ce goût à la fois acide et sucré des nèfles. «Rapatrié» en 1962 dans les Pyrénées, Paul a toujours gardé une nostalgie pour les paysages méditerranéens et éprouve encore la sensation d’avoir quitté une terre ocre de soleil. Il a ensuite vécu sa jeunesse à Toulouse à l’école Bonnefoy et au lycée Raymond Naves mêlant alors dans un creuset culturel réussi, les enfants de «pieds noirs », les fils de réfugiés espagnols et les jeunes des faubourgs toulousains. Mai 1968 a éclaté alors qu’il avait 14 ans et l’a éveillé plus tôt à la vie de la cité. Paul Arrighi a ultérieurement fait des études d’histoire terminées par une maîtrise et bien plus tard, par une thèse de doctorat soutenu le 12 mars 2005 sur le juriste antifasciste, Italien et Européen, Silvio Trentin, figure de l’antifascisme et de la Résistance et libraire à Toulouse. Paul Arrighi aime beaucoup la Corse ou il a tant de fois séjourné depuis son enfance dans le village paternel. Ses goûts et les valeurs essentielles qu’il s’efforce de promouvoir sont : la liberté, la curiosité d’esprit, l’ouverture aux autres. L’écriture de la poésie est en quelque sorte devenue pour lui une sauvegarde et un talisman dans l’attente hypothétique d’un monde plus tolérant ainsi que de l’émergence d’un indispensable nouveau rapport avec la nature.

 

Ce recueil évoque les thèmes suivants :

Souvenirs d’Enfance situés avant 1962 en Kabylie à Akbou où mes parents

enseignaient, puis à Luchon où se situe la maison maternelle et où tant de souvenirs de jeux avec mon frère Régis sont encore présents à mon esprit.

Sur les Chemins de Toulouse correspond l’éloge de ma chère ville définie par René-Victor Pilhes comme « subtile, épicurienne et tolérante » largement ouverte aux influences Méditerranéennes. J’y dépeins le Toulouse des quartiers de ma jeunesse, le faubourg Bonnefoy, Croix-Daurade, l’atmosphère enflammée du lycée Raymond Naves puis les différents quartiers de Toulouse où j’ai résidé après mon retour dans cette belle ville en 1992.

La Corse, l’île enchanteresse correspond aux lieux et aux arbres souvent emblématiques de cette île si « souvent conquise jamais soumise » qui sait si bien aimanter ses amoureux et ses fidèles et leur rend leur attachement au centuple.

Les poésies de Révolte et de Feu décrivent mes passions parfois mes indignations. Aujourd’hui que j’ai atteint 60 ans, prétendument l’âge de la sagesse, j’ai gardé vivant cette faculté de m’indigner et de me révolter avec mes mots car comme l’a écrit Gabriel Celaya « La poésie est une arme chargée de futur ».

 Renouveau des saisons et petits bonheurs regroupe des poèmes sur les

saisons, quelques lieux que j’ai découverts et aimés et pour finir, évoque nos

compagnons les chiens qui sont une source de confiance et de réconfort."

 

Saint-Paul converse ensuite avec l'invité de la semaine : Michel HOST.

Il s'explique sur les chemins pris dans sa vie, notamment après le Prix Goncourt pour "Valet de nuit" en 1986. Voici comment il se présente lui-même :

 

 Michel Host  / Notice biographique  (brève autoscopie)

Né - l’écrivain, précision utile - en 1942, en Flandre.

Vit à Paris et en Bourgogne. Poète, romancier, nouvelliste, traducteur. Hispaniste, lusophile, arachnophile et ami des chats. Agrégé d’espagnol et professeur heureux dans une autre vie. Amateur de vins, de vitesse et de rugby (la deuxième de ces passions ayant été récemment freinée par la loi, il porte dorénavant ses efforts sur les deux autres.) Aime les dames, et aussi les enfants, mais seulement jusqu’à l’âge de dix ans. Athée déterminé, il ne porte cependant aucune condamnation sur ceux qui estiment devoir croire en un Dieu ou un autre, en dépit de cette évidence que ceux qui prétendent l’avoir « rencontré » sont des vantards ou des imposteurs. 

Marié légalement à une artiste peintre (une plasticienne, selon le lexique contemporain), père d’une fille musicienne, esclave de trois chattes : Artémis (décédée), Nejma (décédée) et Tanit, et d’un chat sibérien et sourd nommé Snejok.

Se considère moins comme un créateur, terme grandiloquent réservé à Dieu, aux couturiers et aux fabricants d’automobiles, que comme un digresseur (théorie personnelle récemment développée dans Topic Magazine (Cambridge University). Contributeur dans différentes revues en activité ou défuntes* : Revue des Deux Mondes, Révolution*, Revue d’esthétique, L’Art du bref*, L’Atelier du roman, La Barbacane, Harfang, L’Autre Sud*, Nouvelle Donne*, Écrire & Éditer*, Lieux d’Être, Salmigondis…

Dirige depuis l’automne 2009 la revue de littérature et de pensée : La Sœur de l’Ange.

Fondateur de l’Ordre International du Mistigri qui comporte une quarantaine de membres répartis sur les deux continents, l’européen et l’américain. Son amour des animaux est une affaire d’enfance, nullement consécutive à cette déception que cause d’ordinaire la fréquentation des êtres humains.

Ont tenu un rôle essentiel dans sa formation initiale les écrivains, poètes et philosophes français des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, avec plusieurs auteurs de l’antiquité classique et des littératures espagnole, portugaise et allemande.

Peu attiré par le tourisme, il se déplace le moins possible, mais apprécie de voyager, c’est-à-dire de rester, aimer et connaître.

A improvisé des directions d’ateliers d’écriture en milieu scolaire, non pour former des écrivains, mais pour partager le plaisir du texte et rencontrer l’Autre-Soi. S’est un temps agrégé aux Ateliers du Jeune Ecrivain.

Apprécie l’aphorisme, l’adage, l’apophtegme et la maxime, dont il possède une riche collection personnelle. Sachant le diagnostic du docteur Jules Renard : « Sauf complications, il va mourir », il tente de s’appliquer le traitement préventif préconisé par la marquise de Sévigné : « Faisons provision de rire pour l’éternité. »

 

Plusieurs de ses livres ont été traduits en différentes langues, dont le chinois. Lui-même traduit de l’espagnol, du portugais, et seulement des textes qu’il aime. S’adonne volontiers au grec ancien. N’a pas trouvé le temps de s’ennuyer.

N’a encore assassiné aucun chroniqueur littéraire et aucun éditeur. Est conscient de son mérite sur ce point. Il place aussi de grands espoirs dans son site HOSTSCRIPTVM (aujourd’hui en panne !) pour asseoir sa mauvaise réputation.

La bêtise le remplit de mélancolie et de peur, car elle est bien trop intelligente ainsi que l’observa Robert Musil : « Il n’est pas une seule pensée importante dont la bêtise ne sache aussitôt faire usage, elle peut se mouvoir dans toutes les directions et prendre tous les costumes de la vérité. » Seul, on le sait, Paul Valéry pouvait la narguer impunément.

Bibliographie (juin 2014)  (suivi de l’astérisque  * , le livre est libre de droits et rééditable)

-          POÈMES   -

Les Jardins d’Atalante,  Ed. Rhubarbe  (Auxerre),  juin 2014

Figuration de l’Amante, Ed. de l’Atlantique , (Saintes) coll. Phoïbos, 2010

Poème d’Hiroshima, Ed. Rhubarbe,  (Auxerre),  2005

Alentours (petites proses), Ed.  de l’Escampette, 2001

Graines de pages *, poèmes sur des photos de Claire Garate, Ed. Eboris (Genève), 1999

Déterrages / Villes, Ed. Bernard Dumerchez, 1997

 

-          NOUVELLES & RÉCITS  -

L’Amazone boréale *nouvelles, Ed. Luc Pire, coll. Le Grand Miroir, (Bruxelles), 2008

Le petit chat de neige, nouvelles express, Ed. Rhubarbe (Auxerre), 2007

Heureux mortels, nouvelles, (Grand Prix de la nouvelle de la SGDL), Ed. Fayard, 2008

Peter Sís ou l’Imagier du temps, Ed. Grasset , 1996

Les Attentions de l’enfance, récits (Prix du livre de Picardie), Ed. Bernard Dumerchez, 1996 – réédition aux Ed. La Table Ronde, coll. La Petite vermillon, 2002

Journal de vacances d’une chatte parisienne, récits, Ed. La Goutte d’eau (hors commerce), 1996

Forêt Forteresse *, « conte pour aujourd’hui », Ed. La Différence, 1993

Les Cercles d’or, nouvelles, Ed. Grasset, 1989

 

-          ROMANS  -

Mémoires du Serpent, roman, Ed. Hermann, 2010

Zone blanche, roman, Ed. Fayard, 2004

Converso ou la fuite au Mexique, roman, Ed. Fayard, 2002

Roxane, roman, Ed. Zulma, 1997  - réédition au Cercle Poche, 2002

Images de l’Empire, « roman d’un chroniqueur », Ed. Ramsay, 1991

La Maison Traum, roman, Ed. Grasset, 1990

La Soirée, roman, Ed. Maren Sell, coll. Petite Bibliothèque européenne du XXe siècle, 1989 – réédition aux Ed. Mille & Une Nuits, 2002

Valet de nuit, roman (Prix Goncourt 1986), Ed. Grasset, 1986

L’Ombre, le Fleuve, l’Été, roman, Ed. Grasset, 1983 et Livre de Poche, 1984 (Prix Robert Walser 1984, à Bienne – Suisse)

 

-          TRADUCTIONS  -

Romancero gitano / Romances gitanes,  de Federico García Lorca, bilingue, aux Ed. de l’Atlantique, coll. Hermès, 2012

Ploutos, d’Aristophane  (traduction nouvelle), Ed. des Mille & Une Nuits, 2012

Coplas por la muerte de su padre / Stances pour la mort de son père, de Jorge Manrique, bilingue, aux Ed. de l’Atlantique, coll. Hermès, 2011

Trente poèmes d’amour de la tradition mozarabe andalouse des XIIe et XIIIe siècles, - première traduction en langue française, Ed. de l’Escampette, 2010

Lysistrata, d’Aristophane (traduction nouvelle), Ed. des Mille & Une Nuits, 2008

La Fable de Polyphème et Galatée, de Luis de Góngora, Ed. de l’Escampette, 2005

Les Sonnets, de Luis de Góngora  (les 167 sonnets authentifiés), Ed. Bernard Dumerchez, 2002

Vanitas, nouvelle d’Almeida Faria, dans Des nouvelles du Portugal, Ed. Métailié, 2000

 

Michel Host est agrégé d’espagnol, amoureux des langues espagnole et portugaise. Il a étudié le grec classique pour son plaisir.

Autres publications

En collaboration & Ouvrages collectifs

 

La nouvelle est la fin, in Pour la nouvelle, Ed. Complexe, coll. L’heure furtive, 1990

40 Ecrivains parlent de la mort, Ed. Horay, coll. Paroles, 1990

Avec le temps, si j’ose dire…, in « Nouvelles du temps & de l’immortalité », Ed. Manya, 1992

Transmutations littéraires, in Chercheurs d’Or, Cahier Figures, N° spécial : Ecrans de l’Aventure, Cahier N° 12 du Centre de Recherche sur l’Image, le Symbole, le Mythe, 1993

L’affaire Grimaudi, roman, avec A.Absire, J.C.Bologne, D.Noguez, Cl.Pujade-Renaud, M.Winckler, D.Zimmermann, Ed. du Rocher, 1995

Dit de Neptune en sa fontaine, in « Des Livres et vous », Anthologie dirigée par Henri Zerdoun, aux Ed. Éboris, à Genève, 1996

Roman, problème sans énoncé,  in « Questions du roman / Romans en question », Ed. Revue Europe, 1997

Fable de l’homme invisible, in « Le Livre Blanc de toutes les Couleurs », Ed. Albin Michel, 1997

La dérive des mers, in « Cent ans passent comme un jour »,  56 poètes pour Aragon, Ed. Dumerchez, Coll. Double Hache, 1997

Double Hache 1990-2001  - anthologie – Ed. Bernard Dumerchez, 2001

La Plume et la Faux, 1914-1918, poèmes sur des images de Philippe Bertin, Intensité Editions, 2001

Geste du jouvenceau qui point n’ayant nom bien sut en l’aage moderne machiner s’en faire ung de hault credit & proufict, nouvelle, in Les Chevaliers sans nom, Nouvelle Donne et Nestiveqnen Éditions, 2001.

Pure voltige, puis sur une feuille, ouvert, nouvelle, in Le dernier livre, Nouvelle Donne et Nestiveqnen Éditions, 2002.

Claire au Touquet, 1953, in « Le bord de mer », sous la direction de Claude Jacquot, photographies de Claude Jacquot, 2003

L’Enquêteur, in « Nouvelles / Novellas », 1er Salon du Livre de Chaumont,  Ed. Les Silos, 2003

C’était un lundi de novembre, La Compagnie des Livres, 2003

Puzzle dans la nuit, in « Petites nouvelles d’Éros », Cercle Poche, 2003

Digression et aléagraphie, in « Le roman, pourquoi faire ? », Ed. Flammarion, coll. L’Atelier du roman / Essais littéraires, 2004

L’Appel de la forêt – la forêt dans le conte -, Editions Transbordeurs, 2005.

Chant des ombres, in « L’année poétique 2005 » (Anthologie), Ed. Seghers

Derniers lieux humains, in « Initiales a 10 ans & autres bonnes nouvelles, Librairies du Groupement Initiales, 2007

Enquête du le roman, 50 écrivains d’aujourd’hui répondent… Ed. Le Grand Souffle, 2007

Les Brucolaques, in « Was aus mir wurde  / Ce que je devenais » (Album du Prix Robert Walser / bilingue), 2008 – Fondation Robert Walser

 

Le Voyageur éveillé & autres nouvelles, Ed. Isoète, Cherbourg, 2009

Le Voyeur, in « Nouvelles belges à l’usage de tous », sous la direction de René Godenne, Ed. Luc Pire, coll. Espace Nord, 2009

Préfaces

Nuno Júdice, Les Degrés du regard, L’Escampette, 1993.

Alonso de Ercilla, La Araucana, Utz, 1993.

François Regnault, Chemin héréditaire, En-Bas, Lausanne, 1997.

Jean-Philippe Katz, Violons et fantômes, Littéra, 1996.

Monique Castaignède, Nom de code : Athéna & Hé bien ! La guerre ! Olympio, 2000.

A publié au cours du temps dans les REVUES suivantes :

Révolutions (devenue Regards),  L’Art du bref (revue fondée par Richard Millet), Quai Voltaire, Autre Sud,  Harfang,  Revue des Deux Mondes,  Nouvelles Nouvelles (revue de Daniel Zimmermann & Claude Pujade-Renaud),  L’Argilète (revue d’Arthur Cohen),  Les Cahiers du Ru (revue de Pierre Lexert), La Barbacane (revue de Max Pons), Topic (Université de Cambridge), Nouveaux Délits (revue de Cathy Garcia), Faites entrer l’infini (revue des Amis de Louis Aragon), L’Atelier du roman (revue de Lakis Proguidis), La Sœur de l’Ange (revue de Michel Host & Jean-Luc Moreau), Saraswati (revue de Silvaine Arabo), Le Manoir des Poètes (revue de Maggy de Coster)

*

Michel HOST après plus de trois décennies de publications n'a rien de l'écrivain habitué. Il ne porte sur le monde littéraire aucune condescendance; son travail l'a singulièrement fortifié dans une posture naturelle d'humilité, celle même qui fait dire si justement au poète moine de Ligugé, François CASSINGENA-TREVEDY: "l'humilité est une certaine certitude de soi". En aucune manière, il n'a considéré son travail d'écrivain et encore plus de poète, comme le déroulement d'une carrière. Il réserve celle-ci à son métier d'enseignant, agrégé d'espagnol. Ecrire est pour lui une vocation qui lui permet d'exister pleinement. Dans l'écriture comme dans la lecture, impossible d'oublier la personne intime qui s'y livre. C'est si vrai qu'il précède ses notes de lecture de la phrase suivante : "Une lecture est une aventure personnelle, sinon à quoi bon ?" Ce qui domine dans son œuvre et dans le désintéressement mercantile de sa démarche, c'est son indéfectible attachement à la poésie. C'est avant tout un poète, et sa dernière publication "Les jardins d'Atalante" en atteste. Il se reconnait dans la formule de Georges PERROS : "La poésie "Elle est ce qui est toujours là", dans nos jours et nos nuits difficiles, et pourquoi rêvons-nous la nuit, sinon parce qu'elle ne nous lâche pas". Non, Michel HOST ne lâchera jamais la poésie, même s'il reconnait avec la totale sincérité qui caractérise l'homme, qu'on ne peut être habitée par elle, nuit et jour. L'inguérissable dépendance de l'amour, la beauté confondante de la femme, sont les thèmes inépuisables du poète. Il lit pour illustrer cette évidence, des extraits de son livre "Figuration de l'Amante" paru aux éditions de l'Atlantique, et qui espérons le, sera réédité dans une anthologie ou autre livre, bientôt.   

TA CHEVELURE

 

Fluante flambante électrique

J’y baigne

Mes doigts

Mes mains

Mes désirs de Nil et d’Amazone

Contre ta nuque elle s’élance vers les rapides

Elle cascade

 

Laisse qu’elle broussaille et tourbillonne

Qu’en ses remous nos bouches nos joues

Se noient

Qu’en nos déportements

Lents soubresauts des corps tendus étendus

À dents de jaguar je morde cette crinière

Allumeuse

Qu’en ses courants ses effilages

Je flaire la toute puissance

De ses vagues de ses senteurs étoilées

Et prenne tes pistes à la course

Efflorescences

D’odeurs pour le chasseur

Inspiré affolé qui descend

À tes fontaines

À tes sources

À tes mousses écumeuses

Vers les souvenirs de nos désirs noués

Épissures du temps

*

 

 

TON FRONT

 

Je lève les yeux
Il brille ce matin, tes longs doigts,

Tes crèmes y pourchassent les rides

À l’heure malaise s’y porte ta main

S’y coule la lumière avide

D’y capter l’ombre d’une peine

J’y lis ta pensée nos pensées

Durs paysages, nos jours innocents,

Nos jours coupables

notre lent passage

Il se lève

Il m’éclaire

Laisse que l’orage de mes lèvres

Y lave ta tristesse et l’ennui de ce jour

*

Lecture d'extraits du livre "Les Jardins d'Atalante". Poèmes sur les douze mois de l'année illustrés par Danièle BLANCHELANDE

JANVIER

Infortune du vocabulaire cette année

 

misère de la syntaxe

 

muets de charme   secs  défoliés  abolis

dépouillés  plumés  nuls

les arbres

 

Le fond de la fontaine s’est crevassé

l’eau goutte à goutte a traversé

 parois  capes  couches  strates

pour dessiner un lac  une cuisse

en bas  dans la vallée désirée d’ombres

 

Nous  notre soif  déclinons

les crêtes  grattons le rocher de nos doigts cassés

 

Sans crier gare la femme a remué

le grand lac salé se vide de son sang 

les pores s’obscurcissent

les habitants de la vallée jouissent d’un coucher de soleil

génital

visible entre les jambes d’Albane

car goguenards les bergers  - là -

troupeau aux yeux rayés 

aux quatre coins

démons de l’antique jardin

en elle satisfont

des peurs séminales longtemps

enchaînées

 

Mais veille Atalante la chasseresse

qui sur leurs rires referme ses genoux coursiers

écrase leurs têtes de liqueurs gelées

ô craquement croissance décimale

loin propagée sur les eaux

Atalante se tourne et se rendort 

des mois des semaines

laissant au lac l’usage de recourir au sang

 

Et meurt le soleil sur ces hauteurs que le froid envahit

et jusqu’au cœur de nos ossatures se loge le gel

cependant que l’autre fontaine sourd doucement

entre tes cuisses qu’elle lave toute la nuit

 

Tu t’appelles Albane et le moi braconnier

entre dans ta nuit  

*

FÉVRIER

 

Amère amande altère mes os 

Amarante ô

tu devins la sereine amante de

celui qui jonchait le val de cadavres ennemis

et crucifiait les femmes sur les portes des sanctuaires

arrachait aux ventres des mères

le fœtus violacé les vives entrailles

qu’il livrait aux crocs des chiens

 

Si limpide Toi

plus suave que le clavecin des armistices

Toi couchée dans l’arc incendié

de ses cuisses

Toi ployant sous la masse

de son obscénité

 

Je me déchire à ton soupir

m’écorche au râle d’amour 

comment peux-tu ? comment peux-tu ?

Moi  retiré de ta bouche je vais sans clocher

ni maison dans l’ornière des égorgés

parmi ses victimes  tes victimes maintenant

ô Amarante trop aimante

moi fol insensé qui me désespère

mais empli de rêves où tu baves et gémis

et râles embrassée de flammes verges brandies

redoublantes lacérations de l’air

inscrites en griffes bleutées

à tes bras à tes seins lactescents

quand déjà les bourreaux hurlent tout excités

autour du brasier de tes yeux

dressant les poteaux où ton agonie finira

dans les saccades inondées du plaisir

 

Amarante ô mon innocente

tu avais cessé de lui plaire

à la traverse de ton ventre

sur tes seins déchiquetés

sur la neige

avec des gestes lents ils étendent

-          que du supplice fort l’on jouisse  -

leurs filets  le désir  un oubli de colombes

*

JUILLET

 

Hors leur écrin de satin tes flancs s’allument

mon regard te détache à l’aube où tu te faisais prendre

des chasseurs montés de leurs vallées

                                                                     Tu es Amarante

aussi belle en dépit de la sanie des étreintes

                                                                     d’abord

ce papillon triste au coin de ta lèvre emporte

le souci de tes yeux ma rancune tout ensemble

sauf cette source de sang dont mes mains n’ont su

dévier les courants mais qu’y faire si tu accordes

plus que pain et feu à plus de prétendants

que n’en affronta le Grec

                                    et  - penses-y – moi une Ombre

que pouvais-je contre leurs poings leurs fusils

leurs chiens l’alcool blanc qui les imbibe leurs plaisanteries

grasses herbes dont ils savent se repaître

 

Je te vois qui descends au torrent

antienne couchée sur une page de ciel toute

amertume déserte ma pensée cela suffit à combler

l’attente de la lumière rais jetés pluriel hommage

à ton corps elle est sur toi et peu à peu t’immacule

ô Joie

 

C’est d’une princesse solitaire future reine d’États

délimités sur des portulans que j’invente

c’est le premier bain d’un matin de création

où des oiseaux virevoltent autour de tes épaules

mes yeux seuls les doigts roux des joncs s’y posent

leur caresse mon regard

font tes gestes pudiques et neufs

                                                             quand déjà

tu te penches sur le miroir inversé et contemples

les rides de l’amour sur fond de sable blanc

 

Parmi l’étrange songe

pour plus de lenteur en l’accomplir

j’accoste voiles amenées aux baies aux dunes aux étangs

que tu révèles et ouvres à mon esquif

j’y erre à loisir lynx agile je te contemple toute

de branches en rochers de mousses en vergers

en silence y pourchassant le lièvre du frisson

à l’entour de tes seins

je fuis tes cimes effraction qu’un orage m’interdit

te propose dans l’éclair notre longue petite mort

notre course nouvelle et de poursuivre le jeu

*

Même si PERROS affirme qu'est "poète celui qui habite totalement son être", idée reprise par SOLLERS qui dit, lui, que "la poésie, on ne la fabrique pas, on la vit, on la respire, on l'habite", il n'en demeure pas moins que ce travail de création, malgré tout, toujours un rien suspect s'agissant de poésie, Victor Hugo la considérant d'ailleurs comme "un peu extra-légale", requiert une vraie fabrication. Car "un mot de trop met tout en péril" selon le constat bien vu de Louis-René DES FORETS. Et ce livre de douze poèmes de Michel HOST, s'il existe parce que, indéniablement, son auteur est bel et bien "habité de poésie", s'est façonné lentement, comme un luthier fignole chaque violon en chef d'œuvre.  L'auteur l'indique implicitement en exergue du livre : "Ces douze poèmes, issus d’un songe d’années  - jetés la première fois sur le papier en 1972, à Saint-Auban-sur-l’Ouvèze, réécrits de mois en mois, jusqu’en 2012 -, disent aussi la cruauté des Jardins abandonnés."

Enfin Michel HOST aborde son travail de traducteur. Nul mieux qu'un poète ne peut traduire un autre poète. Ce faisant, il sert une passion; cette passion est celle d'une admiration militante de l'œuvre traduite. Ainsi il choisit les figures les plus emblématiques de la poésie espagnole, le grec antique ARISTOPHANE, le portugais Almeida FARIA. Il répète son engouement jamais affaibli pour Federico GARCIA-LORCA.

Lecture par Michel HOST de deux poèmes du romancero gitano dont :

 

ROMANCE DE LA GUARDIA                                ROMANCE DE LA GARDE

         CIVIL ESPAÑOLA                                                CIVILE ESPAGNOLE

 

Los caballos negros son.                                       Noirs ils sont, noirs sont les chevaux.  

Las herraduras son negras.                                   Leurs fers aussi, leurs fers sont noirs.

Sobre las capas relucen                                         Sur leurs capes partout reluisent

manchas de tinta y de cera.                                  des macules d’encre et de cire.

Tienen, por eso no lloran,                                     Ils ont, c’est pourquoi ils ne pleurent,

de plomo las calaveras.                                         si obtus, des crânes de plomb.

Con el alma de charol                                           Avec leur âme en cuir verni

vienen por la carretera.                                         ils arrivent par la grand-route.

Jorobados y nocturnos,                                         Bossus au milieu de la nuit[1],

por donde animan ordenan                                  là où ils passent ils disposent

silencios de goma oscura                                     des silences de gomme obscure

y miedos de fina arena.                                        et tant de peurs de sable fin.

Pasan, si quieren pasar,                                       Ils passent, s’ils veulent passer,

y ocultan en la cabeza                                          puis dans leur tête dissimulent                                                  

una vaga astronomía                                            une imprécise astronomie

de pistolas inconcretas.                                       de pistolets immatériels.

 

                   *                                                                                    *

                                                                                     

¡ Oh ciudad de los gitanos !                                   Ô ville, ville des gitans !

En las esquinas, banderas.                                     Aux coins des rues sont vos bannières.

La luna y la calabaza                                               La lune avec la calebasse,

con las guindas en conserva.                                 les griottes qu’on a confites.

¡ Oh ciudad de los gitanos !                                   Ô ville, ville des gitans!

Ciudad de dolor y almizcle,                                   Ville de douleur et de musc,

con las torres de canela.                                         ceinte de tes tours de cannelle.

Cuando llegaba la noche                                        Tandis que la nuit approchait,

noche que noche nochera                                       ô nuit d’une nuit plus que nuit,

los gitanos en sus fraguas                                       les gitans au fond de leurs forges

forjaban soles y flechas.                                          forgeaient des soleils et des flèches.

Un caballo malherido                                             Mais un cheval blessé à mort

llamaba a todas las puertas.                                   à toutes les portes frappait.

Gallos de vidrio cantaban                                       Lors des coqs de verre chantaient

por Jerez de la Frontera.                                          vers Jerez de la Frontera[2].

El viento vuelve desnudo                                        Et tourne le vent dénudé

la esquina de la sorpresa,                                        au coin de la rue de Surprise, 

en la noche platinoche,                                            dans la nuit qu’argente la nuit,

noche que noche nochera.                                       ô nuit d’une nuit plus que nuit.

 

                  *                                                                                         *                                             

 

La Virgen y San José                                                 La Sainte Vierge et saint Joseph

perdieron sus castañuelas,                                        ont égaré leurs castagnettes,

y buscan a los gitanos                                               et ils vont chercher les gitans

para ver si las encuentran.                                         qui les retrouveront peut-être.

La Virgen viene vestida                                             La Vierge s’avance parée

con un traje de alcaldesa,                                          d’une toilette d’alcadesse[3],

de papel de chocolate                                                tout en papier de chocolat

con los collares de almendras.                                  avec ses colliers faits d’amandes.

San José mueve los brazos                                        Saint Joseph agite les bras

bajo una capa de seda.                                              sous sa belle cape de soie.

Detrás va Pedro Domecq                                          Derrière eux va Pedro Domecq[4]

con tres sultanes de Persia.                                       avec trois sultans de la Perse.

La media luna soñaba                                               La demi-lune s’ensongeait

un éxtasis de cigüeña.                                               dans une extase de cigogne.

Estandartes y faroles                                                  Les étendards et les lanternes

invaden las azoteas.                                                    envahissent jusqu’aux terrasses.

Por los espejos sollozan                                              À travers les miroirs sanglotent

bailarinas sin caderas.                                                 des danseuses privées de hanches.

Agua y sombra, sombra y agua                                  Et l’eau et l’ombre, et l’ombre et l’eau

por Jerez de la Frontera.                                             vers Jerez de la Frontera.

 

                    *                                                                                          *

 

¡ Oh ciudad de los gitanos !                                           Ô ville, ville des gitans!

En las esquinas, banderas.                                            Aux coins des rues sont vos bannières.

Apaga tus verdes luces                                                  Éteins-les tes vertes lumières

Que viene la benemérita.                                               car vient la Toute méritante[5].

¡Oh ciudad de los gitanos !                                           Ô ville, ville des gitans!

¿ Quién te vio y no te recuerda ?                                  Qui, t’ayant vue, peut t’oublier ?

Dejadla lejos del mar                                                     Oh! laissez-la loin de la mer

sin peines para sus crenchas.                                        avec ses mèches dépeignées.

      

                      *                                                                                         *

                                                                                        

Avanzan de dos en fondo                                               Ils avancent en rangs par deux

a la ciudad de la fiesta.                                                   jusqu’à la ville de la fête.

Un rumor de siemprevivas                                             Puis un murmure d’immortelles

invade las cartucheras.                                                   hante soudain les cartouchières.

Avanzan de dos en fondo.                                              Ils avancent en rangs par deux.

Doble nocturno de tela.                                                  Double nocturne de tissu,

El cielo, se les antoja                                                      et, dans leur idée, le ciel n’est

una vitrina de espuelas.                                                  qu’une vitrine d’éperons.

 

                       *                                                                                           *

La ciudad, libre de miedo,                                            Libre de toute peur, la ville

multiplicaba sus puertas.                                              alors multipliait ses portes.

Cuarenta guardias civiles                                              Les quarante gardes civils  

Entran a saco por ellas.                                                 s’y jettent pour la mise à sac.

Los relojes se pararon,                                                   Là, les horloges s’arrêtèrent,

y el coñac de las botellas                                                et le cognac dans les bouteilles

se disfrazó de noviembre                                                pour n’éveiller point de soupçons

para no infundir sospechas.                                           de novembre se travestit.

Un vuelo de gritos largos                                               Une longue envolée de cris

se levantó en las veletas.                                                 jaillit d’entre les girouettes.

Los sables cortan las brisas                                            Les sabres découpent les brises

que los cascos atropellan.                                               que les sabots ont culbutées.

Por las calles de penumbra                                            Au travers des rues de pénombre

huyen las gitanas viejas                                                  s’ensauvent les vieilles gitanes

con los caballos dormidos                                              avec les chevaux endormis,

y las orzas de moneda.                                                    avec leurs pots pleins de piécettes.

Por las calles empinadas                                                 Et le long des rues escarpées

suben las capas siniestras                                               se hissent les capes sinistres,

dejando detrás fugaces                                                   qui derrière laissent, fugaces,

remolinos de tijeras.                                                        les moulinets de leurs ciseaux.

 

               *                                                                                                    *

En el portal de Belén                                                       À la crèche de Bethléem

los gitanos se congregan.                                                ils se rassemblent les gitans.

San José, lleno de heridas,                                               Saint Joseph, couvert de blessures,

Amortaja a una doncella.                                                 met une fille en son linceul.

Tercos fusiles agudos                                                      Obstinés, stridents, les fusils          

por toda la noche suenan.                                               claquent durant toute la nuit.

La Virgen cura a los niños                                              La vierge soigne les enfants

con salivilla de estrella.                                                   qu’elle oint de salive d’étoile.  

Pero la Guardia civil                                                        Mais la Garde civile avance

avanza sembrando hogueras,                                          semant sur ses pas des brasiers,

donde joven y desnuda                                                    dans lesquels jeune et mise à nu

la imaginación se quema.                                                l’imagination se consume.

Rosa la de los Camborios                                                Rosa, fille des Camborios,

gime sentada en su puerta                                               assise à sa porte gémit

con sus dos pechos cortados                                           regardant ses deux seins coupés

puestos en una bandeja.                                                  qu’on a posés sur un plateau.

Y otras muchachas corrían                                              Et d’autres filles s’enfuyaient

perseguidas por sus trenzas,                                           pourchassées, saisies par leurs tresses,

en un aire donde estallan                                                 dans un air où partout éclatent    

rosas de pólvora negra.                                                    de ces roses de poudre noire.    

Cuando todos los tejados                                                 Lorsque tous les toits en terrasses

eran surcos en la tierra                                                     furent des sillons mis en terre

el alba meció sus hombros                                               l’aube balança ses épaules

en largo perfil de piedra.                                                  en un  très lent profil de pierre.

¡ Oh, ciudad de los gitanos !                                             Ô ville, ville des gitans!

La Guardia civil se aleja                                                      La Garde civile s’éloigne

por un túnel de silencio                                                     suivant un tunnel de silence

mientras las llamas te cercan.                                           tandis que les flammes t’encerclent.

¡ Oh, ciudad de los gitanos !                                             Ô ville, ville des gitans!

¿ Quién te vio y no te recuerda ?                                       Qui, t’ayant vue, ne se souvient ?

Que te busquen en mi frente.                                             Qu’on te cherche ici, sur mon front,

Juego de luna y arena.                                                         Ô toi, jeu de lune et de sable. 

 

Michel HOST, auteur consacré peu enclin à jouer le jeu d'une conformité médiatique dominante, a conservé l'enthousiasme du découvreur. Il semble naître, renaître plus justement à chaque nouvelle publication. Sa ferveur doit nous guider. Dans un monde littéraire où les "hommes habitués" sont cohortes de cynisme, cette fraicheur est un démenti à l'agacement qui pourrait s'installer. Qu'il en soit remercié !


 

[1] Sous les capes, les fusils portés en bandoulière leur dessinent des silhouettes bossues.

[2] Belle ville d’Andalousie qu’entourent de nombreux vignobles. Les Arabes du califat de Cordoue en avaient fait  une frontière défensive contre les invasions venues du Nord.

[3] L’alcadesse est l’épouse de l’alcade (ou alcalde), premier magistrat d’une municipalité.

[4] Le plus renommé des éleveurs de cognac d’Espagne, dont sur toutes les routes des panneaux publicitaires vantent les mérites.

[5] La Très méritante, la Toute méritante (la Benemérita), celle qui a bien mérité de la patrie : surnom familier de la Garde civile.

 
 
 

 
 
26/06/2014

 

 

 

 

 

Michel

 BAGLIN

 

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul revient sur Pierre COLIN qui nous a quittés en mai. Il lit un passage de "La lettre de Mytilène"

publiée en numéro 306 de le revue Encres Vives, avec des photographies de Maïté COLIN, 6,10 € ou abonnement 12 volumes 34 € à adresser à

Michel Cosem, 2, allée des Allobroges, 31770 Colomiers.

"L'adieu"

 

FINIR

Finir est beau soir, un travail de louange.

Tu écoutes la mer,

la mer à qui tu dois ce décombres de l'âme,

et ton nom désormais n'est qu'un ciel intérieur.

Ca sent partout l'oubli, rêve d'amants.

Rendez-vous au dernier des rêves.

Celui qui pèse un être de jasmin.

Rendez-vous à la fenêtre indécise d'un mot sans voix.

Un mot qui traverse les siècles, enseveli dans l'argile insondable,

la nacre des passions.

Rendez-vous dans l'azur délicat des sources.

Rendez-vous dans la braise des derniers jours.

Ne prenons plus le soir pour héritage.

Les mots sont dieux jusqu'au matin.

Corps d'une femme aimée, ma nuit profonde.

 

Michel HOUELLEBECQ présent à Toulouse cette semaine, il est diffusé en l'honneur de l'invité Michel BAGLIN qui aime les voyages en train, "Paris-Dourdan".

 

L'entretien avec l'auteur de la semaine est introduit par une citation d'un extrait d'un des livres de poèmes de Michel BAGLIN : "Quête du poème",

Multiple

 

Qui devinera mes paroles retenues

de peur d'être aussitôt mensongères

et celles à peine prononcées

que mon regard déjà dément ?

 

Pour être sincère,

je ne sais plus parler autrement

tant j'ai de voix mêlées.

*

En effet, multiple, Michel BAGLIN l'est dans sa création littéraire. Auteur de romans, de récits, d'essais, de nouvelles et bien entendu de poèmes,

l'ancien journaliste ajoute un nouveau domaine à sa panoplie : la dramaturgie.

Il vient de publier " Dieu se moque des lèche-bottes, farce théâtrale" aux éditions Le bruit des autres, 112 pages, 12 €.

Rappelons que Michel BAGLIN était venu au micro de Radio Occitania présenter "La part du diable et autres nouvelles noires" publiées chez le même éditeur.

Michel Baglin est un écrivain français né le 25 novembre 1950 à Nogent-sur-Marne (94). Il vit en région toulousaine où il a été journaliste
plus de trente ans.
Poète, nouvelliste, essayiste et romancier, il est l'auteur de plus d'une vingtaine d'ouvrages publiés chez divers éditeurs.
Michel Baglin a vécu à Champigny, en lisière de Joinville-le-Pont et de ses guinguettes, jusqu’en 1961 et au déménagement de ses parents à Romorantin. 
Il évoque ce passage d’un an, plutôt sombre, en Sologne dans Entre les lignes et Chemins d’encre. En 1962, ses parents s'installent 
à Toulouse, sa ville d’adoption, où il résidera désormais (à l’exception d’un séjour de sept années dans le Gers).
Durant et après ses études qu’il suit à Toulouse jusqu’à sa maîtrise de lettres modernes sur Roger Vailland, il exerce de 
nombreux « petits boulots » dans les gravières, les trains, la restauration, les supermarchés, sans oublier la représentation et 
l’Éducation nationale… Ces années sont aussi entrecoupées de périodes de chômage, jusqu’en 1977 : il devient alors journaliste,
 profession qu’il exerce jusqu’en 2009.
Guy CHAMBELLAND édite son premier recueil, Déambulatoire, en 1974.
Romancier (Lignes de fuite, Un sang d’encre, La Balade de l’escargot), il est aussi l’auteur de plusieurs recueils de nouvelles 
(dont Des ombres aux tableaux), de récits (Entre les lignes, à La Table Ronde, Chemins d’encre, chez Rhubarbe) de deux essais 
(Poésie et pesanteur et La Perte du réel) et de plusieurs recueils poétiques dont L’Alcool des vents, paru au Cherche-Midi et réédité 
chez Rhubarbe, ou De chair et de mots, une anthologie personnelle au Castor astral.
Il a également publié sous le titre Les Chants du regard un album de 40 photos de Jean Dieuzaide qu’il a accompagnées de proses poétiques (éditions Privat).
Parallèlement à l’écriture, Michel Baglin a toujours eu une activité de critique, notamment à La Dépêche du Midi, 
où il a tenu une rubrique régulière durant plus de 18 ans, mais aussi pour les revues Autre Sud, Brèves, Europe, etc. ou encore Poésie 1,
 dont il a été membre du comité de rédaction.
Il a aussi créé et animé la revue et les éditions Texture, de 1980 à 1990, puis le site littéraire revue-texture.fr.
Il a été membre du jury international du prix Max-Pol-Fouchet pendant douze ans.
•	1988 : Prix Max-Pol-Fouchet
Michel Baglin dit aimer la marche, le vagabondage dans les rues, et « s'efforce à ce que la vie et l'écriture soient le moins 
possible dissociées. »
Parmi ses thèmes récurrents, le voyage et les faux-départs, l’univers ferroviaire, la quête du paysage, l’amour du réel malgré la difficulté à 
l’habiter et à être présent au monde, la recherche de l’échange avec autrui par le langage poétique, 
les petits bonheurs qui font la nique à la déréliction, comme « l’éclair d’un sourire dans une file d’attente ».
« J'écris sur une réalité qui ne cesse, il me semble, de se dérober, diluée par les habitudes, les rôles sociaux, l
es langages inadaptés. Mes personnages sont ainsi toujours un peu exilés et comme absents de leur propre vie, 
en proie à "la perte du réel". Ils ont pourtant soif de présence, des autres, envie de descendre dans le paysage, et 
cherchent désespérément à retrouver leur pesanteur intime, à s'incarner. La poésie est une réponse, une façon de se gagner l'ici-bas, 
qui n'est jamais acquis, de reprendre pied sur une terre pleine, un monde inépuisable que les mots tiennent à distance mais avec lequel ils 
nous permettent aussi, paradoxalement, de renouer. »
Bibliographie
•	Déambulatoire, poésie (Chambelland) 1974
•	Masques nus, poésie (Chambelland) 1976
•	L'Ordinaire, poésie (Traces) 1977
•	L'Innocence de l'ordre, nouvelles (Atelier du Gué) 1981
•	François de Cornière, essai (Atelier du Gué) 1984
•	Poésie et pesanteur, essai (Atelier du Gué) 1984, réédition augmentée en 1992
•	Jour et nuit, poésie (Le Pavé) 1985
•	Le Ghetto des squares, nouvelles (Soc et foc) 1985
•	Quête du poème, poésie (Texture) 1986
•	Ruptures, nouvelles (Texture) 1986
•	Les Mains nues, poésie (L'Age d'homme) 1988. Préface de Jérôme Garcin. Prix Max-Pol-Fouchet 1988
•	Lignes de fuite, roman (Arcantère) 1989
•	Des Ombres aux tableaux, nouvelles (SPM) 1994
•	L'Obscur Vertige des vivants, poésie (Le Dé bleu) 1994
•	La Perte du réel, des écrans entre le monde et nous, essai (N&B) 1998
•	Un sang d'encre, roman (N&B) 2001
•	Entre les lignes, récits (La Table Ronde) 2002. Prix Gourmets de Lettres
•	L'Alcool des vents, poésie (Cherche-Midi) 2004. Réédition par Rhubarbe en 2010
•	Lettre de Canfranc, récit (Rhubarbe) 2005
•	Les Chants du regard, poèmes sur 40 photographies de Jean Dieuzaide (Privat) 2006
•	Les Pages tournées suivi de Adolescent chimérique et de L'Étranger, poésie (Fondamente) 2007
•	Les Pas contés, carnets de Cerdagne, récit (Rhubarbe) 2007
•	Chemins d’encre, récits & carnets (Rhubarbe) 2009
•	La Balade de l’Escargot, roman (Pascal Galodé) 2009
•	De chair et de mots, poésie (Le Castor astral) 2012
•	La Part du diable, nouvelles, Éditions Le bruit des autres 2013

Ouvrages collectifs
•	Garonne en Pays toulousain, album (La Part des anges) 2000
•	13, rue Carençà, roman (Éditions du Ricochet) 2000
•	Toulouse sang dessus dessous, recueil de nouvelles (Loubatières) 2001
•	Quelques songes de Prométhée, recueil (Éditions du Rocher) 2001
•	Sang pour sang Toulouse, recueil de nouvelles (Le Corbeau) 2001
•	Raffuts, recueil de nouvelles (Le Corbeau) 2006
•	Les mots de l’exil en mémoire, recueil, (Privat) 2007
•	Les Riverains du feu, anthologie (Le Nouvel Athanor) 2009
•	Ton monde est le mien, recueil Atelier Imaginaire (Le Castor astral) 2009
•	La Femme est un songe, recueil (l’Aiguille) 2010
•	Garonne, recueil, (Le Corbeau) 2010
•	Nous, la multitude, recueil (Le Temps des cerises) 2010
•	Participation à de nombreuses revues et anthologies (NRF, École des loisirs, Vagabondages, L'Age d'Homme, Poésie 1, Sud, Brèves, Europe, 
Le Journal des Poètes, livres scolaires au Québec, anthologie en Roumanie, etc.)
•	Dossiers dans les revues Décharge n° 140 et Friches n° 104

Rappelons que Michel BAGLIN anime un des meilleurs sites de poésie de France : revue-texture.fr .

 

PESSOA considérait qu'il y avait seulement deux types d'état d'esprit constant dans lesquels la vie valait d'être vécue : la noble joie d'une religion, ou la noble détresse d'en avoir perdu une. Pour lui, le reste n'était que végétation, et seule une botanique psychologique pouvait trouver de l'intérêt à une humanité si diluée.

Michel BAGLIN revisite ce thème éternel de l'utilité des religions, en prenant le parti de celui qui est convaincu de la nocivité des croyances religieuses, quand elles sont considérées comme la Vérité devant être imposée à tous. Ce plaidoyer, bien argumenté, il le déploie avec une arme nouvelle : l'humour. Il met en scène des personnages et Dieu lui-même, dans ce qu'il prend la précaution de nommer lui-même "une farce théâtrale". Sur la 4ème de couverture, il est précisé :

Dieu est presque aussi fatigué des idolâtres que de ces imbéciles qui prétendent parler, interdire et régenter le pauvre monde en son nom. A l’occasion d’une visite sur Terre, où il se glisse dans la peau d’un sdf pour mieux percevoir le triste spectacle de sa création, il s’échauffe le sang et finit par s’écrier qu’il n’a nul besoin qu’on lui cire les pompes ! Parce que le sacré des uns n’est pas celui des autres et parce que le respect est dû à la personne, pas à ses crédos, ses utopies, ni à toutes ses lubies, il exhorte les Terriens à modérer leur enthousiasme religieux. Et à se rebeller, puisqu’il les a voulus libres ! Tout cela en vrai farceur qu’il est, avec humour, mais sans mâcher ses mots ni son Verbe ! 

Il apparaît d'emblée que Dieu, même s'il ne se cache pas sous la figure d'un sdf, est terriblement humain. Et tout le long de la pièce, pardon de la farce, on voit bien qu'il est bien plus humain que les hommes ou les femmes qui chantent des louanges. C'est là le paradoxe auquel le lecteur assiste : Dieu s'humanise et les hommes, par leur démesure, se déshumanisent.

Cette farce est aussi un joyeux réquisitoire contre ceux qui au nom de Dieu, veulent faire le bonheur des autres malgré eux. Le fanatisme religieux qui a propagé une grande violence pendant des millénaires, ne s'arrête jamais. Il y a aujourd'hui un fascisme djihadiste qui s'illustre dans l'horreur comme le fit l'Inquisition.

La réflexion philosophique menée avec subtilité dans cette comédie, ne craint pas d'aborder les thèmes les plus profonds de la métaphysique, toujours avec la légèreté qui sied à une farce. Le problème engendré par la finitude de l'homme est évoqué : chez les terriens, on demande l'éternité, chez les Zigues, habitants de Planéta, ceux-ci prient Dieu de leur accorder la mort, l'éternité leur étant devenue insupportable, car l'infini est désespérant.

C'est un Dieu, réaliste et volontiers iconoclaste qui occupe l'espace central de cette création théâtrale. Il ne se fait guère d'illusions sur ceux qui sont censés le servir, et le prennent souvent, comme il dit, pour un diététicien ou un fouille-merde. Il sait que les humains marchent grâce à la frustration, et que les imbéciles voient toujours trop grands. L'homme décide toujours pour Dieu et c'est là que le bât blesse depuis toujours. Dieu a la méfiance de l'idéal quand on préfère les idées aux hommes.

Mais l'optimisme reprend son empire dans cette farce, car Dieu a créé l'homme libre. L'auteur fait l'apologie de la laïcité, les religions n'ayant jamais été d'accord que pour entreprendre la basse politique des mœurs. Les religions ne sont que des sectes qui ont réussies selon la formule d'Ernest RENAN. Mais il y a beaucoup de mystiques sans Dieu. Il est probable que Dieu ne s'aime pas. "Si Dieu existait, il faudrait s'en débarrasser".   L'humour ne désarme jamais tout au long des trois scènes de la pièce. C'est précisément là que le savoir faire de Michel BAGLIN s'impose. Sur le ton de la légèreté et de la rigolade, il fait passer avec talent ses idées sur un sujet aussi sérieux que Dieu et les religions. Il y a dans cette farce, qui n'est jamais une gaudriole, quelque chose d'éminemment salutaire. Dénoncer l'intégrisme religieux mortifère aussi plaisamment doit être considéré comme d'utilité publique.

Reste à monter cette comédie; peu de moyens suffiront. L'auteur précise même qu'elle peut à la rigueur se réduire à quatre comédiens. Espérons qu'un théâtre saura en faire son bonheur sans trop attendre.

Dans cet intervalle, lisons avec gourmandise, cette friandise philosophique !

 

Dieu se moque des lèche-bottes

Farce théâtrale

Michel Baglin

ISBN 978-2-35652-101-9
120 pages,12 €

 

 
 

 
 
19/06/2014

 

 

 

 

 

 

Monique-Lise

 COHEN

 

 

RETOUR

 

Christian Saint-Paul signale la dernière publication de Michel Cosem : Dans le Lac des Légendes Collection "Carré d'as" illlustrée par Lilie Oma.
Grâce aux mots de Michel Cosem et grâce aux dessins de Lilie Oma, c’est un bonheur de voyager, portant ses rêves au creux de ses bras. Ici, tout est vrai, chaud et beau puisque les auteurs l’ont voulu, vécu, imaginé… Ils rejoignent la sensibilité des adolescents comme celle des adultes que la nature et le fantastique enchantent. Et toujours, un carnet d’activités pour écrire et dessiner à son tour.

Michel Cosem est auteur de romans, recueils de poèmes,  anthologies et livres pour la jeunesse. Il a fondé la revue Encres Vives, une des plus anciennes de France. Robert Sabatier le qualifie de  “poète du bonheur intérieur”. Ses poèmes ont été couronnés du Prix Artaud et Malrieu. Ils sont traduits en plusieurs langues. Quelques titres : Lieu Ultime, Rougerie ; Images au cœur roux, L’ombre de l’oiseau de proie, L’Amourier ; La Poésie, ce roman, Lanore ; Gorgées de braises, Sac à mots.

Lilie Oma est née en 1985. Elle vit à Liège où elle a étudié l’illustration à l’Institut Saint-Luc. Elle a continué sa formation artistique en peinture monumentale à l’Académie des Beaux Arts de la Cité Ardente. Sa créativité, tout comme sa vie, se veut la quête d’une vérité qui échappe dès qu’on la touche. Ses images se construisent autour de sa spiritualité. Elles parlent du divin que nous sommes et de la difficulté à l’exprimer dans nos vies de terriens. Elle signe ici son premier album illustré.
Consultez : www.lilieoma.tumblr.com/

ISBN 978-2-87003-650-1 / février 2014
48 pages / format 15*15 cm / 9 euros / n° 10

Lecture d'extraits.

Le vent

passe à pleines dents

et se moque

des portails des carrefours

Il se joue des mains qui lui font signe

et ne rêve

que de voyage

au bout des mappemeondes

*

Voyage au coeur de l'infinitude

Ce matin de rouge-gorge

Sur le chemin des salicornes

Je pose simplement mon souffle

Sur une épaule bleue

Et je dessine avec mes pas

L'éclat du monde qui m'accompagne

Avec son odeur de pétale

*

 

Saint-Paul revient cette semaine encore sur le livre :  Aliéné(s), de Jean Marc Flahaut
85 p, avec 10 illustrations de Maxime Dujardin

12€50 
(port compris en France métropolitaine)

« Ce livre est une biographie idéale, rêvée.
Elle parle d’un homme dont on ne sait presque rien. Interné dans l’unité psychiatrique d’un hôpital. Un homme isolé entre les quatre murs de la création. Qui peint. Et se souvient comment tout cela a commencé. Avec lui, tout un bestiaire. Comme une valise. Un capharnaüm. Un ciel totem. Un œuf soleil. Une mangouste. Des chats. Un oiseau. Une vipère. Un père brutal qui lui court après pour lui coller une raclée. Et des enfants qui regardent. Le premier tableau d’une vie éparpillée en mille morceaux.
Parfois, ce n’est pas génial d’être génial.
J’ai voulu écrire un livre pour dire mon amour de l’art.
Et de l’amour tout court. » nous dit JEAN MARC FLAHAUT 

Jean-Marc Flahaut, né le 31 mars 1973 à Boulogne-sur-Mer, est un auteur et poète français.

Il passe son enfance à Outreau (Pas-de-Calais), puis effectue des études à caractère social. Il anime des ateliers d'écriture et participe à la mise en place d'expériences artistiques de quartier. Il se consacre à toutes les écritures depuis 2003.

Son univers, souvent peuplé de personnages isolés et perdus en eux-mêmes, se décline sous la forme de textes courts ou de micro-fictions aux croisées de la nouvelle et de la poésie.

Bibliographie

La maison, éditions Malab'art (2003)

Rengaine (suivi de) Sept secondes avec le soleil, éditions Carnets du Dessert de Lune, 2004

Retour à Quick Hill Road, éditions Carnets du Dessert de Lune, 2006

Même pas en rêve, éditions du Petit Véhicule, 2007

Spiderland, éditions Carnets du Dessert de Lune, 2008

Shopping ! Bang Bang ! (coécrit avec Daniel Labedan), éditions A plus d'un titre, 2010

Aliéné(s), éditions des Etats Civils, 2010

Banlieue de Babylone (ouvrage collectif), éditions Gros Textes, 2010

Nouvelles du front de la fièvre, éditions Le Pédalo Ivre, 2012

L'amour de l'île, éditions des Etats Civils, 2013

Stockholm, éditions des Etats Civils, 2014

En résidence

Résidence de création littéraire en 2012 avec le Centre Régional des Lettres et du Livre en Nord-Pas-de-Calais.

Lecture d'extrait.

Ce policier n'était pas un vrai policier.

Ah bon ? Et qui c'était d'après toi ?

Un échappé de Sainte Agnès.

Tu en es sûre ?

Certaine.

Mince alors, ça fait froid dans le dos.

C'est pour ça que tu ne dois plus

t'approcher de lui si tu le croises à nouveau.

Je n'ai pas eu l'impression qu'il me

voulait du mal.

Il s'est fait passer pour un policier.

C'est vrai que c'est bizarre.

Les timbrés dans son genre finissent

toujours par déconner.

Tu dois avoir raison.

J'ai raison. Ils ne peuvent pas s'en empêcher.

C'est plus fort qu'eux.

Mince alors.

C'est dans leurs gênes. J'ai lu ça quelque

part.

*

Christian Saint-Paul reçoit son invitée : Monique-Lise COHEN. En préambule il cite le livre de Jacques ELADAN qui nous a quittés depuis, "Poètes Juifs de langue française" dans lequel elle figure. En voici la présentation :

"C’est un fait incontestable : de nos jours, la poésie est le parent pauvre de la production littéraire française. Alors que des centaines, voire des milliers de romans, d’essais et d’ouvrages historiques sont publiés chaque année en France, que les maisons d’édition, petites, moyennes et grandes, se multiplient, les éditeurs, qui, dans notre pays, se risquent à publier de la poésie, se comptent sur les doigts d’une main. Parmi eux, Arfuyen, Alpha-Magnum ou encore la librairie-galerie Racine. Et le phénomène se constate pareillement dans la production à thème juif. Nous n’avons pas manqué de signaler, en son temps, lors de la parution de la belle anthologie, Pages Juives la portion hélas congrue réservée à la poésie. On doit dès lors rendre hommage au travail militant et pionnier de chercheurs comme Pierre Haïat, passionné du sujet ou Michèle Bitton. La publication de recueils de poésie est si rare et si confidentielle qu’il faut féliciter leurs auteurs pour leur patience et leur pugnacité. Nous avons ainsi pu apprécier, d’Alain Suied, Laisser partir et de Jacques Éladan, Iris du couchant. Et c’est précisément à ce dernier, infatigable défenseur et promoteur de la poésie à thème juif, que l’on doit ce véritable dictionnaire illustré où sont répertoriés 77 poètes juifs de langue française. Des auteurs célèbres, comme Max Jacob, Benjamin Fondane ou Claude Vigée et d’autres, la grande majorité, qui sortent enfin de l’ombre imméritée dans laquelle ils étaient jusqu’ici confinés. Pour chaque auteur, une biographie, une bibliographie et un choix de poèmes, un, deux, parfois trois. Le classement est chronologique en fonction de la date de naissance des poètes, d’Alexandre Weil (1811-1899) à Sarah Naor. Force nous est de remarquer que la totalité des auteurs est, au départ, originaire d’Europe. L’Afrique du Nord ne vient que bien plus tard, avec Ryvel (1898-1972), Blanche Bendahan (1903-1975) et Albert Memmi, né en 1920. Il faut reconnaître qu’ils se sont rattrapés par la suite au point de devenir majoritaires dans les périodes les plus récentes. On sera infiniment reconnaissant à Jacques Éladan de nous permettre de retrouver ce cercle intime des poètes trop tôt disparus tels le prometteur Gilles Zenou (1957-1989), fauché par un motocycliste dans la fleur de l’âge et Alain Suied, déjà cité (1951-2008), emporté par la maladie. "

Ecoutons le regretté Bruno Durocher, alias Bronislaw Kaminski (Cracovie 1919-Paris, 1996) dont son épouse, Nicole Gdalia ( Tunis, 1942) poète qui figure en bonne place dans ce recueil, poursuit l'œuvre en dirigeant les éditions Caractères .

S’il y avait un poète parmi nous-nous assisterions aux miracles

S’il y avait cent poètes parmi nous-la face du monde serait changée

car en vérité je vous le dis-la poésie n’est pas l’art mais une voix

qui jaillit du fond de Dieu

Abandonnez donc les jolis mots, toute la matière qui vous entoure,

ne dites plus moi, mais dites LUI et vous trouverez

la poésie plus claire

que la source de la lumière

Et Nicole Gdalia, son épouse, comme en écho :

Se saisir du langage

vêtir ma voix

de l’espérance du mot

en extraire l’étincelle

secrète combinaison

de la lettre et du chiffre

géométrie créatrice de

l’alpha et l’oméga

la forme

purifiée à l’extrême

appréhende l’harmonique signature

le ton est juste

et le poète aura le timbre du prophète

Éditions Courcelles Publishing. Préface du Grand rabbin René-Samuel Sirat. 390 pages. 20 euros.

Monique Lise Cohen a fait des études de philosophie à Toulouse. Docteur ès lettres, elle est poète, bibliothécaire et auteure de plusieurs ouvrages et études sur des thèmes littéraires, philosophiques, religieux et historiques.
A la Bibliothèque de la Ville de Toulouse, où elle a exercé longtemps les fonctions de bibliothécaire, elle a créé un secteur Hébraïca-Judaïca et animé un Centre d’Études et de Recherches sur la Résistance toulousaine. Correspondant du CDJC-Mémorial de la Shoah et de la Nouvelle Gallia-Judaïca (CNRS), elle est membre du Conseil d’orientation et de recherche de l’ISTR (Institut de science et de théologie des religions) de Toulouse.
Elle est née en 1944, peu de temps après la Libération. Comme ceux et celles de sa génération, elle a grandi dans le souvenir de la Guerre, des persécutions et de la Résistance. Sa vie personnelle qui connut un grand tourment dans l’enfance a laissé mûrir un désir d’absolu et de renaissance. Un jour de l’adolescence, elle avait formulé le vœu qu’elle voulait écrire. C’était comme un appel. Elle commença d’écrire vingt ans plus tard, après une traversée longue et difficile, mais aussi dans les vagues de son temps : 1968 et le mouvement des femmes.
Elle a le sentiment d’être née plusieurs fois. Quand un professeur ou un maître lui ont transmis la clé des lectures, quand elle a découvert les archives de la résistance juive, quand elle s’est autorisée à écrire. Des vies nouvelles sont toujours possibles. Elles adviennent à l’aune de notre reconnaissance.

Ses ouvrages

Méditations à l’Orient des Cahiers.Paris, Editions Caractères,1989
Les Juifs ont-ils du coeur ? Discours révolutionnaireet antisémitisme, précédé d’un texte de Henri Meschonnic : « Entre nature et histoire : les Juifs ». Energues, Vent Terral, 1992

Orient ce concept que « nous pouvons davantage encore étendre »,Kant, 1786. Toulouse, Editions du CICOM, 1994 (dir. de publication)
Les camps du Sud-Ouest de la France, 1939-1944 : exclusion, internement, déportation. Toulouse, Editions Privat, 1994 (dir. de publication)
Un jardin d’inconnaissance où grandit l’appel de ton nom, Paris, L’Harmattan, 1997
Vie de La Joselito selon les paroles de Carmen. Avec « Coplas del tren» de José Martin Elizondo. Avant-propos de Félix-Marcel Castan. Montauban, Editions Cocagne, 1999
Fragment d’un chapitre sur la résurrection (lettres, poussières et semences). Colomiers, Encres Vives, 2000
Les Juifs dans la Résistance.Paris, Editions Tirésias, 2001 (dir.de publication)
Ephraïm Mikhaël n’est jamais allé à Vienne.Précédé d’une Invention de la littérature (théorie du jugement dernier). Colomiers, Encres Vives, 2002
Un souffle qui trouve sa science dans l’oubli. Colomiers, Encres Vives, 2003
Histoire des Communautés juives de Toulouse.Toulouse, Editions Loubatières, 2003
La fontaine de la rosée soudaine. Le livre, la femme et l’enfant. Avec une Préface de Betty Daël. Montauban, Editions Cocagne, 2004
Récit des jours et veille du livre, Paris, Editions Orizons, 2008, coll.«La main d'Athéna/Philosophie».

Textes & Poèmes de Monique Lise Cohen in Pierre Lachkar, Couleurs : Intérieur-Extérieur, Editions les 2encres, Cholet, 2008.

Le Parchemin du désir, coll. «Littératures», Paris, Orizons, 2009.

Emmanuel Lévinas et la pensée religieuse (dir. de publication), Editions Universiraires du Sud, Toulouse, 2010.

Emmanuel Lévinas et Henri Meshonnic, Résonances prophétiques, coll. «La main d'Athéna/Philosophie», Orizons, Paris, 2011

Concernant  d'autres études, les articles, les  films, voir les sites de Monique Lise Cohen :
 Internet : www.moniquelisecohen.org    www.resistancejuive.org   www.lmda.net

Monique-Lise COHEN infatigable dans son travail d'écriture, que ce soit dans sa recherche philosophique, religieuse, littéraire, est fidèle à une irrépressible vocation d'écriture, où la poésie est maintenant toujours en filigrane. Le regard qu'elle porte sur ses sujets historiques, son travail sur les archives, est empreint de cette posture propre au poète : la prophétie. Elle s'explique lors de l'entretien avec Saint-Paul sur cette notion fondamentale de sa création poétique. On est là bien loin de la voyance, de la Pythie de Delphes, mais dans la prémonition métaphysique de ce qu'il pourrait advenir si nous ne changeons pas les événements tels que la poète les perçoit. Pas de vraie poésie sans prophétie.

Elle présente ses deux derniers livres :

1 ) "D'une parole d'amour à la naissance des archives" BoD, 88 pages 5,90 €

www.bod.fr


Présentation de l'éditeur :

En 1980, après le décès de mon père, Joseph Georges Cohen, qui fut pendant la guerre membre et secrétaire de l’Organisation Juive de Combat, je trouvai dans la cave de notre maison familiale des milliers de documents concernant la Résistance juive à Toulouse et dans la région. Il y avait les récits de la résistance armée et des documents concernant les secours apportés quotidiennement à des personnes isolées, persécutées ou cachées, ainsi qu’aux internés des camps du Vichy.
J’étais dans l’ignorance, mais j’avais senti comme un appel, un murmure, à faire quelque chose. 
Faire quelque chose de cette mémoire, c’est l’arracher à l’horreur, à la fascination de l’horreur. Pour transmettre. Non pas le poids pur et simple des choses. Mais le fil de la responsabilité. Notre responsabilité. Pour que cela ne se reproduise plus.
Il me fallut entrer sur un chemin de connaissance, et je devins comme ces petits enfants dont il est dit, selon le Talmud, que le monde existe dans leur souffle quand ils vont apprendre à l’école.

Le livre débute par un long poème : "Dans le souffle des petits enfants", en mémoire de tous les siens disparus dans la Shoah. Lecture de ce poème et d'extraits de ce livre de "Mémoires de la Seconde Guerre mondiale".

 Ce travail d'écriture, qui a germé de si nombreuses années, jaillit avec une simplicité et une clarté qui attestent d'un lourd passage au crible de tout ce qui pouvait être superflu à l'hommage dû aux siens et à l'Histoire. Le livre est éclairé de nombreuses photographies et documents .

L'Organisation juive de Combat créée à Toulouse à la fin de l'année 1940 a été homologuée officiellement dans le cadre des FFI, sous le numéro 834, par la 17° Région militaire dont le siège était à Toulouse.

 

        

Monique Lise est dans les bras de son cousin Michel Navon, en tenue de soldat de la Brigade juvie de l'Armée britannique, avec son père Joseph Georges Cohen et sa mère Fernande Cohen (née Rudetzki).à la fin de 1944

Par sa dimension historique, le style, le fond, ce livre revêt une dimension universelle. Il révèle aussi l'impact de l'Organisation Juive de Combat qui est née à Toulouse.

2  ) Roman d’une âme simple

 Books on Demand ISBN 978-2-322-03645-5  € 4 10 *TVA incluse

Une âme simple. D’où vient la possibilité d’écrire son roman ? Elle traverse les temps et les épreuves du monde. Elle sait que le monde - sa dureté - n’est pas une apparence, une illusion. Elle a appris à lire et à écrire, et elle connaît, comme Abraham Aboulafia au XIIIè siècle, la victoire de l’encre sur le sang. Elle a entendu Franz Kafka : « Si vous suiviez les paraboles, vous seriez vous-mêmes devenus des paraboles, et par là déjà libérés de la peine de chaque jour. » (Max Brod, « À propos des paraboles », 1923). Elle sait que toute la réalité est dans le livre.

Une écriture resserrée, dont la concision démontre la volonté de rendre compte de la façon la plus juste possible, de l'amour portée à une mère mythique, qui a hanté toute sa vie l'auteure, et qu'elle retrouve avec bonheur par le miracle de l'écriture.

Monique-Lise COHEN explique sa démarche et la naissance de ce livre inclassable, avant tout livre de poésie, composé de trois parties : "Qui m'a faite selon son désir", "Lettre à Elsa", "Etudes bibliques". Elsa, c'est Elsa BERG qui a publié en 2004 "Poupée de sang ou l'écriture de la douleur". Ces lettres avaient été offertes à l'époux d'Elsa : Justin MOULIN; la lettre du livre de Monique-Lise COHEN a été réécrite en 2014 pour le livre précisément.

Lecture d'extraits.

Elsa,

Quelle sera la sépulture de l'enfant,

dans nos mémoires ?

 

Tu voudrais libérer le cri de l'enfant disparue.

 

Mais pourquoi Elsa, ce cri, je l'entends

jusqu'au très-fonds de moi-même ?

Il résonne Elsa, ton cri, il fait vaciller les

fondements du monde

Il interpelle le Créateur, le Maître de toutes

choses, le Maître du monde.

 

Elsa, ton cri brûle en moi.

*

Le livre s'achève sur ce poème :

Alors,

nous ressuscitons

pour parfaire les jardins inespérés.
 

Un livre où se condense la sensibilité créatrice de Monique-Lise COHEN qui parcourt les rives de l'amour filial, de la féminité, de l'écriture, de la prière, de la foi.
 

 
 
 
12/06/2014

 

 

 

RETOUR

 

Christian Saint-Paul de retour de ce pays cousin de l'Occitanie, la Catalogne, où pendent aux balcons le drapeau revendiquant son indépendance et sa volonté de poursuivre son partenariat européen, fait entendre la voix virile et chaude d'un chanteur mythique découvert dans les années soixante en France, notamment au festival de Carcassonne où il venait en concert à côté de Paco  IBANEZ, Xavier RIBALTA; diffusion de l'adaptation catalane du Vaisseau Espagnol de Léo FERRE: El Vaixell Espanyol.

Comme il l'avait promis la semaine dernière, Saint-Paul fait écouter un extrait de "Petits poèmes diversement appréciables mais néanmoins écrits avec grande attention" d'Olivier BASTIDE (cardère éditeur, 15 €); on reconnaît dans cet enregistrement la voix de l'éditeur lui-même, et d'ailleurs aussi poète, Bruno MSIKA. Ces textes ont été écrits sur des suites d'Erik SATIE. Diffusion "D'entrain bien mesuré" sur "Sonatine bureaucratique" du compositeur, pionnier du modernisme.

A signaler cette semaine, un jeune poète qui totalise tout de même presqu'une dizaine de publications : Jean-Marc FLAHAUT pour son livre "aliéné(s)" aux éditions des états civils, illustrations de Maxime DUJARDIN, 83 pages, 12,50 €. Un ton narratif, rugueux, où la poésie fait mouche comme dans les poèmes de DUBOWSKI; un régal pour la radio. Lecture d'un extrait.

Fugue

deux patients

se font la belle

c'est la troisième

fois cette année

 

deux patients

dont un que tout

le monde ici appelle

le policier

 

Cobra serre les poils

de sa barbe

entre ses doigts

et se prend à rêver

qu'il est cet autre

en cavale

 

il sait que je sais

qu'il sait mais continue

de garder le secret

 

une fois dehors

il aperçoit un village

dans le lointain

 

plus il avance plus il marche

et mieux il marche

 

Sainte Agnès

se trouve maintenant

dans son dos

et devant c'est le passé

*

 

Avant  d'aborder le poète de la semaine, Pierre COLIN, qui malheureusement ne peut plus être invité, puisqu'il nous a quittés le 5 mai 2014, Saint-Paul revient sur Philippe BERTHAUT qui avait, avec le poète disparu, des similitudes d'activités comme celle de formation et d'ateliers d'écriture. BERTHAUT écrit "Le champ de lave", COLIN "La lave et l'obscur". Lecture d'un extrait de "Paysage Déchiré" de BERTHAUT.

Poème, ce soir je ressens pleinement ta faille,

A ta manière d'empoisonner le monde

dans le maigre filet des mots,

de ne rien laisser paraître de l'enjeu

ni du cable de sang qui traverse la chair

en filament perpétuel.

 

J'entends des trouées de notes,

je les égrène d'attente,

les épuise sur le pré blanc,

retenus l'impatience et le vouloir mieux,

l'illusion du tout,

sa geste longue,

le méridien offert au cartographe aventurier,

avec sa meute de lieux toujours avides

d'assemblage.

Le manque alors et sa désinvolture

se mettent au cahier comme au lit figé des pierres.

 

Pousse de ta poitrine

La mêlée des fantômes.

 

Poème, ce soir je ressens pleinement la faille

que je ne puis parler.

Partager le piètinement.

Se reconnaître mutilé dans l'éloignement.

 

Ce soir le couchant s'effectuera sans couleur.

Tu partiras encore plus loin dans la sente absente.

 

Il n'y a plus lieu d'insister.

Laisse les lieux à leur cadastre.

 

Ils ne t'ont jamais demandé

de les mêler à tes désastres.

 

C'est une pierre à fond de chair

que ta vie ainsi révélée.

 

Tous les chants ont fondu dans l'air

et l'air n'en fut pas mieux porté.

 

Le paysage est dans la cage

que tu ouvres à chaque matin.

 

Un passeport pour le passage

que tu négocieras en vain.

 

Il n'y a plus lieu d'insister

tout ce que tu as pu en dire

 

te manque dès lors que l'écrire

devient grand temps de s'en aller.

*

Christian Saint-Paul revient sur "De bogue et de roc / Di riccia è rocca  L'amour l'amort  / Amor amorti " de Marcel MIGOZZI, édition bilingue français, corse, avec un avant-poème de Jean-François AGOSTINI et traduit en corse par Stefanu CESARI, Colonna édition,100 pages, 10 €. Ce que la poésie aujourd'hui nous offre de plus dense, dans cette simplicité étourdissante qui témoigne de tant d'essorages, de tant de plaies cicatrisées. Cette écriture concise et d'une précision aigue, cette percussion du langage qui rend compte de la percussion de la vie, précède de peu le silence. Plus tard elle le magnifiera.

Lecture d'extrait ainsi que de : "Et si nous revenions sans vieillir ?", "Voyageurs sans regard", "Qels âges as-tu ?", tous ces recueils chez Encres Vives, 6,10 € chacun, 2 allée des Allobroges 31770 Colomiers. A signaler également : "Un pied toujours dans mon quartier"(La Porte éditeur), "Derniers Témoins" (Tarabuste éditeur).

 

poème de province

autrement dit                       vieux linge

 

abandonné dans un lavoir

de mots usés            de phrases accrocs

 

et l'eau

va boue

*  

Bernard MAZO avait écrit dans "L'hostilité mortelle de l'inconnu" qui constituait le 364ème Encres Vives :

Toute écriture

            retourne

               un jour

                  au silence

 

L'écriture de Pierre COLIN est retournée au silence. Il nous appartient dorénavant de puiser dans ce silence et de retrouver la parole du poète et de la faire entendre. C'est notre vocation, à nous, acteurs de cette émission "les poètes". 

Pour cette première évocation, l'idée est de faire écouter ce flux poétique propre à Pierre COLIN. C'est ainsi que la parole lui est donnée à travers la lecture d'extraits de "La lettre de Mytilène", de "Les Soleils de l'Apocalypse"(Encres Vives éditeur, 6,10 € chaque volume), de "La lave et l'obscur" (prix spécial du jury Max-Pol FOUCHET, L'Atelier Imaginaire et Le Castor Astral éditeurs, 43 pages, 12 €).

Encres Vives lui a consacré son numéro 345, "Spécial Pierre COLIN" qui rassemble des critiques et notes de lecture de Michel DUCOM, Félix-Marcel CASTAN, Claude NIARFEIX, Michel BAGLIN, Henri HEURTEBISE, Marie Florence EHRET, Luis MIZON, Werner LAMBERSY, Michel COSEM, Les SOLICENDRISTES; LES PHOTOS sont de Maïté COLIN.

Lecture de "Pierre Colin : tout est en question" de Michel DUCOM, son vieux compagnon de "L'Education Nouvelle", les deux poètes s'étant rendus ensemble à Saint-Pétersbourg et à Moscou dans le cadre de la promotion de cet organisme. Lecture des mots de CASTAN, l'Occitaniste sur son alter égo celte.

Voici un extrait des mots prononcés par Michel DUCOM le jour des obsèques de Pierre COLIN le 7 mai 2014:

                                                 Un homme du partage

« Il fut un chercheur- trouveur. La recherche ne pouvait aboutir au scepticisme ou à la contemplation mélancolique. Elle devait s'enrichir de vérités conquises - fussent-elles provisoires ?-  pour ouvrir le droit aux bonheurs de vivre, de grandir, de savoir, de penser, de débattre.  « Il faut reprendre aux mots leurs dernières comètes »  avait-il écrit il y a longtemps...

Certains trouvent pour eux, pour enrichir leur image, lui fut un homme du partage. Le souci de faire connaître accompagnait la passion de connaître. Une générosité permanente, il écrivait sans cesse, publiait, s’engageait au plus haut niveau de ses exigences dans les stages que nous mettions en place, quels que soient les obstacles : l'argent, la santé, les incompréhensions, car toute idée neuve est d'abord souvent  reçue comme une violence. Rien ne l'arrêtait. Impulsif, il apprit la patience, enthousiaste devant les découvertes et les idées,  il apprit à se maîtriser le plus possible pour se faire entendre. Il a laissé de très nombreux articles dans la revue Dialogue et dans Cahiers de Poèmes -revues du GFEN- Il fut directeur plusieurs années de cette dernière qui avait été créée par son ami l'écrivain Michel Cosem. Une œuvre   pédagogique majeure, liée aux chemins de la création, de l'auto-socio-construction des savoirs, de la pensée mythique, de l'imaginaire, de l'écriture. Générosité intellectuelle qui n'avait pour limite que son absence de concession à ce qui lui paraissait aller à l'encontre de l'émancipation des enfants, des êtres humains, des peuples.

Une personnalité de chercheur d'autant plus exceptionnelle qu'on ne pouvait séparer son engagement pédagogique de son engagement politique sans concession du côté des opprimés. Un engagement fidèle, - très jeune il avait écrit avec des amis un ouvrage « Citoyen d'autrui »_ engagement fidèle  qui lui valut des conflits et de l'estime, un engagement qui lui a permis de confronter sans cesse son combat savant avec celui que les hommes menaient en tant que bataille collective pour vivre mieux. Quand des populations entières méprisent aujourd'hui  la vie politique, lui a su, jusqu'aujourd'hui lui redonner sa force, sa pertinence comme mesure des actes humains. Terrible leçon, encore à découvrir.

Son engagement en écriture a été intimement mêlé à son action publique et à ses préoccupations intimes. Il a publié plus de trente ouvrages, il a rempli des carnets et des carnets,  travaillé, et surtout il a témoigné très souvent sur ce qu'était le travail d'écriture, à partir des avancées les plus contemporaines.  Non pas du côté des recherches formelles qu'il connaissait bien pourtant, mais du côté du partage de la pensée écrite. Du côté du sens humain et de la possibilité pour tous de penser à l'écrit comme on pense sous d'autres formes.

Pionnier des ateliers d'écriture pour adultes, en tant qu'écrivain d'abord puis ensuite en tant que chercheur en éducation, il passa une grande partie de sa vie à les développer. Universités d'été, stages nationaux, actions locales et internationales, rencontres d'animateurs, séminaires de recherche dans tous les domaines où l'écriture se donnait avant son action comme domaine « réservé » à quelques-uns."

Sa biographie et bibliographie selon "Le Printemps des Poètes":

Biographie

Pierre Colin est né en Bretagne où il effectue de nombreux séjours. Il vivait à Tarbes.
Auteur d'une trentaine de recueils de poèmes, tous publiés à compte d'éditeur. Le premier recueil fut publié par Marc Alain, dans sa collection Formes et Langages
Le Recueil intitulé Une épine de bonheur a obtenu, en 1996, le Prix National Poésie Jeunesse.
Le recueil La lave et l’obscur a obtenu le Prix spécial du jury du Concours international de poésie Max-Pol Fouchet en octobre 2006 (Préface Werner Lambersy et Luis Mizon).

Bibliographie

Recueils, Roman, Nouvelles

  Le Kââ d’Isis, Roman Jeunesse, 2008

 

  Le Nord Intime, recueils de poèmes (Adultes), Editions Chemin Bleu, 2008 

 

  Je ne suis jamais sortie de Babylone, Éditions Multiples, Collection Fondamente, mai 2008

 

  Trouble en moyenne parole, Éditions Nouveaux Délits, Cathy Garcia, Laramière, janvier 2007

 

  Encres vives, spécial N° 345, avril 2007

 

  Contes de fées, Princesse occupe-toi de ta bouche, Éditions du corbeau, Raffuts, Toulouse, octobre 2006

 

  La Lave et l'Obscur, Éditions Le castor Astral, Prix spécial du Jury Concours International de poésie Max-Pol Fouchet, octobre 2005

 

  Lieux d'hiver, Poésies, Éditions multiples, Collection Fondamente, juillet 2003

 

  La Lettre de Mytilene, Revue Encres vives, N° 306

 

  Le Coefficient des marées, nouvelles, Éditions Blanc Silex, Collection "Amers", août 2002

 

  Le Retour à Sumer, Poésies, Éditions La Bartavelle, juillet 2002

 

  Tout retourne au bercail des langues, Numéro spécial de la revue "Encres vives" N° 265, novembre 2001

 

  La Baie des secrets, roman pour la jeunesse, Éditions du Laquets, mars 2001 

 

  Grèce obscure, Éditions Encres vives, avril 2000

 

  Chacun s'éveillera parmi ses mots dormants, Éditions La Bartavelle, mars 1999

 

  Le Corps rupestre, Éditions La Bartavelle, juillet 1998

 

  Une épine de bonheur, Prix National Poésie Jeunesse 96, Éditions La Bartavelle, Novembre 1997, 4ème édition, Tarbes 2006

 

  Se désagrègent, se décousent nos manteaux de disants, Éditions Encres vives, janvier 1997

 

  Monde aux yeux brefs, La loi du corps, Éditions « Soleils et Cendres », Septembre 1995

 

  Dans la Tour des Archets, Europos..., Éditions « Cadratins », octobre 1993

 

  J'ai dit mon nom, Folie dans les syllabes, Éditions « Encres vives »

 

  Il faut reprendre aux mots leurs dernières comètes, Éditions Glyphes

 

  Les mots 'ont pas de langue, Éditions "Encres vives"

 

  Remiremots, Citoyens d'autrui, etc., recueil collectif, 1970-1980

 

  Schizo-Symphonie, Éditions actuelles, Formes et Langages

Revues de poésie 
Encres Vives, Racines, Le Puits de l'Ermite, Glyphes, Rivaginaires, Filigranes, Soleils et Cendre, Traces, Le Pilon, Multiples, autres
Responsable de la revue « Cahiers de Poèmes », fondée par Michel Cosem, pendant une dizaine d’années ; collaborateur régulier de la Revue Dialogue du gfen.

Anthologies 

 

  Aa Pays des mille mots, Éditions Milan, Michel Cosem

 

  Les poètes du Sud-Ouest, Éditions multiples, Henri Heurtebise.

Éducation et Pédagogie

 

  Réconcilier Poésie et Pédagogie

 

  Ça Conte

 

  L'atelier d'Ecriture

 

  Livres de Formation pour Adultes et Formateurs, auteur collectif, Coordonnateur: Pierre Colin, Editeur GFEN

Cette émission est une première approche de ce poète, qui compte désormais parmi ceux qui nous éclairent dans les ténèbres du présent, où il nous a laissés.

 

 
 
 
05/06/2014
 
 
 
Photo Guy
 
 BERNOT

 

 
 
 
 
Philippe BERTHAUT
 
 
 
 

 

 

En préambule, Christian Saint-Paul signale la parution de deux livres des éditions Cardère, dont il lit des extraits et réserve la diffusion d'un extrait du CD pour la semaine suivante, ne voulant pas amputer le temps d'antenne de l'invité. Ces livres sont :

 L'homme au pliant de toile de Jean-Yves LENOIR

 

   

Il s’agit d’un récit, mais de par son caractère nettement poétique, il s’inscrit dans la collection poésie.
L’homme au pliant de toile est un conte en 22 chapitres (plus un prologue et un épilogue), qui se déroule dans la vallée de l’Indre, plus précisément à Villaines-les-Rochers. Le départ (prologue) ressemble à un conte africain où la nature est omniprésente, sauf qu’on est en Touraine. On est tantôt dans un récit (narrateur), tantôt dans la forme reportage (« sur les traces de… »), et le narrateur recueille alors des témoignages de personnages, tantôt dans du vécu (l’homme est là, bien vivant). On reconstitue ainsi comme un puzzle la vie d’un homme étrange, dans ses habitudes, son amour Lætitia, son penchant pour le théâtre… L’univers est toujours poétique, mais on a parfois des « leçons de choses » (le cycle de vie des hannetons, la scène agricole de battage), et des prétextes à évoquer des thèmes actuels (les Roms, les femmes battues, l’utilité de l’art…) ; quelques moments érotiques très poétiques viennent pimenter le conte.
On se demande parfois si les personnages principaux qui accompagnent l’homme au pliant de toile ne font pas partie de son théâtre intérieur : le Passant, l’Instituteur, le Souffleur (gardien d’immeuble), Lætitia… Il y a comme un conte à l’intérieur du conte.
L’homme au pliant de toile a cette capacité de pouvoir nous maintenir « juste en-dessous de la ligne » (celle qui sépare le concret de l’abstrait, le rêve de la réalité), de telle sorte qu’on est dans une vraie réalité, qu’on parle de lieux précis, connus, repérables (la Touraine), tout en baignant dans une atmosphère quasi surréaliste. L’ambiance qui se crée est extrêmement agréable, c’est celle de la poésie abstraite que nous aspirons à publier.
On notera la précision des mots, la connaissance que l’auteur possède des « choses de la nature » (règnes animal et végétal), et l’élégance avec laquelle il utilise cette connaissance, nous faisant passer alternativement au-dessus et en-dessous de la ligne.
En filigrane, le pliant de toile possède la teneur de l’objet symbolique qu’il appartient à chacun de décrypter (ou non) au regard de son propre ressenti, de son propre vécu, avec toute la richesse qu’on peut en tirer…


 

poésie
Un livre de 144 pages au format 140 x 210 imprimé en noir sur bouffant ivoire 80g
mai 2014
ép. 12mm pds 185g
prix public 14 euros
ISBN 978-2-914053-76-1

Petits poèmes diversement appréciables mais néanmoins écrits avec grande attention… d'Olivier BASTIDE

 

 

L’originalité de cet ouvrage tient à deux aspects liés :
* les 40 petits textes qui le composent ont été écrits chacun en correspondance étroite avec 40 pièces d’Erik Satie (36 différentes) ;
* il nous est ainsi apparu incontournable d’adjoindre à l’ouvrage un CD de musique. 9 poèmes ont été sélectionnés, ainsi que les 9 pièces pour piano d’Erik Satie correspondantes, qui ont été travaillées par une pianiste, puis enregistrées en juillet 2013, avec les textes lus. Cette « matière sonore » est travaillée par un compositeur contemporain afin d’être enregistrée sur CD.
Textes : Olivier Bastide, Orange (84) – Piano : Françoise Dragon, Aix-en-Provence (13) – Voix : Olivier Bastide et Bruno Msika, Lirac (30) – Prise de son, mixage et masterisation : Julien Couturier, Mémoire d’Ondes Roquemaure (30) – Composition musicale : Thierry Goulois, Bretagne

Petits poèmes… est une suite de 40 courts textes poétiques (entre 200 et 450 caractères) de forme dadaïste (comme l’était Erik Satie), en prose. Chacun de ces textes possède un titre et une référence à une pièce d’Erik Satie correspondante. Il s’articule en deux parties : Petits poèmes… lui-même, qui comprend 25 textes, et Suite aux petits poèmes… qui regroupe 15 textes supplémentaires.
Chaque morceau de piano génère une image, une courte scène, une impression, une question, un souvenir, une plaisanterie, etc., ainsi que cela arrive à chacun de nous, et imprime au texte que l’auteur s’est attaché à transcrire, une atmosphère, un rythme, des sons, une musique… particuliers ; on pourrait presque y reconnaître le morceau « traduit ».
On est dans le ton de l’atmosphère satienne : les textes sont espiègles mais plutôt soignés, coquets, presque précieux, à l’image d’un humour très contenu ; chaque mot semble avoir été longuement pesé avant d’être posé, l’esthétique est de rigueur. Outre les impressions et images du passé, certains textes donnent jour à des interrogations, des questions qui mettent en alerte, des projections qui fleurent bon la liberté imaginative, mais aussi de l’introspection, un regard sur soi, grave ou amusé, qui ne laisse que très rarement transpirer l’inquiétude.

+
Écouter un extrait du CD

Publié avec le soutien du Centre national du Livre

poésie
Un livre de 60 pages au format 140 x 210 imprimé en noir sur bouffant ivoire 80g
illustrations originales d'Elena Berti, artiste et chorégraphe
mai 2014
ép. 5mm pds 100g
prix public 15 euros
ISBN 978-2-914053-77-8

 

Christian Saint-Paul reçoit son invité : Philippe BERTHAUT

Poète, chanteur, écrivain, comédien/lecteur, animateur et formateur d’animateurs d’ateliers d’écriture Philippe Berthaut est né en 1952 à Aigueperse (Puy-de-Dôme) et vit à Toulouse.

Après un DEA en Lettres Modernes et des études de linguistique, il choisit de mettre en mélodie les poèmes qu’il écrit et de les chanter sur scène. Il débute en 1972 avec un premier récital à la Cave Poésie.
En 1981 il fonde avec d’autres chanteurs, des enseignants et des responsables de salles de spectacle, Toulouse Action Chanson, l'une des premières association en Midi-Pyrénées à créer des ateliers d'écriture...Comédien chanteur dans diverses pièces mises en scène par Luc Montech et Monique Demay telles que La Chanson de Roland, V comme Vian, Baudelaire, Rimbaud, il donne des lectures publiques dans le cadre des lectures organisées par la revue Multiples à la librairie Ombres Blanches de Toulouse, à la Cave-Poésie René Gouzenne, pour le Marathon des mots.
Ses principales créations chantées sont Le Chant-Flipper (Film France 3 en 1983), La Grande Battue (1985), Bateau Epices (1986) et Les Chants de la Nuitée (1996).
Il a aussi réalisé des spectacles sur des poètes comme Eugène Guillevic (création au Printemps de Bourges, 1987) et Pierre Reverdy (CD et spectacle, 1989).
Son dernier spectacle,
Routes captives donné en octobre 2006 à la Cave Poésie est un parcours poétique associant photographies, textes, musique et vidéo. Le DVD Routes captives accompagné de l’intégralité des textes (livret) est paru en février 2008. Il a été aussi conseiller littéraire auprès de la boutique d’écriture du Grand Toulouse de 2000 à 2011.

Formateur pour l’animation d’ateliers d’écriture créative au Cnam de Toulouse.

SPECTACLES

 

 Paroles, musique et chant

 

2012               Plantations   avec Philippe Gelda au piano.                                                                                       

2006                           Les Routes Captives  Cave-Poésie de Toulouse

2002               Poèmes pris au chant.(suite) A la Cave-Poésie de Toulouse

1999/2000     Ultime récital avant la fin du siècle, après on verra. Avec B. Reichmann et Jacques Echene à la Cave-Poésie de Toulouse

1996               Les Chants de la Nuitée   Théatre Jules julien. Avec B. Reichmann.

1991                          Le Chanteur et son commerce.Théâtre Jules-Julien. Avec B.Reichmann.

1988               Le Chanteur et ses sept visages. Cave Poésie. Avec B. Reichmann.

1986               Bateau-Epices. Théâtre Jules-Julien. Avec  D. Carette, B. Reichmann.

1985              La Grande battue. Cave Poésie. Avec B. Reichmann.

1980               Chant-Flipper. Cave Poésie. Avec L. Marc, D. Lasseuguette, F. Knab.

1977               Chants Trajets. Cave Poésie.

années 70: 1ères parties des spectacles de C. Ribeiro, C. Magny, J. Bertin,   L. Escudero, Léo Ferré.

 

Autres spectacles    Musique et chant                                                                 

 

2009               Le Motager de Poèmes Cave-Poésie de Toulouse

1993               Poèmes pris au chant(1).Cave Poésie. Avec René Gouzenne.

1992               Empal’Odyssée. Production COMPACT (J.-C. Bastos), spectacle en plein air, quartier d’Empalot

1989               La Terre est mon bonheur. Centre Culturel de l’Aérospatiale. Avec Eugène Guillevic, Lucie Albertini, J.-C. Bastos.

1987                          Pierre Reverdy, poète. Théâtre Jules-Julien. Avec J.Brianti (décor), S.Wolff (éclairage), R. Ossart (musique

 

Participations  comédien chanteur

1996-1997    Rimbaud   Mise en scène Monique Demay Théatre Jules Julien

1998               Apollinaire Mise en scène Caroline Bertran-Hours Théatre Jules Julien

1986               La Chanson de Roland. Mise en scène L. Montech.Théâtre Jules-Julien

1994-1995    Baudelaire. Mise en scène Monique Demay. Théâtre Jules Julien

1990               V comme Vian.  Mise en scène M. Demay.Théâtre Jules-Julien

2002               La Légende de Fifaro. Texte de Sourine. Musique de Albertus Deksen. En compagnie du comédien Roland GiGOI

LECTURES PUBLIQUES                                                                            

Depuis 1988, lectures publiques régulières dans le cadre des lectures organisées par la revue Multiples  à la librairie Ombres Blanches: Pessoa, Aragon, J. Malrieu, Guillevic, Reverdy, St-Pol-Roux...En 95: C. Pavese, 96: Georges PERROS,97 Roberto JUARROZ 98 Yves Bonnefoy, 99 Nino Judice,2000 Thierry Metz,2001, Michel Deguy.2002 Bernard Noël 2003 Adonis2004 Aimé Césaire 2005Jacques Dupin2006 Lous-rené Des ForêtsA Figeac: J. Marcenac A Montolieu: P.Reverdy.

Participation régulière depuis 2007 aux lectures des 40èmes rugissants à la Cave-Poésie René Gouzenne.

Participation régulière depuis 2008 au Marathon des mots.

 

Bibliographie

Le Chant-Flipper, Tribu, 1981 (épuisé)
Treize lampes bleues seules éclaireront la ville, Privat, 1988 (épuisé)
Le Chanteur et son commerce, Le Lézard, 1991
Récits du pays jonglé, La diagonale d’Espalion à Lavaur, L’Ether vague, Patrice Thierry, 1995, repris au catalogue des Editions Verdier
Le Voyage au lecteur ou la Décameronde, La Renaissance, 1997
Paysage déchiré, poèmes, N&B, 1997
– L'Enfance Labyrinthe, N&B, 1999
– Les Saisons Cayla in Anthologie, Tarabuste, 2002
Abrupt, poème avec une gravure de Michel Cure, Trames, 2002
Mes mains du bout de moi, avec des photos de Jean-Luc Aribaud, Les Imaginayres, 2002
Le Pays jonglé- Récits et poèmes, Accord, 2003
Otaries, poèmes avec des images de Jacques Brianti, Propos 2 éditions, 2003
La Chaufferie de langue, Erès, 2005
Le Champ de lave, Nouvelles Editions Loubatières, 2008

n  Le motager de poèmes (poèmes pour enfants) 2010

Editions numériques       

2008 : Seau rouge Seau bleu  septembre 2008  publie.net

            Enregistré sous                 octobre 2008  publie.net

  en ligne sur remue.net http://remue.net/spip.php?article2200

De quelques copeaux arrachés à la chevelure de l’ange- mélanges

Ouvrages collectifs
-Ecrire le lieu in la revue du Grep Imaginaire et création 1998

13, rue Carença, Le Ricochet, 2000
Les Mots de l’exil en mémoire, Privat, 2007

La Visitation d'écriture, N&B, 2005
 

n  Les voix du poème  Anthologie aux éditions Bruno Doucey 2013

Livres de textes écrits en atelier
L'Empal’Odyssée, Le Lézard, 1993
–  9  Petits cahiers d’écriture, Médiathèque Départementale 31, 1995-2005
Eclats de VOA- Atelier d'écriture de la Verrerie Ouvrière d'Albi, Accord, 1997
Le Grand Agglographe, Nouvelles Editions Loubatières, 2007.

--Glanes Fragments de mémoire Quartier Saint Amans La Madeleine (commande de la ville de Rodez)

- Paroles de gardien. Atelier d’écriture avec le personnel du Musée Ingres de Montauban (2013)

DISCOGRAPHIE

1979              J’aborde l’aval d’être là ,33t

1981               Le Chant Flipper,  cassette. Avec B.Reichmann.

1989               Pierre Reverdy, poète, C.D. Avec la participation de Bernardo Sandoval

1993              Cassette Escalasud (participation).

1997               Chants de la Nuitée. CD

2000               Poèmes chantés aux enfants CD

2003               Poèmes pris au chant. CD

2005                          Participation au CD Pratiques d’écriture créative :textes lus et chantés

                        Le Pied à l’encrier (CLAP Midi-Pyrénées)

2006               Les Routes Captives  DVD

FILMOGRAPHIE                                                                                          

1981               L’Aubrac , 10’, réalisation Geoffroy Pieyre de Mandiargues. Production: FR3 Midi-Pyrénées

1983               Le Chant -Flipper , 52’, réalisation Geoffroy Pieyre de Mandiargues. Production: FR3 Midi-Pyrénées

1995               Ramadier Blues, vidéo 26’. Produit et réalisé par A. Sommermayer. Film sur la création du spectacle avec les adolescents de St Eloi à Rodez

 

 

            Différents passages à France-Culture ( 81-82: Libre-Parcours                    Variétés; 93: Poésie sur parole).

Philippe BERTHAUT évoque toutes ces années consacrées à la création poétique, sous toutes les formes qui sont déclinées ci-dessus. Il revient sur son adolescence passée comme Charles JULIET, enfant de troupe dans une école militaire. Mais la période était très différente de celle qu'avait connue JULIET. Les mœurs avaient changé, la discipline s'était humanisée et une forte amitié liait les élèves. Plus rien à voir avec "L'année de l'éveil". Mais c'est là, que Philippe BERTHAUT découvre la musique et le chant de ses camarades, dont certains étaient extrêmement doués et lui ont appris l'art de chanter. C'est, curieusement, dans cet environnement militaire que se développe sa passion créatrice poétique. Toulouse lui offre par la suite les moyens de mettre en œuvre son talent. Sa rencontre avec le poète-chanteur Bruno RUIZ sera décisive. Ils créeront avec d'autres Toulouse Action Chanson qui s'illustrera dans bien des domaines dont les ateliers d'écriture pour le plus grand bien de la renommée poétique de la ville.

Diffusion d'extraits du CD "Les chants de la nuitée" dont "Le sentier des châtaigners".

Le poète explique, qu'il s'agit dans ce poème chanté, de l'imprégnation à jamais vivace des châtaigners qu'il admirait sur la route qu'il empruntait à Espalion.

Philippe BERTHAUT lit des textes dont des inédits. Il lit également un texte de Philippe JACCOTTET qui tranche avec le ton habituel de ce poète dont il est l'admirateur et un habile lecteur public de sa poésie, comme il le démontra encore cette année lors des lectures de la Cave Poésie René Gouzenne.

Philippe BERTHAUT s'explique également sur le travail d'écriture qu'il mène depuis les années soixante dix, sur la relation profonde qu'il entretient avec les lieux où il vit et qu'il décline sous toutes les formes qu'il pratique : chants, poèmes, récits, ateliers d'écritures, et même séjour d'écriture comme celui du Château de Cayla avec Yves CHARNET. Il voit ainsi dans "Le Champ de Lave" qu'il découvre dans le nord de l'Aveyron "la métaphore parfaite de cette écriture éclatée, en fragments, et son épiphanie, son surgissement réel au monde". Poète du lieu lui aussi. "Le territoire. L'enclos. Le pays. Comment le regardons-nous ? Comment en parlons-nous ? Par toutes les fenêtres de chaque corps, le pays se donne à lire. Chacun y coulisse sa vie, dans le grand vide de ne pas savoir où l'on s'achemine." Cette présentation de "Paysage Déchiré" (éditions N&B) a de troublantes similitudes avec la posture de poètes tels Gilles LADES ou Michel COSEM, autres significatifs poètes du lieu.

 

Nous sommes

la moitié

d'un paysage

déchiré

et renversé.

*

 

Nous sommes le paysage

déchiré par le jour offrant ce spectacle-là

et rien d'autre

avec lequel compter.

 

- rapidement un inventaire de ses biens, si peu,

des biens quand même. Maisons de chair.

Lingots de paroles. Actions côtées au souvenir.

Si peu. Nos mains ne retiennent qu'une autre main,

douce, chaude -

*

 

Et ce paysage déchiré

avec ses cicatrices irrégulières

comme une feuille de papier

maladroitement partagée en deux

sans ciseau

avec le seul couteau

des deux mains

ne nous demande rien

cependant intrigue

par son autre part

disparue effacée du ciel

égarée sûrement en nous.

*

 

Et quel autre sens aurait alors écrire sinon capter

 l'autre versant du paysage déchiré ?

 

Cela se passe au-delà du pli.

*

 

Chaque matin, se lever, aller au séisme,

à la secousse brève

qui nous tient éveillés vivants.

Un raz-de-narré emporte tout

vers des pilleurs d'épaves.

Il pleut des pleurs ?

Où est le gué ?

Un voile de sang sous la dictée des orages

et les amours éparpillées.

 

Je tiens en laisse mon poème.

Il rugit

et j'ai froid.

*

Lecture par Philippe BERTHAUT de poèmes inédits.

Diffusion de "Le flot berceur" de REVERDY qu'il a mis en musique.

L'émission s'achève par la lecture d'un poème de Pierre COLIN qui nous a quittés le 5 mai 2014. Né dans le Finistère dans le Cap Sizun, il vivait à Tarbes mais séjournait régulièrement avec son épouse Maïté en Bretagne. Il était actuellement vice-président de la Maison de la Poésie du Pays de Quimperlé. Auteur d'une trentaine de recueils de poèmes, il avait obtenu plusieurs prix : le Prix national de Poésie Jeunesse en 1996 pour Une épine de bonheur (La Bartavelle), le Prix spécial du jury du Concours international de poésie Max-Pol Fouchet en octobre 2006 pour La lave et l'obscur (Préface Werner Lambersy et Luis Mizon, éditions Le Castor Astral). 
En 2010, il fut lauréat du Prix Xavier-Grall pour l'ensemble de son œuvre.

Derniers ouvrages : Le livre du presque rien (Encres Vives, spécial Pierre Colin), Je ne suis jamais sorti de Babylone (Editions Multiples).

Voici un de ses textes récents écrit lors d'un séjour à Audierne :

«Chacun sa fête de nuit.

Chacun sa fête de nuit. Celle de Grall était nourrie d'un idéal, d'une mystique exprimant sa véhémente passion pour la Bretagne. La mienne est plus proche des rivages. Elle suit les sentiers qui traversent le vent solaire, bordé de bruyères, de salicaires et d'arméries marines. Celle de Grall appelle l'utopie, un rêve, loin d'une humanité prisonnière de chaînes ancestrales, l'avènement d'une poétique totale, un socialisme lyrique dont la Bretagne serait l'épicentre d'un tout-monde, comme dira plus tard Edouard Glissant, un monde réenchanté par la puissance d'un verbe universel. Mon Graal est rivé à la pierre, à la forêt, au vent, à la tempête, à l'océan qui sans cesse se brise comme un poème sur le rocher du monde. Ma patrie, c'est la lutte, le combat quotidien, le réel sursaignant d'Artaud, dont il revient aux hommes d'extraire les plus précieux trésors, la tendresse et la science. Les mots sont pleins de pharaons perdus.

Cap Sizun 
Juillet 2012» 
publié dans Xavier Grall parmi les siens (Rafael de Surtis éditeur) ■

*

Ô nouvel habité

 

A toutes celles que j'ai aimées...

 

Frères qui avant nous viviez...les mêmes peurs, les pires rêves !

Frères à longs poils Sœur Carcasse,

Lucie la douce !

 

Frères à la longue langue, aux yeux liquides,

à voix violettes Frères de La nuit,

Sœur lumière !

 

Le rugissement du temps s'arrête à ton corps enveloppé

de bandelettes de lotus ! Baisse-toi Ramasse encore la terre

Sable et désir Sol et mystère !

 

Dans nos grandes jarres d'os, la moelle est triste,

L'aube aux bandeaux d'effroi creuse ton sexe, de hutte

en hutte, orné de palme, de murmures.

 

Mais au bout de nos vieux zéphirs, tu parlementes encore,

Petit guide du ciel ! Une à une, tu ôtes tes prunelles

et la pierre de soleil roule vers l'horizon !

 

Notre grande vieillesse s'appelle Orient,

terre d'écriture, Notre Ariane éternelle tourne

de cœur en cœur ! Tour de parole Tour de mémoire !

 

Babylone, à la vérité, notre âme...

au milieu du tableau la déesse aux anneaux de bouche

parlemente avec toi, ô nouvel habité !

 

Tu ôtes ton manteau de flûtes,

Dans la tour des archers, Europos enduit ton corps

de glaçures et d'oubli !

 

Petit guide du ciel, c'est la nuit agrandie par toi,

par deux cents fois l'ordre d'aimer :

Scribe !

 

Perdus ici Retrouvés là ! Côte à côte, assis autour du cercle

de l'univers, dans le fumier de lotus et l'éternité,

Viens, nous naîtrons ! Viens nous vivrons !

 

Lucie ma douce,

A petites caresses, Lucie entre mes doigts,

la bouche dévorée de rêves !

 

Coq bleu, ciel de ferraille !

Je te parle de siècle en siècle ! Furie noire,

furie verte !

 

Petit guide du ciel,

ô nouvel habité, sœur de la nuit,

jusqu'au delta du corps parsemé d'étoiles !

 

Pierre COLIN

 

voir:  http://revue-texture.fr/spip.php?article650

son dernier recueil : http://revue-texture.fr/spip.php?article478

 

Philippe BERTHAUT une figure originale de la poésie contemporaine qui rassemble dans un même élan et un même bonheur :  le chant, la comédie, l'art photographique, le récit, le témoignage, l'appel du lieu. "Tout un territoire dans la voix" comme dit si bien Giles PRESSNITZER dans l'article qu'il lui consacre sur son site: espritsnomades.fr . Un poète à suivre assurément !

Voir son site :
 http//
www.lachaufferiedelangue.net

 

 

 

 
 
 
29/05/2014
 
 

 

 

Toulouse, ville de poésie assurément.

Philippe BERTHAUT , poète, écrivain, chanteur composant ses mélodies et ses accompagnements, met en musique les poètes et ses amis les poètes de Toulouse. Ainsi, il réunit dans un de ses CD « Poèmes pris au chant », à côté de Rilke, de Juarroz, de Diener, de Guillevic, d’Éluard, d’Apollinaire, de Thierry Metz, de Gaston Puel, trois poètes de Toulouse.

Diffusion de : « J’entre dans la chanson » de Philippe BERTHAUT, « Heure Grave » de R.M. RILKE, « Mots qui me nomment » de R. JUARROZ, « Je viens » d’Henri HEURTEBISE , « Sait-on le blanc, sait-on le noir » de Claude BARRERE  et de « Montagne » de Gilbert BAQUE.

Philippe BERTHAUT, un des poètes emblématiques de TOULOUSE, sera le prochain invité de l’émission « Les poètes ».

Christian SAINT-PAUL accueille ensuite son invité,  Gilles LADES , figure marquante de la poésie contemporaine, dont il suit avec une attention toujours renouvelée la création poétique et littéraire depuis plus de trente ans.

Biographie :

Né en 1949 à Figeac (Lot. Enfance et adolescence partagées entre la région toulousaine et le Quercy, dont les paysages et l'atmosphère informent durablement son imaginaire. Etudes de Lettres Classiques à Toulouse. Professeur de Lettres à Thionville, Orléans et dans le Lot. Aujourd'hui en retraite. Aime voyager en Europe. Participe à l'animation de plusieurs revues. Auteur de nombreux recueils, de nouvelles, d'une anthologie des poètes du Quercy, de travaux critiques. Fait partie du Comité de rédaction d'ENCRES VIVES et de FRICHES. 
Prix Froissart 1987; Prix Antonin Artaud 1994.

Bibliographie :

Poésie :

  Témoins de fortune, L'Arrière-Pays, 2010

 

  Portails de Charentes, Editions de l'Atlantique, 2010

 

  Damier du destin, encres vives, 2010

 

  Le passage et le songe, Le Poémier de Plein Vent, 2009

 

  Vue seconde, Encres vives, 2009

 

  Le temps désuni, Sac à mots, 2005

 

  Soleil porte du monde, Encres vives, 2005

 

  Poèmes, La Porte, 2004

 

  Dans le silence du tableau, Le poémier de plein vent, 2004

 

  Mémoire des limbes, Gros textes, 2004

 

  Ubaye aux confins du bleu, Encres vives, 2003

 

  Solstice de décembre, Le noeud des miroirs, 2003

 

  De poussière et d'attente, L'Arrière-Pays, 2002

 

  Lente lumière, L'Amourier, 2002

 

  Visages pour mémoire, Encres vives, 2001

 

  Val Paradis, Cahiers de poésie verte, 1999

 

  Le pays scellé, Cadratins, 1998

 

  Coeurs du célé, Encres vives, 1997

 

  La moitié du symbole, Rougerie, 1997

 

  Le trait cassé, La Bartavelle, 1996

 

  Serres sur Garonne, Encres vives, 1996

 

  Poèmes égarés, Clapas, 1996

 

  Notes d'abandon, Encres vives, 1995

 

  Le Causse et la rivière, l'Arrière pays, 1994

 

  Le balayeur, L'Arbre à paroles, 1994

 

  Les Forges d'Abel, La Bartavelle, prix Antonin Artaud, 1994

 

  Journalier du sans repos, traces 1993

 

  De vives gravures, Clapas, 1993

 

  Reprises, A contre-silence, 1992

 

  Carnets d'Europe, Encres vives, 1992

 

  Portraits sans noms tableaux, Rougerie, 1992

 

  Fonderie, Cahiers de poésie verte, 1991

 

  Le Chemin Contremont, Hautécriture, 1990

 

  Au plus près, Encres vives, 1990

 

  Saisons l'éternel présent, Traces, 1989

 

  Les Bastions bleus, Prix Froissard, 1987

 

  Vers la source murée, Encres vives, 1986

 

  Ravins étoilés, Chambelland, 1986

 

  Pierre à dire, Encres vives, 1983

 

  Lames de fond, Millas Martin, 1977

A paraître :


 

  Personne perdue, La Bartavelle

Anthologie :


 

  Anthologie des poète du Quercy - des troubadours à nos jours, éd. du Laquet, 2001

Théâtre :


 

  Tout autour du silence, Caractère, 1978

Récits :


 

  Sept solitudes, Le Laquet, 2001

 

  Dasn le chemin du buis, Le Laquet, 1998

Collabore à de nombreuses revues.

 

C’est une rétrospective de son œuvre, à ce jour, conséquente qui nourrit l’émission. Saint-paul rappelle à Gilles LADES qu’il édita en 1989 dans le n° 5 des « Carnets des Libellules » : « Autour du village perdu » lecture d’extraits. Le poète s’explique sur la genèse de ces poèmes qui sont à rapprocher de ceux publiés par Jean Le Mauve, « Au cœur le hameau » édition l’Arbre.

Gilles LADES dans le long entretien avec SAINT-PAUL livre les ressorts de toute une vie passée à l’exercice de la création poétique, activité vitale. Même lorsqu’il écrit des récits (Sept solitudes) ou des récits de contemplation (sur les Vergers de la Vicomté, Rocamadour), Gilles LADES ne se départît pas de son regard et de sa langue de poète. Il inscrit sa démarche créative dans une incessante aventure intérieure, même si, comme l’écrit PESSOA dans "L’éducation d’un stoïcien » : « penser en spiritualistes, agir en matérialistes, ce n’est pas une doctrine absurde : c’est en fin de compte,  la doctrine spontanée de l’humanité toute entière. » Ecrire de la poésie dévoile certainement une fragilité face à la dureté de la vie triviale, mais aussi la capacité à rendre compte de cette fragilité en l’utilisant. C’est là le paradoxe du poète auquel Gilles LADES n’échappe pas. Son œuvre rend compte de « l’obscur de la vie ». C’est moins le manque, selon la formule de Camille CLAUDEL, « il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente » que la nécessité de restaurer « le trait cassé », de retrouver, comme un restaurateur de tableaux, cette trace disparue qui joint une plénitude à un achèvement qui sous-tend l’écriture poétique chez LADES. Il lui faut « ranimer l’infime ». Cette capacité à retrouver le trait perdu et à réparer le trait cassé s’approche de la définition de Pierre REVERDY : « Le réel est, par sa présence, tueur de poésie, par son absence source de poésie. La poésie, c’est le bouche-abîme du réel désiré qui manque ». Le poète surmonte alors ses écroulements. S’il n’en sort pas indemne, il réapparaît enrichi d’émotions et d’une parole fortifiée. Pour cela, développe Gilles LADES, il faut faire le chemin, sans cesse cheminer. Mais ses chemins à lui, sont toujours des chemins à hauteur d’homme, cet homme défini par HÖLDERLIN, qui « habite poétiquement sur cette terre ». A telle enseigne que, dans son livre « Val Paradis », Gilles LADES va jusqu’à vouloir rendre le Paradis réel ! Il est à sa portée puisqu’il est au cœur de la vallée du Célé, « dans le Causse des enclos de fraîcheur et de silence », sa vallée natale. Et c’est toujours au « rêve réel » du lieu que Gilles LADES nous convie et nous enchante. Car il sait mieux que quiconque, par la percussion du langage poétique, accorder l’énigme du lieu à son propre mystère. Dans « Le Chemin Contremont » déjà, il maîtrisait par le génie des mots le tournoiement qui tente de s’orienter en éclairant le présent de toute la mémoire. Gilles LADES illustre ses explications par la lecture d’extraits de ses livres.

Enfin, l’émission s’achève sur une réflexion à propos du livre d’Eric FRAJ « Quin occitan per deman ? Lengatge e democracia / Quel occitan pour demain ? Langage et démocratie » . éd. Reclams Escola Gaston Febus, bilingue français, Oc, 220 pages, 10 € sur la langue et la culture occitane, si chères à Gilles LADES.

Gilles LADES, un des poètes essentiels de la poésie d’aujourd’hui et de demain dont la dernière publication est un livre d’artiste publié par les éditions « Trames » « Une source au bout des pas » avec les gravures du poète plasticien Claude Barrère. Un très beau livre bien sûr, au tirage limité à 30 exemplaires, 50 €.

 

 
 
 
22/05/2014
 
 

 

 

Christian Saint-Paul revient sur les publications évoquées la semaine dernière des éditions érès de Toulouse.

 De "dépli" d'Alfredo COSTA MONTEIRO, il reprend les présentations de l'éditeur:

Dépli est un poème dans lequel les trois langues constitutives de l'identité de l'auteur - portugaise, espagnole et française - s'entremêlent, s'entredisent sans jamais s'interdire.

Le texte se compose de bribes agencées selon une combinatoire construite sur la sonorité des mots. Poussé dans ses retranchements phonétiques, le langage, dans un premier temps, semble perdre sens. Mais bientôt se profile une autre langue, étrangement sonore,  une langue qu'on dirait tout droit sortie de l'inconscient de son auteur et qui ouvre à une autre communication possible, éminemment poétique.

Dépli se présente sous les deux formes complémentaires d'une partition de mots et d'un enregistrement audio du texte par l'auteur, sur mini CD.

Né à Porto (Portugal) en 1964, Alfredo Costa Monteiro s'installe à Barcelone (Espagne) en 1992, après avoir obtenu un diplôme en sculpture/multimédia avec Christian Boltanski à l’École des Beaux-arts de Paris. Son travail englobe les arts visuels, la poésie visuelle/sonore et le son. La plupart de ses pièces (aussi bien des compositions et improvisations sonores que des installations, des vidéos et des poèmes sonores ou visuels, souvent de facture domestique) sont faites de processus instables, de contraintes conceptuelles et de formes à la simplicité souvent déroutante. Des processus, en règle générale imprégnés d'un fort caractère phénoménologique.
Depuis quelques années, délaissant progressivement son travail d'installations, il s'oriente de plus en plus vers la poésie sonore, et réalise, le plus souvent en solo, des lectures polyglottes (français, portugais et espagnol) et bruitistes.
Depuis 2001, il travaille au sein de différents projets de musique expérimentale et improvisée, collaborant avec d’innombrables musiciens, chorégraphes, vidéastes et poètes. Il possède une vaste discographie dans des labels européens, japonais et nord-américains.

 Mise en vente le 5 juin 2014 (10 €).  www.editions-eres.com

Diffusion d'un extrait du poème enregistré.

 

Lecture d'extraits de "bateau de papier d'Olav H. HAUGE :

Il y a beaucoup d'écueils
dans la mer.
Pourtant
c'est un écueil qui t'a sauvé
.

Vie de paradoxes, en effet, que celle du "jardinier d'Ulvik", homme simple qui partagea sa vie entre écrire et cultiver ses pommiers ; autodidacte sédentaire qui a lu, traduit et commenté les plus grands poètes étrangers ; qui, s'étant heurté pendant 30 ans aux "écueils" de la schizophrénie, a néanmoins  publié une quinzaine de recueils et est aujourd'hui célébré par la Norvège comme une gloire nationale. Un homme que, sans aucun doute, l' "écueil " poésie aura "sauvé"...

Cette sélection de 28 poèmes brefs de Olav Håkonson Hauge(1908-1994) a été établie et traduite du norvégien par Anne-Marie Soulier. La photo est due à Sandrine Cnudde. Édition bilingue.

Olav H. Hauge, poète norvégien(1908-1994) est considéré comme une gloire nationale. Il a publié une quinzaine de recueils dont deux sont traduits en français :Nord Profond, (éditions Bleu Autour, 2008) traduit du néo-norvégien par François Monnet, éditions Bleu Autour ; Cette nuit l’herbe est devenue verte, (éditions Rafael de Surtis, 2007) traduit du néo-norvégien par Eva Sauvegrain et Pierre Grouix.

Mise en vente le 5 juin 2014 (10 €).

 

Lecture d'extraits de "j'ai jardiné les plus beaux volcans" de Michel DUNAND :
J'ai du mal à parler de moi. Je n'y tiens pas vraiment. J'ai donc décidé, de nouveau, dans ce neuvième recueil, et cela sans orgueil, de laisser le plus souvent la parole à certains de mes compagnons de route, ou de mes guides. Ils vous diront forcément, tout en se présentant (vous les connaissez, je pense, en tout cas, pour la plupart d'entre eux), qui je suis, qui je ne suis pas. Mais ne vous fiez pas trop à leurs propos. Je reste un écrivain...
Michel Dunand est né en 1951 à Annecy, dont il dirige la Maison de la poésie. Poète lui-même et récitant très actif, il anime depuis 1984 la revue Coup de soleil (poésie et art).

Mise en vente le 5 juin 2014(10 €).

 

La disparition récente du poète argentin Juan GELMAN qui vivait à Mexico, et avait projeté de venir à Paris ce printemps pour la sortie de son nouveau livre traduit en français aux éditions caractères et qui devait donner lieu à une émission "les poètes", fut un terrible événement pour l'ensemble du monde littéraire. Nicole GDALIA a poursuivi avec la ténacité que nous lui connaissons cette publication : Traductions/ Les autres !! que Saint-Paul invite à découvrir (voir notre rubrique "Parutions" sur ce site ou Achetez-le ici!). Voilà des poèmes qui prétendent être des traductions de poètes célèbres venus d’ailleurs John Wendell, Dom Pero, Yamanokuchi Ando, Sidney West,… Un ailleurs issu des quatre coins du monde. Des traductions dont Juan Gelman se serait appropriées, comme jadis Baudelaire s’appropriait Edgar Allen Poe, à tel point de les faire siennes.

Mais c'est d'une publication de 2006 "L'opération d'amour" dans une magnifique traduction du poète Jacques ANCET, Gallimard, 163 pages, Julio Cortázar signant la Postface, 17 €, déjà signalée dans cette émission, que Saint-Paul veut parler pour le rattacher au genre de la poésie sacrée et de la poésie mystique qui sera évoquée par la suite.

"Chez cet homme dont on a décimé la famille, qui a vu mourir ou disparaitre
 ses amis les plus chers, nul n'a pu tuer la volonté de dépasser
 cette somme d'horreurs (...)
(...) La force la plus extrême de la parole de Juan, c'est d'avoir laissé derrière elle
la surface de la douleur et de la colère pour plonger dans ses racines, dans cette
zone vitale et mentale d'où la réflexion et l'action peuvent renaître
avec une efficacité qui leur a si souvent manqué dans le bruit et dans la fureur (...)" écrit Cortázar dans sa postface. Et Jacques ANCET dans sa présentation des textes, explique "qu'il est donc naturel que, dans l'état de déréliction qui était le sien, Juan GELMAN ait eu recours, en même temps qu'à son idiome natal, à cette tradition proprement fondatrice dont il se nourrissait depuis longtemps et qui elle-même rejoint celle des "béguines" des Pays-Bas, au XIIIème siècle, pour plonger dans l'immémorial de la tradition biblique avec les voix d'Isaïe, de saint Paul et, surtout, cette tristesse de David si contemporaine de la sienne. Désespoir inconsolable, nostalgie de l'objet d'amour perdu et inaccessible, tout cela est également le fond d'une inspiration beaucoup plus proche qui, par-dessus siècles et millénaires, associe audacieusement à ces voix venues du plus lointain celles du tango avec ses poètes et ses musiciens..." Les poèmes sont écrits dans cette langue spécifique de Buenos-Aires, le porteno.

Lecture de larges extraits sur un fonds musical de tango.  

citation XXXIV ( sainte thérèse)

une autre région / et si différente /
s'est levée de la douleur / lumière autre
que celle d'ici que nous vivons / comme
peuples avec leurs bras ouverts au bonheur

qui un jour les inondera : comme une
fabrication de toi / qui sortirait
par dessus elle-même / hors d'elle-même /
très / si peu attachée à ses travaux

ces souffrances de toi / par où tu passes
comme immensités / comme flamboiements /
comme chevaux tout ivres de chemin /
et des oreillers blancs pour le soleil

*

commentaire XXII (saint jean de la croix)

 

feu d'amour brûlant la furie /

le fiel / prisons où je suis pris /

toi qui embrases jusqu'à l'os /

tel l'infini / telle une plaie /

 

râpe de lin où sont en feu

mille mondes / éclat qui me fait

cendre pour que je sois lumière

immense / délice où je reste

 

à fixer ton cœur qui embrase

ou son oiseau doux comme un vol

dessus le ventre de mon âme

comme une main / comme une paix /

 

cautère qui brûle les peines

qui met une flamme d'amour

au plus secret de ma blessure

comme douceur de vif amour

*

 

commentaire XXX (saint jean de la croix)

 

cette santé atteinte quand

ne sommes qu'un tant te suis /

tant tu m'es / ou flamboiements comme

un élargissement de l'être

 

ou changements qui sont toi / j'y entre

en sortant de moi / tel que tu

entres en moi comme dame / feu où

je brûle brûle toujours plus / douceur

 

qu'en partant / triste / tu me laisses /

aube impossible où le soleil

parcourt des mondes comme un fou

si doux de sa propre souffrance

 

Cette poésie du mystère, nous la rencontrons sous des formes différentes mais également intenses, chez les poètes traversés par le sacré ou la révélation mystique.

La poésie réussit ce miracle de rapprocher par l'exactitude de la précision de la langue du poème, des sensibilités qui pourraient sembler sans cela très éloignées. Mais, un même trait d'union rassemble ces poètes en quête d'un même élan d'amour dans un labyrinthe de souffrance.

Marcel MIGOZZI est de ceux-là qui écrivent "des poèmes du mystère, du secret, tout acides, à partir d'un naturalisme qui devient vite fantastique. Derrière "la chair infranchissable" est la mort, ce masque d'odeurs à apprivoiser."(présentation Poésie 1, n° 83-84). Né à Toulon en 1936, le poète est toujours aussi actif et donne des lectures dans le Var, signalées sur notre site.

Lecture d'extraits de "De chair et d'os" Saint-Germain-des-Prés 1979, de "Sous silence", poèmes anciens.

 

Limités à ta peau.

Aime-moi. Même après.

Encore.

Sans. Même semblant.

 

Nous avons tant aimé de la chair sur la terre

la chair qu'on ne répète pas

que la mort nous saisit déjà

pour se conserver

dans l'absurde chair qui saigne des autres

qui nous mariera

qui nous trahira

comme à la gorge de la mer prise une vague

 

Après l'envol des laines chaudes

nus

comme des pousses

impatients

d'octobre

précipités de notre sang

vers une chair douce à ouvrir, trop :

trop comme si la mort à terre guettait

 

Depuis ces cadavres de lit

le premier cadavre fait le lit

le corps

défait depuis

défraichi de fidélité

depuis le sang le sperme sentent

- un drap ne suffit pas dessus -

les doigts l'aisselle de mémoire

le premier cadavre perdu

 

depuis la caresse choisie par la moelle

d'une autre

 

deux chats d'agonie

dans les près à veinules des jambes

 

entre les os à cheveux blancs

cellules en foule de veuves

 

ne plus s'attendre qu'à soi-même

menacé de ses propres os

 

D'ailleurs

à qui manquer

parti perdant perdu sous les déchets

qu'on oubliera

Nul regret. A peine de chair.

Le mien

que d'ici j'éternise à t'apaiser

les seins

 

Lecture d'extraits du dernier livre de Marcel MIGOZZI "Derniers témoins" Tarabuste éditeur, 85 pages, 11 €. Une écriture plus resserrée, où le silence gagne comme des interstices de lumière dans les gouffres, par la place faite au blanc, à l'intervalle, et la persistance trente années plus tard, de l'obsession des os, de la putréfaction. Un appel désespéré à l'ultime flamme de l'amour: et toi            ombre verbale / essaie de te faire aimer

Lecture de larges extraits.

 

c'est l'avalanche dans l'argile

les os réduits

les yeux qui tombent sur la nuque

 

l'arche du vide

 

fument les ruines

*

 

aimer mourir espérer voir

se purifier croire

sentir mourir remercier

rêver écrire aimer

mourir

se souvenir de partager

 

cherchez l'intrus   sans avenir

 

La poésie mystique de haut vol est toujours vivace dans la création contemporaine. Nous avons déjà recommandé la lecture de l'œuvre du poète-moine de l'abbaye de Landèvennec   Gilles BAUDRY ("Le Bruissement des Arbres dans les Pages" chez Rougerie, 13 €). Cette fois, c'est une moniale, sœur Catherine-Marie, du monastère de Sainte-Marie-de-Prouilhe dans l'Aude qui est l'objet d'une forte attention. Josette SEGURA et Eric DAZZAN, tous deux poètes et éditeur dans le Gers, ont publié à L'Arrière-Pays "Le Mendiant d'Infini, poèmes extraits des carnets d'une moniale", livre sublime s'il en est. Saint-Paul lit l'Avertissement en exergue des textes de la moniale, pour éclairer les auditeurs sur la genèse de cette publication qu'il ne faut en aucun cas rater. C'est un poète d'origine brésilienne, Max de CARVALHO qui a découvert  les feuillets des poèmes de la religieuse au magasin du monastère et a permis cette publication. Née en 1926 sous le nom d'état civil de Françoise Azaïs de Vergeron, elle réussit des études de droit avant de rejoindre son monastère en 1948. Ses poèmes se rattachent à la longue tradition de la "mystique nuptiale" ou à celle de la "mystique de l'essence".

Lecture de larges extraits du livre.

 

Je suis partie au point du jour

à la recherche d'une source.

 

Longtemps j'ai remonté

le cours d'un ruisseau frais :

 

eaux limpides,

rives d'aubépines -

 

mais cette source

a sa demeure

dans le rocher.

*

 

Seigneur j'ai soif,

ma source est tarie,

mon cœur est plein de pierres,

chaque pierre est un cri.

 

J'ai dans mon cœur

tout le désir des mondes,

 

et je suis devant Toi.

*

Heureux l'homme qui voit

en son néant une coupe :

il boit le Soleil.

*

Il va

te consoler,

pourquoi pleurer ?

 

La coupe

s'éjouit

de sa courbure,

 

non pour avoir

 

mais pour recevoir.

*

Non-voir, la vision véritable.

 

L'illumination -

un toucher du regard.

 

La vraie connaissance :

une ignorance qui passe

toute intelligence.

 

Là, seul le silence

est témoin de l'union.

 

L'âme est ravie

au-delà d'elle-même

en un Rien suprême.

 

Jean-Pierre FAYE poète mythique depuis des décennies et qui a beaucoup marqué Saint-Paul, a publié aux éditions L'Harmattan collection Notes de Nuit, livre audio, 147 pages, 25 €, "Choix de poèmes lus par l'auteur". C'est un document exceptionnel, lire le poème et l'écouter par son créateur. De plus, Jean-Pierre FAYE fait partie de ces quelques poètes dont la lecture de ses propres poèmes est une création et une réussite en soi. Plaisir garanti d'écouter et de voir le DVD inclus dans le livre. Une initiative que l'on commence à découvrir chez quelques éditeurs comme Flammarion par exemple avec le dernier livre de Serge PEY "Ahuc".

Diffusion d'extraits de lecture par Jean-Pierre FAYE.

 

ils mettaient en ligne le rivage

et disposaient ensemble les machines et vie

                        et s'assemblaient l'un dans l'autre à jamais

                        à elle il faisait ce qui était sa plainte

                        elle lui ouvrait les corpuscules de matin

                        ils ont déchiré ensemble jusqu'aux fruits

                        ils se sont donné ce qui a échappé

                        ils n'avaient cesse d'être encore davantage

                        ils meurtrissaient la faim grandissante

                        il lui baisait son rire de tous côtés

                        et elle lui portait ses bras et ses hanches

                        ...

 

Enfin Saint-Paul signale la parution chez Flammarion collection poésie, du livre d'Eric SAUTOU "Les Vacances", 185 pages, 16 €. Ce poète vit à Montpellier, ville méditerranéenne qui abrite de nombreux poètes. La 4ème de couverture nous dit que :

 

Le nouveau livre d'Eric Sautou se présente presque comme un cahier de vacances aux vignettes déjà lointaines, effacées par le temps. Une première section (Les souvenirs) égrène une liste d'images et d'objets usuels, dressant un catalogue aléatoire, objectif et subjectif à la fois, des choses communes chères à Pérec : de la toupie à l'énorme édredon, en passant par le badminton et les bataillons d'orage (les aléas du ciel rythment l'ensemble de ces pages). Le corps de l'ouvrage (simplement titré : Les poèmes) revient à la manière désormais familière de l'auteur, déroulant un récit morcelé, entrecoupé d'incises et de vides (n'est-ce pas le sens caché de ces vacances ?) : ces strophes s'adressent à un être qui n'est jamais nommé (la Lettre finale le confirme) mais qui focalise la mélancolie du souvenir, entre blessure et lumière. Ce qui frappe avant tout, c'est ce souffle toujours retenu, cette manière de dépeindre l'éloignement du monde sans jamais hausser le ton, à travers une description minimale, presque atone parfois, qui oscille entre intérieur et extérieur pour mieux dire ce tourment secret : « poèmes choses brèves c'est ici que je reste ».
Lecture d'extraits du livre

 

à ma chambre
où s'essoufflent des rideaux
je crois que sans mot
je redeviens le seul
*
 
il y a plus loin un village (un port de pêche) où viennent
les baigneurs (puis cela disparaît)
 
j'ai fait le tour de sa maison de son jardin j'ai repeint les volets
j'ai refermé dans le tiroir
la seule clef
de son trousseau

 
 
 
15/05/2014
 
 

 

 

Christian Saint-Paul indique aux auditeurs que les éditions érès (www.editions-eres.com), 33, avenue Marcel Dassault, 31500 Toulouse, vont publier en juin, trois livres de poèmes d'un très grand intérêt, au format de poche, chacun contenu dans une pochette et d'une confection originale particulièrement réussie. De l'édition de haute qualité pour 10 € le volume ! Décidément, comme ne cesse de le démontrer l'émission "les poètes", la poésie aujourd'hui se porte très bien. Chacun des livres ci-dessous justifierait une émission. Les auditeurs, et les bibliothécaires, pour que ces ouvrages remarquables soient aussi accessibles en lecture publique, sont invités à commander ces livres en pochette.

Il s'agit , selon les informations divulguées par l'éditeur sur son site, de :

 

 

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Couverture 300 dpi >>

Dépli

Alfredo COSTA MONTEIRO



En librairie : 05.06.2014
po&psy - collection dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot

ISBN : 978-2-7492-4136-4 
EAN : 9782749241364 

10.00 €

 

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Résumé (+)

 

 

Dépli est un poème dans lequel les trois langues constitutives de l'identité de l'auteur - portugaise, espagnole et française - s'entremêlent, s'entredisent sans jamais s'interdire.

Le texte se compose de bribes agencées selon une combinatoire construite sur la sonorité des mots. Poussé dans ses retranchements phonétiques, le langage, dans un premier temps, semble perdre sens. Mais bientôt se profile une autre langue, étrangement sonore,  une langue qu'on dirait tout droit sortie de l'inconscient de son auteur et qui ouvre à une autre communication possible, éminemment poétique.

Dépli se présente sous les deux formes complémentaires d'une partition de mots et d'un enregistrement audio du texte par l'auteur, sur mini CD.

Mise en vente le 5 juin 2014.

 

Les autres titres : po&psy / collection dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot. (Cliquez ici)

Thème [
Psychanalyse]

 

 

     

 

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Couverture 300 dpi >>

J'ai jardiné les plus beaux volcans

Michel DUNAND



En librairie : 05.06.2014
po&psy - collection dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot

ISBN : 978-2-7492-4135-7 
EAN : 9782749241357 

10.00 €

 

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Résumé (+)

 

 

J'ai du mal à parler de moi. Je n'y tiens pas vraiment. J'ai donc décidé, de nouveau, dans ce neuvième recueil, et cela sans orgueil, de laisser le plus souvent la parole à certains de mes compagnons de route, ou de mes guides. Ils vous diront forcément, tout en se présentant (vous les connaissez, je pense, en tout cas, pour la plupart d'entre eux), qui je suis, qui je ne suis pas. Mais ne vous fiez pas trop à leurs propos. Je reste un écrivain...

Michel Dunand est né en 1951 à Annecy, dont il dirige la Maison de la poésie. Poète lui-même et récitant très actif, il anime depuis 1984 la revue Coup de soleil (poésie et art).

Mise en vente le 5 juin 2014.

 

Les autres titres : po&psy / collection dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot. (Cliquez ici)

Thème [
Psychanalyse]

 

 

     

 

 

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Bateau de papier

Olav H. HAUGE (ed)


Co-Auteurs : 
Sandrine CNUDDE - 


En librairie : 05.06.2014
po&psy - collection dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot

ISBN : 978-2-7492-4134-0 
EAN : 9782749241340 

10.00 €

 

 

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Résumé (+)

 

 

Il y a beaucoup d'écueils
dans la mer.
Pourtant
c'est un écueil qui t'a sauvé
.

Vie de paradoxes, en effet, que celle du "jardinier d'Ulvik", homme simple qui partagea sa vie entre écrire et cultiver ses pommiers ; autodidacte sédentaire qui a lu, traduit et commenté les plus grands poètes étrangers ; qui, s'étant heurté pendant 30 ans aux "écueils" de la schizophrénie, a néanmoins  publié une quinzaine de recueils et est aujourd'hui célébré par la Norvège comme une gloire nationale. Un homme que, sans aucun doute, l' "écueil " poésie aura "sauvé"...

Cette sélection de 28 poèmes brefs de Olav Håkonson Hauge (1908-1994) a été établie et traduite du norvégien par Anne-Marie Soulier. La photo est due àSandrine Cnudde. Édition bilingue.

Mise en vente le 5 juin 2014.

 

Les autres titres : po&psy / collection dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot. (Cliquez ici)

Thème [
Psychanalyse]

Lecture d'extraits de ces ouvrages qui feront l'objet d'un autre signalement prochainement.

Un mot

 

Un mot

- une pierre

dans une rivière froide.

Encore une pierre -

Il m'en faudra d'autres

si je veux traverser.

*

Les coquelicots

 

Quel est l'elfe

qui t'a visité cette nuit ?

Des habits de soie rouge

se sont déposés sur le pré.

Sont-ils à lui ou à toi

ces yeux noirs ?

*

Aujourd'hui j'ai vu

 

Aujourd'hui j'ai vu

deux lunes,

une nouvelle

et une vieille.

J'ai grande confiance en la nouvelle lune.

Mais c'était sûrement la vieille.

 

Olav H. HAUGE

 

*

Oak Parc. Chicago.

Le berceau de l'auteur vaut le voyage, ou, tout au moins le détour, mais uniquement pour les initiés, les pèlerins.

            Morosité.

            Vacuité.

*

Je déambule

en sifflotant

gaiement,

Paris

sous le bras.

 

*

 

Madrid,

Pamplune

et Barcelone

attendent

à deux pas.

 

                        Quartier natal

                        d'Hemingway.

                        Chicago.

*

 

            Coup de pinceau maternel.

            Couleurs tendres.

            On dirait que l'artiste a tenté d'apaiser

l'incendie. L'ouragan.

            Front tourmenté de Paul Verlaine.

            Il est ailleurs. Egaré.

 

                        Ferdinand-Auguste Cazals.

                        Portrait de Paul Verlaine

                        (vers 1895 - 1896)

 

Michel DUNAND

 

Les auditeurs sont invités ensuite à lire "La fable de l'ineffable, Tombeau de Gaston Miron (1928 - 1996)" de

Fernando d'ALMEIDA aux éditions L'Harmattan (Cameroun), 274 pages, 27 €. Url de référence : http://www.editions-harmattan.fr

 

 

 

Présentation de l'éditeur :

Gaston Miron (1928 - 1996) vient du Québec. Poète ayant su marquer une rupture radicale avec l'œuvre de ses prédécesseurs, Miron a incarné dans son pays la stature de poète national. Versé dans la recherche de soi à partir de l'humus national, sa poésie se décline en miroirs nombreux, alternant constamment l'être de l'homme et le noumène ancestral.

Fernando D'Almeida
Fernando D'Almeida est né en 1955 d'un père béninois et d'une mère camerounaise. Journaliste de formation, il vit au Cameroun. Il est l'un des poètes béninois les plus marquants des années 80. Il enseigne les littératures française, belge et québécoise à l'université de Douala.

Url de référence : 
http://www.editions-harmattan.fr

 

Lecture de larges extraits.

 

Ici l'élégie tire parti

De la distance entre

L'automne et l'harmattan

Quand la neige

Nous prépare

A l'identité turbulente

Qui nous précède dans l'inaltérable

 

Sans fin est l'intime

Qui vers le multiple pointe

Quand s'exerce

La tension entre la vie

Et les choses en devenir

 

*

A pas de neige

La mort soliloque

Sous le poids du volcan

Où s'use l'éternité

 

Dans l'allée des miroirs

La clarté voile ton corps

 

Depuis que le "poème sait

Où vont les morts"*

La vie se lucidifie

Dans la saignée des syllabes

 

*guillemets pour Dominique Sampiero

 

En exergue, le poète cite cette phrase de Claude BEAUSOLEIL : "Toute écriture doit quelque chose à tout".

Un grand livre d'un grand poète, à connaître sans attendre !

 

Une fois n'étant pas coutume, Christian Saint-Paul termine son émission par la lecture de larges extraits de son premier recueil

 "Les murènes monotones" publié en 1969, puis réédité aux éditions de Midi / Poésie Toute avec quelques ajouts, en 1980. Ce livre est dédié à Claude SAGUET qui avait incité à sa première publication. C'est un long poème épique, radiophonique car il fut à l'origine conçu pour être dit à la radio, sur la traversée des villes, des lieux et des amours de jeunesse de l'auteur.

 

 
 
 
8/05/2014
 
 

 

 

En préambule, Christian Saint-Paul rapporte une observation faite récemment, d'un rapprochement d'écriture, à quarante cinq ans d'intervalle, entre deux femmes poètes qui incarnent une sensibilité poétique marquante. Andrée BARRET avait en 1968 séduit par son écriture aérienne, où les silences s'inscrivaient en creux pour mieux suggérer, où les séquences se séparaient par des tirets, où les mots effleuraient les images avec une subtilité heureuse, mais où l'idée, le sentiment communiqué, étaient redoutablement forts. Cette force, née d'une douceur inventée pour nous parler plus intimement en ne gardant que l'essence des choses, l'aperçu étonnant de la marche d'un monde, celui de l'auteure, qui devient alors le nôtre, nous la découvrons depuis ses premiers textes chez Isabelle LEVESQUE. Deux générations de poètes qui perpétuent sans concertation, mais dans le miracle du génie poétique, la transcription du monde. Toutes deux, dans l'habile façon de dire la vie, s'ancrent à l'universel qui nous reflète.

Lecture de textes d'Andrée BARRET et d'Isabelle LEVESQUE.

Sur la frange du premier mot

sur le premier bourgeon - biseau du paysage

avide - sur le bord

du projet qui se reforme - je

 

de profil je rôde et dépasse

je croise dans - je sollicite

la promesse plus noire

*

Au centre d'une savane atteinte

toute de paix - d'herbes flexibles

de fleurs cueillies jadis - la centaurée

 

balance un monde

mauve - soie mauve courte

chevelure

 

ô touffe - vie mouvante

ô moment d'ordre

*

D'un versant d'ocre - d'un plan de pourpre - cela - sans retombe

 

écroulements - cubes de transparence - connu

qui bascule

de détache

quitte l'insaisissable

 

renonce

* Invisible puis négative

cheveux de neige face d'ombre

gestes

des mains

du corps déjà

 

j'émerge malgré moi

on assemble des signes

et c'est la - ce n'est rien

 

Andrée BARRET (quatre poèmes, "action poétique" n° 36, janvier 1968)

 

Seul c'est à croire la parole,

ventre serré, pour balbutier serait

- est-ce condamné ?

N'entendant que courage, cœur à l'ouvrage,

les vers essaiment. Acheminer. Courte-page,

tirer le nombre des années. Vie face au cours,

peu s'en faut, l'éternité.

 

Question posée - forme nuage,

ponctuation hèle un signe inversé.

 

Réponse.

 

Le silence a percé,

gouttelettes,  fines. Elles ont versé

sur la terre, l'encre. Noire, vie c'est.

 

Point.

*

Fortuit,

 

ce fut sommeil. Creux laissé,

vallon c'était. Désir.

Charme né de voix subite - sirène

ou l'armée de Troie.

 

Dévaste, honore.

A l'heure - rançon, soudain

tout

atteint.

 

Des instruments, cordes au vent dissipées.

Lyre

- aurait fait l'affaire, un chant

accompagné. Aède au ciel dévêt belle muse.

Résiste. Pour la forme.

Débridée. A deux,

sauvages - poésie ?

Proscrite. Or

- renversement hardi des vers.

 

Tant mieux.

Isabelle LEVESQUE "Ultime Amer" éditions Rafaël De Surtis.

 

Ciel   encore,

ce tourment d'après le soir.

Nuit tombe, c'est   encore

le bris,

l'éclat où tu vis   passé loin

épars   flaque accrue

avalant    mystère,

densité du jour.

 

Sois ce retour,

initié, contraire,

dispersé dans mon souffle,

des mots, la couleur douloureuse

 

des retrouvailles.

Isabelle LEVESQUE "Terre !" éditions de l'Atlantique

*

            J'aurai volé le toit du monde, pris même la cendre de mes doigts brûlés, j'aurai sur le rouge ardent convolé, j'aurai d'un trait, j'aurai pour toi

 

                        (cœur né).

Isabelle LEVESQUE "Ravin des Nuits que tout bouscule" éditions Henry

 

Lire d'Isabelle LEVESQUE "Va-Tout" aux éditions Les Vanneaux et "Un peu de ciel ou de matin" aux éditions "Les Deux Siciles".

C'est Annie ERNAUX qui nous a tant appris sur nous-mêmes et sur tous, à partir de notre génération née de la guerre ou de l'immédiate après-guerre, qui révélait dans "L'événement" : "Et le véritable but de ma vie est peut-être seulement celui-ci : que mon corps, mes sensations et mes pensées deviennent de l'écriture, c'est-à-dire quelque chose d'intelligible et de général, mon existence complètement dissoute dans la tête et la vie des autres". L'existence de Matiah ECKHARD, dont le passage auprès de nous prît la trajectoire d'un météore, est aujourd'hui "complètement dissoute dans la tête et la vie des autres" par ses compositions musicales et ses "Lointains chants sacrés d'où je suis né" (Euromedia 2014, voir bulletin de commande sur:  http://les-poetes.fr). Il faut lire ces textes dans ce beau livre où les sept peintures de sa mère, l'artiste Angela BIANCOFIORE, sont des échos de couleurs qui prolongent la gravité des mots d'un adolescent admis soudain à la sagesse, par l'inconnaissable volonté du temps. Il faut vraiment acquérir ce livre dont les revenus sont destinés au financement du Prix international de poésie Matiah ECKHARD (attribué aux jeunes poètes entre 12/25 ans).

Lecture de poèmes de Matiah ECKHARD.

Ô Amour, je te mordrais

bien mille fois sans foi ni loi.

Je veux me perdre en toi

découvrir ce que je connais

m'accomplir pour donner

faire de toi, rose d'été

une étoile à qui je chuchote :

brille bel amour, doux psychotrope

l'éternel est en cet élan vertical.

Le même qui relie l'homme à l'étoile.

*

Si en un seul instant

je peux ressentir tout l'amour

et la beauté du Monde

c'est que les souffrances

n'ont que pour résolution le bonheur.

*

Ma demeure est un temple fascinant

où l'esprit a toujours su épouser

la spontanéité.

Les personnes qui m'entourent

ont autant de qualités et d'Amour...

Une vie délicieuse

à qui sait l'observer.

 

 

C'est un poème de Jean LAURENT, familier de la Tour de Feu de Michel BOUJUT et qui croyait en la bonté des hommes et en la pureté des poètes, qui est lu pour célébrer Matiah ECKHARD "Cantate pour un jeune mort" publié en juin 1958 dans la collection "Les poètes de la Tour" de "La Tour de Feu".

...

J'ai vu j'ai vu l'adolescent

Devant moi a passé le collier de ses folies

Sa joue s'est colorée d'images tendres

Il a pleuré pour un soir qui ne finissait pas

Pour une note incertaine un cœur fermé

 

Quand je prenais ta main de grand garçon indocile

Aux heures où nous jouions la liberté

C'était pour te conduire où tu savais marcher sans moi

Et mieux que moi

Chez les enfants qui rient dans les royaumes poétiques

Et les terres prêtées pour inventer des joies nouvelles

Ils le diront les compagnons du rire et de la grimace

Ils voudront poings tendus contre le néant

Témoigner de ta vie placarder les vrais mots

Jurer de la vérité de ta voix et de tes pas

 

Les chants de tous les pays l'entouraient

Et construisaient pour lui l'univers aux cent dimensions

 

Le père de Matiah ECKHARD, Michel ECKHARD-ELIAL, poète, traducteur, directeur de la revue LEVANT, avait écrit un poème sublime à la mort de sa mère, enterrée à Toulouse, comme celle de Jean SENAC. Lecture de "Mère illimitée" (Carnets des Libellules n° 5 - 1989).

Mère illimitée

(extraits)

Pour Christian Saint-Paul

sa parole et la tienne

multiples d'une commune destinée.

 

nous habitions dans ta main

une étincelle

d'île

 

une poignée de nuit

j'ai appris à te voir

de si loin

 

prêter à cette voix

que tu me prends

 

des treize portes

tu choisis

la porte de l'eau

pour couler avec elle

dans la libération

et le chant

 

le fil

de l'unique

ceignant les hanches

comme un peigne

 

la libération de l'eau sept

fois

tourner la langue

dans sa bouche

 

et l'éloge

comme le vin

 

toute mesure

dans le mélange

des corps

 

le jour de l'eau

et le sel de la terre

les cinq pétales rouges

de la femme

 

je ferai pleuvoir sur une ville

et sur une ville

je ne ferai pas pleuvoir

 

l'immersion

du fruit

pour purifier

l'arbre de ta vie

 

 

C'est Michel ECKHARD-ELIAL qui avait conçu en 1987 une anthologie des poètes d'Israël, "Le poète est un coureur de fond", publiée à Toulouse par Christian SAINT-PAUL et dont Dominique BAUDIS, Maire de Toulouse et Président du Conseil Régional de Midi-Pyrénées avait signé la préface.

 Lecture de cette préface.

Lecture de poèmes de Roni SOMEQ, né en 1951 à Bagdad, comme son ami irakien Salah-Al-HAMDANI, publiés ensemble par ailleurs récemment par Bruno DOUCEY. Un projet d'animations culturelles autour de Muriel BATBIE-CASTELL, d'Esther GRANEK, d'expositions et d'anthologie de poètes de Toulouse et de Tel Aviv se fait jour pour l'année prochaine.

Pour terminer, Christian SAINT-PAUL signale la parution de "Juste après la pluie" de Thomas VINAU (Alma éditeur 283 pages, 17 €). Ce poète, né en 1987 à Toulouse et qui vit aujourd'hui dans le Lubéron, est une des voix de la jeune poésie.

Lecture d'extraits.

Le monde de la nuit absolue, celle des aveugles, interroge tout homme voyant et tout poète. Nicolas PESQUES publie chez Flammarion poésie, "La face nord de Julian, onze, douze " (230 pages, 18 €).

Lecture d'extraits.

 

 

 
 
 
24/04/2014
 
 

 

Matiah ECKHARD

 

Jean-Louis CLARAC

 

Claude BARRERE

RETOUR

 

 

 

L’anthologie du Printemps des poètes 2014, publiée aux éditions Bruno Doucey « La poésie au cœur des arts » est dédiée à la mémoire de Matiah ECKHARD, poète, pianiste et compositeur, disparu à l’âge de 19 ans le 10 janvier 2014 à la suite d’une grave maladie. Il avait participé à de nombreux concerts dans la région de Montpellier et avait joué de l’orgue électronique à Toulouse lors de la présentation de la revue LEVANT au musée Georges Labit. Ses derniers carnets « Lointains chants sacrés d’où je suis né » font l’objet d’une publication posthume aux éditions Euromedia – revue Notos (52 pages, 7 peintures d’Angela BIANCOFIORE, 15 €, à commander par mail : euromedia.revuenotos@gmail.com  ou par courrier : 4, chemin du Rapatel, 34980 Montferrier sur Lez.

Angela BIANCOFIORE, plasticienne, professeure d’Université, sa mère, écrit :

  Matiah, jeune poète, compositeur et pianiste, a inscrit dans ses derniers carnets un cheminement singulier : avec une rare intensité, ses vers condensent le fruit de son expérience à la fois personnelle et universelle.

La parole révèle une découverte de chaque instant du monde alentour, une progression constante vers une conscience profonde : un regard qui se construit et qui pénètre l’univers, du microcosme au macrocosme, de la vibration subtile d’un atome jusqu’à l’étoile.

Nous sommes en présence d’une conscience créatrice : la joie se déploie dans le jazz, dans le jaillissement continu de notes, de nouvelles inventions, une musique partagée, intime et universelle, où la fraternité retrouve son sens profond, où chaque son est étroitement lié à la musique du cosmos.

Les poèmes en vers et en prose célèbrent la beauté du Monde : révélation qui émane de chaque être lorsque le regard, aiguisé par la souffrance, arrive à sonder l’existence secrète de toute chose.

Christian Saint-Paul et ses deux invités, Jean-Louis Clarac et Claude Barrère s’accordent sur l’exceptionnelle qualité du livre, livre d’artiste par les peintures aux couleurs vives mais comme voilées, percées par une lumière de l’intérieur, comme les taches de couleurs des vitraux de Notre Dame des Sablons à Arles. Si l’artiste a donné la vie à Matiah, c’est lui maintenant qui donne la vie à sa mère qui le rejoint dans ses créations picturales.

Les poèmes de Matiah sidèrent par leur extravagante maturité. Pouvait-il aller plus loin dans cette approche de la Vérité, dans cette lucidité sur l’incessant chemin ?

La fulgurance de ce jaillissement, c’est celle décrite par Gil JOUANARD : « tant qu’elle court, l’eau ne vieillit pas ». Et Matiah ECKHARD n’a pas vieilli. Ses poèmes sont un incendie d’étincelles. « Le feu meurt sans avoir vieilli » constate encore Gil JOUANARD (« Cela seul » ; Fata Morgana 2002, p 11). De Matiah, survit à jamais, cette image du feu, d’un être solaire qui nous illumine et nous réchauffe.

 

La seule et belle joie – la plus belle –

que  l’on peut avoir devant la mort,

(la mort approchant, la mort se faisant)

réside dans les sentiments de curiosité et d’excitation

purement infantiles

que représente cet évènement nouveau, (finalement)

cette nouvelle vie.

*

 L’eau qui jaillit de la roche

si pure, puissante et douce.

La boire à pleine mains

face aux couleurs rayonnantes de l’air pur :

du dehors

jaillir sans cesse

ressentir sa puissance et sa pureté

se donner à boire à l’univers

s’imaginer dans le don de soi à l’extérieur de nous-mêmes.

Alors je suis cette eau qui jaillit sans cesse de la roche

sous la lumière harmonieuse.

*

Le monde est merveilleux

mesure et harmonie ;

malheureusement ce sont

les hommes sans sagesse

qui se sont emparés

de son Histoire.

 

Lecture d’extraits du livre par Saint-Paul qui invite les auditeurs à cette fabuleuse découverte. Il précise que les revenus de cet ouvrage sont destinés au financement du Prix international de poésie Matiah ECKHARD attribué aux jeunes poètes entre douze et vingt cinq ans.

 

L’émission se concentre ensuite sur l’invité de la semaine Jean-Louis CLARAC accompagné du poète toulousain Claude BARRERE.

Jean-Louis CLARAC est né en 1951 à Limoux dans la rigole des Corbières. Il a fait des études de psychologie et de philosophie à Toulouse (auteur des travaux universitaires : Antonin Artaud ou la langue double et La langue poétique, itinérance dans la poésie de René Nelli). Aujourd’hui à la retraite, il a exercé les fonctions d’enseignant à l’IUFM d’Aurillac, ville où il vit.
Il est membre de l’Association La Porte des poètes, créée en 1985 et orientée vers la promotion des écritures latino-américaines ; il fait partie du comité de rédaction de la revue-édition Encres Vives depuis 1992.
Il a animé des ateliers d’écritures, dans des médiathèques et d’autres lieux du Cantal. Il participe fréquemment à des lectures-échanges.
Il est à l’origine des moments poétiques d’Aurillac, en collaboration avec la saison culturelle du théâtre de la ville, qui  a accueilli depuis 2005/06 environ tous les deux mois deux poètes. A ce jour, ce sont soixante et un poètes qui ont été présentés au Théâtre d’Aurillac. La formule initiale s’est modifiée et aujourd’hui c’est un seul poète par « moment poétique » mais avec des lectures par un ou une comédienne de textes d’un auteur choisi par l’invité. Ce programme est toujours annoncé sur notre site  http://lespoetes-fr  

De ces évènements, Jean-Louis CLARAC a fait paraître : VIBRATIONS EN PARTAGE        éditions La Porte des Poètes (Paris). Ce nouveau livre de Jean-Louis Clarac rassemble les textes qu’il a écrits pour présenter les poètes invités dans les « Moments poétiques d’Aurillac ». Les 61 poètes sont aussi présents par un poème inédit ou choisi dans leur œuvre publiée. C’est un livre de 132 pages, dos carré, au format 25 cm x 18 cm, couverture en quadrichromie avec une encre de Françoise Cuxac, édité par La Porte des Poètes avec la collaboration et le soutien du Théâtre d’Aurillac. Vous pourrez vous procurer « Vibrations en partage » à la librairie des Frères Floury pour les toulousains, ou en adressant à Jean-Louis CLARAC 98, rue de l’Egalité 15000 Aurillac un chèque de 15,30 € correspondant au prix du livre (12 €) et des frais postaux.

Jean-Louis CLARAC lit la présentation qu’il a rédigée pour la venue du poète et critique Georges CATHALO.

C’est avec des encres du poète Claude BARRERE également plasticien, qu’est paru « Vers les confins » (éditions Encre et Lumière, 20 €) prix de poésie de la ville de Béziers. Lecture d’extraits par l’auteur. Lecture d’extraits du livre : « Le vacarme du monde » (éditions de l’Atlantique, collection Thémis, 18 €). Jean-Louis CLARAC s’inscrit depuis le début de sa création poétique comme un poète du lieu. Le regard porté sur le lieu détermine la sensibilité réservée au texte. Le lieu ne peut s’effacer au profit d’une pensée pure. Le poète est imprégné des lieux qu’il traverse ou dans lesquels il rythme un quotidien répété. Le lieu devient le souffle de la parole poétique. Déjà ce souffle venu des Corbières se dégageait de son premier livre « Maquis le feu mis aux sarments »publié en 1984 par Tribu. Mais il s’étendait à Montségur ou à Carnac, ou à Toulouse, quartier de Bagatelle :

Bagatelle

 

Un chemin pour des prunes

se perdant en Rocade

Un chemin pour les merles d’Arlequin

Bagatelle

Avec la vitesse du sourire

qu’éponge un soleil de misère

il se fond dans le bois où

le vent dérouillé déracine son peuple

en oubli d’harmonie

Pourtant quand il hurle dans Bagatelle

à bout de souffle claquent les enfants

dans les feuilles volantes

De grands bruits rouillés d’élytres d’automne

éclatent les boiseries sans toiture

et sus pendent aux branches écorchées

des ampoules pleines à craquer de rires confettis

prêtes à flamber la mouillure de l’herbe

Alors se frottent les enfants

alors se balancent ludiques et soudain

la vie insufflée par l’innocence

se crie dans les arbres foutus abattus

misérables étincelants telluriques

La magie de l’enfance fait un train du tonnerre

un éclair de vie coloration aux accents du Monde

La beauté quotidienne se balance sur un levier

d’amitiés

Et les enfants harmonisent la Terre et le Monde

et les enfants en partance vers l’oubli   

se moquent que demain il fera soleil

et les enfants s’amusent et ils s’amuseront

au-delà de la frontière fantomatique

que dressent les adultes qui ont perdu de vue

            le trait d’union arborescent

            l’arbre de vie

            le pont de vie

            par-delà les misères des grands

parce que les enfants portent le feu en eux

outrepassant le ratissage proche du

Service d’Assainissement de la ville de Toulouse

 

Le Prix Troubadour décerné par la revue « FRICHES » lui est décerné en 2010 pour « Passager au jardin ». Lecture d’extraits.

Oyez, Oyez :

Errement terrement

de la terre à sa motte

écoulement des sens

De matière en matière

fragile grenue

les sens du tangible

subliment le printemps

Friables les mots

arides les paroles

poussières les écrits

*

Les vents dispersent les senteurs

Excès enivrement et cetera

Ecoulement des sens

dessaisie cyclique des semis

des légumes et des fleurs

Dans la terre germent les mots

et les mots déterrent le sens

Les mots condensent la terre

dans la rondeur de la motte

jusqu'à la limite

de la pulvérulence

Extrait de Passages au jardin

Editions Cahiers de Poésie verte,

Prix Troubadours 2010

Le lieu toujours avec un recueil publié dans la collection « lieu » d’Encres Vives « Lignes de Crête Fond d’Egée » (Grèce, 6,10 €, 2 allée des Allobroges 31770 Colomiers). Lecture d’extraits.

Trente années d’écriture semblent avoir conduit Jean-Louis CLARAC à une sérénité qui n’a renoncé en rien à l’élan de révolte qui couvait dans les cendres des sarments de ses Corbières natales. La voix s’est affermie, le ton est celui des certitudes assumées, les mêmes depuis toujours, la dénonciation de la violence et l’appel à la fraternité. Par le Verbe.

Sa bibliographie :

Vers les confins , Grand Prix de Poésie de la Ville de Béziers 2011,
Le vacarme du monde, éditions de l’Atlantique, 2011
Passages au jardin, Prix Troubadours 2010, Cahiers de Poésie Verte, 2010
Numéro spécial Jean-Louis Clarac, Encres Vives, fin 2007
Lisières , A la rêveuse matière, 2007, CD Audio, poèmes dits par l’auteur, création musicale de Daniel Coste, illustrations de Françoise Cuxac
Dans les traces , A la rêveuse matière, 2005 en collaboration avec Françoise Cuxac, artiste
Laisses levées, Encres Vives, 2005
Laisses brisées, Encres Vives, 2003
Lieux-dits du dépaysement (extraits), Panorama n°22, dirigé par Jean-Pierre Metge, 2002
L’ibérante échappée, Encres Vives, 1999
Paysages de l’inépuisable , Clapas, 1998
Variations de l’inespéré , Traces, 1995
L’infime, l’infini , Hautécriture, 1994
Végétale orchestrée , Clapas, 1994
Fécos , Encres Vives, 1993
Brèves solaires , Encres Vives, 1993
Carnaval/Ode , Ed. Patrice Thierry – L’éther vague, 1985
Maquis le feu mis aux sarments, Tribu, 1984
La terre a goût de langue , PA-Edition, 1982
Dans l’écart au cœur , Millas-Martin, 1978

Livres d’artiste, avec Françoise Cuxac :

Dans le creuset des écritures, 2011, collection Cahiers du Museur dirigée par Alain Freixe, 21 exemplaires
Rêveuse-Menhir, 2011, 25 exemplaires
Passants, 2005, 10 exemplaires
Lisières, 2004, 6 exemplaires
Orbe, 2004, exemplaire unique hors-commerce

Livre d’artiste, avec Thierry Lambert :

Aurores, 2009, 4 exemplaires

Il figure dans les livres collectifs :

Visages de poésie – Portraits crayon & Poèmes dédicacés (Jacques Basse – Anthologie tome 6, Rafael De Surtis, 2012
Terres d’Afrique, dirigé par Gabriel Okoundji, éditions NDZÉ, 2012
Nous, la multitude, dirigé par Françoise Coulmin, éditions Le Temps des Cerises, 2011
L’année poétique 2009, éditions Seghers, 2009
L’expérience poétique, éditions Saraswati, 2009

Anthologie franco-latinoaméricaine bilingue, Ed. La Porte des poètes, 1999
Terres du Sud, dirigé par Gilles Lades, Le vert sacré, Hautécriture, 1994
Une échelle de poèmes pour Escalasud, Traces, 1992

Il a publié poèmes ou articles dans les revues, A contre silence, Loess, L’ Ether Vague, Tribu, Encres Vives, Friches, Monde en Oc, Lo Convise, Froissart, La Sape, Souffle, Lieux d’être, Arpa, De l’autre côté du mur, Bulletin des Cahiers des amis de François Ozenda, Linea, Décharge, Diérèse, Triages, Saraswati, Nu(e),…

Il a coordonné le numéro Joë Bousquet (Encres Vives, 1997) et le spécial hommage à Joseph Delteil (Encres Vives, 1994). Il a participé aux numéros spéciaux consacrés à Joë Bousquet par les revues Loess, Tribu, aux Cahiers Joë Bousquet ou le génie de la vie (sous la direction d’Alain Freixe, 2000) ainsi qu’au numéro de Friches consacré à René Nelli et au numéro de La Sape sur Michel Cosem.

 

 
 
 
17/04/2014
 
 

 

 

Régine

HA-MINH-TU

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul dit son enthousiasme pour les derniers CD Rom du chanteur poète occitan, catalan, espagnol Eric FRAJ, et en particulier pour sa mise en musique de poèmes de F. GARCIA LORCA traduits en occitan par le poète écrivain Max ROUQUETTE. Depuis les années 40, ce dernier traduit l’œuvre de LORCA en langue d’Oc. Il était naturel qu’un passionné de la poésie espagnole comme Eric FRAJ mette tout son talent au service de la diffusion en lengua nostra d’un des plus grands génies poétiques du XXème siècle. Sur ce CD « Eric Fraj chante Lorca en occitan », Éric chante, accompagné à la guitare par Morgan Astruc, quinze poèmes de Lorca dans la traduction de Max Rouquette (tirés du Romancero gitano, du Cante Jondo, du Diván del Támarit, et du Llanto por Ignacio Sánchez Mejías). 1 CD Digipack 18 euros (avec livret 16 pages, contenant les textes des poèmes et une introduction de Philippe Gardy). Pour commander en ligne (et écouter 2 extraits), voir: http://www.max-rouquette.org/commandes/fraj-lorca.htm ou écrire à : Association Amistats Max Rouquette - 2 Rue de l’Ancien Courrier - 34000 Montpellier

Diffusion à l’antenne de « Baladeta dels tres flumes ».

Parmi les poèmes de cet album :

Memento

(poèma del Cante-Jondo)

 

Quand morirai

enterratz-me amb ma guitarra

jos la sorra.

 

Quand morirai

entre irangièrs

e mentastre.

 

Quand morirai

enterratz_me se volètz

en una giroleta.

 

Quand morirai !

*

Quand je mourrai

enterrez-moi avec ma guitare

sous le sable.

 

Quand je mourrai

entre les oranges

et la menthe.

 

Quand je mourrai

enterrez-moi, si vous voulez,

dans une girouette.

 

Quand je mourrai !

 

Saint-Paul invite ensuite à lire la poésie hautement spirituelle des moines et moniale poètes, d’aujourd’hui. Pour cette semaine, il choisit le moine de l’abbaye de Landevenec Gilles BAUDRY et son livre publié chez Rougerie (88 pages, 13 €) « Le bruissement des arbres dans les pages ». Lecture d’extraits.

 A Olivier Rougerie

 

Poètes

voués à la notoriété

de l’ombre

 

de la conversation du vent

avec les arbres

nous n’avons que des bribes

 

n’importe

qu’il continue fébrilement

à feuilleter leurs fraisfeuillages

 

jusqu’à trouver enfin

au livre de la vie

en filigrane des nervures

 

nos petits noms inscrits

dans une note brève et sibylline

en bas de page

*

Tu cherches

un mot de rien

qui dirait tout

 

tu trouves

une parole silencieuse

assise au fond de ta respiration

*

Observé à genoux

Une coccinelle

Escalader une tige

 

Si nous étions vraiment humbles

Un seul brin d’herbe suffirait

A nous faire de l’ombre

 

L’invitée de la semaine est la poétesse Régine HA-MINH-TU, née en 1956 à Paris, germaniste et depuis une quinzaine d’années bibliothécaire à l’Université Paul Sabatier à Toulouse.  Saint-Paul la découvre dans les années 90 au sommaire de la revue TEXTURE que tenait alors Michel BAGLIN. Bruno DUROCHER des éditions Caractères la publie également à cette même époque. On retrouve son nom dans les revues de poésie, les anthologies et elle publie huit livres de poèmes. Elle vient cette semaine présenter son neuvième recueil de poèmes qui constitue le numéro 428 de la revue Encres Vives (le n°, 6,10 €, l’abonnement 1 an, 12 volumes, 34 €, chèque à adresser à Michel Cosem, 2, allée des Allobroges, 31770 Colomiers) : « L’Empreinte » avec une illustration de Philippe MINARD, peintre, graveur : http://philippe-minard.fr .

Il s’agit de marquer durablement l’empreinte d’une expérience humaine exceptionnelle dans le ciment indélébile du langage dans sa quintessence : la poésie. En effet, Régine HA-MINH-TU a travaillé pendant treize ans au sein des Archives allemandes de la persécution national-socialiste. De cette intense période elle dit : « Je n’avais été qu’une archiviste plongée dans les plaies vives des humains, et pourtant, cette activité m’a enfermée des années encore après avoir quitté les archives. Portet-sur-Garonne, Vernet sur Ariège, Noé, Septfonds, Gurs, Bram et autres lieux de mon nouveau quotidien, n’étaient que des noms de camps. J’ai remis peu à peu des couleurs vives à ces noms. Bram a pris des couleurs de son marché de plein air. »

Au micro, elle explique sa démarche, comment elle a pu exorciser la souffrance obsessionnelle occasionnée par la conscience de ce qu’elle découvrait dans son travail de traduction d’archives. Les dialogues avec les familles concernées par les atrocités commises par le régime national-socialiste, représentaient une terrible épreuve qui pouvait anéantir la journée. Sa vocation de poète lui a permis de transcender l’angoisse résultant de cette révélation de la nature humaine dans ce qu’elle offre de plus insupportable. Dire cela dans le poème. Par le poème, redonner la vie et mettre à distance la terreur. Et ne jamais oublier, car ce qui est advenu, peut revenir. Les génocides se sont multipliés dans le XXème siècle et le XXIème siècle est entaché de guerres larvées qui ne cessent de faire reculer la dignité de l’homme.

Pour illustrer ses propos elle fait écouter des poèmes de Gaston COUTE (1880 – 1911) le Bauceron, mis en musique et chantés par Marc ROBINE : « les conscrits », « la complainte des ramasseurs de morts ».

Elle lit aussi de Guy GOFFETTE « Souvenir d’Ohrid » extrait du livre « Le pêcheur d’eau » (Poésie/Gallimard) ; elle trouve des similitudes avec ce qu’elle a intimement ressenti dans certains poèmes de Marina TSVETAÏEVA (1892 – 1941) qu’elle lit également.

Lecture de larges extraits de « L’Empreinte ».

 

chaque jour pendant des jours

j’ai ouvert vos mots enfin déliés

et traduit vos douleurs

les signes manuscrits font trembler vos visages

photos, regards crevés de l’intérieur qui me fixent

dans vos silences,

les mots écorchent plus de cinquante ans de survie

transpirent les aubes hallucinantes

aux cerveaux glacés

dans l’immensité du temps,

dans l’irréversibilité

des folies

qui se cabrent

 

les frontières de sang coagulé

estampillent de nouvelles archives

 

combien d’archives encore ?

*

feuilles de journaux éparses

inventaire des crimes

l’encre est pâlissante

et fait pâlir le sang

les feuilles dansent

une ronde macabre

à tout vent

 

demain ?

 

Un recueil puissant publié par l’infatigable Michel COSEM que nous remercions. Régine HA-MINH-TU construit une œuvre poétique pas à pas et nous la suivrons dans ce chemin.

 

 
 
 
10/04/2014
 
 

 

Charles DOBZYNSKI.

 

RETOUR

 

 

 

Christian Saint-Paul invite les auditeurs à lire le numéro 48 de « NOUVEAUX DELITS  Revue de poésie vive » 6 €, abonnement  25 €, à Association Nouveaux Délits, Létou  - 46330 St Cirq-Lapopie. Cathy GARCIA dont les illustrations jalonnent ce numéro poursuit le chemin, allant de l’avant coûte que coûte, « vu que la marche arrière n’existe pas » dans la vie. Les 24 pages recèlent des textes denses d’auteurs à retenir ou que l’on a plaisir à retrouver comme Hamid TIBOUCHI ou Cécile COULON. Une mise en page pertinente et agréable avec les œuvres d’une facture maîtrisée de l’artiste complète qu’est incontestablement Cathy, et des citations qui interpellent telle celle-ci : « « Degas avait raison de dire qu’il faut décourager les arts ». Les hommes qui doivent créer créeront en dépit de tous les obstacles. Ce sont des hommes fleuves : on n’arrête pas les fleuves ». Henri PERRUCHOT in « La peinture ». Et toujours, la découverte d’un artiste sorti de l’ombre de la société pour projeter sa lumière inclassable dans nos consciences. C’est le cas de Sylvère MOULANIER avec son « Journal d’un SDF de luxe » http://sdfdeluxe.hautefort.com

C’est l’honneur des revuistes de donner la parole à ceux qui en sont écartés et qui ont tant à dire. Lecture d’un poème du poète plasticien Hamid TIBOUCHI.

Un fil

me relie

à mon enfance

le barbelé

*

Papier-textile

textile-papier                       aller-retour

corps écrit

palimpseste toujours

*

Le papier le carton la toile

C’est toujours moi qu’ils supportent

Certains jours poids plume

D’autres poids lourd

*

La toile   étendue à même le sol

tantôt je la piétine   tantôt je tourne autour

parfois encore on peut m’y voir dans la position de la prière

peindre    peut-être au fond ma façon à moi de prier

  


 

Daniel MARTINEZ  publie à ses éditions Les Deux-Siciles, « Frag  ments  & cætera  Une anthologie de poésie brève » établie et présentée par Jacques COLY (315 pages, 14,50 €). C’est la première anthologie de ce type qui offre un aussi large panorama d’une forme d’écriture brève. L’auteur de cette anthologie écrit dans sa présentation pour la 4ème de couverture : «  « Chaque poème est trop long », disait le poète allemand Günter EICH, on ne peut en faire le reproche aux œuvres rassemblées dans cet ouvrage qui donne à lire des auteurs aux expressions différentes, à la voix singulière, construites en marge des grands courants littéraires de leur temps. »    

Certainement la lecture de ces textes nés de la fulgurance d’un éclair de l’esprit confirme l’idée de Jean-Michel MAULPOIX en exergue du livre : « Le fragment est la conscience du poème ». Plaisir de trouver parmi tant de poètes prestigieux, Paul VINCENSINI. En 1985, lors d’une émission consacrée à Simone ROUSSEL poétesse remarquée par Pierre EMMANUEL qui avait préfacé son recueil, Saint-Paul annonçait à son invitée la mort de VINCENSINI qu’il venait d’apprendre et celle-ci ne put retenir ses larmes ; une amitié forte s’était forgée entre eux par l’écriture.

J’ai froid

Ô mon ange

Apportez-moi des foules.

 

(« Archiviste du vent », Le Cherche Midi, 1986)

 

Une anthologie étonnante de par sa fabuleuse diversité et l’incendie de tous ses éclairs, qui séduira le nombre croissant de passionnés d’haïkus, de textes minimalistes et d’aphorismes.

 

Saint-Paul salue ensuite son invité : Charles DOBZYNSKI.

Né en 1929. Journaliste, d’abord chroniqueur de cinéma aux Lettres françaises d’Aragon, puis rédacteur en chef de la revue EUROPE. Écrivain, critique. Il a appartenu aux rédactions d’Action poétique et d’Aujourd’hui poème. Traducteur (Anthologie de la poésie yiddish, Poésie/Gallimard) Sonnets à Orphée, de Rilke (Ed. Orizons), de Maïakovski, de Nazim Hikmet. Son œuvre poétique compte une quarantaine de titres, pour l’ensemble desquels il a reçu en 2005 le prix Goncourt de poésie et en 2012 le Grand prix de poésie de la Société des gens de Lettres. Entre les années soixante et 2000, sont à citer notamment : D’une voix commune (Seghers) L’opéra de l’espace (Gallimard) La vie est un orchestre (Belfond, prix Max Jacob) Journal alternatif (Dumerchez) La scène primitive (La Différence) Derniers livres en date : Je est un juif, roman (Orizons) La mort, à vif (L’Amourier), Un four à brûler le réel, poètes de France (Ed. Orizons, 2011), Un four à brûler le réel, poètes du Monde (Ed. Orizons, 2012) Journal de la lumière & de l’ombre, préface de Bernard Noël, peintures de Marc Feld (Le Castor Astral 2012) et Ma mère, etc. roman (Orizons, 2013).

C’est ce dernier livre « Ma mère, etc. roman » 183 pages, 18 € aux éditions Orizons collection Profils d’un classique qu’il présente aux auditeurs. (Voir : http://les-poetes.fr/parutions/parutions.html )

Voici ce que l’on peut lire sur la 4ème de couverture :

 

 Cela pourrait se dire une autobiographie, ce qui s’entretissse ici, comme une tapisserie depuis la naissance, en Pologne, c’est toute la gamme des événements petits et grands, parfois dramatiques, les aventures, mésaventures, les amours et les amitiés, les étapes de la construction psychologique et professionnelle de celui qui deviendra le poète de Je est un juif, dont ce livre est un peu le prolongement.

 

C’est la chronique d’une expérience jalonnée par les rencontres avec quelques grandes figures de ce temps, Cendrars, Éluard, Aragon, Char, Césaire, Asturias, Chagall. Itinéraire sinueux des rêves d’avenir, des utopies politiques, de l’enracinement dans la judéité.

Chaque séquence de cette vie a pour rythme la musique du vers, et constitue par sa continuité, autour du thème central de la mère, un roman aux variantes et embranchements multiples.

 

Charles DOBZYNSKI apporte des précisions sur sa vie qui est racontée dans ce livre de poèmes à sa mère, car il n’écrit pas des recueils, mais des romans de poèmes. Il explique que ceux-ci sont découpés en chapitres. Il a choisi cette fois-ci la forme classique de décasyllabes avec rimes, mais reste bien entendu totalement moderne dans le ton.

Il revient sur son passé : né à Varsovie, il arrive quelques mois plus tard à Parisen1930. Ses parents travaillent dans la couture, sa mère à domicile, son père en atelier. Lors de la guerre, il échappe par d’heureuses circonstances aux rafles. Il est sauvé ensuite avec sa mère par un Résistant qui les amène de Montargis où ils se cachaient à Paris retrouver leur père, par ailleurs engagé dans le groupe Solidarité. Son père lui apprend l’allemand. Bientôt il lit tous les auteurs de la modernité française. Il va ensuite les rencontrer et nouer des liens épais avec eux, la poésie, la littérature. Il raconte tout cela dans ce livre à sa mère.

Lecture par l’auteur de larges extraits. Evocation émue des figures qui l’ont marqué.

Il se dégage de cette vie tourmentée par les horreurs du siècle une indéniable sérénité qui donne une vraie puissance aux poèmes. Il évoque sa visite à Auschwitz en 1954, à une époque où le lieu n’était pas encore un lieu sacré de mémoire.

Il évoque ces noms, célèbres aujourd’hui, des poètes qu’il a fréquentés, admirés, aimés. Il se dégage de ses souvenirs une tendresse vivifiante.

Cette tendresse qui est en réalité, une des clefs du caractère tenace de Charles DOBZYNSKI, Saint-Paul l’avait éprouvée jusqu’à la moelle en lisant « J’ai failli la perdre » paru aux éditions La Différence. Il en lit un très court extrait qui résume la posture éminemment humaniste de l’auteur :

Pour toi née chrétienne

et pour moi juif récidiviste

c’est enfin la levée d’écrou

de l’excommunication

l’infamie soldée

le déicide commué

en relégation à vie

dans le mythe

deux mille ans de martyre

enfin rayés du protocole

et l’on protège dans les archives

non plus les Sages

mais les Messages

apocryphes de Sion.

 

Amour passionné qu’il voue à son épouse, mais aussi amour passionné de la vie et des êtres qui l’honorent. Il lit les poèmes sur ces personnalités exceptionnelles qui ont jalonné sa vie, comme par exemple Nazim HIKMET qui en 1958 défiait ARAGON.

La voix de Nazim Hikmet

 

J’entends toujours la voix d’Anatolie

Nazim lisant en turc. Des mots légers.

Neige de sons et d’accents étrangers

Dont la frontière en moi s’est abolie.

Depuis l’hôtel Bristol à Varsovie,

En l’an Cinquante-Cinq, dans le déluge

Du festival et puis dans son refuge

De Peredelkino, j’ai poursuivi

L’écoute de Nazim. J’ai vu blanchir

De quelques traits sa chevelure blonde

Ses vers planaient par essaims sur le monde

Jamais l’exil ne l’aura vu fléchir.

Le dur métier dont il se fit le maître

Plus que l’exil fut celui de l’espoir

Ce qu’il aima ne pouvait décevoir

Plus qu’à mourir il nous apprit à naître.

Je reprenais un par un les maillons

De ce tissu du sien du mien langage

Cherchant leur fil de vie et le codage

Des vérités déjouant les bâillons.

 

Dans son livre « Sur les sentiers de la poésie », le regretté Bernard MAZO consacrait un chapitre à DOBZYNSKI : « ou la beauté irréductible du chant ». Cette beauté, elle est coriace et vit toujours irréductible dans ce livre « Ma mère, etc., roman ».

 

 

 
 
 
3/04/2014
 
 

 

 

dubost-fabienne-lombardo2.jpg

 

 

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul invite les auditeurs à assister à l’intervention de Salah AL HAMDANI  le dimanche 13 avril 2014 à 15 h 30 à Balma (près de Toulouse) à la salle polyvalente, avenue des Arènes à l’occasion des Rencontres du livre et du vin du 10 au 13 avril. Ce poète familier des auditeurs de l’émission « les poètes », échappé des prisons de Saddam Hussein, exilé à Paris en 1975 présentera ses derniers livres parus aux éditions Bruno Doucey et le tout dernier « Adieu, mon tortionnaire », des récits publiés aux Editions Le Temps des Cerises.

 

C’est avec une profonde émotion que Saint-Paul appelle à la souscription du livre de :

Matiah  Eckhard

Lointains chants sacrés d’où je suis né

 

 

 

Matiah, jeune poète, compositeur et pianiste, a inscrit dans ses derniers carnets un cheminement singulier : avec une rare intensité, ses vers condensent le fruit de son expérience à la fois personnelle et universelle.

La parole révèle une découverte de chaque instant du monde alentour, une progression constante vers une conscience profonde : un regard qui se construit et qui pénètre l’univers, du microcosme au macrocosme, de la vibration subtile d’un atome jusqu’à l’étoile.

Nous sommes en présence d’une conscience créatrice : la joie se déploie dans le jazz, dans le jaillissement continu de notes, de nouvelles inventions, une musique partagée, intime et universelle, où la fraternité retrouve son sens profond, où chaque son est étroitement lié à la musique du cosmos.

Les poèmes en vers et en prose célèbrent la beauté du Monde : révélation qui émane de chaque être lorsque le regard, aiguisé par la souffrance, arrive à sonder l’existence secrète de toute chose (Angela Biancofiore).

 

 

 

Matiah Eckhard, né à Montpellier le 7 janvier 1995, a été poète, pianiste et compositeur.

Elève du Conservatoire à Rayonnement Régional de Montpellier en piano classique et en jazz, il a participé en tant que pianiste à de nombreux concerts : entre autres, l’Hommage à Franz Liszt, en décembre 2011 à la Chapelle Haute, Candolle, à Montpellier, organisé par le Conservatoire de Montpellier ; la lecture-rencontre en musique avec Salah Stétié Printemps de Méditerranée, en avril 2012, organisée par la revue Levant et l’Espace Averroès, Médiathèque Emile Zola, Montpellier ; la rencontre poétique et musicale De Bagdad à Jérusalem, avec Ronny Someck et Salah Al Hamdani, en juin 2013, salle de la Gerbe, Ville de Grabels.

Entre 2011 et 2013 il a travaillé sous la direction artistique d’Abdou Salim, saxophoniste de jazz afro-américain, au sein du groupe musical Le fruit du Freemind, avec lequel il a donné plusieurs concerts à Claret et dans la région en 2013.

A paraître aux éditions Euromedia - revue Notos, avril 2014

52 pages, avec sept peintures d’Angela Biancofiore

Prix : 15 euros

Commande par mail : euromedia.revuenotos@gmail.com

4, chemin du Rapatel 34980 Montferrier sur Lez France

Saint-Paul signale ensuite que vient de paraître :

VIBRATIONS EN PARTAGE        

éditions La Porte des Poètes (Paris)

 Ce nouveau livre de Jean-Louis Clarac rassemble les textes qu’il a écrits pour présenter les poètes invités dans les « Moments poétiques d’Aurillac » entre janvier 2006 et mai 2013 au théâtre d’Aurillac. Les 61 poètes sont aussi présents par un poème inédit ou choisi dans leur œuvre publiée.

 

Un livre de 132 pages, dos carré, au format 25 cm x 18 cm, couverture en quadrichromie avec une encre de Françoise Cuxac, édité par La Porte des Poètes avec la collaboration et le soutien du Théâtre d’Aurillac.

Lecture d’un extrait de la présentation du poète toulousain Claude BARRERE.

 Vous pourrez vous procurer « Vibrations en partage » en remplissant le bon de commande que vous trouverez en page d’accueil du site http://les-poetes.fr (15 € frais postaux inclus à régler  par chèque à l’ordre de « La Porte des Poètes 15 »et à envoyer à Jean-Louis Clarac, 98 rue de l’Egalité 15000 Aurillac.

Enfin, très rapidement, l’attention est portée sur le livre de Saleh DIAB « J’ai visité ma vie » édition bilingue français-arabe (Le Taillis Pré, 285 pages, 30 €). Ce poète né en 1967 en Syrie, a été journaliste littéraire à Beyrouth et est actuellement chargé du monde arabe au festival Voix Vives à Sète. Docteur en littérature arabe contemporaine, il vit en France depuis l’an 2000.

Mille chiens

Ce matin aussi

je ne suis pas sûr de moi

je jette un coup d’œil

sur mon retour au pays garé au grenier

et je monte dans le métro

 

le temps est gris au-dessous de mon humeur

et le silence avec toute sa charge commence

à faire naufrage dans mes yeux

 

en compagnie de mes pensées

je parcours les petites rues

de Saint Germain des Prés

et je me pose un peu au bord de la Seine

contemplant les bateaux

qui traînent les chagrins des amoureux

 

La rapide présentation de livres s’achève par le signalement d’un recueil du moine poète de l’abbaye de Landevennec en Bretagne, Gilles BAUDRY «Le bruissement des arbres dans les pages » éditions Rougerie, 87 pages, 13 €).

 

VOIX OFF

 

Ne le crains pas

le vide

ne le supprime pas

    me dit la voix

-et s’il ouvrait les apparences ?-

 

Ne veuille pas combler le manque

ni affranchir

toute distance

-si porter les stigmates

de l’absence creusait le pur désir ? –

 

Le peu, ne le méprise pas

considère l’insignifiant

-si passait la gloire dans les jours gris

L’illimité

Dans l’ordinaire des petites heures ? –

 

La phrase détachée, la phrase

inachevée, la toile

restée sur le chevalet – tout est là

    me dit la voix

dans la sève invisible de toute croissance –

 

Place ensuite à l’invité de la semaine : Patrick DUBOST.

 

Après des études de mathématiques et de musicologie, Patrick Dubost a publié en poésie une vingtaine de livres qui, tout en jouant dans les yeux, demandent à être lus à voix haute. Ce travail sur l'oralité l'a conduit vers la performance, mais aussi aux rencontres avec le théâtre, la marionnette, ou les univers musicaux (instrumentistes ou électro-acoustiques).

De cet énorme travail est enfin publiée une anthologie personnelle dont le bon de commande est disponible en page d’accueil du site les-poetes.fr. Il s’agit de l’édition Chez La Rumeur Libre, de :

Œuvres Poétiques (tome 1 & tome 2), 2012, 2013 ; ainsi que Mélancolie douce, 2013, Prix Lerrant des Journées de Lyon des auteurs de théâtre. Plus antérieurement Patrick DUBOST avait publié : Dans la neige,  en 2011 et  Le corps du paysage, en 2008. A signaler l’édition cette année 2014, Chez Color Gang de : EGO NON SUM SED VOS AMO, et auparavant  Les Neuf Coriaces, en 2010 et Jonas Orphée, en 2007.

C’est le prix KOWALSKI décerné en 1984 pour son recueil « Celle qu’on imagine » qui a fait découvrir Patrick DUBOST à Saint-Paul. A signaler que Cheyne éditeur a réédité ce recueil.

Patrick DUBOST s’explique sur sa démarche créatrice, originale et faite d’expériences diverses où l’oralité et la musique tiennent une place majeure. Evoquant le livre «) le corps du paysage ( », l’auteur indique que c’est le moins oral de ses recueils et qu’il s’agit là pour lui, d’une expérience d’écriture unique.

Lecture d’un extrait :

            ) je prendrai le chemin de l’usine et si je ne la trouve là, j’irai vers le nord (    ) mais d’abord me lever, manger un peu (     ) fusil au premier (    ) machette sur une pile de draps (           ) soleil autour de neuf heures (     )

 

Les parenthèses représentent l’aptitude de la pensée à « sauter du coq à l’âne », à englober aussi le silence.

Lecture par Patrick DUBOST d’extraits de ses livres.

Lecture par Saint-Paul d’extraits de « Celle qu’on imagine ».

Ce boulimique d’activités poétiques a créé le personnage d’Armand-le –poète qui est devenu son véritable alter-ego. Il a même sa propre biographie. Lecture de textes d’Armand-le-poète qui a coutume de faire des fautes d’orthographes.

Une exposition des textes d’Armand-le-poète reproduits en acier par le sculpteur Guy PIERRE est programmée pour le mois d’avril. Guy PIERRE ami de vieille date de Saint-Paul est un sculpteur poète qui a inventé un stylo qui écrit avec des lignes d’acier pour matérialiser le poème.

Enfin Patrick DUBOST dit sa joie de contribuer à l’essor de la Scène Poétique de Lyon qui présente de nombreux poètes et dont vous pouvez suivre le programme sur le site les-poetes.fr.

Un créateur en pleine maturité et en pleine effervescence qui se produit infatigablement un peu partout tel est Patrick DUBOST dont il faut lire les Œuvres Poétiques, puisqu’elles sont pour la plupart maintenant rassemblées.

Voir : http://patrick.dubost.free.fr et http://armand.le.poete.free.fr

 

 
 
 
27/03/2014
 
 

 

 

Michel BAGLIN

 

 

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Christian Saint-Paul signale la parution du numéro 62 hiver 2013 – 2014 de la revue DIERESE (le n° 15 €, abonnement 40 € chèque à adresser à Daniel Martinez, 8 avenue Hoche 77330 Ozoir-la-Ferrière). 305 pages d’une impression tirée au cordeau, décidément Daniel MARTINEZ et Isabelle LEVESQUE qui réalisent cette belle revue, sont d’indéfectibles perfectionnistes. La perfection s’étale dans les illustrations de 6 artistes, dans la mise en page et bien entendu dans la pertinente qualité du sommaire. A cela s’ajoutent pour le plus grand profit de la diffusion de la poésie, des dizaines de pages de notes de lecture dans une rubrique : Bonnes feuilles.  Les poètes mis en exergue et dont le nom est porté sur la couverture : Claude DOURGUIN, Richard ROGNET, Silvia BARON SUPERVIELLE, Pierre BERGOUNIOUX, côtoient Emmanuel MOSES, Michel BUTOR, David RENOUX etc.

La poésie chinoise et la poésie grecque sont représentées dans ce numéro où il est traité aussi par Jacques SICARD de cinéma. Les comptes-rendus de lecture sont comme d’habitude de très haute volée, signés d’auteurs prestigieux tels Max ALHAU, Olivier MASSE, Jeanpyer POËLS, Christophe MAHY et d’autres. Un numéro très riche sur lequel force sera de revenir. Lecture d’un texte de Daniel MARTINEZ.

Isabelle LEVESQUE a rédigé des notes de lecture et la présentation d’Emmanuel MOSES dont elle fait longuement la scansion de son livre : « Comment trouver comment chercher » éd. Obsidiane, 88 pages, 14 €.

Saint-Paul rappelle que cette poétesse a été lauréate du Prix des Trouvères 2013 pour son livre « Ravin des Nuits que tout bouscule » Editions Henry Les Ecrits du Nord préface de Pierre DHAINAUT 45 pages, 8 €. Lecture d’un extrait du livre.

C’est le poète qui a longtemps incarné l’activité littéraire à Montpellier, Gil JOUANARD qui est ensuite évoqué. Lecture d’un texte sur le Canal du Midi pour une future anthologie. Lecture d’extraits de « Cela seul » paru en 2002 chez Fata Morgana, 125 pages, 15 €.

ce n’est pas le monde qu’il faut changer

mais la nature de nos rapports avec lui

*

à conquérir la lune

ils ne feront qu’allonger

la portée du rêve

*

Le printemps vient trembler dans le reflet d’un verre, où s’unissent une fenêtre et ma main droite qui écrit. La lumière crue aspire les cris des enfants. Un dimanche tout blanc de soleil, qui remplit à demi le verre d’optimisme. Ce moment est venu où tout ce que l’on sait eût fait, voici à peine six mille ans, hésiter l’histoire. A présent, tout ce savoir suffit à peine à vous permettre de tenir debout. La terre rêve ailleurs, et la position assise, qui favorise le geste d’écrire, est devenue la plus courante chez l’humain privé de ses plus fertiles ignorances.

 

 

C’est le souvenir prégnant d’Yves HEURTE et la force d’un de ses derniers recueils de poèmes « Dans la gueule d’ombres » (Editinter, 55 pages, 10,60 €) dans cette période où l’histoire des deux guerres mondiales remonte à la surface de la mémoire collective des français, qui a incité à lui consacrer l’émission. Voici la présentation sommaire de Wikipedia :

« Né le 7 avril 1926 à Marigny (Marne), mort le 19 février 2006 à Cierp-Gaud (Haute-Garonne) est un écrivain, auteur de romans pour la jeunesse, dramaturge et poète français.

D'origine bretonne, Yves Heurté mène pendant toute sa vie à la fois une carrière d'auteur et celle de médecin de montagne en Haute-Garonne (de 1953 à 1988). Cette multi-activité l'influence constamment : ses œuvres littéraires sont nourries de ses expériences professionnelles et il met son talent littéraire comme ses capacités médicales au service d'une implication dans divers domaines humanitaires (boat-people, jeunes toxicomanes). Il poursuit des études de médecine à Bordeaux, en même temps qu'il pratique la musique (il est flutiste), le théâtre, les sports de combat et de montagne (il devient aspirant guide). Passionné de voyages à pied, il parcourt ainsi l'Europe méditerranéenne, l'Asie, les bordures himalayennes, le Tibet de l'ouest, l'Afrique noire, le grand nord de l'Europe, et l'Amérique latine (Argentine). Poète internaute, Yves Heurté, comme d'autres auteurs contemporains francophones (Huguette Bertrand, Bernard Perroy, François Bon, Michel Gerbal, Stéphane Méliade, Emmanuel Hiriart, Marie Mélisou et bien d'autres) utilise le réseau international d'internet comme outil de création et pédagogique, faisant partager son expérience d'auteur.

 

  Bibliographie

Romans (liste non exhaustive)

Yves Heurté a écrit plusieurs romans pour la jeunesse, ainsi que des contes et nouvelles.

Textes autobiographiques

Théâtre

Yves Heurté a []obtenu le prix 12/17 Brive-Montréal en 1992 avec Daniel Sernine et, en 2002, le prix de poésie Joël Sadeler. »

Il répond à la sempiternelle question d’ADORNO :

Quelle poésie après Auschwitz ?

            L’innommable dépasse l’imaginable. L’innommable n’est pas poétique. J’ai quand même tenté de me laisser guider dans le sillage d’un Primo Levi, qui osa entrouvrir cette Gueule d’ombres pour témoigner de ce qu’il avait vu et vécu et nous alerter sans trop d’illusions. Un regard lucide sur notre monde nous montre que la Bête est toujours proche, qu’elle remue déjà ici et là, si elle ne nous mord pas encore.

            Si le retour de l’inhumain absolu, invention de l’homme, reste possible, il est peut-être temps encore de le combattre avec ces pauvres armes du poète que sont les mots.

 

Lecture d’extraits du livre.

Eloge du destin

 

Merci grand chef pour tes bourreaux,

pour le froid et la faim, les squelettes de neige,

la danseuse jetée au four.

 

Merci à toi Seigneur pour l’Absolu silence

quand tu voyais passer sur le route d’exode

tous tes enfants crucifiés.

 

Merci pour tout à chacun d’eux

de la part de l’ignoble.

 

Yves HEURTE est l’auteur de « Journal de nuit  Bordeaux pendant l’Occupation » Alan Sutton éditeur collection Témoignages et récits, 96 pages, 17 €.

Un enfant gâté de la bourgeoisie bordelaise, à l’âge où l’on joue à faire la guerre, est entraîné par hasard, puis par esprit d’aventure, dans un réseau de la Résistance. Il va se sentir bien seul tout au long des années terribles où Bordeaux souffrira de l’occupation nazie, mais il se trouvera toujours quelqu’un pour le sauver. Alors l’enthousiasme succèdera au découragement, à son tour balayé par les déceptions amères qui se suivront et se mêleront, d’abord à Bordeaux même, puis sur le front du Médoc.

Dure mais belle vision d’un adolescent dont l’esprit s’organise peu à peu face au spectacle d’un monde implacable.

Ce journal de nuit, qui est pour une large part autobiographique, comprend des illustrations des archives de Bordeaux et de la Gironde, ainsi que des photographies de l’auteur.

L’émission s’achève sur la lecture de poèmes par Yves HEURTE lui-même, enregistrement réalisé quelques semaines avant sa mort, dans sa vaste maison de Cierp-Gaud par Christian Saint-Paul et Claude Bretin.

Un poète toujours présent dans nos cœurs.

           

 

 

 
 
 
20/03/2014
 
 

 

 

Illustration de Cathy GARCIA

pour "fugitive"

 

 

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Christian Saint-Paul donne la parole à une poétesse Katia SALVAIRE originaire de Narbonne et installée depuis quelques années à Albias, près de Montauban ; elle écrit et a seulement publié dans une anthologie collective lorsqu’elle résidait à Narbonne : « Les mille poètes ». Elle est heureuse de pouvoir lire au micro de Radio Occitania trois de ses textes récents que vous trouverez dans notre rubrique (très peu développée par manque de temps) : Textes libres adressés par les auditeurs ou internautes :

 http://les-poetes.fr/quelque%20texte%20libre/alpha.htm#sd_s

 

C’est de l’Afrique encore qui avait été le thème d’un texte de Katia SALVAIRE, dont il est question dans le recueil de Christophe LEVIS « MAM NAN GOFO » qui est la traduction littérale d’un dialecte de tradition orale du Burkina Faso. Ce mot veut dire « je t’aime ». Ce recueil, nous dit l’auteur est pour ma fille, et ma femme qui a séjourné dans ce pays. (Encres Vives collection Encres Blanches, 6,10 €, 2, allée des Allobroges, 31770 Colomiers). Lecture d’extraits.

Les sandales à leurs pieds

                                               Sur les trottoirs mouillés

 

                                               Les sandales parfumées

 

                                               De goudron et de plumes

 

                                               Depuis qu’ils ne sont plus

                                                           Que tas de confettis

 

                                               Dans un carnaval sourd

                                               Dans un bruit de marée

 

Camarades des parcours

Des routes de soie brillante

Des vaillances encombrées

Pour que le feu s’embrase

Dans les pupilles de nacre

 

Les harpons se dessèchent

Dans des creux

De viande folle

 

Les ovaires délassés

Par delà…

                                                                       …Le souffle tourne

                                                                       Le tonnerre gronde

                                                                       Les alarmes retentissent

 

Et Christophe LEVIS vient de faire paraître dans la même collection « Dors dans ma vie ». Une écriture syncopée, familière à ce poète, une économie de mots, chacun pesé et intégré dans la percussion du poème.

le calme

la tempête

saisissante

de n’avoir

connu

plus tôy

ce charme

 

plus quelques violences

de larmes

lorsque

s’offrent nos âmes

aux destins

éclairés

 

La revue ENCRES VIVES (le numéro, 6,10€, abonnement un an 34 € à adresser  2, allée des Allobroges, 31770  Colomiers)  nous livre ce mois-ci trois numéros qu’il importe de recommander :

Le 426ème est consacré à Emile HEMMEN qui est d’ailleurs le titre de la plaquette. Il s’agit d’articles et de regards portés sur cet auteur luxembourgeois né à Sandweiller en 1923 qui a mené de front une œuvre en luxembourgeois, en allemand et en français. En 2008, les Editions MediArt ont publié – sous le titre « Emile Hemmen. Poète » – un volume retraçant le parcours littéraire et intellectuel d’un homme qui, en dépit de sa lutte contre l’adversité, n’a jamais perdu sa foi en l’humain. Parmi les auteurs qui écrivent sur Emile Hemmen, figure le poète Marcel MIGOZZI que nous citons souvent dans cette émission. Son texte « Emile Humain » met en exergue « la fraternité, la gentillesse, l’intransigeante tolérance, la ferveur d’absolu, / […] Et le Grand-Duché, le monde bien compris, toujours à mieux comprendre » d’Emile Hemmen. Un hommage fervent sous l’emprise chaleureuse de l’amitié. Migozzi ne saurait jamais s’éloigner de l’amour fraternel qu’il voue à l’humanité, malgré, ou à cause de son extrême lucidité éloignée de toute béatitude angélique. Il semble qu’il ait trouvé chez Emile HEMMEN le même sens angoissé de la vie qui ne conduit jamais à la misanthropie, mais à son contraire. Lecture complète de l’article de MIGOZZI.

Le cahier noir de l’infini

avec nos mots au ralenti.

Avec des mots qui se font loup.

Ce cri poussé devant les arbres en détresse.

Et l’an prochain,

le requiem pour la vie sauve,

pour la sur-vie.

Emile HEMMEN

 

Le 427ème d’ENCRES VIVES publie un recueil de Cédric LE PENVEN « Variations autour d’un geste ». Ce poète qui compte parmi les poètes reconnus de notre époque et qui avait fait paraître chez Jacques Brémond, « Sur un poème de Thierry Metz », nous fait découvrir dans ce numéro de la revue de Michel COSEM, des textes d’une originalité totale, écrits, dit Florent Mabilat « à partir de trois premières figures, peintes d’après des troncs d’arbres, à l’huile sur toile et s’inscrivent au cœur du projet « Commune Figure ». Ce projet réunit danse, peinture, musique et poésie en inventant un court instant où l’image est dévoilée dans une émanation de vie qui fait corps avec elle et la dépasse afin d’amener la sensibilité à s’ouvrir ». Une émission avec Cédric LE PENVEN s’impose dans un proche avenir.

Lecture d’extraits.

Etre

plus nu

qu’un arbre

parvenir à

détacher

son visage

comme vêtement

trop lourd tombe

aux chevilles

pas de visage

qui nous ressemble encore

mais cet abricotier

peint en blanc aujourd’hui

voilà mon visage

ici

*

tu cries non

en toi

cet arbre en face

ignore

la stupeur

roulant dans son orbite

lui meurt

devient autre

comme lentement

passent les heures

comme passe

un enterrement

lentement

lentes

 

Le 428ème d’ENCRES VIVES  est consacré à Régine HA-MINH-TU qui y publie un recueil « L’Empreinte » avec un bois gravé de Philippe MINARD, peintre, graveur (voir : http://philippe-minard.fr ). Un recueil d’une grande densité. Une langue ciselée au cordeau pour exorciser ses treize années occupées à un travail de recensement au sein des Archives allemandes de la persécution national-socialiste. Nous savions que cette poétesse remarquée très tôt par Michel BAGLIN avait connu cette expérience pendant laquelle elle avait traqué les traces de ces victimes de l’indicible, et qu’elle ne pouvait en être sortie indemne. Certainement, ces textes témoignent d’une brûlure au contact de l’impensable. Oui, la poésie s’écrit encore après Auschwitz pour dire la démesure infinie dans l’horreur. Il faut absolument lire ce recueil pour se réconcilier avec la noblesse du genre humain que Régine HA-MINH-TU parvient à restituer par le miracle de la parole et de la poésie. Ce recueil fera l’objet d’une émission particulière avec l’auteure.

chaque jour pendant des jours

j’ai ouvert vos mots enfin déliés

et traduit vos douleurs

les signes manuscrits font trembler vos visages

photos, regards crevés de l’intérieur qui me fixent

dans vos silences,

les mots écorchent plus de cinquante ans de survie

transpirent les aubes hallucinantes

aux cerveaux glacés

dans l’immensité du temps,

dans l’irréversibilité

des folies

qui se cabrent

 

les frontières de sang coagulé

estampillent de nouvelles archives

 

combien d’archives encore ?

 

Celle qui fut publiée par Bruno DUROCHER aux éditions Caractères dédie son dernier poème du recueil « aux poilus, à Bruno Durocher et à tous les autres » :

soixante ans

archives – déambulatoire

 

qu’empêchent des archives

face à la démesure

 

demain

nous pèserons nos réponses

demain

nous habiterons

d’autres mots

 

survivre

nos pas nous mènent depuis toujours

vers ailleurs

 

nous empruntons sans cesse

la suite de notre histoire

 

Terre d’après la genèse

Les couleurs se mêlent à l’infini

  

Parmi les nombreux livres que Saint-Paul voudrait citer il y en a un, qui ne saurait ni passer sous silence, ni attendre : « Elégies pour ma mère » de Seyhmus DAGTEKIN (Le Castor Astral, 74 pages, 10 €). Le rapprochement de la démarche avec celle du poète irakien Salah AL-HAMDANI est évident. Le premier est né dans un village kurde de montagnes, le second à Bagdad ; tous deux naissent à 22 ans pour Dagtekin, à 17 ans pour Al-Hamdani, au français et tous deux sont hantés par la mère et la langue de la mère.

« En attendant l’épuisement des assaillants et des puissants de toute géographie, « Elégies pour ma mère » se propose de dire la vanité de tout commandement  et de donner à entendre quelques couleurs qui peuvent trouver écho au-delà des querelles du présent » confie le poète. Lecture d’extraits.

Je t’avais dit de ne pas faire ces pas

De ne pas faire ces trois pas vers cette sépulture

Ta bouche se tordra

Tes yeux se mettront de travers

Tes mains dessècheront sur place

Tes pieds ne te porteront plus au-delà de cette limite

 

Mais tu es lourd, lisse d’oreille

La parole ne peut s’y accrocher

Tu prends ta tête sur cette rive et l’emmênes sur celle des morts

Tu brises ton souffle sous les nuages

Tu te lèves, tu secoues ta croupe

Et t’en vas

Sans sortie ni porte

 

Tends l’oreille, écoute

Ne fais pas ces trois pas vers cette sépulture

Ta bouche s’effacera

Tes pieds se briseront dans ta tunique

Ne vas pas. Sur cette terre. Faire ces pas

Ne t’aplatis pas

Dans l’embrasure d’une porte

 

Les éditions Cardère (www.cardere.fr) publient deux livres de poésie à signaler.

« A hauteur d’ombre » de Marie-Françoise GHESQUIER DI FRAJA (68 pages, 12 €, photographies de l’auteure et de Cathy GARCIA). Déjà Michel COSEM avait publié d’elle un recueil dans la collection Encres Blanches d’Encres Vives : « Aux confins du printemps ». Dans le dernier recueil, vrai livre d’art tant la présentation est soignée et les photographies de haute volée, elle s’interroge : « Comment le poème pourrait-il saisir / toutes les nuances / pour conjurer la distance ? » « Comment aller du noir vers le clair ? » « Si le rêve se casse, quels édifices / de voyelles à partir d’une voix ? » Poésie de contemplation, s’en remettant au final à la nature : « Le gris des pissenlits s’égrène / en points de suspension / qui suturent le peu qui existe. »

Les chardons,

bourdons immobiles

fixent le silence

de leurs yeux gris.

 

On a depuis longtemps renoncé

à franchir les buissons inextricables.

 

Les mots ont disparu dans les fondrières

où ils croupissent dans leur encre.

 

Les feuilles d’automne battent de l’aile,

et la phrase apparaît dans tout son dénuement

de branches pauvres à parler.

 

Les immortelles conjuguent

Sur papier jauni

Le présent conditionnel.

Sans liberté.

 

« Fugitive » de Cathy GARCIA (55 pages, 12 €, illustrations de l’auteure) est aussi un livre d’art du fait de la parfaite mise en page de cet éditeur perfectionniste, et de la qualité des illustrations de cette poétesse qui excelle aussi dans l’art plastique. Une artiste totale ! Celle qui fait paraître cette revue que nous aimons citer « Nouveaux-Délits » et qui a déjà publié 17 livres de poésie, atteint avec ce dernier volume une maturité impressionnante. L’écriture s’est resserrée, gagne en densité. La langue impose son rythme, sans pas superflus, car il s’agit de marcher avant tout.

Je dois marcher. Suivre mon ombre.

 

Tendue de peaux mortes, elle tangue, la mâchoire rouillée.

Elle tangue sous le couteau et ses cauchemars sont des drones.

 

Le guetteur lui parle de vie majuscule.

Elle entend funérailles, rubis teinté de mort.

 

Passe un ogre de désir et elle chavire encore, les flancs fracassés.

 

Comme l’affirmait MACHADO, le chemin se fait en marchant, il faut donc marcher et peu importe d’atteindre une destination, l’essentiel est de ne jamais quitter le chemin, de ne jamais interrompre la marche, sous peine d’anéantissement.

Je dois marcher.

 

Voltige de lunes dans les ténèbres tamisées.

Visions éclatées de l’oracle.

 

Je vois l’ange tatoué d’éclipses.

L’âpre déchirement tellurique.

 

Du ciel baraté s’échappe une tornade.

Exodes, insurrections, liturgies volcaniques.

Dilution de soufre à la fonte des orages.

 

J’avance entre déflagration, vertige,

Et le souffle rauque des vents solaires.

 

Si pour échapper à ce qu’ARTAUD nommait « cette sempiternelle anonyme  machine appelée société » dont les impitoyables rouages brisent celle qui tente de s’y soustraire, il ne reste que marcher, alors il faut marcher, et dans cet élan, rejoindre enfin l’unité qui nous unit et nous confond dans un absolu qui nous délivre.

Pluie de cœurs en torches. Moisson brûlante de coquelicots.

 

Je marche, je cours, je suis la sorcière parfumée d’épices.

Voyez les déluges rougissant entre mes seins d’ambre.

 

Je cours et je danse.

 

La terre est une et nous sommes un.

Tous de passage, mouvement et empreinte.

Chair de rocaille dans l’herbe maigre où sieste le serpent.

 

Mais marcher sans cesse, c’est être « fugitive », comme la vie. Un très beau livre !

(bon de commande à la page d’accueil du site)

 
 
 
13/03/2014
 
 

Gaston

 PUEL

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Christian Saint-Paul reçoit Georges CATHALO, poète, critique pour une émission d’hommage consacrée exclusivement à Gaston PUEL (6 mars 1924 – 3 juin 2013).

Voici le résumé de la vie de ce poète qu’a connu Georges CATHALO depuis 1964 et Saint-Paul en 1965 :

«  Gaston Puel s'est éteint le 3 juin 2013 à 6h45 du matin dans sa maison de Veilhes. Il était né à Castres en 1924. Très jeune, il perdra sa mère et sera éduqué par sa grand-mère paternelle. Après une adolescence active et mouvementée, il découvrira la poésie grâce à son ami graulhétois Georges Vergnes qui lui fera lire Alcools de Guillaume Apollinaire.

     Il publiera son premier livre de poésie en 1944 : il s'agit d’Horizons verrouillés sorti à l'Imprimerie Bonafous de Lavaur. En 1946, il ouvrira à Albi, au 25 de la Place Saint-Cécile, une librairie à l'enseigne de La Tête Noire qui sera aussi une enseigne éditoriale. Dès 1947, il participera à Paris aux activités du groupe surréaliste auprès d'André Breton. Après de sérieux ennuis de santé (tuberculose) et des séjours en sanatorium, il s'installera à Veilhes où son épouse Janine était institutrice. C'est là qu'il fondera les éditions de La Fenêtre Ardente qui publieront, de 1962 à 1984, des dizaines de poètes contemporains comme René Char, Guillevic, Joë Bousquet, Jean Malrieu ou René Nelli avec des ouvrages superbement réalisés et souvent illustrés par des artistes tels que Joan Miro, Jean Arp, Max Ernst, Jean Dubuffet ou Antoni Tapiès. Il continuera à publier et à être reconnu dans les milieux poétiques. En 1966, il obtiendra le Prix Max-Jacob avec son livre Le cinquième château. En 1971, il sera invité à l'Université de Maryland aux USA pour animer deux séminaires sur René Char et Claude Simon. 

     Par la suite, il poursuivra son entreprise éditoriale en passant le relais à Thierry Bouchard en Côte-d'Or tout en continuant à écrire et à publier, essentiellement aux éditions de L'Arrière-Pays. C'est en 1995 qu'il retrouvera avec émotion la célèbre chambre dans laquelle avait vécu, handicapé et reclus, le poète Joë Bousquet, au 53 de la rue de Verdun à Carcassonne, chambre qu'il avait découverte pour la première fois en décembre 1944. C'est là également que, depuis 1999, René Piniès et son équipe du Centre Joë Bousquet et son temps présentent de prestigieuses expositions, des conférences-débats et des spectacles. De 2006 à 2012, il composera 71 ouvrages à tirage limité avec des illustrations d'une cinquantaine d'artistes contemporains, tout cela grâce à l'amitié et à la complicité de Jean-Paul Martin aux éditions de Rivières dans le Gard.

     Comme il l'avait si ardemment voulu et désormais obtenu, il a été inhumé le samedi 24 août 2013 en contrebas de la prairie qui prolonge la vue, depuis sa demeure, face au soleil levant.

 

      Homme d'une grande rigueur intellectuelle et d'une haute exigence morale, il aura su résister sa vie durant aux compromissions et aux allégeances diverses, en demeurant fidèle à ses amitiés ainsi qu'à ses racines tarnaises. Désormais, il nous reste son œuvre monumentale composée d'une bonne centaine de livres,  de  poésie essentiellement, avec hélas peu de titres disponibles. Que sa mémoire soit entretenue par tous ceux qui l'ont connu ainsi que par ceux qui ne vont pas manquer de le découvrir mais auparavant, comme l'écrivait déjà en 1982 son ami René Nelli, « il faudra faire beaucoup de silence sur les mots avant de pouvoir entendre la poésie de Gaston Puel s'ouvrir un asile tempêtueux au sein du vent de panique qui emporte notre inhumanité vers l'an 2000 ». Que cette mémoire continue d'irriguer les territoires non-balisés de la poésie vivante. »

 

Eric DAZZAN dans l’excellent livre « Gaston Puel » publié aux éditions des Vanneaux, collection « Présence de la Poésie » 198 pages, 15 € écrit sur la 4ème de couverture :

« L’œuvre de Gaston Puel témoigne de la situation de l’homme moderne dont un siècle de violence a abattu une à une toutes les certitudes et qu’un demi-siècle de consumérisme forcené a achevé d’enfermer dans le cercle étroit de ses besoins. Elle nous le montre sous les espèces de cet enfant qui rature, décalque, cerne « au passage une coïncidence » et qui se débat au milieu du bric-à-brac de l’existence. Enfant perdu, exilé, alors que « les mères sont mortes en amont », enfant sans avenir et qui cependant s’obstine avec l’espoir tenace de rejoindre « le poème de la vingt-cinquième heure », de briser le cercle du temps et de se tenir dehors. Parler, dans cette perspective, de la « communication poétique » comme le faisait Mounin n’est peut-être pas approprié. L’écriture chez Puel ne communique pas : elle rejoint. »

C’est une figure des plus marquantes de la poésie française et qui vivait dans ce Sud qui a façonné l’homme et qui est notre héritage quotidien, qui a disparu l’été dernier après un dernier combat contre les vicissitudes de la vie qui finissent par tout emporter. En sus de l’admiration et du naturel respect voué à Gaston PUEL, il y avait aussi l’affection pour un homme toujours attentif à son interlocuteur, généreux avec une sincérité qui ne s’embarrassait de rien et qui employait le langage rude de la vérité.

 

Prétexte

 

            La mort nous talonne et nous excède. Nous promettant à l’effacement, à l’oubli abyssal, elle nous masque le tourment de celui qui, voué à la présence perpétuelle, envierait notre sort.

 

            Car celui qui porte le fardeau de tout le mal, sur qui convergent nos projections maléfiques, est condamné à se répéter inexorablement, figure machinale qu’aucun avatar ne délivrerait, qui ne se délierait qu’en parlant (parler pour parler, selon la formule de Novalis) et que nous entendrions enfin dans le silence de mort (l’absence de Dieu).

G.P. « Evangile du Très-Bas »

 

Lecture de textes par Georges CATHALO, Christian Saint-Paul et Gaston PUEL, celui-ci ayant été enregistré pour l’émission « les poètes » en 2005 à son domicile à Veilhes.

 

Il appartient maintenant à nos éditeurs nationaux, et c’est leur devoir, même si leurs actionnaires sont étrangers à la France et à ses poètes, de rassembler cette œuvre forte et de la diffuser dans une édition accessible à tous. Que René PINIES soit remercié d’avoir permis la publication des derniers poèmes de Gaston PUEL par le Centre Joë Bousquet et son temps. Quant à nous, nous continuerons à évoquer ce poète dont nous ne recevrons plus les lettres appliquées, à l’écriture élégante et ferme comme son auteur.

En attendant, il faut lire ce qui est encore disponible et dont l’inventaire a été dressé par Georges CATHALO :

«  De 1944 à 2012, la bibliographie complète de Gaston Puel compte 148 titres que l'on peut regrouper en plusieurs catégories : œuvres dites « de jeunesse » (reprises ou reniées), recueils de poèmes, essais, proses et surtout de nombreuses éditions originales tirées à petit nombre d'exemplaires. La plupart de ces livres sont épuisés ou disponibles à petit nombre d'exemplaires. On trouvera ici les références de ceux que l'on peut encore se procurer ainsi que quatre ouvrages consacrés à son œuvre.

 

Livres :

     Aux éditions de L'Arrière-Pays (1,rue de Bennwihr- 32360 Jegun) :

Carnet de Veilhes II (1996), 40 pages, 9,15 euros

Carnet de Veilhes IV (2001), 48 pages, 9,15 euros

Le fin mot (2003), 40 pages, 9,15 euros

D'une saveur mortelle (2004), 208 pages, 18 euros

L'âme errante & ses attaches (2007), 144 pages, 15 euros

Aux éditions du Centre Joë Bousquet et son temps (53, rue de Verdun- 11000 Carcassonne) :

42 sirventès pour Jean-Paul (2012), 208 pages, 15 euros

Aux éditions de Rivières (chez Lib. Gal. Hutin – 5, rue d'Argenson – 75008 Paris) :

Plusieurs dizaines de très beaux livres illustrés à tirage limité (de 12 à 18 exemplaires), signés et numérotés, édités entre 2006 et 2012.

Ouvrages consacrés à l'oeuvre de Gaston Puel :

 Cahiers de l'Amourier – spécial G.P. préparé par Alain Freixe – (2003), 56 pages, 12,20p euros. (1, montée du Portal – 06390 Coaraze)

En chemin (2008), 208 pages, 15 euros – ouvrage rassemblant une trentaine de participants – édition établie par René Piniès. (Centre Joë Bousquet et son temps, 53, rue de Verdun – 11000 Carcassonne)

Gaston Puel – monographie composée par Eric Dazzan – (2009), 200 pages, 15 euros. (Editions des Vanneaux – 64, rue de la Vallée de la Crème – 60480 Montreuil-sur-Brèche)

Nu(e) N°46 – numéro de revue « spécial G.P. » préparé par Béatrice Bonhomme et Eric Dazzan – (2011), 240 pages, 20 euros. (co-édition par la revue Nu(e), 29 avenue Primerose -06000 Nice et les éditions de L'arrière-Pays, voir adresse ci-dessus). »

 
 
 
06/03/2014
 
 
Monique
Saint JULIA

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul revient sur le livre de Salah AL-HAMDANI « Rebâtir les jours » aux éditions Bruno Doucey, 120 pages, 15 € qui lui paraît avoir été une des publications les plus emblématiques de ces six derniers mois. Depuis longtemps en exil à Paris, ce poète irakien au ton lyrique proche de l’épopée nous livre un recueil pour la première fois écrit directement en français. C’est une preuve supplémentaire et ô combien décisive, de son indéfectible attachement à la France qui lui a offert l’asile. En reconnaissance, le poète est devenu cet infatigable passeur de culture entre les rives de la Méditerranée. Se réclamant de CAMUS, il dit : « Si Bagdad m’a fait naître / la France m’a fait homme ». Très actif dans la promotion de la poésie, l’auteur n’a pu être encore disponible pour en parler au micro de Radio Occitània qui suit scrupuleusement toutes ses créations. Nous en reparlerons donc avec lui, prochainement.

A Arthur Rimbaud

 

Tout est mouillé à Charleville

l’ombre et son double

le souffleur qui vide les mots dans la rivière

les nuances

traces laissées par la pluie

défiant inlassablement un paysage

à cinq heures de l’après-midi

un bateau péniblement traîné par un gamin

tranche la grande place

 

Ma nostalgie ressemble à ce jour innocent

délaissé sur le front de l’église

 

Tout est rouillé à Charleville

à midi comme à minuit

le désert gît au pied de ton lit invisible

comme ce mirage de chevaux dans un cahier

et même ta solitude

ignore l’écorchure de l’esclave

 

Tire, poète, tire

jusqu’à l’usure du verbe

jusqu’à dérober l’aube de l’humanité et sa rosée morte

jusqu’à la rature de la lumière

Tire, enfin tire !

 

Tout est beau à Charleville

tes pas d’autrefois

même l’abîme qui s’ouvre

sur la fermentation de cette journée

ton itinéraire qui s’étire

à l’envers d’un détail

défiant l’impossible miroir

 

Un instant j’aborde l’oubli

m’assois au bord de l’été

dans l’entrebâillement d’une aube assassinée

 

Victime d’une parole infirme

je verse la vie tiède sur la tombe

dans l’espoir de sentir l’éternité

frissonner dans ma chair

 

 

Saint-Paul recommande également la lecture du livre d’ADONIS « Commencement du corps fin de l’océan » traduit de l’arabe par Vénus KHOURY-GHATA  au Mercure de France, 185 pages, 14 €.

Peut-être

n’y a-t-il d’amour sur terre

                        que celui que nous imaginons

                                   rencontrer un jour.

 

Ne t’arrête pas

poursuis ta danse amour,

poursuis ta danse poème

même si elle est ta propre mort.

 

*

 

La vie m’a questionné

je lui ai répondu par ton corps.

 

Doux le mirage

généreuse la grâce de l’illusion.

 

Mon corps ne pouvait contenir tout ce vacarme

ses sens s’écroulaient dans le plaisir

montaient dans le désir

son corps ne connaissait pas d’accalmie.

 

Retrouvailles était le nom de chaque cellule

Ses désirs polissaient ses membres.

 

La passion est une forme du réel

le désir une forme de la vérité

le plaisir une forme du temps

et le corps vêtement du corps.

 

Enfin, il faut ne pas oublier le prix Nobel de littérature de 1992,

Dereck WALCOTT né à Sainte-Lucie en 1930 et qui vit entre New-York et cette île. Son « poème à Camille Pissaro » « Le chien de Tiepolo » paru aux éditions Du Rocher / Anatolia, 190 pages, 21 €, est un long poème lyrique, œuvre magistrale qui raconte la quête spirituelle de deux hommes des Caraïbes. Pissaro est un juif séfarade né en 1830 qui a quitté son île natale, Saint-Thomas pour suivre sa vocation de peintre à Paris. Walcott, lui, languit de découvrir un détail – « une touche de rose à l’intérieur de la cuisse / d’un chien blanc » - d’un tableau vénitien repéré lors d’une première visite à New-York.

Ce poème est à la fois une biographie spirituelle du grand peintre dans l’exil, une histoire en vers de la peinture impressionniste et le témoignage du poète et de son désir de capter le monde visuel au-delà des mots.

 

Cézanne signait Elève de Pissaro, moi je ne voulais

que lui rendre hommage d’affection, et d’affectueuse

 

envie, doux comme la voûte du soir au-dessus de Charlotte

Amalie, doux comme la nuit, quand s’effacent les siècles,

 

ou que le jour se lève sur les avenues dorées de Paris,

de Castries, ou d’Italie, plafonds de Tiepolo ou de Véronèse

                                                           [dans des cieux changeants.

 

Changements de Muses, changement de lumière et d’usages,

Avenues au lieu de pistes tortueuses, la brique au lieu de paille,

 

Orchestres et violons au lieu de tambours à la lumière

Du feu, jamais ils ne furent son peuple, nous n’étions là que pour qu’il nous dessine.

 

Christian Saint-Paul reçoit son invitée : Monique SAINT-JULIA.

Peintre et poète, elle est originaire du Roussillon. « Elle a commencé à écrire et à peindre très tôt, écrit Paul FARELLIER  dans la Revue Les Hommes sans Épaules, puis a pris des cours d’Art dramatique et de piano au Conservatoire de Musique à Paris. Elle a publié pour la première fois en 1958, à Rodez dans «Entretiens sur les Lettres et les Arts» que dirigeaient Jean Subervie et Jean Digot. En tant que peintre, elle a exposé à Toulouse (Galerie le Biblion), Nantes, Paris (Galerie Antoinette) et Galerie Colette Dubois, en Angleterre à Bath et au London Art à Londres. Elle vit aujourd’hui à Revel dans le Lauragais. L’extrême sensibilité, ou même sensitivité, de cette écriture fervente impose à chaque détour le sentiment de la merveille, et le regard dont s’illumine ici la nature semble rendre grâce d’avoir été comblé. Des auteurs comme Gaston Puel, Gérard Bocholier ou Josette Ségura ont dit leur admiration pour le travail de ce poète, qui est également peintre ». Cette admiration fut celle aussi du chroniqueur de La Dépêche du Midi qui rendit ainsi compte de son recueil « On n’invente pas la neige » qui a obtenu le prix Troubadours 2012 :

Rappelez-moi le nom de la rivière

des menus plaisirs des jours

quand l'été libère les ors

craquelés des tournesols.

Elle n'oublie pas le vent d'autan,

Rappelez-moi le nom du vent

qui jette ses bourrasques

dans un ciel échevelé,

prend un malin plaisir à assoiffer le verger

à faire choir une à une les poires

L'été est la saison généreuse, peu avare de ses trésors, tout en soleil,

distribuant ses instants des premiers cris de l'aube

instants de notes d'eau du puits

instants des bleus juteux du ciel

L'automne et le printemps n'ont pas même prestige.

Dans l'automne en bal masqué

les cris des paons élèvent

des monuments de tristesse

Mais rien n'est au-dessus de l'hiver, saison de la neige, qu'on attend avec impatience.

On la devine à l'austérité du ciel :

[…] elle vient le matin dans le plus clair des chambres feuillet doux de vie levé comme une histoire d'amour Le voici, L'hiver est venu :[…] des flocons volent premier gel de saison : les kakis jonchent le sol. Surtout, la neige a parti lié avec la poétesse. La saison instille sa couleur Il neige une fine habitude d'ennui les flocons se pressent sur les vitres[…] les merles se posent sur la tristesse de l'hiver. C'est que la neige impose son intimité. Nul ne révèle mieux l'hiver, n'est plus aimé, n'est plus confidentiel que la neige. Elle couronne la solitude. L'hiver c'est : tendu, gaine d'ennui le gel mollit les haies de symphorines fripe la soie des prunelles sauvages. La femme est enfermée chez elle, luttant contre l'obscurité, vouée au silence Elle coud à la fenêtre, ombre résignée, repousse les plis des rideaux lui voilant la rue. à travers le silence confiné de l'hiver un brouillard diffus monte lentement. Monique Saint-Julia place son recueil sous l'égide de Pierre Reverdy, à propos duquel Michel Leiris note «le côté journellement vécu de sa poésie où réalités du dehors et du dedans se répondent sans chatoiement de vocabulaire ou de syntaxe». C'est une poésie de l'immédiat, du détail, de la vie humble. L'hiver nous happe nous cloître dans la maison. On marche avec une prudence de chat, le regard exile vers la fenêtre le vent chevrote. Une page de saison se tourne. C'est toute une sagesse née d'une connivence acceptée avec la nature, une façon de s'enrichir d'elle, de toutes ses métamorphoses, mutations qui obligent à se hisser hors de soi. Finalement, c'est toute une morale de vie qui se dégage des poèmes faits d'instants de silence, de solitude, d'isolement, de recueillement finalement, où le poète se retrouve lui-même.

Michel BAGLIN, sous le charme depuis toujours de cette poésie écrivait à propos de ses recueils parus à L’Arrière-Pays :
« J'écris pour retrouver une voix, une musique, le parfum de moût fermenté, sentir sous la main le sifflement de la rampe cirée, retrouver des près fleuris de jonquilles », écrit Monique Saint-Julia. Gérard Bocholier, qui préface son dernier recueil, « Claire-voie », paru aux éditions N&B, le souligne avec justesse : elle écrit « pour retrouver ». L'enfance, bien sûr, évoquée dans de nombreux poèmes, et « la cérémonie des souvenirs », mais aussi un regard émerveillé, une appréhension lumineuse de la nature qu'elle approche dans une langue aussi précise que sensuelle et, avec « les visages aimés », un bout d'éternité.

A propos de son précédent recueil, « Un train de paysage », Gaston Puel parlait lui d'une « poétique de l'élémentaire, une écoute fervente des choses, des animaux, de la lumière d'un instant, cérémonial pour les accordailles, parole et cœur ». Mais il notait aussi, avec justesse, cette « tendresse endolorie » qui est comme la marque de Monique Saint-Julia. « La terre est dans ma chair », écrit-elle, mais son adhésion frémissante au monde n'est pas totalement sereine. Et la voix qui chante connaît la gravité des « jours d'eau lasse ». Quelque chose est perdu et l'on devine dans maints poèmes « les portes entrebâillées des deuils ». C'est bien sûr ce qui donne à sa façon d'aimer sa profondeur.
« Plus les jours passent menant la fin des choses et des noms, plus le passé résonne. Détachés des muettes saisons, nous cheminons vers une lumière d'éternité. » Toute la poésie de Monique Saint-Julia est de cette eau, cette belle eau claire.

Ce soir, elle vient présenter son dernier livre « Je vous écris » paru aux éditions L’Aire. C’est précisément Michel BAGLIN qui a rédigé la préface : « Monique SAINT-JULIA a suffisamment d’énergie, de ferveur et d’amour pour congédier les tristesses. Son verbe, lui, reste une gourmandise. Voilà l’essentiel, il me semble. A l’instar de certaines formulations de menus réussies, ses images savent nous mettre en appétit. Ces mots, dit-elle, elle les mitonne ! Pour qui pense, comme moi, que la poésie est effort pour se gagner l’ici-bas et descendre dans le paysage, voilà la bonne recette : celle d’une écriture sensuelle qui donne du mérite à tout ce qu’elle touche. Et nous invite au-delà de l’observation, à la célébration, à l’émerveillement d’être en vie.

Je vous écris des mots pour trouver mon chemin, avoue l’auteure au destinataire de ses missives. Et ce faisant, elle a trouvé celui de la poésie en nous rendant plus présents au monde. »

C’est une phrase du peintre Nicolas de Staël « Ne pensez pas que les êtres qui mordent la vie avec autant de feu dans le cœur s’en vont sans laisser d’empreintes » que Monique SAINT-JULIA a mis en exergue de son livre. Les poèmes sont des lettres à Bernard. Que seraient l’émotion et le bonheur de la présence au monde s’ils étaient voués au seul sentiment solitaire ? Partager ces émois nés d’un quotidien apprivoisé du regard du peintre, telle est la vocation de ce livre. Et la générosité naturelle, épanouie de cette artiste qui aime avec une sérénité confiante le monde familier qu’elle observe et la rassure comme l’amour constant du destinataire des lettres. Un ton d’une douceur infinie. Un miracle certainement, ce regard bienveillant sur toute chose qui traverse la journée comme pour l’enchanter. L’écriture ne retient que l’enchantement d’être vivant parmi la nature vivante. Seule alternative à l’émerveillement discret, le silence :

Sans doute aimeriez-vous cet hiver, il lape la grisaille, déterre l’ennui, revêt le ciel de lassitude tel un châle de tristesse sur les épaules.

Parfois la neige se pose devant la porte, les flocons tombent : arbres fantômes, voiles de la lune.

On respire le vouvoiement, le confidentiel du jour lorsqu’il pénètre par les interstices des contrevents. S’isoler, boire des océans de joie, caresser ces heures converties à la musique d’un clavier muet.

 

Comme il abonde de silence ce temps à vous aimer.

 

Lecture d’extraits du livre par l’auteure et Christian Saint-Paul.

 

Fernando PESSOA convenait qu’une philosophie pouvait être simplement l’expression d’un tempérament, mais disait-il « j’ai découvert, pour ma gouverne, qu’un tempérament est une philosophie ».

A lire Monique SAINT-JULIA cette assertion est vérifiée : le tempérament de célébration de la nature, du détail du quotidien qui irradie d’espérance, est bien une philosophie de la vie. On pourrait paraphraser Gaston PUEL, le vieil ami de Monique qui nous a récemment quittés, et qui voyait chez elle « une tristesse endolorie », en disant qu’il y a chez elle : un épicurisme endolori. Cette félicité savante, propre aux êtres d’exception nous réconforte des réelles vicissitudes d’un quotidien souvent mal assumé. Ces beaux poèmes d’amour, d’une exquise pudeur sont un vrai régal de l’âme, cette « gourmandise » chère à Michel BAGLIN. Un livre à lire pour mieux vivre !

 
 
 
 
27/02/2014
 
 
Eric FRAJ

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul dit l’admiration qu’il a pour le long travail accompli par Guy ROUQUET de l’Atelier Imaginaire qui a publié notamment en coédition avec Le Castor Astral : Le livre d'où je viens 16 écrivains racontent, préface de Guy ROUQUET voir doc

et Mon Royaume pour un livre 16 écrivains racontent, avant-propos de Guy Rouquet, préface de Joël Schmidt, voir doc

Les plus grands noms de la littérature d’aujourd’hui et de la poésie nous révèlent, dans le style qui a fait leur renommée, ce qui a entraîné leur vie vers cette passion inextinguible de l’écriture. Deux livres de témoignages uniques à lire comme deux documents exceptionnels !

 

Christian Saint-Paul accueille son invité, le poète, chanteur, compositeur interprète Eric FRAJ ; militant de la culture occitane depuis 1970 alors qu’il était au Cercle des Jeunes Occitans de Bordeaux, chanteur depuis 1971, agrégé d’espagnol et de philosophie, quand il ne chante pas, il enseigne la philosophie et l’occitan au lycée Pierre d’Aragon à Muret, près de Toulouse.

Ce créateur infatigable, qui habite quatre langues : le français, l’espagnol, le catalan et l’occitan avec un même bonheur, vient rendre compte ce jour de ses dernières réalisations.

Tout d’abord, il reprend en concert son spectacle « Pep el Mal » « La vie est un voyage » qu’il donnera le mercredi 5 mars au Conservatoire Occitan, 5, quai de Tounis à Toulouse à 19 h 30.  Pep el mal voir : dossier de présentation

Des chansons dans les trois langues, espagnole, catalane et occitane. L’épopée de son grand père émigré libertaire qui traversa les Pyrénées pour rejoindre Lavelanet en Ariège et s’établir plus tard à Toulouse. Eric FRAJ explique l’absolue nécessité à cette époque de cette fuite du pays natal qui ne parvenait pas à nourrir ses habitants. L’entretien avec Saint-Paul alterne avec la diffusion d’extraits du spectacle ; c’est ainsi que l’on peut écouter : « Pep el mal », « Doble joc », « Coma tu ».

Cette création fait enfin l’objet d’un album « PEP-EL-MAL » de douze chansons et d’un livret avec la traduction française.

Les 12 chansons – en catalan, espagnol et occitan – du spectacle Pep el mal créé en 2006 sur la Scène Nationale de Foix et de l’Ariège. D’Alcoi (Pays Valencien) à Toulouse, en passant par Barcelone et Lavelanet d’Ariège, c’est l’histoire de l’immigré José Fraj, l’invention d’une identité, d’un trajet, d’une aventure… Avec les Guillaume López (flûtes, clarinette, chœurs, hautbois), Thierry Roques (accordéon, acordina, piano), Pierre Dayraud (batterie, percussions), Pascal Celma (contrebasse, piano, chœurs, arrangements, réalisation), Morgan Astruc (guitare), Nicolas Panek (prise de son). Album est produit par le CAMOM et diffusé par l’Autre Distribution. Pour se le procurer : www.lecamom.com ou http://musique.fnac.com/a6740719/Eric-Fraj-Pep-el-mal-CD-album ou écrire : CAMOM – 10 Place de Compostelle – 32600 – L’Isle Jourdain.

 

Eric FRAJ présente également la parution d’un autre album : le cd « Eric Fraj chante Lorca en occitan »

Éric chante ici, accompagné à la guitare par Morgan Astruc, quinze poèmes de Lorca dans la traduction de Max Rouquette (tirés du Romancero gitano, du Cante Jondo, du Diván del Támarit, et du Llanto por Ignacio Sánchez Mejías). 1 CD Digipack 18 euros (avec livret 16 pages, contenant les textes des poèmes et une introduction de Philippe Gardy). Pour commander en ligne (et écouter 2 extraits), voir: http://www.max-rouquette.org/commandes/fraj-lorca.htm ou écrire à : Association Amistats Max Rouquette - 2 Rue de l’Ancien Courrier - 34000 Montpellier. On écoute dans l’émission deux extraits : « Gacela de la fugida » et « Arma absenta ».

 

Eric FRAJ dans cette période qu’il a su rendre faste pour ses créations, présente son livre « Quin occitan per deman ? Lengatge e democracia » publié chez Reclams. C’est un essai bilingue et critique sur l'enseignement et la transmission de la langue occitane aujourd'hui et sur leur avenir. Il s'intitule « Quin occitan per deman ? Lengatge e democracia » (Quel occitan pour demain ? Langage et démocratie).Voir et commander l'ouvrage (222 pages, prix : 10 euros) sur le site de Reclams : www.reclams.org ou en écrivant à :  Edicions Reclams Administration – Secrétariat Quartier de l'église - 64160 COULEDAÀ-LUBE-BOAST / Tél. 06 76 88 37 93 secretariat.reclams@orange.fr

C’est le mode réaliste et concret qu’a choisi Eric FRAJ pour aborder cette réflexion sur l’avenir d’une langue et d’une culture sous-jacente dont il ne pourrait admettre qu’elles puissent disparaître.  A lire sans attendre par tout amateur de la culture occitane et au-delà par tout humaniste car la culture occitane est avant tout un humanisme.  Ce livre étant traduit intelligemment en français, est accessible à tous.

 

Enfin Eric FRAJ signe la traduction française et la préface de VIAUR (264 pages, 14 x 21, 18.00 €), un recueil de deux romans de Robert Marty, empreints d’un fantastique onirique et historique captivant, écrits et publiés initialement en occitan chez IEO Edicions : L’ombre douce de la nuit et L’Arbalétrier de Miramont. Pour toute commande : http://www.ideco-dif.com ou IEO Éditions – 11 rue Malcousinat – 31000 – Toulouse.

 

Eric FRAJ : un Français au talent heureux qui fait de lui, une personnalité éblouissante de la culture occitane, catalane, espagnole. Un « honnête homme » au sens du siècle des Lumières, qui fait l’honneur de la culture contemporaine occitane et qui s’adresse à tout public par l’enchantement de la musique et de la chanson.

Quatre publications : deux CD et deux livres que nous devons connaître sans tarder !   

 

 
 
 
20/02/2014
 
 
YVES CHARMET

RETOUR

 

 

Christian Saint-Paul invite les auditeurs à assister à CARCASSONNE au Centre Joë Bousquet, 53, rue de Verdun aux rencontres, lectures, projections de films programmées dans le cadre du Festival FEMMES-En-Jeu(x) et du Printemps des Poètes : « Au cœur des arts », le samedi 1er mars et le samedi 8 mars 2014 à 15 h.  

voir programme 1er mars

voir programme 8 mars

Il signale la parution de La poésie au cœur des arts anthologie établie par Bruno Doucey et Christian Poslaniec aux éditions Bruno Doucey. Ce livre est dédié à Matiah ECKHARD jeune pianiste et poète disparu à l'âge de 19 ans, qui avait accompagné les lectures de la présentation de la revue LEVANT au musée Georges Labit à Toulouse. Le poète israélien Ronny SOMECK signe en exergue du livre un poème sur Matiah ECKHARD :

Le piano ardent

 

Eloignez les nuages

dirigez le projecteur du soleil

sur le moment de la rencontre entre

les doigts de Matiah

et les touches du clavier ardent

en haut les marches du Jardin d’Eden.

 

La prochaine fois que vous entendrez le tonnerre,

Imaginez que ce sont les applaudissements

De Dieu en son honneur.

 

Ronny SOMECK

traduit de l'hébreu par Michel Eckhard-Elial

voir doc pageslivre.pdf

 

La poésie allemande est rarement citée dans cette émission comme l’ont fait remarquer des auditeurs, alors que Toulouse avec le Goethe Institut et une population allemande importante travaillant dans l’aéronautique, a une vocation culturelle germanophile.  C’est la figure emblématique de Peter HUCHEL (1903 – 1981) qui est évoquée, un aperçu de son œuvre étant accessible par la publication bilingue de « La tristesse est inhabitable », traduit de l’allemand et présenté par notre grand poète Emmanuel MOSES aux éditions Orphée La Différence. Ce fut un homme de radio ; il dirigea 3 ans la radio de Berlin pendant la période soviétique après la guerre. Mais il fut vite suspect pour ce régime et dut vivre surveillé dans sa résidence. En 1971 il put quitter la RDA pour la RFA et voyagea en Belgique, en Angleterre, en Hollande et en Italie. Il meurt à Staufen le 30 avril 1981.  Emmanuel MOSES nous dit que HUCHEL n’a cessé d’associer la nature à sa méditation sur le tragique de l’histoire, dont l’écho « assourdit les oreilles des générations ». Ecrire après Auschwitz ? HUCHEL répond en dialoguant avec les morts, en homme pénétré de vie et d’espoir. Entre la lampe et l’étoile, sa voix se déploie, nous donnant à entendre que « la tristesse est inhabitable ».

 

EXIL

Le soir, les amis s’approchent,

les ombres des collines.

Ils passent lentement le seuil,

assombrissent le sel,

assombrissent le pain

et conversent avec mon silence.

 

Dehors dans l’érable

s’agite le vent :

ma sœur, l’eau de pluie

dans l’auge chaulée,

prisonnière

elle suit les nuages du regard.

 

Va avec le vent,

disent les ombres.

L’été pose la faux de fer

sur ton cœur.

Va-t-en, avant que la feuille d’érable

ne brûle le stigmate de l’automne.

 

Sois fidèle, dit la pierre.

Le crépuscule de l’aube

point, là où lumière et feuillage

habitent l’un dans l’autre

et le visage

se consume dans une flamme.

 

Christian Saint-Paul reçoit son invité : Yves CHARNET.

Ecrivain, poète, essayiste, enseignant universitaire, cet auteur est en réalité inclassable tant sa posture littéraire, son style, sont l’exceptionnelle réplique d’un moi intérieur qui, pour n’avoir cessé de se déchirer, ne s’est jamais vraiment fracassé. Cette œuvre, d’une richesse remarquable s’inscrit en majuscules dans la littérature de l’autofiction. Mais ces proses sont toujours des poèmes en prose. Et cela fait d’Yves CHARNET un des plus intéressants poètes de notre époque. A priori, nous pourrions croire que cette réussite littéraire incontestable, s’est opérée à l’insu de l’auteur, mais celui-ci est trop lucide pour être dupe de son propre talent. De l’écrasant fardeau qu’il transporte depuis sa naissance, celui de sa « bâtardise », conséquence d’un père qui ne voulut pas le reconnaître, Yves CHARNET en a fait, au sens baudelairien du terme, de l’or. Depuis « Proses du fils » ses angoisses, ses douleurs ont fouillé un filon poétique qui nous vaut de grands moments d’exaltation de lecture. Paradoxalement, lire CHARNET procure un plaisir, certainement noir, mais un plaisir recherché pour la justesse de la langue, du rythme, en un mot de sa poésie. Peu de poètes, en réalité savent donner cette émotion avec autant d’acuité. Cela ne peut se concevoir sans une forme originale de génie. Peu importe son histoire, même si elle est décrite avec minutie ; c’est le pouvoir de la langue qui nous envahit, nous inflige de partager sa douleur dans une extase consentie, tellement les mots, le ton, s’emparent de toute distance. Nous sommes reliés au plus près du vécu de l’auteur, et cette intimité nous fascine. Car elle nous révèle. Semblables à lui.

Yves CHARNET lit des extraits de « Carnets d’une amitié » dont des passages ont été publiés dans l’excellente revue Diérèse (n° 61) dirigée par Daniel MARTINEZ (abonnement  40 €, 8 avenue Hoche  77330 Ozoir-la-Ferrière). Cette amitié est celle qui le lie au comédien et également auteur Denis PODALYDES qui a mis souvent les livres de CHARNET en voix, parfois même avant l’impression du livre.

D’autres textes de ce même livre en projet seront probablement publiés dans les prochains numéros de Diérèse.

Yves CHARNET a été très lié également avec Claude NOUGARO. Il a écrit un livre sur cette relation ; à la manière de CHARNET, c’est-à-dire en poèmes en prose, avec la minutie de retrouver les instants intimes de cette amitié sans rien omettre des sensations fussent-elles noires, éprouvées alors. Et toujours taraudé par cette « tristesse qui durera toujours » face à l’inexorable absence.

Lecture d’extraits de ces textes à ce jour encore inédits. Les auditeurs de Radio Occitania ont ce privilège de les découvrir avant la publication.

Yves CHARNET bâtit une œuvre forte, que l’on suit scrupuleusement, conscient de ce qu’elle a de magistrale qui marquera l’histoire de la littérature française.

 
 
 
13/02/2014
 
 
Bruno RUIZ

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« Un poème peut donner une idée, pas l’inverse » nous dit Antoine EMAZ dans « Cuisine ».  Les poèmes de Jean SENAC peuvent vous donner des idées, ils ont été mis en musique et chantés par le poète chanteur Gilles MECHIN accompagné d’Alain BREHERET, pianiste bien connu à Toulouse et qui est le complice musical de Bruno RUIZ. Après ARAGON et FERRE, Gilles MECHIN lauréat deux fois de l’Académie Charles Cros, nous livre SENAC. Une œuvre forte qui, comme l’a dit EMAZ, doit nous donner des « idées ». De SENAC nous disposons maintenant de ce livre de poche collection POINTS (7,90 €) « Pour une terre possible ». Diffusion d’un poème de Sénac chanté par Méchin.

Donnez-moi une phrase qui ne sorte pas de la tête,

Qui jaillisse de la réalité du monde

(dauphin bondissant dans les vagues

sur ton sillage ô liberté !)

qui marche à votre pas vers un seul objectif :

le bonheur de l’homme à restituer aux hoommes

(je n’ai pas dit à l’homme,

aux hommes

- avec leur plaie !

Nous laverons ces plaies ; sur elles fonderont le Signe de Concorde. )

 

Christian Saint-Paul reçoit son invité :

Bruno RUIZ. (http://brunoruiz.wordpress.com)

Poète-chanteur ou plutôt poète de music-hall comme il se revendique, voilà plus de trente ans qu’il construit une œuvre originale et qu’il sillonne la France et ailleurs avec ses poèmes chantés ou pas. Ses albums nous ont habitué à un plaisir aux accents lyriques. Dans celui intitulé « Après » il évoquait la figure de son père et lui rendait hommage ainsi qu’aux Républicains de la Guerre Civile d’Espagne, avec un long poème « Altavoz ». « Comme bien d’autres, mon père, écrit-il, dut s’exiler en France où il fut accueilli sur les plages barbelées de Roussillon, gardées par des gendarmes français et des soldats sénégalais.

La communauté internationale (dont le gouvernement français de l’époque) s’engagea alors aux côtés d’Hitler et de Mussolini à reconnaître la dictature fasciste du Général Franco contre la jeune république espagnole.

Evoquant cette page d’histoire au regard des dernières années de la vie de mon père, « Altavoz » se veut, afin de ne pas oublier, un témoignage de résistance pour la génération d’aujourd’hui et pour celles de demain. »

Ce soir il vient parler de son dernier spectacle « Bruno RUIZ peut mieux faire » à la Cave Poésie René Gouzenne, rue du Taur à Toulouse du 11 au 22 février 2014 à 19 h 30 sauf le jeudi à 21 h.

C’est un récital composé comme une sorte de patchwork fait de poèmes chantés a capella, de textes déclamés, d’histoires racontées, d’aphorismes où il est seul en scène. Il a voulu réaliser au bout de presque quatre décennies de création, un « arrêt sur image », comme une pause sur un présent insaisissable, avant de repartir pour d’autres textes lyriques, d’autres épopées. Ne voulant rien dévoiler des textes, il raconte un épisode marquant de son enfance et d’autres choses, et avec malice, dit que, peut-être ce qu’il a dit au micro, fait partie du spectacle. C’est une parole émouvante qu’il fait entendre avec un ton léger et retenu derrière lequel se terre une gravité, du fait du sujet même qu’il évoque : son enfance dans la pauvreté, ses lectures volées, le sort des réfugiés espagnols en 1939, une vie entière vouée à la poésie et aux spectacles. Il cite son ami Jean-Louis Trintignant qui disait que le plus difficile dans la vie, c’était d’aller d’une tragédie à une autre. Ce à quoi Saint-Paul complète en citant le poète de la Méditerranée, Michel ECKHARD-ELIAL directeur de la revue LEVANT, qui lui a dit, alors qu’un de leurs amis était à l’hôpital à la suite d’une tentative de suicide : « Entre soi et soi-même il y a toujours l’écart de la tragédie ». Mais ces choses graves, comme certains passages du récital de Bruno RUIZ sont évoquées sans solennité, sur le ton badin et pudique propre à l’artiste. Et par ailleurs, on rit beaucoup à son récital.

Toulouse est riche de ces personnalités prodiges et dynamiques qui portent haut la parole poétique.

Un poète à voir, à lire et à écouter !!

 
 
 
 
06/02/2014
 
 
Eric Dubois

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Christian Saint-Paul invite les auditeurs à assister au dernier spectacle du chanteur poète, poète de music-hall Bruno RUIZ qui se produit à la Cave Poésie René Gouzenne, rue du Taur à Toulouse du 11 au 22 février 2014 à 19 h 30 sauf le jeudi à 21 h. Diffusion de « Hom-Louve » extrait de son album : « Après ». A voir absolument !

Bruno RUIZ sera notre invité la semaine prochaine et s’expliquera sur sa démarche de donner un récital qui échappe à tous les critères de classement de genre ; récital « hors cadre » comme il se plait à l’énoncer.

 

 

 

 

Christian Saint-Paul revient sur la dernière publication de Michel COSEM « Ainsi se parlent le ciel et la terre » Poèmes, préface de Jean JOUBERT,  L’Harmattan, 90 pages, 11,50 €. Une poésie de célébration de la nature et des lieux par un travail subtil de la langue. Lecture d’un extrait.

Le vent aime la liberté

Il traverse tous les filets

tous les pièges et toutes les tentations

il s’attarde avec le chaume rouge

il éparpille des messages comme des papillons

il n’attend rien près des buis

il s’abreuve au ruisseau

comme la couleuvre du grand fleuve

il est parcouru de frissons

et de mélodies bleues

il déchire de vieilles alliances

et les échange

 

Il serre contre ses lèvres chaudes

d’autres lèvres pleines de soif

et il va dans une brève course

retrouver l’horizon

 

 

L’infatigable Jacques CANUT nous réjouit de deux recueils : il poursuit ses « Carnets confidentiels » avec un n° 42 « Silhouettes » où le lecteur retrouve avec bonheur l’univers du poète, son indéfectible tendresse pour son prochain, ses chats, les lieux chargés de souvenirs. Il y a chez lui ce que les Grecs appelaient l’agapè, un amour charitable au sens expliqué par Simone Weil, un amour charité, de bienveillance où tout égoïsme est banni. Emouvant chez ce poète qui a si longtemps décrit l’amour éros. Une nostalgie lucide l’habite et heureusement irrigue sa création d’une veine somme toute vivifiante, du fait, lui aussi, de ce travail sur la langue qui nous bascule dans un univers précis, celui de la poésie qui nous console des mots routiniers d’un langage habitué et mortifère.

Puis il publie aux éditions espagnoles Càlamo à Palencia en Espagne : « Palabras Recobradas » « Paroles Retrouvées ». Jacques CANUT avait déjà publié des recueils de poèmes écrits en langue espagnole, en Espagne et en Argentine. Dans ce dernier livre, l’écriture en castillan est dotée de la même force resserrée que dans « Silhouettes ». Il fait mouche dans les deux langues. Toutefois, la version espagnole percute un peu plus les sensations du lecteur. Apparemment la version française est la version traduite. Il se dégage de ce livre une impression rassurante de tendresse virile. Lecture d’extraits des deux livres.

Les livres sont à commander à Jacques CANUT, 19 allées Lagarrassic  32000 Auch.

 

Tango.

? Por qué hostigar mi memoria

con tantos dolores latentes

que la letra se agota a cercar ?

 

Un desamparo que repite

el rosario de los pesares.

El abismo juega con el eco

del tiempo…

 

Tango.

Que jamàs supe bailar.

 

*

 

Tango.

Pourquoi harceler ma mémoire

de tant de mots latents

que les mots s’épuisent à cerner ?

 

Une détresse que répète

le rosaire des regrets.

L’abîme joue de l’écho

du tempo.

 

Tango.

Que je ne sus jamais danser.

 

*

A une lointaine, exaltante époque

de ma vie

certains lieux m’enchantèrent…

 

C’est toujours Moi

et Moi seul

que j’y retrouve.

Devrais-je me suffire

de cet égocentrisme ?

 

 

Mon regard ancré sur cette vue

d’une plage déserte…

J’y attends encore quelqu’un

qui n’avait pas daigné me rencontrer.

 

*

Minou dans les bras de ma compagne

me suit, comme elle du regard.

Je m’éloigne pour un long voyage

sur une route où je ne repasserai

jamais.

A l’orée des larmes, l’image d’êtres

déchirés par l’insidieuse musique

qui m’enjoint de partir…

 

*

 

Femme fleur.

Robe éthérée propulsant

les formes encore vives du corps.

 

La maison rayonnait

du désir

que nous nous accordions.

 

Reviendras-tu

si je t’espère encore ?    

 

Christian Saint-Paul rejoint l’invité de la semaine : Eric DUBOIS.

Eric Dubois est né en 1966 à Paris. Auteur, lecteur-récitant et performeur avec l’association Hélices et le Club-Poésie de Champigny sur Marne. Auteur de plusieurs recueils dont « L’âme du peintre » ( publié en 2004) , « Catastrophe Intime » (2005), « Laboureurs » (2006), « Poussières de plaintes »(2007) , « Robe de jour au bout du pavé »(2008), « Allée de la voûte »(2008), « Les mains de la lune » »(2009), « Ce que dit un naufrage »(2012) aux éditions Encres Vives, « Estuaires »(2006) aux éditions Hélices ( réédité aux éditions Encres Vives en 2009), « C'est encore l'hiver » (2009), « Radiographie », « Mais qui lira le dernier poème ? » (2011) aux éditions Publie.net, « Mais qui lira le dernier poème ? » (2012) aux éditions Publie.papier, "Entre gouffre et lumière " (2010) aux éditions L’Harmattan, « Le canal », « Récurrences » (2004), « Acrylic blues »(2002) aux éditions Le Manuscrit, entre autres.

Textes inédits dans les anthologies Et si le rouge n 'existait pas ( Editions Le Temps des Cerises, 2010) et Nous, la multitude ( Editions Le Temps des Cerises, 2011) , Pour Haĩti ( Editions Desnel, 2010) , Poètes pour Haĩti (L'Harmattan, 2011) Les 807, saison 2( Publie.net, 2012), Dans le ventre des femmes ( Bsc Publishing, 2012) … Participations à des revues : « Les Cahiers de la Poésie », « Comme en poésie », « Résurrection », « Libelle », «Décharge », « Poésie/première », « Les Cahiers du sens », « Les Cahiers de poésie », « Mouvances.ca », « Des rails », « Courrier International de la Francophilie »... Responsable de la revue de poésie « Le Capital des Mots ».

http://le-capital-des-mots.fr

Blogueur : « Les tribulations d'Eric Dubois ».

http://ericdubois.net

http://www.myspace.com/poete66

 

Un entretien s’instaure avec Saint-Paul, permettant à Eric DUBOIS de préciser sa démarche et son action poétique. Très actif et militant de la poésie contemporaine, il a créé une revue de poésie sur le Net : « Le Capital des Mots » qu’il anime depuis 2007. Il a ainsi publié plus d’une centaine d’auteurs, des milliers de textes et les « grands noms » de la poésie contemporaine y ont figuré.

L’entretien est entrecoupé de lecture de poèmes d’Eric DUBOIS par lui-même et quelque fois par Saint-Paul.

 

Textes d’Eric DUBOIS :

 

ATTENDRE

Il faut attendre
prolonger

La présence
l'absence

La chair ouverte
fermée

Quand le ciel est
attendre quand même

Noir
que les jours aient un sens

Drapé dans un hiver
comment dire?

Opaque
quand on cherche la transparence

Oui
la transparence

Attendre
c'est notre part d'humanité

*

 

QUARTIER

 

Un œil

qu'on ouvre

 

Le poids du temps

la bouche

 

Le bras qui

la rue est pleine

 

se tend

pleine de gens exilés

 

On dirait

s'accroche à vos chaussures

 

Une impression comme ça

des gens exilés

 

C'est ce que j'ai vu

la bouche

 

Qui demande

l'autre bras aussi

 

Des gestes

se tend

 

Qui emplissent l'espace

vision familière

 

D'un quartier tant de fois

il y a l'eau

 

Traversé

de la rivière

 

Les commerçants attentifs

sans vous en apercevoir

 

 

 

*

 

Quelques pas

l'oubli

 

Chercher à dire

on attend

 

L'autre cherche aussi

c'est troublant

 

Marée qui monte

les mots

 

C'est si simple

comme la continuité des bras des mains

 

Le geste à la parole

le possible qui se fait jour

 

Extraits de « Mais qui lira le dernier poème ?  Suivi de C'est encore l'hiver et Radiographie» (Publie.Papier)

 

http://www.publiepapier.fr

 

Prix : 11.98 €

 

Existent en livres numériques : "Mais qui lira le dernier poème?"(Publie.net) 2.99 € le téléchargement

 C'est encore l'hiver (Publie.net) 1.99 € le téléchargement

 Radiographie (Publie.net)   1.99 € le téléchargement

 

http://www.publie.net

 

Le blog de Publie.net : http://publie-net.com/

 

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30/01/2014
 
 

Monique Lise COHEN

 

 

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Christian Saint-Paul est heureux de signaler la parution du dernier livre de poèmes de Michel COSEM : « Ainsi se parlent le ciel et la terre » aux éditions L’Harmattan, 90 pages, 11, 50 €. Dans sa préface Jean JOUBERT écrit : « Le grand travailleur littéraire est aussi un grand voyageur, dontles découvertes de paysages nouveaux nourrissent sa création, tout particulièrement dans le domaine de la poésie. En témoignent, une fois encore, ses recueils récents dans lesquels Michel COSEM a rassemblé ses carnets de voyage avec des textes brefs, que l’on peut considérer comme des poèmes en prose. Leur concision, le choix subtil des détails révélateurs d’un lieu, à la fois dans sa réalité et dans son esprit, en font de petits chefs- d’œuvre de finesse et d’émotions discrètes. »

L’herbe sait être nue

mouillée

elle sait être enceinte

et porter sur son visage toutes les traces de la nuit

 

Elle sait aussi le vent qui râpe les fleurs

Ensanglantées

Elle sait enfin l’insolation

L’incertitude de la parole

Et le goût démesuré de l’automne

 

La revue « chiendents » cahier d’art et de littératures, consacre son n° 42 à Michel BAGLIN, présentation, entretien avec Luc Vidal, sélection de textes, critiques rassemblés sous le titre « Ecumes ». Un numéro bien soigné qui rend assez bien compte de l’univers créatif toujours à hauteur d’homme de cet auteur dont la lucidité et une certaine forme de nostalgie n’ont pas gâté une volonté de vivre heureux comme Sisyphe pouvait l’être. Le n°, 4 € + 2 € pour frais d’envoi, à adresser à Editions du Petit Véhicule, 20 rue du Coudray – 44000 Nantes ; commande Paypal sur le blog : http://editionsdupetitvehicule.blogspot.fr/  

 

Isabelle LEVESQUE lauréate du Prix des Trouvères 2013 et du Grand Prix de Poésie de la Ville du Touquet publie son dernier recueil de poèmes aux Ecrits du Nord Editions Henry  (www.editionshenry.com « Ravin des Nuits que tout bouscule » 45 pages, 8 €. C’est Pierre DHAINAUT qui signe la préface de ce livre dont il dit qu’il « n’est si frémissant que parce qu’Isabelle Lévesque refuse d’y être seule, elle dit « tu » aussi souvent que « je », le dialogue est constant, elle ne désire que le temps du « nous », « le point d’orgue ». A travers « Ravin des Nuits que tout bouscule », en nous faisant participer à la genèse d’un poème, à la renaissance du Phénix, elle nous communique sa « foi », c’est-à-dire déjà le « feu ». »

            On se libère, croyances rendues au soir, expirant.

On se libère du jour croisant le fer des nuits qui nous arrache le silence. On vit de noir comme d’un cri poussé : je danserai les pas de midi dans les heures courant jusqu’à minuit.

            Mon dernier souffle sera léger, dune de rosée. Et toi, tout bas, ton dernier chant dira l’ode de nos deux vies.

-       C’est écrit.

 

Enfin le recueil publié à La Porte (Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin, 02000Laon, 3,75 € le livret, abonnement 20 € pour 6 numéros) par Marcel MIGOZZI « Un pied toujours dans mon quartier » est encore à signaler : lecture agréable d’une nostalgie revendiquée comme un baume sur les plaies d’un présent qui s’échappe pour paraphraser Michel BAGLIN avec son livre « Un présent qui s’absente ». Migozzi sépare dans ce petit livre les « Corps visages disparus » des « Choses lieux disparus ». Un puissant travail sur la langue comme dans tout texte de ce poète qui ne se départit pas d’une lucidité ironique et d’un sens aigu de la dérision.

Derrière la porte métallique on gueule

Y a quelqu’un

Sur des cabinets à la turque.

Jets d’urine, chants de tôles, traces intimes

Poisseux doigts, morceaux de papier-journal

Embrenés secs comme crapauds.

 

Notre pissotière de quartier

En surplomb sur la rivière, rouillée

Jusqu’aux serrures.

Où a-t-elle disparue ?

Dans quel paradis de pissotières

Retraitées ?

 

L’émission est ensuite consacrée à l’invitée Monique-Lise COHEN écrivaine, essayiste, poète, philosophe et docteur en littérature, auteure de nombreux ouvrages et études sur des thèmes religieux, littéraires et historiques. La dernière intervention à ce micro portait sur son livre de poésie « D’étoiles comptabilisées au cœur des souvenances » B.O.D. éditeur. Cette fois, elle vient présenter « Histoire des Communautés Juives de Toulouse des origines au IIIème millénaire » 400 pages, 25,90 € aux éditions Book on Demand (B.O.D).

Monique-Lise COHEN est une des co-auteurs de cette large étude avec Elie SZAPIRO (décédé l’été 2013), Eric Malo, Frédéric VIEY, Pierre LEOUTRE.

Ce livre reprend le livre qui avait été publié chez Loubatières en 2003, et l’augmente considérablement de nouvelles études. Nous disposons ainsi d’une source documentaire historique sans précédent ; c’est dire l’intérêt de cette publication pour appréhender l’histoire de Toulouse, riche et complexe, mais aussi l’histoire tourmentée du peuple juif depuis l’Antiquité.

Monique-Lise COHEN explique avec la pédagogie qui lui est familière les diverses périodes de cette histoire. L’Antiquité voit l’aventure du Livre naître tout autour de la Méditerranée. De l’Espagne, elle s’étend au Languedoc.  Au Moyen-âge les juifs étaient protégés par les seigneurs et peu inquiétés par l’Eglise. Mais l’annexion du Midi au domaine royal va tout changer. Raymond VI en 1207 dut faire amende honorable pour avoir confiées des charges publiques aux juifs « à la honte de la religion » selon le courroux du pape.  Auparavant la communauté juive bénéficiait  de l’héritage du droit romain qui reconnaissait le droit à la propriété et autorisait la possession d’immeubles, de propriétés foncières et de charges publiques. Le commerce de l’argent, bien qu’interdit par l’Eglise, était largement pratiqué par les chrétiens. A Pâques avait lieu la colaphisation, giffle infligée à un notable de la communauté juive devant le parvis de la cathédrale.

En 1306, l’expulsion des Juifs de France par Philippe le Bel abolit dix siècles d’histoire juive en France.

La science juive méditerranéenne va être transmise au Nord. La Kabbale et l’enseignement de Maïmonide s’étaient développés dans le Languedoc.

Survient l’époque noire de l’Inquisition, les Marranes, la naissance ensuite de la philosophie sceptique avec Montaigne et Francisco Sanchez.

La révocation de l’Edit de Nantes en 1685 va entraîner l’autodafé des œuvres juives.

Le XVIIIème siècle est celui du rejet de l’étranger à Toulouse devenue intolérante. Elle envoie Callas au supplice place Saint-Georges.

Il faut attendre la Révolution Française pour qu’une communauté juive ose s’installer à Toulouse. Puis viendra l’affaire Dreyfus, la position tardive mais ferme de Jaurès qui signe des articles dans La Dépêche du Midi.

En 1940 commence une nouvelle période noire, avec les camps de concentration près de Toulouse et en Languedoc. La Résistance Juive s’organise à Toulouse. Monique-Lise COHEN évoque les figures de Claude VIGEE  et de Marcel LANGER.

Une histoire à découvrir  car elle nous éclaire sur notre passé et nous prépare à notre avenir.

Monique-Lise COHEN présentera ce livre le lundi 17 février à 18 h à la Librairie Ombres Blanches à Toulouse.

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23/01/2014
 
 

Michel BAGLIN

 

 

 

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Christian Saint-Paul annonce que le Bureau Des Compagnies de Théâtre, un collectif pour la création des théâtres en Midi-Pyrénées organise le samedi 1er février 2014 de 10 h à 18 h à l’Espace DURANTI, salle Osète à Toulouse, 6, rue du Lieutenant Pélissier, une journée d’ateliers et de débats sur « la création théâtrale dans nos démocraties ». Le public est convié à participer à cette journée.

Dans le cadre de la semaine franco-allemande du 17 janvier au 1er février les auditeurs sont invités à assister au Goethe-Institut, 4bis rue Clémence Isaure à Toulouse, à une représentation autour des « Lettres à un jeune poète » de Rainer Maria RILKE, le mercredi 22janvier 2014 à 20 h par la Compagnie L’Instant Théâtre, Julie PICHAVANT comédienne.

Yves CHARNET lira des passages de ses livres le samedi 25 janvier 2014 à 19 h, à la Librairie-Tartinerie à Sarrant dans le Gers. Le dimanche 26 janvier 2014 à 11 h, il donnera une lecture musicale de « La tristesse durera toujours » et d’inédits d’extraits de son livre en cours, autour de Nougaro, « Mon seul chanteur de blues », en compagnie d’Augustin CHARNET au clavier et de Clément LIBES au violon (musiciens du groupe KID WISE).

Cathy GARCIA fait paraître « FUGITIVE » aux éditions Cardère, 64 pages, 12 euros. (http://www.cardere.fr) Ce livre de poésie s’inscrit dans le sillage des deux livres précédents publiés par Cardère « Le poulpe et la pulpe », « Les mots allumettes » ; texte d’exhortation à poursuivre la route avec l’énergie camusienne de la révolte. Un texte fort à lire dont nous reparlerons.

Isabelle LEVESQUE est la lauréate du Prix des Trouvères 2013, Grand Prix de Poésie de la Ville du Touquet. Les Ecrits du Nord, Editions Henry dirigées par Jean Le BOËL (www.editionshenry.com) publient son recueil « Ravin des Nuits que tout bouscule » 44 pages, 8 euros. Pierre DHAINAUT, Président du jury du Prix des Trouvères 2013 écrit pour la 4ème de couverture du livre : « Ce livre n’est si frémissant que parce qu’Isabelle Lévesque refuse d’y être seule, elle dit « tu » aussi souvent que « je », le dialogue est constant, elle ne désire que le temps du « nous », « le point d’orgue ». A travers « Ravin des Nuits que tout bouscule », en nous faisant participer à la genèse d’un poème, à la renaissance du Phénix, elle nous communique sa « foi », c’est-à-dire déjà le « feu ». Lecture d’un extrait.

Gilles LADES publie un livre d’art illustré par Claude BARRERE « Une source au bout des pas » aux éditions Trames. Il s’agit d’une édition d’art imprimée par Gérard TRUILHE sur ses presses artisanales de Barriac en Rouergue, limitée à 33 exemplaires (50 euros). Ce poète, depuis quelque temps, bien trop rare, sera prochainement l’invité de l’émission.

Saint-Paul accueille son invité, l’écrivain, poète, nouvelliste, essayiste,

Michel BAGLIN familier de cette émission à laquelle il vient toujours présenter ses ouvrages. Et comme c’est un auteur prolixe, nous avons le plaisir de le recevoir régulièrement. La revue « chiendents » cahier d’arts et de littératures, lui consacre son numéro 42 ; voir Editions du Petit Véhicule 20, rue du Coudray,  44000 Nantes (http://editionsdupetitvehicule.blogspot.com). Prix Max-Pol FOUCHE puis lui-même membre du jury de ce prix jusqu’à sa suppression, c’est un poète riche d’une trentaine de publications, romans, livres de poèmes, nouvelles, essais qui vit au bord de la Garonne tout prés de Toulouse et anime sans relâche une revue numérique sur la toile (revuetexture.fr) qui rend compte brillamment de la vie poétique. Il vient ce soir, nous parler de sa publication aux éditions Bruno Doucey « Un présent qui s’absente » 128 pages, 15 euros, voir :  

http://les-poetes.fr/parutions/parutions%20fichier/2013/Septembre-2013.jpg

 

Un entretien s’instaure entre Saint-Paul et Michel BAGLIN entrecoupé de larges moments de lecture d’extraits du livre par l’auteur. Le constat du poète selon lequel la pratique de la langue du lieu commun n’a rien à dire, rien à déranger, se rapproche de l’assertion de René CHAR : « Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égard ni patience ». « Je les entends, ces mots qui font sonner le vide » écrit BAGLIN. Pour lui, il existe des « formules  qui aident à vivre ». Signer un livre, c’est le donner en partage et peut-être aider l’autre à se connaître, à se reconnaître et à se trouver. Attaché à la sonorité de la langue et ayant même écrit des textes pour des chansons, Michel BAGLIN a travaillé avec des compositeurs comme Martine CAPLANNE et aujourd’hui a noué une forte complicité avec le poète chanteur Jacques IBANEZ ; celui-ci qui vit à Narbonne est joint par téléphone et fait part aux auditeurs de son enthousiasme dans ce travail de collaboration avec notre poète. Diffusion d’une chanson interprétée par IBANEZ sur un texte de BAGLIN.

Un poème lu par hasard est le « précipité  de nos vies dissoutes » explique le poète qui rend hommage dans son livre, vivants et morts confondus puisque les poètes ne meurent en réalité jamais, à René Guy CADOU, à Bernard MAZO, à Michel François LAVAUR, à Jean L’ANSELME, fait un clin d’œil à Philippe-Marie BERNADOU passionné d’insularité, immortalise une phrase de l’ami IBANEZ avec lequel il a parcouru le Canal du Midi en bicyclette : « il y a toujours du monde aux écluses ». Il nous fait entrer dans son univers tangible, que nous cernons de prés mais sans indiscrétion, car s’il y a un sens caché ou plutôt sous-jacent, c’est nous, lecteurs qui projetons le nôtre sur les mots sûrs et fraternels de l’auteur. 

Le mythe de Prométhée n’est jamais loin chez Michel BAGLIN qui sait le prix et la nécessité de la révolte et de la transgression. La fraternité l’emporte à chaque coup et c’est tout naturellement qu’une partie du livre s’intitule « Le chant des migrants ». « Derrière eux, ils ont laissé le poème d’une vie pauvre » dit-il.

Mais peut-on éviter de se payer de mots ? C’est une vraie angoisse : est-ce que le poète a perdu son temps à se payer de mots ? Il répond à cette récurrente interrogation par un long poème qui clôture le recueil et qu’il lit in extenso.

Des textes magnifiques de vie, d’humanité, de celle qui, on le pressent, va nous échapper bientôt, mais sera reprise par d’autres, familiers ou inconnus, dans cette chaîne fraternelle que tisse les hommes comme BAGLIN pour que Sisyphe soit toujours heureux. A lire d’urgence ! 

 

 voir notes de lecture de "Un présent qui s'absente".

 

Michel BAGLIN Émission TV sur « Un présent qui s'absente »

 Greg Lamazères (lui-même romancier et musicien) a invité Michel BAGLIN dans son émission TV « Courrier Sud » très récemment sur TLT. Il l'interroge sur son dernier recueil, « Un présent qui s'absente » (Bruno Doucey éd.) et sur le recueil collectif « L'Autan des nouvellistes, 17 auteurs toulousains » (Atelier du Gué) auquel il a participé. 

 Pour regarder l'émission : http://www.teletoulouse.fr/Mstr.php?lk=468gLi4788z020&Em=84&Vd=3326

 

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16/01/2014
 
 

Francis PORNON

 

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Christian Saint-Paul invite les auditeurs à se rendre vendredi 17 janvier 2014 à 19 h à la librairie Terra Nova, 18 rue Gambetta à Toulouse à une soirée dédiée à la poésie autour du recueil d’Aurélia LASSAQUE « Pour que chantent les salamandres » paru aux éditions Bruno Doucey. Ce recueil a fait l’objet d’une émission avec l’auteure en 2013. Née en 1983, elle est poète de langue française et occitane. Elle collabore avec des plasticiens, danseurs et musiciens. Ses poèmes sont traduits dans une quinzaine de langues. Elle a donné de nombreuses lectures en festivals en Europe, au Brésil, en Norvège et en Inde. Engagée en faveur de la diversité linguistique, elle a été responsable en 2011 de l’exposition « Dialogue entre cultures et langues » au Conseil de l’Europe ; elle est aussi conseillère littéraire du festival « Paroles Indigo » à Arles aux côtés de Boubacar Boris Diop. Ses derniers titres : « Solstice and Other poems », Francis Boutle Publishers (trad. James Thomas, Londres, 2012) et « Pour que chantent les salamandres », éditions Bruno Doucey (Paris, 2013). « Elle s’exprime en deux langues, le français et l’occitan, sans que l’on sache toujours, dans le cours limpide de son écriture, quelle est la part de l’affluent et celle du confluent », dit d’elle son éditeur Bruno Doucey.  La librairie TERRA NOVA depuis sa création en 2004, invite les lecteurs à interroger le monde à travers ses écrivains, ses réalisateurs, ses artistes, ses penseurs, ses luttes sociales. Dans cette chaleureuse librairie, le lecteur peut fouiner et trouver les livres d’éditeurs en marge de l’industrie du livre. Et comme TERRA NOVA pense  la librairie comme un lieu de vie sociale, elle organise régulièrement dans son espace café des rencontres. Ce sera le cas mercredi 29 janvier 2014 pour l’invité de cette émission : Francis PORNON.

« La Porte » Poésie, art et littérature vient de faire paraître un livret de Marcel MIGOZZI « Un pied toujours dans mon quartier » (le livret 3, 75 €, abonnement 6 numéros 20 €, règlement à adresser à Yves Perrine, 215 rue Moïse Bodhuin, 02000 Laon). On retrouve dans ce court recueil tout l’univers migozzien : un sens aigu de la langue, une ironie irrépressible, la dérision de soi comme une arme à tout délire, un goût tenace pour la nostalgie, l’amour de sa terre et des siens. Le tout très tonique malgré cet amour du passé. Et il s’en explique de cet attachement au passé en citant en exergue José Ortega y Grasset :

Je suis simplement un homme qui aime le passé…

Aimer le passé,

c’est se réjouir qu’il soit en effet le passé,

que les choses s’élèvent à la vie

pure et essentielle

qu’elles acquièrent dans la réminiscence

 

Où respire aujourd’hui la mère

 

(On n’en a qu’une)

 

Qui s’appuyait contre le mur de la cuisine en noir

Tissu, main sans enfant,

Perdue dans un vieux temps

Tout creux ?

 

La mère

Aujourd’hui sans respiration.

 

Olivier DEMAZET, poète né en 1930 à Tours qui vit à Montauban et dans le Tarn, auteur de 28 recueils de poésie et de trois anthologies collectives « Eclats de Rimes » fait paraître à Montauriol Poésie « Courtes lignes » aphorismes (140 pages, 20 €).

Les conseils sont plutôt précédés que suivis.

 

Boire apporte déboire.

 

La vie serait-elle une erreur, la mort une faute ?

 

Gardons le souvenir de l’impardonnable.

 

Être libre, c’est se maîtriser sans maître.

 

Le poète argentin Juan GELMAN auquel nous avions consacré une émission le jeudi 26 septembre 2013 (que vous pouvez écouter en cliquant sur l’année 2013) est décédé  à 83 ans chez lui à Mexico où il vivait depuis 1988, le mardi 14 janvier 2014 entouré de l’affection des siens. Il était lauréat des prix les plus prestigieux de la littérature espagnole et latino-américaine. Il faisait cohabiter dans ses vers l’amour, la mort et la souffrance. Son dernier livre traduit merveilleusement par Jacques ANCET « COM / POSITIONS » est publié aux éditions Caractères qui avaient un projet d’un nouveau livre qui, nous l’espérons, verra le jour puisque les poètes ne meurent vraiment jamais.

 

Christian Saint-Paul reçoit son invité le poète, écrivain

Francis PORNON qui vient présenter son premier livre de nouvelles « Le Coffret » publié aux éditions du Horsain, 254 pages, 15 €. Auteur d’une trentaine d’ouvrages, parmi lesquels carnets de voyage et romans, poèmes, textes dramatiques et lyriques, Francis PORNON nous donne à lire cette fois un ensemble de 17 nouvelles. Ce sont des tranches de vies d’Espagnols, de « Pieds-noirs », d’Algériens, d’Italiens, de Français de France, de femmes et d’hommes d’ailleurs, aussi de gens de chez nous, d’hier et d’aujourd’hui. Dans ces histoires de transmission – ou de non transmission – se croisent jeunes et vieux tandis que se perd ou rebondit l’Histoire. Ces nouvelles où  la fiction épouse le réel furent écrites au fil des ans, au fur et à mesure qu’une rencontre ou une émotion les fit clore.

Francis PORNON rend compte de sa démarche : il a écouté des histoires et a voulu les transmettre en corrigeant si nécessaire les versions originales du fait de l’impérieux devoir de l’écrivain. C’est la langue qui commande et qui a le dernier mot. Le genre littéraire des nouvelles connaît en France un déclin préoccupant alors qu’il s’agit d’un genre noble qui a enraciné la littérature française au cours des siècles précédents. Il est souhaitable que les nouvelles retrouvent l’engouement perdu simplement parce qu’elles ne collent plus aux critères de vente actuels.

Le fil commun qui relie cet ensemble de nouvelles est, selon Saint-Paul, l’emprise de l’Histoire, celle de la guerre civile d’Espagne, de la guerre d’Algérie, de l’émigration italienne, de l’histoire de Toulouse en filigrane etc. Transmettre est toujours transmettre l’Histoire. Francis PORNON abonde dans ce sens même si ce n’est pas une volonté consciente au départ.

Pour les auditeurs de Radio Occitania il lit en entier une nouvelle du livre « Le Coffret ».

Francis PORNON présentera ce livre à Toulouse à la librairie TERRA NOVA 18, rue Gambetta, le mercredi 29 janvier à 19 h ; la séance sera suivie d’un apéritif amical.

Un livre très agréable à lire ; un ton alerte et poétique. Les 17 nouvelles peuvent réjouir sans effort 17 soirées ou peuvent s’avaler à la suite, selon son goût. A lire en tout cas et à encourager l’édition parcimonieuse de nouvelles.

 
 
 
09/01/2014
 
 

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L’émission diffusée le jeudi 9 janvier 2014 avait été enregistrée, ce qui est exceptionnel, les émissions étant réalisées normalement en direct. Toutefois, avant le passage du document sonore, et alors en direct, Christian Saint-Paul a fait quelques annonces à l’antenne. Ces annonces n’ont pas été enregistrées et n’ont pu être écoutées que par les auditeurs présents ce jeudi à 20 h. Pour mémoire et bien entendu pour incitation à la lecture, voici ces annonces :

Parution de NOUVEAUX DELITS  Revue de poésie vive et dérivés abonnement 25 € pour 4 numéros ou 48 € pour 8 numéros à adresser à l’ordre de Association Nouveaux Délits, Létou – 46330 Saint Cirq-Lapopie

Numéro 47

Lecture de l’éditorial de Cathy GARCIA : 

« Dernier noël capitaliste » lançait le journal Hara Kiri en décembre 1972… Visionnaire, non ? Mais ils n’avaient pas prévu entre autre le retour des tablettes (depuis le bon vieux temps de l’argile) et des téléphones plus intelligents que leurs utilisateurs… Flonflons, cotillons, soyons mignons, la même rengaine encore et toujours, joyeux naufrage et bonne bourre 2014 !?

 

Oh bien-sûr, ça n’empêche pas les vrais sentiments, les vœux vraiment les plus sincères, ça n‘empêchera pas non plus les gens de mourir de froid dans la rue, noyés en Méditerranée, bombardés par ci, découpés par là, balayés par les statistiques, ça n’empêchera pas les trafics en tout genre, d’influences ou d’organes, mais on se plie bon gré, malgré, à la tradition, à l’habitude, au désir aussi, toujours un peu suspect, de capter un peu de joie précieuse entre deux factures.

Et puis on peut aussi lire ce numéro. Il est sans flonflons, sans trompettes, il est même un peu triste, un peu noir, un peu trash… Et pourquoi pas ? S’exprimer c’est aussi ne pas laisser dans l’ombre ce qui pourrait déranger, c’est affronter le malaise, ouvertement, ça peut même en devenir libérateur. Être libre de flonflons et de trompettes, prêt à accueillir chaque instant qui passe, avant ou après minuit, sans vouloir changer hier, sans craindre de ne pouvoir changer demain, mais simplement être ici et maintenant, heureux ou malheureux, amer ou amoureux, en pleine forme ou sur les genoux, pessimiste ou optimiste, lâche ou courageux, gagnant ou perdant, qu’importe ! Juste être là, laisser les sourires se poser sur nos lèvres s’ils le veulent et repartir quand ils auront envie d’aller fleurir d’autres bouches, laisser nos mains s’ouvrir et se fermer comme des battements d’ailes, en attendant le printemps qui revient toujours, même si tout se détraque, même si les coutures craquent et patatrac !

 

Se dire que plus on prend de claques, plus le sang circule…  et la vie va ! »

Lecture de « Signes de mon vieillissement » d’Eric DEJAEGER.

Et parce que Cathy GARCIA dans son éditorial évoque l’année 1972, Saint-Paul revient sur ces années soixante dix et en particulier sur ces années en Espagne et sur une jeunesse déboussolée qui entrera avec un désespoir aveugle dans le terrorisme. Epoque douloureuse. Pour Saint-Paul la lutte antifranquiste de l’extérieur et de façon active se devait de cesser dès 1970. La transition démocratique, voulue par l’Espagne qui désirait entrer dans l’Europe ne laissait aucune place à une action clandestine dirigée depuis les pays étrangers, comme l’URSSS par exemple. Toulouse, plaque tournante de ces actions clandestines et qui s’était si bien illustrée, devait céder le terrain de la lutte politique aux forces de l’intérieur. Toute obstination compromettait la rapidité et le succès du changement vers un état démocratique. Pourtant, des groupes se sont constitués après 1970 refusant le capitalisme et prônant la lutte armée. Et l’amiral CARRERO BLANCO pouvait assurer une continuité édulcorée du régime en place. L’action réussie de l’ETA a rendu drôlement service aux partis démocratiques de transition, toujours officiellement clandestins mais déjà représentatifs et dans l’action politicienne classique qui sied en Europe. Cette année 2014, il y aura 40 ans que les velléités utopiques de jeunes anarchistes fourvoyés dans une action de guérilla, furent stoppées dans le sang. Toulouse fut une des villes les plus impliquées dans l’inutile protestation internationale qui s’en suivit. Le consulat d’Espagne de la ville rose fut plastiquée, avec, c’est vrai, de bien maigres dégâts. Mais la voix toulousaine se faisait entendre. Elle avait intégré dans sa mémoire politique humaniste le nom de Salvador PUIG ANTICH, militant du Mouvement Ibérique de Libération (MIL) impliqué lors de son arrestation à Barcelone, d’échange de coups de feu qui coûtèrent la vie à un inspecteur de police. Six mois après cette arrestation, PUIG ANTICH né en 1948 fut garrotté à la prison Modelo de Barcelone. Son supplice dura vingt minutes. Le même jour, à la prison de Tarragone, Heinz CHEZ  un activiste polonais qui avait tué un garde civil fut lui aussi garrotté, mais dans l’indifférence de l’opinion internationale. L’année suivante, en septembre 1975, cinq autres militants de la lutte armée furent fusillés car l’Espagne ne possédait pas assez de garrots pour les exécuter en même temps. L’Espagne est entrée dans l’Europe en 1986. La peine de mort y est abolie. Mais le nom de Salvador PUIG ANTICH symbole d’une répression brutale qui fut celle, terrifiante, de la dictature franquiste doit demeurer dans nos mémoires, non comme un exemple, mais comme « una putada » une saloperie qui déshonore, s’il en était besoin, les hommes de pouvoir de ces années.

Les prisonniers qui étaient dans la galerie d’où partit Salvador PUIG ANTICH pour le supplice, dont il ne découvrit la nature qu’au dernier moment, composèrent sur cette mise à mort des chansons. Lecture de l’une d’elles :

Ferme la porte

Tire le verrou

Maton !

Attache ferme cet homme-là

Avec des chaînes, avec des cordes

Ces chaînes aux anneaux

Ensanglantés qui forment

Des nœuds de sang

Attache ferme et serré

Cet homme là, maton

Tu n’attacheras jamais son âme

Nombreuses sont les serrures

Nombreuses sont les clefs, maton

Mais tu n’as pas celles de son âme

Un homme attend

Dans son confinement

L’oreille à l’écoute

C’est le prisonnier Salvador

Le peuple criera peut-être

Ce peuple, le nôtre, qui réclame la liberté

Et alors voleront les serrures

Voleront les prisons

Attache ferme et serré

Cet homme-là, maton

Tu n’enchaîneras jamais son âme

Putain de vie, le garrot l’a emporté !

 

Passage ensuite de l’enregistrement.

Les éditions Colonna (colonnadistria.jj@wanadoo.fr) ont publié de Stella ANGELI « Aux cœurs fendus » 112 pages, 10 €. Livre soigné comme toujours chez cet éditeur. Une poésie du cri. Des rimes, de la musique. Lecture d’un extrait.

Les éditions Caractères  www.editions-caracteres.fr , contact@editions-caracteres.fr , ont publié « Compte à rebours » du poète Israélien Natan ZACH, poèmes traduits de l’hébreu par Charlotte WARDI avec une préface de Nissim CALDERON, 190 pages, 18 €. Un évènement éditorial ! Ce poète est né à Berlin en 1930 mais émigre avec sa famille en Palestine, alors sous mandat britannique en 1937.  Il devient professeur d’université, enseigne à Tel-Aviv, se rend en Angleterre et y poursuit des études de doctorat. De 1978 à 2000, il enseigna la Littérature Comparée à l’Université de Haifa. Poète, critique et traducteur il a exercé une influence déterminante dans le développement de la poésie hébraïque moderne. Il fut l’éditeur de revues littéraires et anthologies en Israël. Il est lauréat de prix littéraires prestigieux en Israël et en Italie où le gouvernement lui a conféré le titre de « Cavaliere ». « La poésie de ZACH parle à tout être humain, quelle que soit sa culture, qui a besoin de justesse quand il approche la souffrance humaine et refuse le cérémonial des sentiments » nous dit le préfacier qui conclut : « ZACH fut et reste un poète de « déchirures », nom qu’il donna à un de ses derniers textes écrits jusqu’à ce jour ; déchirures de vie et déchirures de poèmes de la difficulté desquels il porte la responsabilité. Il porte aussi la responsabilité de la beauté du refus de s’enfermer dans la difficulté qu’ils comportent ».

Une œuvre majeure de la poésie mondiale à découvrir !

Lecture d’extrait.

 

Le peintre peint

 

Le peintre peint, l’écrivain écrit, le sculpteur sculpte

mais le poète ne chante pas,

il est colline au bord du chemin,

ou arbre, ou parfum,

quelque chose qui s’échappe,

ou n’est déjà plus ce qu’il était

et ne reviendra, comme les saisons de l’année,

la chaleur, le froid, la glace et le rire

du cœur, quand il aime,

ou l’eau, quelque chose de vaste, d’insaisissable

comme le vent, ou un navire, ou un poème,

quelque chose qui laisse

quelque chose.

 

Saint-Paul reparle du recueil de Jean-Michel TARTAYRE « Marines » qui constitue le n° 425 de la revue ENCRES VIVES, 6,10 € et abonnement 12 volumes 34 € à adresser à Encres Vives, 1 allée des Allobroges, 31770 Colomiers.

« Chaque poème, nous dit l’auteur, ici s’inscrit dans une relation d’ordre amoureux avec la topographie littorale que j’eus l’heur de connaître depuis mes plus jeunes années, qu’il s’agisse de la côte atlantique, de la côte méditerranéenne ou encore de celles de l’île Maurice au cœur de l’océan Indien. Je me suis employé à travers eux à goûter les iodures éclatantes qui fondent la nécessité du voyage et de la bonne humeur, non sans les avoir placés au préalable sous l’invocation de Neptune ».

Lecture de « Au large de Cuba, 1839 ».

 

Saint-Paul reçoit son invité : Jacques ARLET, Mainteneur de l’Académie des Jeux Floraux de Toulouse, professeur de médecine qui depuis qu’il a cessé de pratiquer cet art, a publié pour notre plus grand profit des biographies et des livres sur l’histoire de Toulouse, le dernier en date étant « La vie à Toulouse sous Louis XIV » aux éditions Loubatières.

Cette fois-ci il vient nous parler de son dernier livre qui n’est pas le fruit de ses recherches rigoureuses, mais de son imagination fertile. En effet, il publie un recueil de contes : « Contes sans provisions »  aux éditions de l’Ixcéa à Toulouse (2, rue d’Austerlitz) 210 pages, 17 €.  C’est le Secrétaire Perpétuel de l’Académie des Jeux Floraux, Georges MAILHOS qui signe la préface.

« Au commencement était le conte.

Avant de savoir écrire, nos ancêtres savaient rêver, inventer des fictions et les plus éloquents, parmi eux, racontaient leurs rêves en famille ou entourés de leur tribu, le soir autour d’un grand feu ou à la lumière des étoiles.

Il n’ya pas que les bons comptes qui font les bons amis, les bons contes aussi : ils doivent être, de préférence, invraisemblables et poétiques, avec une pincée d’humour qui peut être noir si nécessaire ! » nous avertit l’auteur  dans la 4ème de couverture. Et ces ingrédients garnissent avantageusement les contes du livre. Il en résulte une lecture jubilatoire qui conduit à lire d’un trait l’ensemble. Un moment de plaisir trop vite passé. Jacques ARLET interrogé sur les circonstances qui président à l’élaboration de ces contes et des trouvailles inimaginables qu’ils recèlent, admet que le plus difficile est le démarrage. Mais qu’ensuite l’imagination fait le reste et que l’auteur peut être aussi le premier surpris. On comprend dès lors que l’effet jubilatoire n’est pas réservé au seul lecteur, que l’auteur lui aussi s’y épanouit. Pour un auteur habitué depuis si longtemps à un lourd et méticuleux travail de documentation et de rigueur toute scientifique dans l’écriture de ses ouvrages d’histoire, ou pire encore de médecine, la victoire de l’imagination et de la force de l’écriture, de la langue, est euphorisante. Le conte ne peut se concevoir, à l’opposé de la nouvelle ou du roman, sans une chute explicite et « morale », celle précisément du conte. « Les contes sans provisions » ont été écrits pour des lecteurs de 4 à 94 ans s’amuse Jacques ARLET, modernisant en cela la célèbre formule de 7 à 77 ans. Il ravive le genre littéraire des contes qui s’écrivent sans contrainte, pour le plaisir et pour un plaisir partagé.

La préface malicieuse, habile et amicale de Georges MAILHOS éclaire avec humour la lecture à venir et participe en réalité du même élan jubilatoire. Le préfacier comme l’auteur sont heureux de ce qu’ils écrivent. Le style crée déjà l’atmosphère du conte et pour cela varie d’un conte à l’autre. Jacques ARLET révèle ainsi toutes les facettes de son multiple talent. Il sait adopter un ton familier, celui de l’humour, de l’ironie, ou de la pédagogie de vulgarisation quand il évoque les peintres. Et l’on comprend alors que l’auteur manie aussi les pinceaux et voue une passion à la peinture. Il est vrai « qu’écrire, c’est mettre en œuvre ses obsessions » comme le disait Jean GRENIER.

Lecture de « La fiancée juive de Rembrandt ».

La société du spectacle s’est imposée sans réserve. Rien n’y échappe. Les médias peuvent fabriquer un artiste ; Jacques ARLET s’en amuse avec « L’écrivain » conte sur les avatars d’un vieil écrivain porté subitement aux nues par ces médias qui font le monde.

 « Accordéon quand tu nous tiens » joue sur l’émotion sentimentale car la tendresse a sa place également dans les contes. Et puis, comme le dit si justement Georges MAILHOS « le merveilleux corrige la réalité » et la rend désirable.

Lecture par Jacques ARLET de « Le Diable ».

Un livre de plaisir qu’il serait indécent de se refuser !  

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Manijeh

NOURI

02/01/2014

 

 
 
 
 
   

 

« Cars amics de Radio Occitania vos desiri una bona annada plan granada 2014 ! » c”est par ces mots que débute la première émission de l’année. Claude BRETIN et Christian SAINT-PAUL souhaitent une très bonne année aux auditeurs et les remercient de leur fidélité de plus de trente ans.

L’émission continuera, imperturbablement, à faire connaître les poètes du monde entier, connus, reconnus ou à découvrir, vivants ou morts. Pas de frontières et pas d’idéologies partisanes dans le choix, mais une inébranlable passion humaniste.

L’année 2014 est l’année du centenaire de la première guerre mondiale. Le livre à lire, avant tout autre sur cette période tragique qui a accéléré la modernité technologique, est celui de Joseph DELTEIL : « Les Poilus » paru en 1926 et repris par Grasset en 1994 dans sa collection Cahiers Rouges. Génie de la langue, de la synthèse, du discernement !

C’est Daniel VAROUJAN, un poète arménien massacré dans des circonstances effroyables par la police turque en 1915, qui est évoqué en préambule de l’émission ; la poésie arménienne aura sa place dans l’année qui commence. Né en 1884, il fut celui qui célébra la très ancienne culture arménienne, en ayant les yeux rivés sur la poésie européenne en pleine métamorphose. Il sut profiter de l’opportunité de son époque qui reliait le romantisme à la modernité en marche. Il écrivit pour son peuple qui allait connaître un des premiers génocides qui entachèrent l’histoire de l’humanité de ce terrible XXème siècle.

Lecture de Voici le livre, extrait de « Chants païens et autres poèmes » (Orphée/La Différence)

 

Voici le livre, comme promis… Tu verras

qu’il contient le Songe insondable

de tous les âges :

les Ménades au teint de rose,

dansant sur la colline, sous la lune…

 

les dieux réclamant qu’on leur sacrifie

le cœur d’Homère, ou quelque Messaline

aux prunelles de feu qui, n’ayant comme otage

que des chevaliers morts pour avoir trop aimé

l’abricot sans pareil, couche avec leur cadavre…

 

Tu pourras y goûter les nuits de Pompéï,

la grenade mûrie sur les lèvres fatales

du volcan… puis, grave comme Jésus,

ce nouveau siècle, telle une aurore en gésine…

 

Tu pourras y trouver de mourantes bougies

-       je veux des cœurs achevant de brûler...

l’affrontement de l’homme et de l’acier,

et, surgi de la boue, le crime au regard torve

qui suce impunément le sang des roses…

 

Ô mon ami, sache-le, mes poèmes

ne font que dire les douleurs

de la jouissance et toutes les voluptés

de la souffrance : le cœur est un calice et

les vins qui l’emplissent deviennent aussitôt

le mémorable sang des dieux immémoriaux…

 

Songe que nul n’a pu maîtriser d’une main

le mors de mon ardent Pégase,

et que les criaillements des corbeaux

n’ont jamais entravé ni détourné sa course…

 

Songe, lecteur, que l’œil du véritable juge

n’a qu’un tranchant, et que le moraliste

qui sait voir l’invisible est toujours sage :

qui donc est en mesure de peser

sans erreur, sur l’universelle

Balance, un cœur persécuté ?

 

Seul peut connaître la magie du Songe

celui qu’enivrent tout ensemble

la lie de l’existence et l’encens de la vie :

c’est l’Homme lumineux, pétri de fange obscure,

c’est l’Homme seul, sanctifié par les larmes.

 

L’émission est ensuite consacrée à un évènement toulousain qui perpétue la tradition éthique occitane qui fait alliance de cultures. C’est l’écrivaine, traductrice, enseignante iranienne, Manijeh NOURI qui est l’invitée venue en parler.

En effet, LUNDI 6 JANVIER 2014 à 20 h 30 sera donné un concert exceptionnel et unique :

 

"MUSICA OCCITANA, MUSICA PERSANA"

- la musique et ses instruments -

avec :

 

Pierre Blanchut

Jean-Pierre Lafitte

Renat Jurié

Taghi Akhbari

Michel Raji

Manijeh Nouri

 

à l'auditorium Saint-Pierre des Cuisines à Toulouse.
 

(Renseignements et réservation : Ariana/regards persans

06 70 22 32 71

ariana-asso@orange.fr )

 

Manijeh NOURI explique que cette soirée va rassembler des artistes exceptionnels qui vont dialoguer dans l’ivresse de la musique. Elle rappelle que les deux cultures, l’occitane et la persane, n’ont jamais cessé de se répondre, de s’estimer et de se copier dans les nuances de leur différence. Une exposition sur les instruments de musique respectifs a précédé la soirée et la complètera. Par ailleurs, un travail de pédagogie auprès des élèves des Calendrettes a été réalisé pour présenter les divers instruments et la musique des langues. L’intérêt suscité démontre l’utilité de cette démarche d’association des cultures.

Lecture de poèmes en persan par Manijeh NOURI ; diffusion alternée de musique persane (Mirageduo) et de musique occitane (Vent de Solana).

Une occasion unique d’assister à cette communion d’artistes originaux, tous, au sommet de leur art.

Cette soirée n’a été possible que grâce à la persévérance de Manijeh NOURI qui a réussi à réunir une distribution prestigieuse pour le plus grand plaisir du public.

 

 

 

  

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